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Le DROIT à
la
SANTÉ

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Le DROIT à
la
SANTÉ

Au-delà de la grossesse
et de la reproduction

Jennifer Kitts
et
Janet Hatcher Roberts

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© Centre de recherches pour le développement international 1996

Données de catalogage avant publication ( Canada )

Kitts, Jennifer

Le droit à la santé : au-delà de la grossesse et de la reproduction

Publ. aussi en anglais sous le titre : The health gap.

« Il faut de toute évidence poursuivre les recherches interdisciplinaires sur diversaspects de la santé des femmes intégrant pleinement la dimension de la différence entre les femmes et les hommes, et ce à toutes les étapes du protocole de recherche : conception, mise en œuvre, analyse et diffusion. » — Avant propos Comprend des références bibliographiques.

ISBN 0-88936-796-5

1. Femmes — Santé et hygiène — Pays en voie de développement — Congrès.
I. Hatcher Roberts, Janet.
II. Centre de recherches pour le développement international ( Canada ).
III. Title.

RA778.A2K57 1996                   613’.04244’097124                      C96-980323-0

Disponible sur microfiches.

Tous droits réservés. Cette publication ne peut être photocopiée ou reproduite, stockée dans un système de recherche documentaire ou transmise par des moyens électroniques, mécaniques ou autres sans l’autorisation préalable du Centre de recherches pour le développement international.

Afin de faciliter la lecture du texte, le masculin est souvent utilisé dans le présent ouvrage pour désigner à la fois les femmes et les hommes.

Le CRDI se soucie de l’environnement. Le présent document est fait de papier recyclé et est recyclable, et les encres et enduits sont dérivés de matières végétales.

Table des matières

Avant-propos

viii

Introduction : Le droit dérobé

1

Inégalité des sexes en matière de santé

2

Lacunes des recherches sur la santé en fonction des sexes

3

La santé au-delà de la grossesse et de la reproduction

5

Chapitre premier : Différence entre les sexes, santé et développement

9

La santé

13

Le développement durable

14

Chapitre 2 : Les problèmes communs

17

Sexes, classe sociale et ethnicité

18

L’éducation et la santé des femmes

21

Responsabilisation des femmes et santé

25

L’alimentation

27

Chapitre 3 :Le processus de recherche

35

Les obstacles à la recherche

36

La perspective d’une différence entre les sexes

37

La recherche qualitative

41

La recherche-action

43

Initiatives issues des ateliers

46

Chapitre 4 : Le sida

49

Taux d’infection parmi les femmes

52

Transmission et effets du VIH et du sida

53

Traitement et prévention

54

Transmission des MTS et du VIH

55

L’épidémie de sida et les femmes

57

La transmission du sida parmi les femmes

60

Interventions

86

Chapitre 5 : Les femmes, la santé et le milieu de travail

97

La population active officielle

99

La population active non officielle

101

La division du travail entre les sexes

104

Travail des femmes et risques associés

105

Caractéristiques du travail des femmes

131

Chapitre 6 : Les maladies tropicales

151

Les « espaces vitaux » selon les sexes

154

Les maladies de la pauvreté

158

Tabous et maladies tropicales

160

L’accès aux soins de santé

164

Dispensatrices des soins à la famille

166

Chapitre 7 : Obstacles à l’accès à des soins de qualité

179

Reconnaissance de la maladie

180

Exigences conflictuelles

181

Une question de priorités

183

Manque de soutien

185

Honte et embarras

186

La peur de la maladie

187

Apathie et dépression

187

Difficultés d’accès aux centres de santé

188

Restriction de la mobilité

190

Accès aux ressources financières

191

Sexe et maturité des travailleurs de la santé

192

Respect de la culture

194

Piètre qualité des soins

197

Préférence pour les pratiques traditionnelles

203

Chapitre 8 : Nouveaux secteurs de recherche

205

La santé des femmes plus âgées

206

La santé des petites filles et des adolescentes

207

La santé mentale

207

Les femmes et le tabac

207

Les effets de la guerre sur la santé

208

La violence contre les femmes

209

Chapitre 9 : Les priorités de la recherche

211

Problèmes généraux

213

L’éducation

213

L’alimentation

214

Le sida

215

Le milieu de travail

218

Les maladies tropicales

220

Les difficultés d’accès à des soins de santé de qualité

223

Sigles et acronymes

227

Bibliographie

229

Avant-propos

Entre octobre 1993 et janvier 1995, le Centre de recherches pour le développement international ( CRDI ) a parrainé une série de quatre ateliers régionaux sur Les femmes, la santé et le développement durable qui ont eu lieu à Nairobi, au Kenya ( 5–8 octobre 1993 ), à Montevideo, en Uruguay ( 26–29 avril 1994 ), à Bridgetown, à la Barbade ( 6–9 décembre 1994 ), et à Singapour ( 23–26 janvier 1995 ). Ces ateliers découlaient d’une prise de conscience croissante de deux faits : le premier était que les femmes des pays en développement courent des risques de santé notablement différents de ceux des hommes et se heurtent également à des contraintes différentes lorsqu’elles cherchent à résoudre leurs problèmes ; le second était que notre connaissance de la différence entre les femmes et les hommes face à la santé présente des lacunes majeures, en grande partie parce qu’un bon nombre des recherches effectuées antérieurement sont en quelque sorte passées à côté des femmes.

Les ateliers ont réuni des scientifiques et des spécialistes des sciences sociales œuvrant dans différents secteurs de la santé des femmes. Les participants provenaient des pays suivants : Afrique du Sud, Bangladesh, Barbade, Bolivie, Brésil, Cambodge, Cameroun, Chili, Chine, Colombie, Corée, Costa Rica, Dominique, Équateur, Éthiopie, Ghana, Guyane, Inde, Indonésie, Jamaïque, Japon, Kenya, Laos, Malaisie, Mexique, Mongolie, Myanmar ( ex-Birmanie ), Nicaragua, Nigéria, Ouganda, Paraguay, Pérou, Philippines, République Dominicaine, Sainte-Lucie, Singapour, Tanzanie, Thaïlande, Trinité-et-Tobago, Uruguay, Venezuela, Viet Nam, Zambie et Zimbabwe. Des membres de nombreux organismes internationaux, dont le CRDI, étaient également présents.

Les ateliers avaient pour but d’examiner de près quatre secteurs prioritaires où il est urgent d’effectuer davantage de recherches en tenant compte de la différence entre les femmes et les hommes : le syndrome d’immuno-déficience acquise ( sida ), la santé et le milieu de travail, les maladies tropicales et les obstacles à l’accès à des soins de santé de qualité. Des questions supplémentaires ont été intégrées à chaque atelier en fonction des priorités régionales ( p. ex. la nutrition lors de l’atelier qui s’est tenu aux Antilles, la santé des peuples autochtones lors de l’atelier organisé en Amérique latine et, lors de l’atelier qui a eu lieu en Asie, les effets de la guerre sur la santé des femmes ). On s’est également efforcé, à partir des données fournies par ces ateliers, de recommander des travaux de recherche à effectuer pour promouvoir la santé et le bien-être de tous. Les objectifs spécifiques des ateliers étaient les suivants :

Image encourager les personnes qui font des recherches sur la santé, les organisations non gouvernementales ( ONG ) et les décisionnaires à intégrer activement à leurs recherches, à leurs activités et à l’élaboration des politiques, les éléments interdépendants que sont la différence entre les sexes et le développement durable ;

Image partager les analyses sur la différenciation sexuelle et sur la santé effectuées dans différentes parties des pays du Sud ;

Image réfléchir sur les méthodologies utilisées par les équipes scientifiques qui se penchent sur la différence entre les sexes face à la santé ;

Image identifier les lacunes importantes dans les recherches sur cette différence en matière de santé ;

Image discuter de la santé dans le vaste contexte des conditions et des forces qui influencent la vie des femmes et des hommes ;

Image examiner les similitudes et les différences entre les problèmes auxquels doivent faire face les différents pays en développement ainsi que les stratégies utilisées pour surmonter les obstacles à la santé.

Le partage des idées et des expériences dans chacun des ateliers régionaux a été extrêmement bénéfique. Le fait que les personnes présentes soient venues de différentes parties de chaque région et aient représenté différents secteurs de spécialisation a permis un échange enrichissant des points de vue et des perspectives.

Bien que chaque atelier ait été unique en son genre, beaucoup de problèmes, de préoccupations et de recommandations semblables ont émergé. On trouvera dans ce document un résumé des présentations, des discussions et des travaux de groupe effectués dans chacun des quatre ateliers, et une synthèse des réflexions des personnes présentes. Des documents supplémentaires ont aussi été consultés et intégrés à l’ensemble, en particulier les mémoires soumis aux concours sur les maladies tropicales et la différence entre les sexes qui ont eu lieu entre 1991 et 1994 avec le soutien du CRDI et du Programme spécial de recherche et de formation sur les maladies tropicales ( TDR ) de l’Organisation mondiale de la santé ( OMS ). Enfin, on a également examiné les communications présentées lors d’un atelier — organisé par l’OMS et la Fondation Ford et tenu en octobre 1994 — sur la qualité des soins de santé pour les femmes dans les pays en développement.

Il faut de toute évidence poursuivre les recherches interdisciplinaires sur divers aspects de la santé des femmes en intégrant pleinement la dimension de la différence entre les femmes et les hommes, et ce à toutes les étapes du protocole de recherche : conception, mise en œuvre, analyse et diffusion. Le personnel de recherche et les organismes du monde entier pourront faire avancer notablement les recherches dans ce domaine s’ils travaillent en collaboration et mettent en commun leurs expériences et leurs résultats. On espère que cette publication encouragera le dialogue et servira de base aux initiatives qui seront prises pour améliorer la santé et le bien-être des femmes, et incitera ceux qui font des recherches dans le domaine biomédical et dans celui des sciences sociales à multiplier les contacts et augmenter la collaboration.

Jennifer Kitts
Janet Hatcher Roberts

janvier 1996

Introduction
Le droit dérobé

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CRDI: D. Marchand

Pourquoi étudier les femmes indépendamment des hommes ? Rappelons ici quelques faits pertinents : les femmes ont des problèmes de sonté particuliers que les hommes ne connaissent pas ; les femmes sont plus vulnérables à certaines pathologies que les hommes ; certaines pathologies sont moins facilement détectées chez les femmes : la sonté des femmes a un effet direct sur les chances de survie des enfants : les besoins des femmes sont souvent négligés s’ils ne sont pas spécifiquement identifiés.

— Eva M. Rathgeber. Centre de recherches sur le développement international. Bureau régional de l’Afrique orientale et australe, Nairobi ( Kenya )

INÉGALITÉ DES SEXES EN
MATIÈRE DE SANTÉ

La santé, droit humain fondamental et élément crucial du développement durable, échappe à la majorité des femmes. Même si, dans la plupart des sociétés, les femmes vivent plus longtemps que les hommes ( pour des raisons biologiques ), la charge des femmes en termes de maladie et d’invalidité est souvent plus lourde que celle des hommes. Bien qu’il existe des inégalités flagrantes dans le domaine de la santé tant dans les pays en développement que dans les pays industrialisés, les disparités sont plus prononcées dans les pays en développement ( Banque mondiale, 1993 ). Environ un demi-million de femmes meurent tous les ans, par exemple, par suite de complications de la grossesse et de l’accouchement. La plupart de ces décès pourraient être évités grâce à des technologies simples mises au point il y a des dizaines d’années. Les ratios de mortalité maternelle ( décès des mères par 100 000 naissances vivantes ) sont, en moyenne, 30 fois plus élevés ( et 200 fois plus élevés dans certains cas ) dans les pays en développement que dans les pays où le revenu est plus élevé ( Banque mondiale, 1993 ).

Par suite de la discrimination, visible ou invisible, de la subordination et de la sous-évaluation dont les femmes font l’objet tout au long de leur vie, elles sont plus vulnérables à la pauvreté, à la malnutrition, aux maladies évitables, à la fécondité incontrôlée, aux décès prématurés, à la violence, à l’invalidité, à l’aliénation, au veuvage et à la solitude. Leur qualité de vie est compromise encore davantage par le manque d’éducation, les mauvaises conditions de logement et d’hygiène, les longues heures de travail dans des conditions physiquement difficiles et souvent dangereuses, l’impossibilité d’accéder à des services de soins et de santé adéquats et le manque de soutien familial et communautaire.

Seble Dawit ( 1994 ) décrit ainsi la situation :

Les pratiques culturelles dangereuses dont les femmes et les filles continuent à faire l’objet [...] comprennent les mariages d’enfants et les grossesses précoces, l’alimentation forcée avant le mariage, les tabous alimentaires, particulièrement pendant la grossesse, certaines pratiques d’accouchement, la mutilation des organes génitaux féminins, moins de nourriture, d’éducation et de soins de santé pour les filles, le prix de la dot, l’héritage des veuves et l’infanticide des filles [...]. Le résultat, pour les femmes et les filles, est un amoindrissement de leur santé ou de leur qualité de vie. Ce que toutes ces pratiques ont en commun, c’est qu’elles découlent de la préférence pour les enfants de sexe masculin. ( Traduction libre. )

Les inégalités entre les sexes et la préférence pour les enfants mâles commencent parfois avant la naissance. Des techniques diagnostiques comme l’amniocentèse, le prélèvement des villosités choriales et l’échogra-phie permettent maintenant aux futurs parents de connaître le sexe du fœtus et de mettre fin à la grossesse s’ils avaient espéré un enfant de l’autre sexe. Dans un certain nombre de pays ( p. ex. en Chine, en Corée et en Inde ), l’avortement sélectif des fœtus féminins devient de plus en plus courant à cause de ces nouvelles technologies ( CRNTR, 1993 ; OH, 1995 ).

LACUNES DES RECHERCHES SUR LA SANTÉ EN FONCTION DES SEXES

Dans son ouvrage The Female Client and the Health-Care Provider, H.V. wyatt ( 1995 ) note ceci :

Depuis 1945, il y a eu plusieurs centaines d’articles sur la polio en Inde qui ont couvert l’immunisation, la prévalence de la paralysie aiguë et résiduelle et la rééducation, mais aucun n’examine les différences en fonction des sexes. Même les données qui auraient pu être analysées par sexe sont toujours présentées comme un total [...]. Les personnes qui effectuent les recherches font de sérieuses enquêtes foyer par foyer pour trouver les enfants invalides — puis classent leurs résultats de telle façon que les différences entre les sexes ne peuvent pas être examinées.

Il y a des lacunes majeures dans notre compréhension du rapport entre les deux sexes et la santé, en grande partie parce que bon nombre des recherches effectuées jusqu’ici sont passées dans une certaine mesure à côté des femmes ( Rathgeber, 1994a ). Dans beaucoup de pays, par exemple, il n’existe quasiment pas de recherches rigoureuses ventilées par sexe. Les recherches sur la santé ont aussi eu tendance à ignorer les conséquences spécifiques des pathologies et des maladies sut les femmes et sur les hommes ; elles ont négligé d’examiner sérieusement les contextes sociaux, culturels et

En Corée, beaucoup d’avortements sont provoqués parce qu’on pense que le sexe du fœtus est féminin. Les derniers progrès de la technologie médicale. permettent maintenant d’identifier le sexe du fœtus pendant le premier trimestre de la grossesse. Par suite du nombre élevé d’avortements des fœtus féminins, il y a maintenant un grave déséquilibre des sexes.

— Kasil Oh, Université Yonsei, Séoul ( Corée )

économiques différents dans lesquels les femmes et les hommes travaillent et vivent ( Rathgeber et Vlassoff, 1993 ).

La plupart des recherches ont aussi ignoré l’impact des différences physiques et biologiques entre les femmes et les hommes sur l’épidémiologie et l’étiologie des maladies. Les recherches médicales ( autres que celles sur les fonctions de reproduction ) ont tendance à être orientées vers les hommes ( Rosser, 1991 ) ; elles sont souvent effectuées sur des sujets mâles et les résultats sont supposés s’appliquer aux femmes comme aux hommes. Par exemple, les femmes n’ont pas été inclues dans les essais cliniques visant à déterminer dans quelle mesure l’azidothymidine ( AZT ) inhibe l’évolution du sida ; les scientifiques ne savent donc pas quel est l’effet de l’AZT sur les femmes. Or, celles-ci ne réagissent souvent pas de la même façon aux traitements, métabolisent les médicaments différemment et, comme le dit Donna Stewart, de l’Université de Toronto (Canada ), elles ne sont pas simplement « des hommes avec des cycles menstruels » ( Priest, 1994 ).

Bien que les femmes constituent une proportion rapidement croissante de la population séropositive, elles restent désavantagées en termes de diagnostic, de traitement et de soins à cause des inégalités entre les sexes dans la recherche médicale ( Strebel, 1994 ). Selon Hankins et Handley (1992, p. 967 ) :

Il faut un effort concerté de la part du personnel clinique, du personnel de recherche, des organismes de financement et des décisionnaires pour redresser les inégalités tant au niveau des connaissances de l’historique, de la progression et des résultats du sida en fonction de chaque sexe, que de la pertinence des soins médicaux et psychosociaux dispensés aux femmes séropositives. Les réactions aux aspects du sida particuliers aux femmes ont été marquées par la négligence scientifique et le vide politique. ( Traduction libre. )

Outre le sida, les différences en fonction du sexe ont été négligées dans un grand nombre d’autres secteurs de la recherche médicale. C’est le cas des maladies tropicales, par exemple ( Rathgeber et Vlassoff, 1993, p. 513 ) :

Les recherches tant biomédicales que sociales concernant les effets des maladies tropicales sur les femmes ont adopté une perspective étroite.

C’est une erreur de partir du principe que la norme de l’expérience masculine est également applicable aux femmes. que les femmes ont les mêmes attitudes et perceptions, les mêmes possibilités et manques de possibilités et les mêmes besoins que leurs homologues masculins.

— Eva M. Rathgeber. Centre de recherches pour le développement international. Bureau régional de l’Afrique orientale et australe, Nairobi ( Kenya )

Elles ont porté avant tout sur les différences d’ordre purement sexuel, particulièrement la grossesse et la reproduction, et n’ont pas examiné ces dernières dans le contexte plus vaste des responsabilités et des rôles sociaux. ( Traduction libre. )

Lots d’une recherche sur les études effectuées sur les maladies tropi-cales et les différences entre les sexes au Pérou, Timoteo et Llanos-Cuentas ( 1994 ) ont rapporté avoir été totalement surprises par l’absence de publications sur le sujet. Dans les bibliographies sur la leishmaniose, il y avait très peu d’études sur les différents effets observés chez les femmes et chez les hommes d’un point de vue socio-économique et culturel. Même si le sexe était identifié comme une variable dans les recherches, il n’y avait que peu ou pas d’analyse de l’impact des différences plus générales en fonction des sexes.

Les répercussions du travail des femmes sur la santé est un autre secteur d’études complètement négligé dans les recherches. Dans les quelques études qui existent, les scientifiques ont analysé les effets du travail sur les fonctions de reproduction plutôt que la santé des femmes elles-mêmes. Il n’y a pas de recherches qui aient exploré les effets directs sur la santé des lourdes charges de travail des femmes à la maison ainsi que dans le monde du travail informel.

LA SANTÉ AU-DEL À DE LA GROSSESSE
ET DE LA REPRODUCTION

L’un des objectifs des ateliers était d’adopter une approche globale sur la santé des femmes et d’insister davantage sur la qualité de la vie des femmes au-delà des fonctions liées à la fécondité et à la reproduction. Jusqu’à maintenant, lorsque la santé des femmes a reçu de l’attention, la santé des fonctions de reproduction et la santé des femmes ont généralement été considérées comme une seule et même chose ( Manderson, 1994 ) et on s’est davantage préoccupé des enfants issus des grossesses que des femmes

Les services de santé pour les femmes insistent habituellement sur les besoins des femmes en matière de reproduction et font peu d’efforts pour aider les femmes à prendre conscience du fait qu’elles sont des personnes à part entière, avec leurs propres besoins en santé. Or, les besoins des femmes reçoivent moins d’attention que ceux des enfants. La qualité des services est inférieure et, le plus souvent, les besoins des femmes sont subordonnés aux programmes de contrôle de la croissance démographique.

— S.A. Udipi et M.A.Varghese. SNDT Women’s University, Bombay ( Inde )

elles-mêmes. La corrélation entre la santé et le bien-être des femmes et la mortalité périnatale et infantile, par exemple, a constitué l’un des points d’intérêt majeurs. Les premières études sur les femmes et le sida ont surtout voulu prévenir la transmission du virus d’une mère infectée à son enfant ( Cohen, 1995 ) ; les femmes en tant que telles ont été négligées dès le début de l’épidémie.

Les analystes ont noté que l’intérêt manifesté à l’égard des femmes dans les discussions sur la contraception et la planification familiale visait davantage le contrôle de la croissance de la population que l’amélioration de la santé et du bien-être des femmes. La recherche dans ce secteur a été motivée en grande partie par des préoccupations générales concernant la nécessité d’abaisser les taux de natalité trop élevés et de contrôler la croissance de la population, plutôt que par un souci de la santé des femmes en tant que telle ( Vlassoff, 1994 ).

Du côté de la prestation des services, les programmes pour les femmes ont été orientés vers leurs fonctions de reproduction, avec un objectif qui se limitait à la planification familiale. Dans le système de prestation des soins de santé, les services médicaux destinés aux femmes ont souvent une priorité moindre que ceux qui sont destinés aux enfants et aux hommes, et leur qualité est inférieure ( Udipi et Varghese, 1995 ). Ceci perpétue l’idée que les besoins des femmes sont subordonnés à ceux des autres. Les femmes sont vues d’abord comme des mères ou des futures mères, alors que la santé des hommes n’est jamais définie du point de vue de la famille ou de leur rôle de parent ( Rathgeber et Vlassoff, 1993 ).

Richters ( 1994 ) a réclamé la déconstruction de l’idéologie selon laquelle l’unique destinée naturelle de la femme est de remplir la fonction biologique de procréation. Les femmes doivent être vues comme des êtres humains, avec des besoins et des désirs qui leur sont propres en tant que femmes. Les recherches sur les femmes doivent cibler leur responsabilisation en tant qu’individus, que personnes à part entière, sans toujours considérer leur rôle de mère.

Les secteurs de la médecine et de la santé publique ont perpétué le point de vue ondrocentrique de la femme qui se concentre sur sa capacité de reproduction et la réduit au rôle unique de mère.

— Jaime Breilh, Centre consultatif pour les recherches sur la santé, Quito ( Équateur )

Les recherches devraient également couvrir toute la durée de la vie des femmes, depuis le fœtus menacé par la malnutrition et la sélection du sexe de l’enfant jusqu’à la femme postménopausique affaiblie et marginalisée par l’ostéoporose1. Les recherches et les politiques sur la santé doivent intégrer la gamme complète des besoins et des activités des femmes, et toutes les souf-francés et maladies auxquelles elles doivent faire face ( Richters, 1994 ). Les remarques de Denise Eldemire ( 1995 ), de la University of the West Indies, sont d’une grande justesse :

La femme plus âgée a été tout à fait ignorée, les questions de ménopause non étudiées et la contribution des grands-mères, chargées de dispenser des soins et une éducation aux enfants et de s’occuper de la maison, n’a pas reçu la reconnaissance qui lui était due. Ces activités constituent une ressource et une contribution au développement car elles permettent aux autres membres de la famille d’être productifs. Elles servent également à élever la nouvelle génération de travailleurs. ( Traduction libre. )

1 Le commentaire est de V. Wee lors de l’atelier du CRDI sur la différenciation entre les sexes, la santé et le développement durable tenu à Singapour du 23 au 26 janvier 1995.

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Chapitre premier
Différence entre les
sexes, santé et
développement

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CRDI

La santé doit être, nécessairement, une composante et un objectif du développement. ll faut que les femmes soient en santé si elles veulent participer pleinement au développement en tant que travailleuses, mères, membres d’une famille et d’une communauté. Non seulement elles bénéficient des soins de santé, mais elles voient à leur prestation et ó leur promotion.

— K. Soin, membre du Parlement, Singapour

Dans la plupart des sociétés, sinon toutes, les rapports socio-économiques entre femmes et hommes sont en grande partie hiérarchiques et donc inégaux. On en voudra pour preuve la division officielle du travail — au-delà des rôles purement biologiques au sein du foyer et de la population active officielle — sans oublier les pratiques discriminatoires contre les femmes dans les autres institutions ( Tsikata, 1994 ). Les femmes ont moins de facilités d’accès à l’éducation que les hommes, reçoivent une part inégale des terres et ont un accès plus limité à des ressources comme la nourriture et les soins de santé ( Wee, 1995 ).

La théorie traditionnelle pour expliquer l’établissement de rôles séparés pour les femmes et pour les hommes partait du principe qu’il y avait des différences déterminées biologiquement entre les deux sexes. Cependant, la croyance qu’il y a des différences fondamentales et immuables entre les femmes et les hommes a été sérieusement remise en question par les analyses féminines. Elles ont affirmé que la sexualité est en fait une construction sociale et qu’elle a son origine historique en un lieu où se recoupent des facteurs sociaux, économiques et culturels ( Caplan, 1987 ).

Les relations entre les sexes ne sont pas déterminées biologiquement mais sont au contraire basées sur des rapports de pouvoir différentiels où le patriarcat exerce un contrôle sur les femmes dans toutes sortes de domaines ( Strebel, 1994 ). Une opinion répandue est que l’une des formes les plus puissantes du contrôle social sur la sexualité des femmes est la peur de la violence des hommes ( Smart et Smart, 1978 ).

Par différence entre les sexes, on n’entend pas seulement les différences biologiques. Alors que le « sexe » est déterminé par les gènes et la biologie, une perspective basée sur la différence entre les sexes tient compte des rôles assumés par les femmes et par les hommes dans la société et des rapports de pouvoir entre eux ( Crawford et Maracek, 1989 ; Balmer, 1994 ; Cook, 1994 ). Vlassoff ( 1994 ) note que la différence entre les sexes fait référence au comportement des femmes et des hommes dans la société, aux rôles différents qui leur sont dévolus, aux différentes attentes et contraintes sociales et culturelles dont ils font l’objet à cause de leur sexe et à la façon

On pensait que ces différences biologiques, combinées avec les processus psychiques et l’apprentissage social, étaient telles que l’on pouvait parler de caractéristiques masculines et féminines spécifiques. Les traits masculins typiques comprenaient la force, l’affirmation de soi et la rationalité ainsi que des besoins sexuels créés par la biologie, tandis que les caractéristiques féminines comprenaient la douceur, la dépendance, la passivité, l’émotivité et la beauté physique.

— Anna Strebel. University of the Cape, Belleville ( Afrique du Sud )

dont ils répondent à ces attentes et à ces contraintes sociales. Rathgeber ( 1994b, p. 6–7 ) livre ainsi son point de vue :

En parlant de différence entre les sexes plutôt que directement des femmes, on peut procéder à une analyse plus substantielle et plus profonde de la position des femmes par rapport à celle des hommes [...]. Une telle analyse tiendra compte des relations de pouvoir entre hommes et femmes et, inévitablement, amènera à se poser des questions fondamentales sur les structures sociales de base. ( Traduction libre. )

La différence entre les sexes doit être comprise comme un facteur qui conditionne tous les aspects de la vie sociale : la population active, la famille, les relations politiques et culturelles ainsi que les rapports avec l’environnement ( Breilh, 1994 ). Il est essentiel d’intégrer une perspective basée sur cette différence dans les recherches sur la santé si l’on veut que leurs résultats mènent à des décisions politiques qui favorisent un développement durable.

Il faut aussi insister sur le fait que parler de la différence entre les sexes ne revient pas à seulement parler des femmes. Notre ouvrage s’intitule Le droit à la santé : Au-delà de la grossesse et de la reproduction parce que la plupart des présentations et des discussions lors des ateliers portaient sur la santé des femmes. Cet intérêt pour les femmes témoignait de la nécessité de donner davantage d’importance aux femmes et de redresser les déséquilibres dans les rapports de pouvoir entre les hommes et les femmes ( Richters, 1994 ). Un grand nombre des personnes présentes ont cependant insisté sur le fait qu’il était important d’inclure les hommes dans les recherches et les interventions qui ont pour but d’améliorer la santé des femmes. Dans le secteur de la prévention des maladies transmises sexuellement ( MTS ) et du sida, par exemple, les hommes ont beaucoup de pouvoir de décision en ce qui a trait à la sexualité ; ils ont besoin d’être encouragés à prendre l’initiative de la prévention. Selon Barbara Klugman ( 1994 ), on reconnaît de plus en plus, dans les milieux qui se préoccupent de la santé des femmes, qu’il est nécessaire de s’intéresser aux expériences et aux préoccupations des hommes et de

Les attitudes et les comportements liés au sexe se développent à mesure que grandit l’individu. Tôt dons la vie, le milieu définit les caractéristiques féminines de passivité, de dépendance et d’impuissance. Pour rester conforme à ce rôle établi en fonction de la différence entre les sexes, une femme ou un autre membre de la famille peut minimiser ses accomplissements pour entretenir le statu quo.

— S.A. Udipi et M.A.Varghese. SNDT Women’s University, Bombay ( Inde )

faire des recherches à ce sujet, compte tenu du pouvoir des hommes sur les femmes. De plus, dans la distribution des responsabilités en matière de soins des enfants et de travaux ménagers, les hommes devraient être encouragés à jouer un rôle plus important afin d’alléger le fardeau des femmes.

Les stéréotypes sexuels

Les stéréotypes sexuels sont fondés sur les attentes partagées par une culture concernant les comportements jugés appropriés pour chaque sexe ( Eagly et Steffen, 1984 ; Eagly et Wood, 1991 ; Garcia et al., 1994 ). Bien que les stéréotypes sur les rôles dévolus à chaque sexe changent avec le temps et varient d’une culture à l’autre, une grande partie du contrôle exercé sur les femmes par les hommes dans nos sociétés dépend de ces rôles stéréotypés. Les rôles sociaux découlant de cette différence définissent la nature et le type d’activités poursuivies par les femmes et les hommes, d’une part, et le pouvoir différentiel des relations hommes-femmes, d’autre part ( Airhihenbuwa et al., 1992; Garcia et al., 1994 ).

Les attentes traditionnelles sur la façon dont les hommes et les femmes doivent se comporter peuvent avoir de graves conséquences tant sur la santé et le bien-être des hommes que des femmes. Des attentes socialisées, qui supposent que les hommes doivent être indépendants, ne pas montrer leurs sentiments et se suffire à eux-mêmes, peuvent avoir pour effet de favoriser le blocage des émotions, le manque d’ouverture, l’incapacité de reconnaître la faiblesse et la vulnérabilité, et une aptitude inférieure aux échanges interpersonnels ( Pleck, 1985 ; Werrbach et Gilbert, 1987 ; Balmer, 1994 ). Par ailleurs, en centrant la virilité autour de la fonction pénienne et des prouesses sexuelles, la société a entretenu une atrophie affective chez les hommes qui les rend plus vulnérables aux dangers de la témérité ( Pinel, 1994 ). Enfin, dans la plupart des cultures, la société attend des femmes qu’elles soient émotives, sensibles, attentionnées, dépendantes et non violentes ; ce type d’attentes stéréotypées a pour effet de les abrutir.

Le « marianismo », contrepartie féminine du « machismo », réduit les valeurs féminines à la virginité, à la maternité et aux fonctions de pourvoyeuse de soins. Le caractère docile et soumis du marianismo a encouragé le développement de la séduction indirecte, par opposition à l’affirmation de soi, comme le moyen presque exclusif à la disposition des femmes pour répondre à leurs besoins. La confrontation n’est pas seulement considérée comme une faute de conduite mais comme quelque chose à éviter car elle pourrait provoquer la colère de l’homme. Les femmes se sont donc trouvées enfermées dans une structure hiérarchique défavorable qui en fait des objets de discrimination, de harcèlement sexuel et de manipulation économique. Peu importe qu’elles soient les principales pourvoyeuses de soins ou, dans bien des cas, les principales sources du revenu familial, la vulnérabilité sociale des femmes l’a emporté sur leurs capacités.

— Arletty Pinel, GENOS International, S ā o Paulo ( Brésil )

Les fluctuations de la nature des rôles assignés aux sexes au cours de l’histoire et par les différentes sociétés suggèrent qu’une plus grande conver-gence des rôles est possible ( Balmer, 1994 ). Aux Philippines, par exemple, les hommes et les femmes héritent la terre à part égale. Là où les femmes ont une sécurité économique égale à celle des hommes, elles ont aussi tendance à avoir un pouvoir social et politique égal. Les femmes constituent ainsi une proportion importante des entrepreneurs, des avocats et des directeurs de banque du pays. Alors que les femmes sont supposées rester silencieuses dans beaucoup de sociétés, Violeta Lopez-Gonzaga ( 1995 ), de l’Université De La Salle aux Philippines, a indiqué qu’il était culturellement acceptable pour les femmes de parler autant que les hommes, et que les enfants avaient droit à la parole sans discrimination entre les sexes.

Au Canada, un nombre croissant de femmes embrassent des professions dominées par les hommes et davantage d’hommes partagent les responsabilités de la maison avec leur partenaire. Balmer ( 1994 ) a affirmé que l’égalité authentique entre les sexes, qui peut grandement contribuer à améliorer la santé des femmes comme celle des hommes, ne pourra exister que lorsque les stéréotypes sexuels fortement différenciés auront disparu.

LA SANTÉ

D’après la définition de la santé adoptée par l’OMS et généralement acceptée, la santé est un « état de bien-être complet, physique, mental et social » ; ce n’est pas seulement l’absence de maladie et d’infirmité. Le concept de santé tel que défini par l’OMS insiste sur le bien-être social des populations et pas simplement sur la médicalisation de la maladie ( Cook, 1994 ) et demande que l’on tienne compte de l’ensemble complexe des facteurs culturels, économiques, sociaux, politiques et environnementaux, ainsi que des composantes biologiques et génétiques qui tous influencent la santé et le bien-être des populations ( Tsikata, 1994 ). Cette définition, fort large, reconnaît le rôle des activités humaines, des structures sociales et de l’environnement pour l’obtention d’une bonne santé et permet de discuter de l’effet des différences entre les sexes sur la santé ( Tsikata, 1994 ).

Pour permettre aux individus de parvenir à un « état de bien-être complet, physique, mental et social », un certain nombre de conditions préalables ont été identifiées par les analystes. Pour commencer, un logement adéquat, une alimentation saine, de bonnes pratiques d’hygiène, une eau propre et abondante sont de toute évidence des éléments essentiels. De plus, la santé et le bien-être requièrent la paix, l’absence de violence, l’accès à un travail rémunéré et à l’éducation, la justice sociale, un écosystème stable et des ressources durables ( Cook, 1994 ; Timoteo et Llanos-Cuentas, 1994 ).

Parce que les mesures prises en dehors du secteur de la santé peuvent avoir des effets beaucoup plus marqués sur le bien-être que celles qui sont prises au sein même du secteur, l’amélioration et l’entretien de la santé requièrent la mise en place d’activités générales multisectorielles et intersectorielles, et ceci à un certain nombre de niveaux, afin d’élaborer des politiques et des programmes véritablement efficaces et intégrés ( Milio, 1986 ).

LE DÉVELOPPEMENT DURABLE

D’après Notre avenir à tous, le rapport de la Commission mondiale de l’environnement et du développement ( CMED, 1987, p. 8 ), assurer un développement durable consiste à « veiller à ce que le développement réponde aux besoins du présent sans compromettre l’aptitude des générations futures à répondre à leurs propres besoins ». Il ne peut pas y avoir de développement

Le développement doit avoir pour objet d’augmenter les choix des individus pour leur permettre de vivre longtemps et en bonne santé, de parvenir à des niveaux d’éducation qui leur permettent de fonctionner de façon adéquate et d’avoir accès à des ressources économiques qui leur assurent un niveau de vie décent.

— H. Elizabeth Thompson, ministre de la Santé, Barbade

Les résultats du paradigme de « relance par le haut » qui a animé les programmes de développement depuis (es années I960, tout comme les programmes d’« ajustements structurels » qui ont émergé au cours des années I 980, semblent avoir stimulé la croissance économique. Mais ceci a cependant coûté très cher en termes du bien-être général de segments importants de la population de nombreux pays en développement.

— Vivienne Wee, Centre for Environment, Gender and Development ( ENGENDER ), Singapour

durable sans que les hommes et les femmes du monde soient en bonne santé. Les investissements dans le secteur de la santé auront pour effet d’améliorer le bien-être des hommes, des femmes et des enfants qui auront alors une capacité accrue à mener une vie socialement et économiquement productive. Les enfants qui sont en bonne santé grandissent et apprennent mieux, et ont davantage de chances d’acquérir les compétences nécessaires à l’emploi. L’impuissance créée par la maladie ou la mort du chef de famille, par contre, peut provoquer une crise familiale et une tragique dégringolade vers la maladie et la pauvreté.

La santé des femmes est un élément essentiel du développement durable. Même s’il est vrai que la majorité des pauvres du monde ne sont pas en bonne santé et souffrent de la faim, il faut reconnaître que le taux de malnutrition, de maladie et d’invalidité est souvent plus élevé chez les femmes que chez les hommes. Assurer la bonne santé des femmes, c’est les aider à mieux assumer leur rôle nécessaire et indispensable à la fois à l’intérieur et à l’extérieur de la maison.

La corrélation entre la santé et le développement durable a souvent été négligée parce que les concepts de développement ont généralement été associés à l’amélioration économique. Le développement ne se limite pas à la croissance économique. Il faut de nouveaux modèles de développement qui se fondent sur le potentiel humain et créent des milieux qui favorisent la pleine utilisation des capacités humaines. Le développement devrait viser directement les populations et la santé, les considérant comme des variables clés, et ne pas se limiter à l’augmentation du revenu et de la richesse.

Le développement durable doit aussi être équitable. Or, jusqu’à maintenant, les femmes ont été les bénéficiaires inégales des forces déployées par les programmes de développement international. À Gortaka, en Inde, par exemple, malgré le fait qu’une grande partie de l’argent du développement ait été utilisé pour alléger le fardeau des pauvres, les femmes, qui sont pauvres parmi les pauvres, sont celles qui ont le moins de chances d’en bénéficier. Selon Stackhouse ( 1995a, p. Dl ) :

Malgré toutes les bonnes intentions des gens de l’extérieur, ce sont les hommes qui ont tendance à bénéficier du développement — et les hommes riches en plus. Alors que les femmes continuent à marcher sur les pistes avec leur charge de bois sur la tête, les hommes riches conduisent des tracteurs sur les routes. Les hommes reçoivent un salaire élevé du gouvernement pour construire des canalisations d’eau ; les femmes sont censées entretenir ces canalisations gratuitement. Les écoles sont pleines d’élèves de sexe masculin. Même au centre de santé, la salle est occupée par des hommes parce que les femmes ne sont pas prêtes à se dévêtir devant un praticien. ( Traduction libre. )

Chapitre 2
Les problèmes communs

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CRDI: R. Charbonneau

Si la femme a un état de santé aussi précaire, c’est le résultat des divers types de pauvreté qu’elle subit. Il ne s’agit pas seulement ici de la pauvreté au sens économique, mais de la pauvreté multidimensionnelle qui peut apparaître même avant la naissance, quand la petite fille est déjà vue comme une charge plutôt que comme une richesse. Cette pauvreté vient du fait qu’on la valorise moins, qu’on la nourrit moins, qu’on la fait travailler très tôt, sons l’envoyer à l’école, sans lui donner accès aux ressources, à la technologie et aux services essentiels que requiert sa santé. Cette pauvreté insidieuse la poursuit sa vie durant. Ces aspects interreliés, aux facettes nombreuses, de la pauvreté ont des effets déterminants sur son état de santé.

— A. El Bindari Hammad, Organisation mondiale de la santé. Genève ( Suisse )

Au cours des présentations et des discussions qui, dans chaque atelier, ont cherché à explorer les quatre secteurs de recherche choisis en priorité dans le domaine de la santé et de la différence entre les sexes ( le sida, le milieu de travail, les maladies tropicales et les obstacles à l’accès à des soins de santé de qualité ), certains thèmes sont revenus régulièrement. Quatre sujets ont été identifiés comme représentant des problèmes communs qui influencent tous les aspects de la santé et du bien-être des femmes :

Image les liens entre la différenciation des sexes, la classe sociale et l’ethnicité ;

Image la corrélation entre l’éducation et la santé des femmes ;

Image le rapport entre la responsabilisation des femmes et la santé ;

Image le rôle de l’alimentation.

SEXES, CLASSE SOCIALE ET ETHNICITÉ

On reconnaît de plus en plus que les variables de classe et de race viennent s’ajouter à la différence entre les sexes pour aggraver la complexité des rapports de pouvoir ( Ramazanoglu, 1989 ; Stamp, 1989 ; Singer, 1994 ; Strebel, 1994 ). Les groupes ethniques défavorisés dans les pays riches sont souvent en moins bonne santé que les groupes plus riches dans les pays pauvres. L’état de santé des Amérindiens du Canada, par exemple, traîne loin derrière la population canadienne en général. Entre 1984 et 1988, le taux de mortalité maternelle pour la population des Indiens dits « inscrits » était en moyenne cinq fois plus élevé que le taux canadien. En 1988, la mortalité infantile indienne était 2,2 fois plus élevée que le taux canadien ( Santé et Bien-être social Canada, 1991 ).

Aux États-Unis, la combinaison de la pauvreté urbaine et de l’ethnicité socialement dévaluée ( particulièrement le fait d’être afro-américain ou latino-américain et, dans certaines parties du pays, autochtone et asiatique également ) s’est avérée un complexe particulièrement malsain ( Singer, 1994 ).

Un certain nombre de conditions interdépendantes, qui ont eu un effet disproportionné sur les femmes et les hommes afro-américains et latino-américains pauvres, sont à l’origine des crises qui se sont déclarées dans le secteur de la santé des milieux urbains défavorisés de l’Amérique. Ces conditions comprennent, entre autres : les taux de chômage élevés, le nombre des sans-abri, les logements surpeuplés, l’alimentation inférieure aux normes, la toxicité environnementale, la détérioration des infrastructures, la mobilité géographique forcée, l’éclatement des familles, la désintégration des réseaux de soutien social, les gangs de jeunes et la violence liée aux drogues, ainsi que les inégalités dans la prestation des soins de santé ( Singer, 1994 ). Bien que les États-Unis et, dans une moindre mesure, le Canada fournissent des exemples clairs des différences flagrantes qui existent dans le secteur socio-économique et dans le domaine de la santé en fonction de la race et de la classe, on trouve ce type de disparités dans la plupart des pays du monde.

C’est pourquoi il faut aborder les questions de santé d’un point de vue intersectoriel et lier la différence entre les sexes comme système d’inégalité à d’autres formes d’inégalité, comme la classe sociale et l’ethnicité ( Breilh, 1994 ). C’est ce type d’analyse qui permet d’expliquer pourquoi les hommes du Bangladesh ont une probabilité de survie après 35 ans supérieure à celle des hommes de Harlem à New York ( McCord et Freeman, 1990 ).

De même que les problèmes de santé des hommes sont différents de ceux des femmes, les maladies des riches ne sont pas les mêmes que celles des pauvres. « Les femmes noires pauvres qui vivent aux États-Unis sont parmi les plus défavorisées aux trois niveaux — race, classe sociale et sexe ; elles sont pauvres parmi les pauvres », selon Vivienne Wee. Rosina Wiltshire lui fait écho : « Bien qu’il y ait des inégalités en rapport avec la race et la classe sociale, il ne faut surtout pas oublier l’inégalité entre les sexes [...] ce sont les femmes qui souffrent le plus, indépendamment de la race et de la classe sociale. »

Le rôle de la pauvreté

La majorité des pauvres du monde sont des femmes. La plupart du temps, les femmes n’ont ni le pouvoir ni le statut social nécessaires pour accéder aux ressources économiques ( Strebel, 1994 ). À cause de leur position différente dans la société, les femmes sont habituellement plus pauvres que les hommes et elles dépendent souvent d’eux économiquement ( Campbell, 1990 ; Ankrah, 1991 ; Ulin, 1992 ).

Il est impossible de parler de la féminisation de la pauvreté sans mentionner le nombre croissant, partout dans le monde, de femmes seules avec des enfants qui se retrouvent chefs de famille à cause de la migration nationale et internationale des hommes en quête de travail, des divorces, des veuvages, des guerres, des abandons, ainsi que du nombre croissant de naissances chez les adolescentes sans partenaire. Les familles qui ont une femme à leur tête, soit environ un quart des familles du monde (ONU, 1995 ), sont particulièrement désavantagées et économiquement vulnérables. Le manque d’éducation des femmes et les difficultés qu’elles ont à obtenir un emploi correctement rémunéré signifient que la quantité d’argent qui entre dans une famille dont le chef est une femme est habituellement nettement inférieure à ce qui se passe dans une famille dont le chef est un homme ( Acevedo, 1994 ).

Parce que les mères n’ont souvent pas beaucoup d’éducation ni de capital d’investissement, explique Richters ( 1994 ), et qu’elles essaient d’occuper deux emplois à la fois ( à la maison et à l’extérieur pour gagner un salaire ), les familles qui ont une femme à leur tête ont tendance à être pauvres.

C’est un fait généralement reconnu que la pauvreté a une profonde influence sur la santé. La pauvreté féminine signifie qu’il y a moins d’argent pour acheter des aliments adéquats et nutritifs, ce qui accroît le risque de maladie. La mauvaise alimentation compromet la guérison. Les conditions de vie inférieures à la normale — notamment en termes de logement, de normes d’hygiène, d’approvisionnement en eau potable, de services d’enlèvement des ordures et de réseaux d’égouts — exposent aussi les populations à de plus grands risques de maladie. Les femmes pauvres n’ont généralement pas non plus accès à des services de santé officiels ni à des traitements adéquats et ont tendance à accoucher de bébés dont le poids est insuffisant à la naissance et qui démarrent mal dans l’existence.

La pauvreté a un effet sur les choix de vie dont disposent les femmes. La pauvreté féminine peut signifier qu’une femme doit accepter de faire n’importe quel travail pour subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille. Ce manque de choix augmente de beaucoup la probabilité qu’elle se retrouvera en situation d’exploitation dans son milieu de travail avec peu ou pas de protection de sa santé et de sa sécurité. La prostitution est une autre stratégie utilisée par les femmes du monde entier pour lutter contre la pauvreté.

Les dures conditions de vie peuvent aussi provoquer des sentiments de négativité et de mépris de soi qui sont des facteurs psychologiques importants de l’attitude des femmes envers leur santé. Une femme qui manque d’estime de soi et d’amour-propre sera moins portée à chercher des services de santé en réponse à ses besoins.

Les politiques mises en place pour étendre les possibilités économiques des femmes qui vivent dans la pauvreté finiront par améliorer la santé et le

Les cochons sont mieux logés que ces gens. On ne peut pas avoir d’amour-propre quand on vit comme ça, que tout indique que l’on n’a aucune valeur en tant que personne. Elles ne prennent pas soin d’elles-mêmes comme personnes, elles se méprisent comme femmes, elles n’ont aucune estime de soi.

— Une spécialiste de la santé, à propos de la vie des femmes qui vivent dans un état d’extrême pauvreté à l’extérieur de Montevideo, citée par Maria Bonino. Universidad de la República. Montevideo ( Uruguay )

bien-être des femmes et des membres de leur famille. Les femmes dépensent habituellement leur revenu supplémentaire sur des choses qui améliorent leur santé : alimentation, eau potable et hygiène et logement. Dans les pays en développement, les femmes ont tendance à dépenser leurs ressources, quelles qu’elles soient, en nourriture et en soins de santé pour leurs enfants alors que les hommes ont tendance à les dépenser en marchandises de luxe, en alcool et en liaisons extramaritales ( Richters, 1994 ).

L’ÉDUCATION ET LA SANTÉ DES FEMMES

L’éducation des femmes et les rapports de pouvoir entre les sexes et le sida doivent être considérés non seulement séparément mais aussi comme constituant un complexe dynamique interdépendant.

— Maureen Law. Centre de recherches sur le développement international, Ottawa ( Canada ) ( voir Law, 1994 )

Un deuxième problème commun à toutes les femmes concerne la corrélation entre leur niveau d’éducation et leur santé. Dans presque tous les pays en développement, les femmes sont désavantagées par le fait qu’elles n’ont pas eu autant de facilités d’accès à l’éducation que les hommes. Selon le rapport de la Conférence internationale sur la population et le développement tenue au Caire entre les 5 et 13 septembre 1994 (ONU, 1994 ) :

Il y a environ 960 millions d’adultes illettrés dans le monde dont les deux tiers sont des femmes. Plus d’un tiers des adultes du monde, des femmes pour la plupart, n’ont pas accès à des connaissances imprimées, à de nouvelles compétences ou à des technologies qui amélioreraient la qualité de leur vie [...]. 11 y a 130 millions d’enfants qui ne sont pas inscrits à l’école primaire et 70 % d’entre eux sont des filles.

Au Viet Nam, les taux élevés d’abandon scolaire parmi les filles sont une indication à la fois du niveau élevé des dépenses en éducation et du peu d’importance accordé à l’éducation féminine ( Binh, 1995 ). En Inde, les filles qui reçoivent un minimum de 5 000 heures de scolarité, soit six années complètes d’école, ne sont pas plus d’un tiers et, en Chine et en Amérique latine, la proportion ne dépasse pas 60 % ( Banque mondiale, 1993 ). Les taux d’inscription des femmes à l’école secondaire sont inférieurs à ceux des hommes de 56 % au Bangladesh, 40 % au Malawi et 68 % au Togo ( Misch, 1992 ). Bien que certains pays aient réussi à appliquer le principe de l’égalité des sexes aux inscriptions dans les écoles primaires ( Tillett, 1994 ), plus le niveau d’éducation est élevé, plus on a de chances d’avoir un écart entre les sexes, particulièrement au palier tertiaire ( Grandea, 1994 ).

La limitation de l’accès à l’éducation, à l’information et à la connaissance signifie que les femmes sont souvent mal informées sur les questions de santé, sur le fonctionnement de leur propre corps et sur la façon de se protéger des maladies. Elles sont donc désavantagées dans leur aptitude à reconnaître les signes et les symptômes de la maladie et à prendre les mesures nécessaires ( Manderson, 1994 ; Vlassoff, 1994 ). La pauvreté de l’éducation crée un cercle vicieux de mythes et de désinformation qui perpétue les comportements nocifs pour la santé et les pratiques dangereuses ( Hammad, 1994 ).

L’appel en faveur d’une amélioration de l’accès des femmes à l’éducation part souvent du principe que les femmes éduquées sont de meilleures mères qui élèvent des enfants en meilleure santé et en moins grand nombre ( Grandea, 1994 ). Comme l’a fait remarquer la Banque mondiale ( 1993, p. 42 ) :

Dans les pays en développement, les femmes mieux éduquées se marient et ont des enfants plus tard dans la vie [...]. Les femmes éduquées ont également tendance à davantage utiliser les soins prénatals et l’aide à l’accouchement [...]. Les enfants des mères éduquées continuent à jouir d’autres avantages qui favorisent la santé : une meilleure hygiène à la maison qui réduit le risque d’infection ; une amélioration de l’alimentation et de l’immunisation qui limitent l’une et l’autre la vulnérabilité à l’infection ; un usage plus judicieux des services médicaux [...]. Le relèvement des niveaux d’éducation des femmes est associé de près au ralentissement de la croissance de la population et à une réduction des taux de mortalité infantile. ( Traduction libre. )

Mais l’amélioration de l’éducation des femmes ne signifie pas seulement que leurs enfants se porteront mieux ; elle signifie que les femmes elles-mêmes seront en meilleure santé. L’éducation permet aux femmes de comprendre les informations sur la santé et de faire bon usage des services de santé ; elle accroît leur accès au revenu et leur permet de mener une vie plus saine ( Banque mondiale, 1993 ). Mbacke et van de Walle ( 1987 ) ont noté, par exemple, que l’utilisation des moustiquaires et des spirales contre les moustiques était liée de façon significative au niveau d’éducation maternelle. L’éducation donne aussi aux femmes la confiance nécessaire pour faire face au monde.

C’est un fait reconnu que les femmes éduquées rendent plus souvent visite au personnel sanitaire que les femmes sans éducation. Ceci vient du fait que l’éducation accroît leur amour-propreet leur confiance en soi et aussi du fait qu’elles connaissent mieux le système de soins de santé. Les répercussions de l’éducation vont plus loin et s’étendent à l’attitude des personnes qui entourent ces femmes, y compris le personnel sanitaire, et qui les traitent avec plus de respect et de considération. L’éducation améliore la communication entre la cliente et le personnel sanitaire. C’est ainsi que l’expérience de la femme éduquée avec le personnel sanitaire peut être plus positive que celle d’une femme non éduquée.

— Tehseen lqbal, Multan ( Pakistan )

Les femmes qui ont un niveau supérieur d’éducation, formelle ou non, ont souvent plus de pouvoir de décision, dans la famille, sur la santé et les questions connexes ( Sermsri, 1995 ). Ainsi, dans un quartier insalubre à l’extérieur de Bombay, on a trouvé que le niveau d’énergie des filles était influencé de façon notable et positive par le degré d’instruction et le pouvoir de prise de décisions ( Udipi et Varghese, 1995 ). Une étude effectuée dans une région rurale du sud de l’Inde a démontré que les mères qui avaient été à l’école demandaient plus souvent à leur mari et à leur belle-mère de faire soigner un enfant malade et utilisaient plus souvent les installations médicales. Elles suivaient aussi davantage les conseils du médecin et retournaient au centre de santé pour poursuivre le traitement ( Caldwell, 1993 ).

Les chances offertes aux femmes dans la population active et les possibilités de trouver un emploi qui produise un salaire adéquat — c’est-à-dire ce qui est nécessaire pour s’assurer une alimentation nutritive et adéquate et un

Les mères éduquées ont souvent un plus grand pouvoir de décision sur la santé et les questions connexes dans la famille et la communauté et davantage de connaissances en matière de prévention et de traitement des maladies : elles sont plus susceptibles d’adopter de nouveaux modes de comportement qui permettent d’améliorer la santé de leurs enfants.

— Santhat Sermsri, Forum international des sciences sociales sur la santé, Nakornpathom ( Thaïlande )

logement décent, avec des sources d’eau plus saines et des sources d’énergie qui respectent l’environnement — sont au moins en partie liées à l’éducation. Celle-ci est un facteur important qui sous-tend la ségrégation sexuelle dans le marché du travail. La formation des femmes a tendance à être orientée vers des carrières spécifiques, notamment dans le secteur social, comme l’enseignement, les soins infirmiers et la dactylographie, et loin des domaines techniques ou industriels ( OIT, 1985 ; Grandea, 1994 ). Tant que l’inégalité entre les sexes en matière d’éducation ne sera pas abolie, les femmes seront désavantagées au départ et ne pourront pas rivaliser avec les hommes pour les emplois de haut niveau et bien rémunérés ( Grandea, 1994 ).

Bien que l’éducation puisse augmenter jusqu’à un certain point les chances des femmes d’obtenir de meilleurs emplois, il faut cependant faire remarquer que le lien entre l’éducation et l’emploi, particulièrement pour les femmes, est fragile. Même lorsque les femmes ont les compétences voulues, les stéréotypes sexuels et les préceptes culturels, ainsi que les facteurs socio-économiques, peuvent présenter des obstacles à l’égalité devant l’emploi ( Grandea, 1994 ).

Dans certaines sociétés, les parents ne sont pas prêts à investir dans l’éducation des filles et n’encouragent pas leurs filles à rester à l’école ( Atai-Okei, 1994 ; Kerawalla, 1994 ). Dans une zone urbaine défavorisée à l’ex-tétieut de Bombay, en Inde, des familles musulmanes ont déclaré que les filles ne devraient pas être éduquées parce que l’éducation avait pour effet de les rendre plus indépendantes et autonomes, de leur apprendre à s’exprimer et de les prédisposer à « répondre » à leurs aînés ( Udipi et Varghese, 1995 ). D’autres raisons sont invoquées par les parents pour ne pas scolariser leurs filles : on craint de leur donner une trop grande liberté ; on préfère épargner un peu de cet argent si rare pour éduquer les garçons qui pourraient soutenir leurs parents plus tard ; les hommes ont une meilleure chance de dénicher un emploi mieux rémunéré ; les stéréotypes traditionnels persistent quant aux rôles dévolus aux femmes (ONU, 1995 ).

L’investissement dans l’éducation des enfants a été vu jusqu’à maintenant comme un prêt que les enfants doivent rembourser. Les filles sont éduquées de façon à pouvoir rembourser une grande partie de l’investissement avant le mariage. Elles sont envoyées au travail dès que possible pour contribuer à l’économie de la famille, y compris à l’éducation des autres enfants, notamment leurs frères. Bien que l’éducation des filles soit censée favoriser l’alliance matrimoniale, la valeur intrinsèque de l’éducation des filles n’a guère été reconnue.

— S.A. Udipi et M.A. Varghese. SNDT Women’s University, Bombay ( Inde )

Le lien entre l’éducation et l’amélioration de la santé peut être associé aux niveaux de revenu plus élevés ; en fait, le revenu peut être le facteur déterminant. Les familles plus riches peuvent se permettre d’envoyer leurs filles à l’école plus longtemps et peuvent avoir davantage tendance à considérer l’éducation des enfants comme un investissement pour leur avenir. Dans les familles pauvres, cependant, les besoins sont tels que l’on retire souvent les enfants de l’école pour les faire travailler. Les jeunes filles, en particulier, abandonnent l’école pour aider leur mère. Quand une mère devient gravement malade, ce sera plus souvent sa fille que son fils qui cessera d’aller à l’école pour assumer des responsabilités domestiques accrues.

Si l’on veut promouvoir la santé, il est essentiel d’adopter des politiques qui étendent la scolarité des filles. Il faut mettre en place de nouveaux établissements scolaires et renforcer les installations existantes, et donner aux femmes les mêmes facilités d’accès à l’éducation qu’aux hommes. Et il faut intégrer dès le début les informations essentielles sur la santé aux programmes scolaires.

RESPONSABILISATION
DES FEMMES ET SANTÉ

Une fois qu’une femme a de l’amour-propre, elle commence à découvrir « la personne à l’intérieur d’elle-même » et à assumer la responsabilité de ses propres besoins de santé.

— S.A. Udipi et M.A. Varghese, SNDT Women’s University, Bombay ( Inde )

Les liens entre la santé des femmes et les notions de responsabilisation, de droit et de renforcement de l’amour-propre ont également été mentionnés dans tous les ateliers. Littéralement, « responsabilisation », ou « affranchissement », signifie que l’on est investi d’un pouvoir, d’une responsabilité. Dans le présent contexte, il s’agit de donner du pouvoir à des individus ou à des groupes dans le but de créer et d’entretenir des rapports d’égalité dans la société. Pour les femmes, le processus d’affranchissement consiste à briser le cycle de la soumission puis de la discrimination, légué d’une génération de femmes à l’autre ( Tomasevski, 1993 ). Nan Peacocke ( 1995 ), de l’Unité de développement des femmes ( WAND ) de la University of the West Indies, croit qu’il est crucial que les femmes se sentent investies d’une certaine responsabilité pour pouvoir accepter de s’informer sur leur santé, et traduire cette connaissance au niveau de leurs comportements.

Le manque relatif d’accès à l’éducation pour les femmes et la part inégale qu’elles reçoivent de ressources comme la terre et la nourriture témoignent de la dévaluation dont elles font généralement l’objet dans la société. Les intérêts des femmes sont ignorés et leur travail est sous-estimé. Leur statut généralement inférieur et l’intériorisation qu’elles en font ont pour effet de marginaliser leurs besoins physiques, psychologiques et affectifs ( Kwawu, 1994 ; Manderson, 1994 ). Lin Tan ( 1995 ), de son côté, estime que la position des femmes dans la société influence directement ou indirectement leur aptitude à participer aux décisions concernant la grossesse, le comportement sexuel et le taux de fécondité.

Si les femmes comprennent mieux leur valeur dans la famille et la communauté, et la contribution importante que leur travail apporte à l’économie nationale, elles auront davantage d’amour-propre et de confiance et cela influencera leurs rapports avec les autres et les amènera à modifier certains comportements dans le sens d’une amélioration de la santé ( Peacocke, 1995 ). Une femme qui a davantage d’amour-propre se sent plus apte à prendre des décisions et commence à faire valoir son point de vue dans la famille.

La création de groupes de femmes peut augmenter l’amour-propre et la confiance en soi des femmes ( Udipi et Varghese, 1995 ). La constitution d’un tel groupe de femmes dans une zone défavorisée à l’extérieur de Bombay, en Inde, où la mobilité des femmes était sérieusement réduite, leur a donné l’occasion de sortir de leur maison, puis les a amenées graduellement à prendre des initiatives pour améliorer leur santé et leur bien-être personnels. L’établissement d’un autre groupe à Surkhet, au Népal, a aidé les femmes à parler ouvertement de leurs problèmes et les a encouragées à éliminer graduellement certaines pratiques discriminatoires traditionnelles, dangereuses pour leur santé. Une femme a annoncé après avoir accouché qu’elle composerait son propre régime alimentaire avec tout ce qu’il fallait, y compris des légumes, tandis que d’autres femmes ont commencé tranquillement à mettre de côté une poignée de riz par jour pour la manger ou la vendre plus tard ( Stackhouse, 1995b ).

Il faut encourager les femmes à assumer la responsabilité de leur santé. Les notions de prise en charge personnelle et de contrôle de sa propre vie doivent pénétrer à tous les niveaux émotionnels ( Pinel, 1994 ). De plus, il faut enseigner aux femmes les compétences qui leur permettront de modifier effectivement leur réalité.

Éventuellement, la prise de conscience de leurs droits donnera aux femmes le pouvoir nécessaire pour remettre en question les structures de pouvoir existantes. À titre d’illustration, Peacocke ( 1995, p. 278–279 ) a décrit comment une femme, C.J., membre de l’organisation pour le développement des femmes Red Thread, en Guyane, a été en mesure de transformer un atelier sur l’allaitement parce qu’elle était consciente tant de ses droits que des

Au début, les femmes étaient absorbées par leurs soucis domestiques et disaient souvent qu’elles n’avaient pas le temps de participer. Lorsque certaines d’entre nous se sont réunies et ont mis sur pied une garderie et un programme de formation professionnelle, les autres femmes ont montré de la curiosité. Aujourd’hui, nous avons beaucoup de femmes qui ont réussi à mieux s’organiser à la maison pour pouvoir se libérer pendant deux ou trois heures. Le plus important, c’est qu’elles estiment que ce temps libre leur appartient. On a graduellement aidé ces femmes à s’exprimer au sein du groupe, à la suite de quoi elles ont pris la parole dans la famille plus aisément.

— Tavailleuse communautaire citée par S.A. Udipi et M.A. Varghese, SNDT. Women’s University. Bombay ( Inde )

déterminants socioculturels de la santé. C.J. a fait le compte rendu suivant de ses expériences :

Je suis allée à un atelier jeudi et vendredi. Quand je suis arrivée, je me suis dit : « Qu’est-ce que c’est que ça ? Pourquoi est-ce que la chef d’équipe m’a envoyée là ? » Il n’y avait que des médecins, rien d’aurre ! Quand on s’est mis à discuter en petits groupes, j’ai dit au médecin qui dirigeait les débats : « Je ne crois pas que c’est par là qu’il faut commencer. [... ] Il faut commencer par les maladies chroniques. » [ Le médecin a eu l’air surpris, ajoute C.J., que quelqu’un propose une autre façon de procéder ; les infirmières étaient scandalisées qu’on ose contredire un médecin. ] Vingt minutes plus tard on n’avait toujours pas commencé. Et puis, vous savez ce que le médecin a dit ? « D’accord, commençons comme le propose C.J. » Et vous savez, quand on a commencé, on a rudement bien discuté.

Dans mon évaluation, j’ai dit : « Vous savez ce que je pense ? Je pense que cet atelier n’a pas atteint son objectif. Il [ ... ] aurait dû y avoir davantage de femmes présentes parce qu’elles auraient pu vous parler [... ] à vous, les médecins et les infirmières, de l’allaitement et vous expliquer pourquoi elles n’allaitent pas leurs bébés [...]. L’une des propositions a été de donner aux mères quatre mois de congé de maternité pour leur permettre d’allaiter leurs bébés. J’ai dit : « Ces quatre mois ne serviront à rien parce que les mères ne se nourrissent pas comme il faut. » ( Traduction libre. )

L’ALIMENTATION

L’alimentation des femmes est un autre problème qui influence tous les aspects de leur santé et de leur bien-être. Bien que l’état nutritionnel des femmes ait reçu une attention notable dans les recherches et les interventions sur la santé des femmes, dans la plupart des cas l’objectif premier était l’amélioration de l’état nutritionnel des nouveau-nés. On s’est très peu

Les pratiques d’alimentation discriminatoires dans l’enfance peuvent provoquer une carence protéique. L’arrêt de croissance prématuré que cela entraîne pour la petite fille pourra lui causer des problèmes plus tard dans ses fonctions de reproduction tels qu’obstruction du travail, asphyxie à la naissance et bien d’autres difficultés.

— A. El Bindari Hammad, Organisation mondiale de la santé. Genève ( Suisse )

intéressé au problème des carences nutritionnelles des femmes qui ne sont pas enceintes ni allaitantes ( Paolisso et Leslie, 1995 ).

Les femmes souffrent d’une façon disproportionnée d’anémie fer-riprive, de troubles dus à la carence en iode et de retard de croissance par suite d’une sous-alimentation en protéines ( figure 1 ). Quarante-trois pour cent des femmes en général et 51 % des femmes enceintes dans le monde souffrent d’anémie ferriprive. La grossesse éprouve sérieusement les réserves de fer des femmes et 56 % des femmes des pays en développement sont anémiques — elles sont 88 % en Inde ( OMS, 1994b ). L’anémie est aussi un risque pour les femmes non enceintes à cause des besoins de fer qui accompagnent la lactation et des pertes de fer associées à la menstruation ( Paolisso et Leslie, 1995 ).

L’état nutritionnel des femmes peut être notablement affecté par la distribution inégale de la nourriture parmi les membres de la famille, inégalité qui est liée à leur statut social inférieur ( Breilh, 1994 ; Rathgeber, 1994a ).

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Figure 1. Pourcentage des femmes ( 15 ans et plus) souffrant d’arrêt de croissance prématuré, d’anémie, de troubles dus à la carence en iode et de cécité due à une carence en vitamine A ( 1992 ). ( Source : OMS, 1994b. )

La privation de nourriture fait partie de la socialisation des filles ; elle est vue comme un élément de la déférence dont elles devront continuer à faire preuve quand elles assumeront le rôle de bru. Les parents expliquent souvent que la discrimination à l’égard des enfants de sexe féminin fait partie de leur formation pour qu’elles sachent ce qui est attendu d’elles dans la maison de leurs beaux-parents.

— S.A. Udipi et M.A. Varghese, SNDT Women’s University, Bombay ( Inde )

La discrimination peut commencer dès la petite enfance lorsque les enfants mâles sont nourris au sein plus longtemps que les filles (Udipi et Varghese, 1995 ). Dans certaines régions du monde, les hommes et les garçons mangent toujours les premiers ; les femmes et les filles mangent moins et mangent une nourriture de qualité et de valeur nutritive inférieures (ONU, 1991 ).

Un sondage effectué en Inde par le comité national sur le statut des femmes a conclu que celles-ci mangeaient après les hommes dans 48,5 % des familles ( Udipi et Varghese, 1995 ). Les mères dressaient les filles à ce rôle sacrificiel eu égard à la nourriture ( Udipi et Varghese, 1995 ). Les membres de la famille qui mangeaient les premiers ne se souciaient pas de savoir si la quantité de nourriture disponible était suffisante pour toute la famille et ne montraient aucun intérêt pour les besoins nutritionnels des membres féminins de la maisonnée ( Udipi et Varghese, 1995 ).

Les recherches effectuées aux Philippines ( Illo, 1991, p. 4 ) ont également indiqué que les femmes ont tendance à se placer en dernier lorsqu’elles servent à manger aux membres de leur famille :

Il faut d’abord donner à manger au mari, puis aux enfants. Ceci est particulièrement vrai pendant les mois maigres où le riz et les autres aliments se font rares et où il faut appliquer un certain rationnement [...]. Un grand nombre des femmes [...] interrogées semblaient considérer cette abstinence comme faisant partie de leur rôle de bonne épouse et de bonne mère. ( Traduction libre. )

La sous-alimentation

L’insuffisance de nourriture limite le développement physique des femmes, compromet leur santé et menace leur aptitude à avoir des enfants sains. Les femmes sous-alimentées sont plus souvent malades, ont des bébés plus petits et meurent plus jeunes (ONU, 1991 ).

Image L’alimentation et le sida Les femmes ont souvent un moins bon pronostic lorsqu’elles sont infectées par le virus du sida et elles meurent plus vite que les hommes ( Jones et Catalan, 1989 ; Berer et Ray, 1993 ; Melnick et al. 1994 ; Strebel, 1994 ). Ceci peut être lié au fait que la progression du sida est associée à l’état de santé et à l’immunité générale de la personne avant l’infection, et que les femmes ont tendance à avoir un mauvais état général de santé et de nutrition ( Adeokun, 1994 ).

Image L’alimentation et le travail des femmes L’anémie nutritionnelle exacerbe la fatigue et réduit la capacité de travail des femmes dans le lieu de travail et à la maison (ONU, 1991 ). La sous-alimentation peut aussi augmenter les effets des maladies du travail ( Haile, 1994 ; Puta, 1994 .). Comme l’a fait remarquer Messing ( 1991, p. 10 ), un jeune organisme en bonne santé a tendance à mieux résister aux dommages causés par les produits chimiques clans le lieu de travail qu’un organisme malade ou plus âgé ; l’organisme mal nourri a tendance à être moins capable de tolérer l’air pollué.

Image L’alimentation et les maladies tropicales La sous-alimentation compromet le système immunitaire des femmes et les rend plus vulnérables aux maladies tropicales ( Ulrich et al., 1992 ). Le mauvais état de santé des femmes dû à une malnutrition générale a été identifié comme l’une des raisons des taux élevés de mortalité et de morbidité chez celles qui souffrent de paludisme ( Alilio, 1994 ). On a également rapporté un synergisme entre l’alimentation et les infections associées à la leishmaniose viscérale ; les enfants qui présentent des signes de malnutrition sont plus vulnérables à cette maladie ( Mutinga, 1984 ).

Image L’alimentation et les obstacles à des soins de santé de qualité Les femmes sous-alimentées ont tendance à prêter une attention moindre aux messages d’éducation qui sont essentiels pour leur santé ( Alilio, 1994 ). Non seulement les femmes sous-alimentées s’occupent généralement moins de leur santé, mais elles sont aussi moins disposées à participer à des activités comme les soins prénatals et les visites médicales aux fins d’immunisation et de surveillance de la croissance des enfants ( Alilio, 1994 ).

L’hypertension, le diabète et l’obésité
chez les Antillaises

Le personnel de recherche des Antilles a souligné que la sous-alimentation chez les Antillaises coexiste avec une susceptibilité élevée aux maladies liées à la nutrition comme l’hypertension, le diabète et l’obésité. Ces maladies comptent effectivement parmi les causes principales de décès des femmes dans cette région ( Patterson, 1995 ). De plus, la prévalence de ces maladies est notablement plus élevée chez les femmes que chez les hommes ( Fraser, 1995 ; Patterson, 1995 ; Thompson, 1995 ).

La présence de ces maladies peut être associée à un déséquilibre du contenu nutritif des aliments consommés dans les familles ( Patterson, 1995 ). Les pratiques culturelles qui encouragent l’utilisation du sel, des sucres simples et des graisses dans le régime alimentaire pourraient être en partie responsables de cette situation. On continue à donner de l’importance aux aliments riches en calories, ce qui était autrefois dicté par la nécessité mais n’a plus de raison d’être dans la société moderne. Les aliments indigènes, riches en hydrates de carbone, cellulose, bêta-carotène et autres vitamines, sont rejetés par certains secteurs de la population comme des « nourritures de pauvres » ( Patterson, 1995 ). Il est essentiel de trouver des moyens de changer ces perceptions traditionnelles et culturelles pour mieux lutter contre la maladie.

Fraser ( 1995 ) a fait remarquer que la susceptibilité élevée des femmes à l’obésité est aussi liée au fait que l’obésité chez les femmes des Antilles était traditionnellement regardée comme un signe de beauté et de bonne santé. Les femmes minces, mêmes si elles sont en bonne santé, peuvent être jugées malades. Fraser ( 1995 ) ajoute cependant que les données récentes indiquent que, parmi la nouvelle génération au moins, ces attitudes sont en train de changer.

Certaines recherches effectuées en Amérique du Nord ont démontré qu’il existait un rapport entre les maladies cardiovasculaires et la pauvreté et l’inégalité sociale ( Singer, 1994 ). Ce rapport a besoin d’être étudié, particulièrement dans le contexte antillais.

Dégradation de l’environnement et al imentation

Dans le chapitre 6, on examine l’impact de la dégradation de l’environnement sur le travail des femmes. Cette dégradation non seulement accroît la charge de travail des femmes mais peut aussi empêcher les membres de la communauté de satisfaire leurs besoins nutritifs. Dans le district de Tongu, au Ghana, la dégradation de l’environnement a fait disparaître les palourdes et provoqué la détérioration de la pêche et de l’agriculture, ce qui a eu un effet désastreux sur les normes nutritionnelles ( Tsikata, 1994). Le manque de nourriture est maintenant le problème le plus sérieux dans cette région ; les membres de la communauté doivent acheter les aliments qu’ils produisaient eux-mêmes autrefois, ce qui est particulièrement difficile pour les familles à faible revenu.

Jacobson ( 1992a ) a observé que, dans certaines parties de l’Afrique subsaharienne, de Haïti, du Mexique, du Népal et de la Thaïlande, la

Le manque de nourriture éprouve particulièrement les femmes qui sont habituellement chargées de subvenir aux besoins de la famille dans ce domaine. Elles ne peuvent plus produire leurs propres hydrates de carbone et leurs protéines. La plupart des aliments doivent maintenant être importés des plames d’ Afram et d’autres parties du pays pour être vendus aux communautés Tongu. Les faibles revenus ne permettent souvent pas d’acheter suffisamment de nourriture, particulièrement les protéines qui sont chères. Cette situation a contribué de façon notable aux niveaux élevés d’onémie et de malnutrition ainsi qu’à ta réduction de la résistance à d’autres maladies.

— Dzodzi Tsikata. Institut de recherche statistique, sociale et économique. Université du Ghana, Legon ( Ghana )

déforestation et la rareté des feuilles, brindilles, branches, herbes et autres matériaux utilisés comme combustible pour faire la cuisine rivalise maintenant avec la rareté de la nourriture elle-même. Sans bois, les femmes ne peuvent pas faire cuire les aliments qu’elles ont fait pousser et récoltés ni faire des choses aussi élémentaires que bouillir de l’eau ou chauffer leur logement. Avec moins de combustible à leur disposition, les femmes font cuire les repas moins longtemps ou réduisent le nombre des repas cuits.

Dans certaines parties du monde, les champs ont été ravagés par la guerre et cela a entraîné une dégradation des niveaux de nutrition des communautés en cause. Au Cambodge, par exemple, l’utilisation des produits chimiques et des mines a gravement affecté les récoltes, et donc les niveaux nutritionnels ( Ren et al., 1995 ). Ce sont les femmes, responsables de nourrir leur famille, qui ressentent le plus fortement les effets de ces carences alimentaires.

Le remplacement des activités indigènes d’agriculture de subsistance par des activités génératrices de revenu peut provoquer une détérioration des normes nutritionnelles de la communauté ainsi que de l’écologie des sols. Par exemple, parmi les communautés indigènes des bassins de l’Orinico et de l’Amazone, en Amérique du Sud, l’intensification des relations commerciales avec le monde non indigène a provoqué beaucoup de changements dans la société traditionnelle. Herrera et Lobo-Guerrera ( 1994 ) ont expliqué que, dans le passé, chaque famille indigène avait habituellement deux ou trois conucos ( lopins de terre ) où elle faisait pousser toute une variété d’aliments pour la consommation familiale ( p. ex. ananas, mapuey, yucca, poivrons, seje et lulo ) qui composaient un régime alimentaire équilibré et permettaient d’entretenir la qualité du sol ( Rojas, 1992 ).

À mesure que les sociétés agricoles indigènes de subsistance se tournaient de plus en plus vers les activités génératrices de revenu, les conucos

Les récoltes ne produisent plus autant qu’avant parce qu’elles doivent être replantées sans cesse afin de produire suffisamment pour la vente ; le sol se fatigue — et nous aussi.

— Cité par Xochitl Herrera et Miguel Lobo-Guerrera, Fondation Etnollano. Bogotá ( Colombie )

traditionnels ont été consacrés à la plantation d’une seule récolte commerciale comme le cacao, les bananes, le maïs ou le yucca. Un « bon » conuco veut maintenant dire « un grand conuco plein de bananes » au lieu d’un terrain diversifié où poussait une variété d’aliments nutritifs pour la consommation familiale. Ceci peut avoir des effets à long terme sur les niveaux nutritionnels de la communauté parce que les terres utilisées pour les récoltes dans le bassin de l’Orinoco, comme le sol de la forêt amazonienne, sont fragiles et ne supportent pas la culture intensive à des fins commerciales.

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Chapitre 3
Le processus de
recherche

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CRDI: S. Colvey

Les besoins en santé des femmes, et ce qui empêche de les sotisfaire, tout cela pèse lourd pour les femmes. Toutefois, la plupart de ces besoins et de ces obstacles pourraient être évités ou diminués considérablement grâce à de meilleures interventions fondées sur des recherches interdisciplinaires plus globales et regroupées par sexe.

— Michael Paolisso et Joanne Leslie. Centre international de recherche sur les femmes. Washington DC ( É.-U. ) ( voir Paolisso et Leslie, 1995, p. 62 )

LES OBSTACLES À LA RECHERCHE

Divers obstacles empêchent l’adoption, dans la recherche en santé, du point de vue de la différence entre les sexes. Il arrive parfois qu’il manque un soutien institutionnel et financier pour ce type de recherche et nombre de chercheurs ont déploré l’insuffisance des instruments de recherche — la difficulté d’accès, par exemple, à des publications récentes, à de bons travaux de recherches et à des bibliographies. Les chercheurs d’Amérique latine ont signalé avoir eu de la difficulté à trouver des documents en espagnol. Le manque flagrant de recherches sur la santé qui intègrent une étude de la différence entre les sexes, par exemple dans les travaux sur les maladies tropicales et la santé et la sécurité au travail, représente un autre obstacle.

On a aussi évoqué le besoin d’une formation approfondie sur les méthodologies, les techniques et les instruments spécifiques nécessaires pour faire des travaux qui intègrent la dimension de la différence entre les sexes, tandis que d’autres demandaient une sorte de « liste de contrôle » que l’on puisse vérifier pour s’assurer que la recherche tienne compte de cette différence.

Au-delà de ces obstacles, il faut déployer de grands efforts pour surmonter une perspective de recherche orientée vers les hommes ( Lange et al., 1994 ). Ht Lange, par exemple, dans son étude sur les monitrices et les moniteurs de la santé à Santiago du Chili, a constaté que le langage masculin dominait le processus de recherche. Le mot espagnol monitores était toujours utilisé au lieu de monitoras, version féminine du terme. Alors que toutes les personnes qui faisaient l’objet de l’étude étaient des femmes, Lange a noté que les chercheurs persistaient à utiliser la forme masculine.

Un autre obstacle était la résistance de la communauté à certains types de recherche. Pino et al. ( 1994 ) a remarqué que les parents et le personnel enseignant de Santiago du Chili essayaient de faire obstacle aux recherches qui comportaient une étude de l’adolescence et du comportement sexuel précoce. De tels obstacles doivent être surmontés ; il est nécessaire de poursuivre les

Le défi est de trouver des façons de procéder pour que les recherches sur la santé tiennent compte de tous les déterminants de la santé et de la maladie dans toutes les sociétés et que la différence entre les sexes devienne évidente aux responsables des politiques.

— Dzodzi Tsikata. Institut de recherche statistique, sociale et économique, Université du Ghana, Legon ( Ghana )

recherches dans ce domaine pour favoriser l’élaboration de politiques et de programmes adaptés qui visent à réduire le nombre des grossesses non désirées et des MTS, y compris le sida, parmi les jeunes adolescents.

LA PERSPECTIVE D’UNE DIFFÉRENCE
ENTRE LES SEXES

La différence entre les sexes ne peut pas être simplement prise en considération et ajoutée après coup à une étude. C’est une perspective qui doit être pleinement intégrée au protocole de recherche à tous les niveaux : conception, exécution, analyse et diffusion. Elle suppose bien autre chose qu’une répartition par sexe. Le moins qu’on puisse espérer, c’est que le sexe soit une variable dont on tienne compte dans toutes les études, même si l’examen des différences en fonction des sexes ne fait pas explicitement partie des objectifs ( Vlassoff, 1994 ). Le présent manque de données et d’informations réparties selon le sexe entrave l’aptitude des décisionnaires à élaborer des politiques et des programmes efficaces sur la santé des femmes.

Outre les renseignements sur le sexe des répondants et la raison pour laquelle ceux-ci ont été sélectionnés, les études devraient fournir des informations sur le contexte social, structurel et culturel de la population étudiée ( Vlassoff, 1994 ). L’idéal serait que les recherches sur la santé tiennent compte des différences entre les rôles des femmes et des hommes, les responsabilités des uns et des autres, la base de leurs connaissances, leur statut dans la société, leurs perceptions, leur accès aux ressources et à l’information et l’usage qu’ils en font, leur participation respective aux prises de décisions, enfin les codes sociaux qui régissent les comportements des uns et des autres.

Du fait que les femmes et les hommes ont souvent des responsabilités et des rôles divers, leurs environnements vitaux, à l’intérieur et à l’extérieur de la maison, peuvent être très différents. C’est l’impact de ces environnements différents sur la santé qu’il faut examiner.

Où se trouve-t-on 24 heures por jour suivant que l’on est une femme ou un homme, une fille ou un garçon, un bébé de sexe masculin ou féminin ? Les espaces de vie des hommes et des femmes sont différents et cela peut créer des différences dans l’exposition aux pathologies et aux maladies, notamment tes maladies tropicales. Ceci est lié à la division du travail entre les sexes. Par exemple. qui s’occupe des troupeaux ? Qui ramasse la bouse de vache ? Qui égorge les animaux ? Qui nettoie les vêtements et les ustensiles dons la rivière ? Le personnel de recherche pourrait examiner combien d’heures par jour les membres de ta population à l’étude passent au bureau, aux champs, à la maison. etc. Quelle est la fréquence d’exposition de la population à certains risques ? Si la communauté vit près d’une décharge de déchets toxiques. quels sont les membres de la communauté ( hommes, femme ou enfants ) qui sont à la maison toute la journée et le plus exposés aux déchets ?

— Vivienne Wee. Centre for Environment. Gender and Development ( ENGEDER ), Singapour

La constitution d’équipes de recherche interdisciplinaires, dans lesquelles, par exemple, un personnel de recherche avec des antécédents médicaux et des spécialistes des sciences sociales travaillent ensemble, pourrait faciliter l’adoption d’une perspective qui tienne compte de la différence entre les sexes. Il est impossible pour une seule discipline ou un seul type de spécialiste de disposer des connaissances nécessaires pour identifier les facteurs sociobiomédicaux qui déterminent les risques de santé des femmes et leurs besoins dans ce domaine ( Paolisso et Leslie, 1995 ). Cependant, les ressources ne permettent pas toujours de constituer des équipes interdisciplinaires. Compte tenu de cette contrainte, il est devenu pratique courante de dispenser une formation dans plusieurs disciplines à la fois où l’on insiste, par exemple, sur les questions et les techniques des sciences sociales dans le programme de médecine, et vice versa. Le personnel de recherche avec des antécédents scientifiques et médicaux, même sans formation en sciences sociales, peut toutefois examiner les données d’un point de vue différent. Les femmes et les hommes qui font des recherches médicales sont des êtres humains qui peuvent exposer la dimension humaine observée et donner à leurs travaux une perspective sociale.

Partir d’un point de vue basé sur la différence entre les sexes, c’est être conscient et tenir compte de la pléthore de facteurs liés aux différences entre les femmes et les hommes qui peuvent avoir une influence sur la collecte des données de recherche. Le personnel de recherche devrait être conscient du fait, par exemple, que les femmes peuvent ne pas avoir les mêmes idées que les hommes sur la pathologie et la maladie. Les femmes, et particulièrement les femmes pauvres, peuvent prendre pour acquis un certain nombre de maux. Parce qu’elles ont un seuil de tolérance à la souffrance élevé et considèrent les maux de tête, par exemple, comme une chose normale, elles risquent de ne pas considérer ce type de malaise comme valant la peine d’être signalé. Les femmes ont tendance à souffrir en silence ; le seuil où la société situe la maladie, sur le continuum que forment le couple santé-maladie, est extrêmement élevé pour les femmes qui sont prêtes à endurer beaucoup de choses pour ne pas perturber l’organisation de la maison ( Okojie, 1994 ).

Il peut être extrêmement difficile pour les chercheurs de recueillir des informations qui reflètent le véritable état de choses pour les femmes parce que, dans certaines cultures, celles-ci hésitent parfois à dire ce qu’elles pensent, surtout en présence des hommes. Les chefs de famille masculins risquent de vouloir parler « au nom des femmes », même sur des sujets qui sont particulièrement importants pour elles. Le personnel de recherche doit donc veiller à ce que les femmes aient la possibilité de parler pour elles-mêmes. Les hommes assistant aux entrevues, le personnel d’enquête a dû faire face aux difficultés que posait cette présence, explique Irene Luppi ( 1994 ). Par exemple, le mari corrigeait ou censurait les réponses de la femme, demandait que certaines réponses soient effacées, ou déclarait : « Il vaudrait mieux que je réponde parce que je sais mieux qu’elle. »

Le sexe de la personne qui effectue la recherche est un autre point important à considérer. Dans certaines sociétés, les femmes ne sont pas autorisées à ouvrir leur porte aux chercheurs masculins et cela risque d’éliminer systématiquement les femmes de la recherche ( Manderson, 1994 ). Même dans les cas où un chercheur peut avoir accès aux deux sexes, les filles et les femmes risquent de se sentir mal à l’aise pour répondre aux questions d’un homme ; elles hésiteront à répondre. Elles sont souvent plus à l’aise pour s’exprimer avec d’autres femmes, surtout lorsqu’il s’agit de questions délicates comme la sexualité. Dans son étude sur les femmes et le sida, Strebel ( 1993 ) a indiqué que le recours à des femmes pour faire les enquêtes avait aidé à établir un sentiment d’expérience partagée, surtout en ce qui concernait les questions sexuelles et la façon dont les hommes traitent les femmes. Aux fins d’évaluation, les rapports de recherche devraient identifier si l’équipe scientifique était constituée d’hommes, de femmes ou d’une combinaison des deux sexes.

Le moment choisi pour les entrevues doit aussi tenir compte des différences entre les sexes. La disponibilité des personnes qui font l’objet du sondage peut être liée à la division des rôles et des responsabilités entre les sexes. Dans une communauté agricole, par exemple, l’échantillon aura tendance à être biaisé si les entrevues ont lieu alors que la plupart des femmes sont à travailler dans les champs.

Les méthodes de recherche participatives jouissent de plus en plus de popularité et de respect et elles ont tendance à avoir une perspective plus féministe parce qu’elles accordent de la valeur à toutes les opinions et donnent à chaque personne la possibilité de s’exprimer.

— Eva Rathgeber, Centre de recherches pour le développement international, Bureau de l’Afrique orientale et australe, Nairobi ( Kenya )

Un autre facteur qui peut poser un problème méthodologique est la différence possible entre ce que les femmes disent qu’elles font et ce qu’elles font en réalité. Par exemple, bien que les femmes sachent parfois ce qu’elles devraient faire pour rester en bonne santé, elles peuvent être incapables, pour différentes raisons, d’appliquer les pratiques de santé désirées. Si la personne qui administre l’entrevue demande : « Que faites-vous quand... ? », les femmes peuvent répondre ce qu’elles pensent être « la bonne réponse » ( ce qu’elles devraient faire et non ce qu’elles font en réalité ). Lorsque l’on examine les pratiques d’une famille en matière d’alimentation, les femmes, qui sont désignées pour subvenir aux besoins de la famille, pourraient éprouver de l’embarras à parler des difficultés qu’elles ont à donner à leurs enfants des aliments nutritifs et adéquats. Les chercheurs doivent donc trouver des moyens de se renseigner sur l’écart entre les intentions et les pratiques. Il peut parfois être préférable de poser des questions comme : « Est-ce que vous avez de la difficulté à appliquer ce que vous savez que vous devriez faire ? »

Dans le secteur de la sexualité, les femmes peuvent hésiter à dire la vérité aux personnes qui les interrogent à cause des attentes de la société dans ce domaine. Lorsque l’on fait des recherches sur la sexualité des adolescents, la franchise des réponses est en rapport avec l’acceptabilité sociale de leur comportement, qui est en grande partie conditionnée par le sexe. Même si les personnes qui effectuent la recherche prennent toutes les mesures nécessaires pour garantir la confidentialité et l’anonymat, les résultats peuvent être influencés par les attentes différentes de la société pour chaque sexe en ce qui concerne les relations sexuelles avant le mariage.

Le personnel de recherche doit veiller à ce que le sujet de la recherche présente un intérêt pour la communauté à l’étude. Les voix des femmes doivent être entendues. Il faut inclure les points de vue des femmes de la communauté dans le processus de recherche, faire participer celles-ci à la définition des priorités de recherche, à l’élaboration des directives et des normes éthiques, à la conception et à l’application du plan de recherche et à l’analyse des résultats. En Equateur, le personnel du Centre de consultation et de recherche sur la santé a adopté un modèle de recherche participative où les femmes ont aidé à administrer les questionnaires sur leurs conditions de vie et de travail, leurs problèmes de santé et leur accès aux soins de santé ( Breilh, 1994 ). Le personnel de recherche doit également être sensible aux exigences qu’il impose aux femmes et veiller à ce qu’elles soient dédommagées pour leur temps et leurs efforts. Pour en apprendre davantage sur les besoins de santé des femmes, on pourrait aussi mettre à profit les connaissances des groupes qui travaillent de près avec elles et connaissent généralement bien leurs points de vue.

La population qui fait l’objet de la recherche doit aussi être pleinement informée des résultats. Les femmes qui participent à la recherche devraient émerger de cette interaction plus conscientes du monde auquel elles appartiennent et donc davantage capables d’avoir une action sur lui ( Klugman, 1994 ). Nombre de chercheurs dans le passé ont exploité les membres de la communauté sans rien offrir en retour. Violeta Lopez-Gonzaga ( 1995 ) note que beaucoup ont obtenu leur doctorat et recueilli des honneurs grâce au travail des membres de la communauté sans que cela ait responsabilisé les personnes qui avaient fait l’objet de la recherche. De son côté, Strebel ( 1993 ) a cependant remarqué que les efforts pour partager les résultats avec la population étudiée ne réussissaient pas toujours. Elle a ajouté qu’il était nécessaire de trouver des façons originales de relier les résultats de la recherche avec les besoins immédiats des personnes qui y ont participé.

LA RECHERCHE QUALITATIVE

Beaucoup d’analystes ont souligné l’importance des techniques de recherche qualitatives, comme les sources d’informations clés, les discussions en groupes spécialisés, les entrevues en profondeur, pour fournir un point de vue

À la fin de chaque discussion en groupe spécialisé, les femmes ont déclaré qu’il était merveilleux d’avoir l’occasion de parler dechoses qui sont habituellement passées sous silence. Après chaque séance, nous avons donné aux femmes des informations et des réponses aux questions soulevées au cours des débats. Ceci leur a donné des connaissances utiles et arépondu à beaucoup de leurs anxiétés. Nous avons promis de revenir les voir quand nous aurions terminé la recherche pour qu’elles puissent entendre ce que les autres femmes avaient à dire. Les participantes sesont déclarées enchantées de ce projet car elles sont très coupées de l’expérience des outres femmes. Cet exemple illustre comment le processus de recherche peut être agréableet bénéfique pour les personnes qui en font l’objet.

— Barbara Klugman, Projet sur la santé des femmes, Université de Witwatersrand, Johannesburg ( Afrique du Sud )

multidimensionnel sur les situations sociales. Ellis ( 1986, p. 138 ) apporte ce commentaire :

L’approche qualitative nous aide à comprendre les gens dans le cadre de leurs interactions dans différents contextes sociaux, et à définir la réalité sociale à partir de leurs expériences et de leurs perspectives plutôt que de celles de la personne qui effectue la recherche. [...] Elle permet de soulever des questions qui n’avaient pas été posées jusqu’ici et dont les réponses aident à mieux comprendre comment et pourquoi les gens participent comme ils le font à une variété de processus sociaux. ( Traduction libre. )

Simmons et Elias ( 1994, p. 6 ) ajoutent que :

Les méthodes qualitatives, qui utilisent surtout des techniques d’observation et diverses formes d’entrevues en profondeur, fournissent des explications contextuelles ou globales basées sur un plus petit nombre de cas et mettent l’accent sur la signification plutôt que sur la fréquence des phénomènes sociaux. ( Traduction libre. )

Chiarella ( 1994 ) a dégagé cinq avantages de la recherche qualitative : flexible, elle permet de continuer à développer le concept et le modèle tout au long de la recherche ; les données recueillies ne sont pas là pour démontrer nécessairement des hypothèses et des théories préconçues ; la recherche qualitative offre la possibilité d’étudier les gens et les éléments essentiels comme un tout, non comme des variables ; elle rejette les préjugés et les croyances préétablies et s’efforce de voir les faits ou les processus comme s’ils arrivaient pour la première fois ; enfin, elle permet d’intégrer les données du point de vue des répondantes et répondants eux-mêmes. Ce dernier point est important parce que la façon dont les gens parlent de leur vie est significative : le langage qu’ils utilisent et les rapports qu’ils établissent révèlent le monde tel qu’ils le voient et dans lequel ils agissent ( Gilligan, 1982 ).

Plusieurs personnes ont rapporté de fascinants résultats de recherche menées au moyen de méthodes qualitatives. Chiarella ( 1994 ) a obtenu une mine d’informations qualitatives pour expliquer pourquoi certaines femmes indigènes de Bolivie se montraient réticentes à l’égard des services de santé basés sur la médecine occidentale. Par des méthodes qualitatives, on a pu identifier, à Myanmar ( ex-Birmanie ), des coutumes traditionnelles et des croyances culturelles relatives à la grossesse et identifier les perceptions des couples mariés à l’égard de la grossesse et des avantages et désavantages des soins prénatals ( Win May et al., 1995 ). Une étude des déterminants psychosociaux qui influencent l’utilisation des services de santé à l’intention des mères et des enfants dans des quartiers extrêmement pauvres de Montevideo, en Uruguay, comportait une étape qualitative initiale qui permettait de mieux se renseigner sur les variables, les catégories et les indicateurs associés à l’utilisation ou à la non-utilisation des services de santé ( Bonino, 1994 ). Par le biais d’entrevues individuelles et collectives avec des femmes du quartier, ainsi qu’avec le personnel de santé, on a pu recueillir une abondance d’informations qui n’auraient pas pu être obtenues par des méthodes quantitatives.

Les groupes spécialisés ont beaucoup d’avantages. Pour commencer, ils permettent de réduire le risque associé à la différence de pouvoir dons les entrevues personnelles. Les groupes spécialisés, qui ont plus de membres que de chefs, permettent aux personnes qui y participent de discuter et de parler entre elles, tandis que les chefs n’interviennent qu’occasionnellement. Ceux-ci, en fait, passent à l’arrière-plan et toute perception d’une différence de statut ou de pouvoir entre les participants et les façilitateurs a tendance à s’amenuiser. Les groupes spécialisés peuvent aussi rapprocher les femmes qui partagent des expériences similaires dans la vie quotidienne. Ce partage permet aux femmes d’explorer, de remettre en question et d’échanger des informations plus en profondeur que ce qui est habituellement possible dons le cadre d’une entrevue unique.

— Thicumporn Kuyyakonond, Centre du Nord-Est pour la prévention et le traitement du sida, Université Khon Kaen ( Thaïlande )

C’est la question de recherche qui devra déterminer si l’on doit utiliser des techniques qualitatives ou quantitatives ou une combinaison des deux. Les approches quantitatives, comme les sondages, insistent sur le nombre de personnes interrogées et la possibilité de généraliser et d’étendre les résultats à des populations plus larges. La triangulation, c’est-à-dire la combinaison de différentes méthodologies pour étudier le même phénomène, est utile pour valider les résultats et fournir différentes perspectives sur un secteur de recherche donné.

LA RECHERCHE-ACTION

On a besoin de recherches qui soient davantage orientées vers la pratique et intégralement liées au changement social. Les recherches devraient avoir une composante axée sur l’action — laquelle serait identifiée dans le sujet de recherche lui-même — et avoir pour objet d’améliorer l’état de santé des femmes. Il ne faut pas se contenter de poser les questions et d’analyser les problèmes dans le style de la recherche traditionnelle. L’équipe scientifique doit plutôt utiliser activement ses connaissances et ses compétences pour passer aux actes et apporter des changements aux politiques et aux programmes nationaux ( Ellis, 1986 ). En fait, comme le dit aussi Ellis ( 1986 ),

II ne suffit pas de rassemblerdes experts pourdes séances de lamentations collectives. Il importe d’agir, d’être vigilant et de mettre fin aux palabres. Les changements doivent se produire au niveau local où les gens prennent des décisions quotidiennes déterminantes pour le cours de leur vie et de celle de leurs enfants.

— Yianna Lambrou, Centre de recherches pour le développement international, Ottawa ( Canada ) ( voir Conway et Lambrou, 1995 )

toute recherche faite simplement pour elle-même ou dans l’intérêt de la personne qui l’effectue est un abus ainsi qu’une exploitation des personnes qui en sont l’objet.

Les données les plus récentes sur les problèmes de santé des femmes ne sont souvent pas intégrées aux politiques publiques et aux interventions dans le secteur de la santé. Atai-Okei ( 1994 ) a exprimé sa frustration devant le fait que les recherches sur la santé avaient en grande partie échoué et n’avaient pas atteint les populations locales qu’elles étaient censées servir. Les résultats sont rarement mis en pratique dans les hôpitaux ou les cliniques médicales rurales.

Les informations fournies par la recherche doivent servir à donner du pouvoir aux femmes ainsi qu’aux communautés auxquelles la recherche s’applique, afin de favoriser le processus de changement ( AbouZahr, 1994, p. 6 ).

Toutes les recherches sur les perceptions et les besoins des femmes dans le domaine de la santé doivent être conçues et mises en œuvre dans le but exprès de pratiquer des interventions sur la base des résultats obtenus. Ces interventions devraient avoir pour effet d’étendre les services de santé dans la communauté, de rehausser la qualité des soins offerts aux femmes et d’améliorer l’état de santé de celles-ci. ( Traduction libre. )

Outre les interventions auxquelles ils devraient donner lieu, les résultats de recherche devraient influencer les politiques publiques concernant la santé. Cependant, nombre des efforts tentés par les personnels de recherche

Bien qu’il y ait eu un certain nombre de conférences, de séminaires et d’ateliers sur la santé des femmes organisés en Ouganda, on a bien peu accompli jusqu’ici en termes d’améliorations mesurables en faveur de l’état de santé des Ougandaises ou de l’accès de celles-ci aux soins de santé.

— Hellen Rose Atai-Okei, Ateki Women Development Association, Kampala ( Ouganda )

pour éduquer les responsables des politiques et les convaincre de la nécessité de planifier des programmes visant à améliorer la santé et le bien-être des femmes semblent être tombés à plat ( Atai-Okei, 1994 ). Violetta Lopez-Gonzaga ( 1995 ) a conjuré les personnes qui effectuent les recherches de faire un effort supplémentaire et de traduire chaque ouvrage de 200 pages qui risque de rester pendant des années sur la tablette... en un document de deux pages qui soit utile aux responsables des politiques. Les pays en développement, dit-elle, ne peuvent pas se permettre de faire des recherches « pour le plaisir ». Dans son exposé intitulé « WID, WAD, GAD », Rathgeber ( 1990b ) s’attaque au même problème :

On n’a toujours pas trouvé le moyen de traduire les résultats des [...] projets de recherche en plans et programmes viables de développement social général. Ce qui est de toute première importance pour y parvenir, c’est une communication et une interaction plus efficaces entre les personnes qui effectuent les recherches, les responsables des politiques nationales et internationales et les représentants des organismes donateurs. ( Traduction libre. )

Les résultats de deux conférences récentes des Nations Unies représentent une victoire majeure des femmes dans la bataille pour que leurs préoccupations soient intégrées à l’élaboration des politiques. À la Conférence mondiale sur la population et le développement, qui a eu lieu en septembre 1994 au Caire, des groupes de femmes en provenance du monde entier ont réussi à faire passer leur message : que le problème de la démographie doit être compris non comme un phénomène isolé mais dans le cadre plus vaste de la santé et des droits des femmes en matière de reproduction. Parce que les femmes sont parvenues à mettre leurs préoccupations à l’ordre du jour international, on a vu émerger un plan d’action complètement nouveau qui soulignait que, si les femmes avaient le pouvoir de contrôler leurs propres fonctions de reproduction, elles choisiraient d’avoir moins d’enfants. Le plan d’action déclarait aussi qu’il est important de veiller à ce que les femmes participent également à la politique et à la vie publique et de prendre les initiatives nécessaires pour éliminer la discrimination sexuelle dans le lieu de travail ainsi que d’autres inégalités économiques comme les limites imposées aux femmes en matière de crédit, de propriété ou d’héritage (ONU, 1994 ).

De la même manière, et malgré l’intimidation et le harcèlement dont elles ont fait l’objet de la part des fonctionnaires chinois lors de la Quatrième Conférence mondiale sur les femmes, celles-ci ont quand même réussi à élaborer une déclaration et une plate-forme d’action de 150 pages qui se fondaient sur les acquis du Caire. Dans les mois qui ont précédé la conférence, les militantes ont craint que l’intention des Chinois de limiter la participation des ONG internationales ne nuise aux importants succès remportés par les femmes jusqu’à ce jour ( Broadbent, 1995 ). En fait, plus de

Le plan d’action issude la Conférence mondiale sur la population et le développement a insisté sur l’importancede l’avancement de l’égalité entreles sexes, de la responsabilisation des femmes, de l’élimination detoutes sortes de violences contre les femmes et de la capacitédes femmes de contrôler leur propre fécondité. Les droitsdes femmessont une partie inaliénable, intégrale et indivisible des droits universels de la personne.

— Trinidad S. Ostena. Université De La Salle. Manille ( Philippines )

10 000 femmes membres d’ONG internationales n’ont pu obtenir un visa pour participer à la conférence ; d’autres ont été empêchées de circuler librement. Malgré l’organisation médiocre de l’événement, des femmes du monde entier ont pu renverser la vapeur.

La déclaration finale dénonce vivement la violence, notamment la violence familiale, et le harcèlement sexuel, condamnant le viol, cet instrument de guerre contre les femmes. On y confirme les droits des femmes en ce qui concerne la sexualité et la reproduction, dénonçant toute forme d’imposition de la stérilisation, des rapports conjugaux et de l’avortement. On déclare que la femme est économiquement affranchie, demandant qu’elle ait accès aux ressources financières et au crédit bancaire. Les problèmes entourant la santé des femmes sont mis en rapport avec les droits de la personne ; l’approche globale de la santé féminine que prend la déclaration met l’accent sur le facteur social et sur la différenciation des sexes, sans oublier une vaste gamme de mauvaises conditions dont souffre la santé des femmes en plus des problèmes de santé liés au sexe et à la reproduction. Mieux encore, les femmes tant du côté gouvernemental que du côté des ONG, sont retournées chez elles avec la ferme intention de passer de la déclaration à l’action.

INITIATIVES ISSUES DES ATELIERS

Tous les ateliers ont identifié des lacunes dans les recherches et ont recommandé de poursuivre les études dans le secteur de la différence entre les sexes, de la santé et du développement durable. En outre, dans l’espoir d’apporter des changements dans les programmes et les politiques qui aient un impact sur la santé des femmes, deux initiatives orientées vers l’action ont été lancées à l’issue des ateliers.

Le programme antillais de recherche

L’atelier organisé dans les Antilles anglophones a formulé un plan d’action qui établit la liste des priorités de la recherche sur la différence entre les sexes, la santé et le développement durable. Les recommandations ciblent un certain nombre de questions majeures, notamment la pauvreté, la violence, la nutrition et les maladies chroniques, les questions de santé en rapport avec le travail et les facteurs qui influencent la flexibilité des services et leur utilisation. Des politiques clés ont aussi été définies. Ces recommandations ont été présentées aux plus importants organismes d’exécution de la région : les gouvernements et leurs ministères, le Caribbean Development Cooperation Committee, le Caribbean Community Secretariat, le Commonwealth Caribbean Medical Research Council, l’Organization of Eastern Caribbean States Secretariat, l’Organisation panaméricaine de la santé, l’Organisation mondiale de la santé, le Centre de recherches pour le développement international et la University of the West Indies.

Le réseau de santé des femmes
de l’Asie et du Pacifique

Une initiative très ambitieuse a été lancée à l’issue de l’atelier de Singapour : la création d’un réseau régional de recherche et d’action pour la santé des femmes. Le réseau de santé des femmes de l’Asie et du Pacifique a été constitué avec les objectifs suivants :

Image combler les lacunes fondamentales dans les connaissances sur la santé des femmes à toutes les étapes de leur cycle de vie ;

Image promouvoir des politiques et des recherches sur la santé et des systèmes de prestation de soins qui tiennent compte de la différence entre les sexes ;

Image donner aux femmes le pouvoir de formuler leurs propres besoins de santé et la capacité de dispenser des soins de santé, à elles-mêmes et aux autres.

Au niveau le plus fondamental, le réseau sera au cœur des échanges d’informations sur la santé des femmes ; il coordonnera des activités et des recherches régionales sur la santé, en particulier la santé féminine. À un niveau plus avancé, le réseau rassemblera une masse critique d’efforts convergents pour les orienter vers la résolution des nombreux problèmes de santé des femmes de la région. Le réseau accordera une attention spéciale aux questions de santé liées au développement économique rapide des pays de cette partie du monde.

Le réseau rassemblera aussi tous les participants régionaux au secteur de la santé : médecins, responsables des politiques, chercheurs, administrateurs et membres du secteur privé. Ensemble, ils tenteront de combler les lacunes fondamentales dans la connaissance des problèmes proprement féminins en santé ; ils verront à améliorer l’accessibilité des services à tous les niveaux ; ils mettront en place des programmes innovateurs qui tiennent compte de la différence entre les sexes.

Un secrétariat, basé pour le moment au Centre for Environment, Gender and Development ( ENGENDER ), une ONG de Singapour qui a accueilli l’atelier conjointement avec le CRDI, coordonnera les activités et diffusera les informations de la façon suivante :

Image collecte et diffusion de l’information : bases de données, coordination et publication d’un bulletin, description des réussites et des renseignements accumulés, élaboration et gestion d’un tableau d’affichage électronique ;

Image recherche : coordination des activités de recherche transnationales ;

Image intervention et coordination stratégiques : coordination de l’intervention des responsables des politiques aux paliers international, national et régional ;

Image formation et éducation : mise en place de modules de sensibilisation à la différence entre les sexes, partage de matériels et de modules de formation qui peuvent être traduits, vulgarisés et adaptés aux besoins locaux ;

Image facilitation du financement.

Des groupes de travail ont été constitués autour des questions suivantes : santé au travail, sida, ostéoporose, hygiène du milieu, systèmes de soins de santé, maladies tropicales parasitaires, santé des fonctions de reproduction et tabagisme. De plus, des groupes de travail sur les stratégies à mettre en œuvre ont également été proposés sur les sujets suivants : responsabilisation et participation des femmes, mécanismes de développement durable, recherches basées sur la communauté, défense des politiques, et communication et diffusion de l’information.

Chapitre 4
Le sida

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CRDI: G. Toomey

Alors que les infections liées au sida entrent dans leur deuxième décennie, il fout se demander : cette maladie nous a-t-elle vraiment appris quelque chose ?

— Arletty Pinel, GENOS International. Sāo Paulo ( Brésil )

Le sida, ou syndrome d’immunodéficience acquise, pose un problème de santé publique majeur dans la plupart des régions du monde. Le sida est une maladie définie par un ensemble de signes et de symptômes causés par le virus de l’immunodéficience humaine ( VIH ) et caractérisés par un affaiblissement de la réponse immunitaire. Le VIH, qui est transmis par les fluides biologiques ( sperme ou sang ), envahit les globules blancs et se multiplie, provoquant une défaillance du système immunitaire.

Depuis que le VIH a été identifié, il y a 14 ans, le nombre de personnes séropositives a augmenté de façon substantielle. Environ 6 000 personnes — dont plus de la moitié sont des femmes — sont infectées quotidiennement par le VIH ( Banque mondiale, 1993 ). Le Programme global sur le sida de l’Organisation mondiale de la santé ( OMS ) estime qu’il y a maintenant plus de 17 millions de personnes séropositives dans le monde parmi lesquelles les cas de sida déclarés sont estimés à quatre millions ( OMS et PNUD, 1994 ). L’OMS a prédit que, dès l’an 2000, il pourrait y avoir jusqu’à 26 millions de personnes séropositives et atteintes du sida dans le monde ( Banque mondiale, 1993 ). L’organisation ajoute que, vu le peu de temps qu’il faut pour que les taux d’infection se multiplient par deux dans beaucoup de pays en développement et vu la vitesse avec laquelle la maladie se propage dans les régions où les taux d’infection étaient restés faibles jusqu’à ce jour, le chiffre total en l’an 2000 pourrait être de deux à trois fois plus élevé ( Banque mondiale, 1993 ).

Bien que le sida représente une préoccupation majeure pour un grand nombre de pays, certaines régions du monde ont été plus profondément touchées que d’autres ( figure 2 ). En 1990, plus de 80 % des personnes infectées vivaient dans les pays en développement et on s’attend à ce que ce chiffre atteigne 95 % en l’an 2000 ( Banque mondiale, 1993 ).

L’Afrique subsaharienne, où se retrouvent plus des deux tiers de la population séropositive mondiale, a été la région la plus frappée par la pandémie du sida. Au milieu de 1994, L’OMS estimait que plus de 10 millions des infections avaient eu lieu en Afrique où, dans certaines villes, la prévalence des infections atteint une personne sur trois. L’Afrique du Nord, par

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Figure 2. Estimation de la distribution des adultes infectés par le VIH . ( Source : OMS et PNUD, 1994. )

contre, est une région où le taux d’infection est actuellement relativement faible.

En Asie, il a fallu attendre la fin des années 1980 pour que le sida soit reconnu comme un grave problème de santé. Cependant, la progression du VIH est maintenant plus rapide en Asie que dans les autres régions du monde. Au milieu de 1994, L’OMS estimait à plus de 2,5 millions le total cumulatif des personnes séropositives dans cette région, avec une majorité des infections en Inde et en Thaïlande.

En Amérique latine et aux Antilles, on estime qu’entre 1,5 et 2 millions de personnes sont infectées, le Brésil et le Honduras étant les pays les plus touchés. Dans cette partie du monde, les infections sont surtout concentrées dans les régions urbaines.

Eu égard aux statistiques, il faut faire remarquer qu’il est extrêmement difficile d’évaluer la véritable étendue de l’épidémie de VIH et de sida à cause des niveaux élevés de cas non déclarés. D’après les épidémiologistes, par exemple, le taux de cas non déclarés à Sào Paulo, au Brésil, peut atteindre 100 %, et le nombre de personnes séropositives peut être jusqu’à cinq fois plus élevé que le nombre de cas officiellement déclarés ( Goldstein, 1994 ).

TAUX D’INFECTION PARMI LES FEMMES

Depuis 1981, le profil de transmission du VIH et du sida a beaucoup évolué. À l’origine, dans certaines régions du monde, on pensait que le sida frappait principalement les hommes homosexuels, les prostituées et les toxicomanes qui partageaient leurs aiguilles, et que les femmes mariées ou les personnes qui avaient un partenaire stable couraient un risque relativement faible d’infection séropositive par transmission sexuelle.

Ces dernières années, cependant, le nombre de femmes infectées par le VIH a augmenté de façon spectaculaire dans le monde entier. En 1994, il y avait plus de six millions de femmes séropositives dans le monde. L’OMS estime qu’il y a actuellement 115 000 femmes séropositives en Amérique du Nord, 425 000 en Amérique latine et dans les Antilles, plus de quatre millions en Afrique et environ 1,8 million en Asie et dans le bassin du Pacifique ( figure 3 ). On s’attend à ce que, en l’an 2000, le nombre de femmes infectées soit égal à celui des hommes ( Institut Panos, 1990 ).

En Amérique du Nord et en Europe, les femmes continuent à représenter un pourcentage relativement faible du nombre total de personnes séropositives. Le taux d’infection parmi les femmes est cependant à la hausse. En 1994, 18 % de tous les cas de sida aux États-Unis étaient des femmes par rapport à 7 % en 1985 ( Cohen, 1995 ). Les centres américains de contrôle

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Figure 3. Prévisions concernant la distribution des femmes séropositives ( cas de sida exclus ). ( Source : OMS et PNUD, 1994. )

des maladies ont déclaré que les cas d’infection augmentaient d’environ 17 % par année chez les femmes ; de plus en plus de ces femmes sont infectées lors de relations hétérosexuelles ( New York Times, 1995 ). Ce sont les Américaines appartenant aux minorités raciales qui sont régulièrement le plus touchées, les femmes noires et hispaniques représentant plus de 75 % des cas déclarés parmi les femmes infectées ( Campbell, 1990 ; Carpenter et al, 1991 ).

Dans l’Afrique subsaharienne, plus de la moitié des personnes adultes nouvellement infectées sont des femmes et plus d’une femme adulte sur 40 est maintenant touchée. Les données indiquent qu’entre 60 et 80 % des femmes séropositives sont monogames et ont été infectées par leur mari. En Ouganda, plus de 60 % des personnes séropositives sont des femmes et, à Kampala, la capitale, plus de 30 % de toutes les femmes enceintes sont infectées ( Banque mondiale, 1993 ). On rapporte que le pourcentage d’infection par le VIH parmi les prostituées du Kenya est passé de zéro en 1980 à 88 % en 1988 ( Ngugi, 1991, cité dans Koblinsky étal, 1993b ).

En Asie comme en Afrique, près de la moitié des personnes nouvellement infectées sont des femmes. L’exploitation commerciale de l’activité sexuelle dans beaucoup de pays d’Asie comme la Thaïlande et l’Inde est liée de très près à la transmission du VIH par contact hétérosexuel entre les travailleuses sexuelles et les clients masculins et vice versa.

En Amérique latine, les personnes les plus profondément touchées par le sida ont d’abord été les hommes homosexuels, les hommes bisexuels et les utilisateurs de drogues administrées par injection. Or, la transmission par contact hétérosexuel représente maintenant 75 % de toutes les nouvelles infections et un quart d’entre elles touchent des femmes. Au Brésil, le pourcentage de cas de sida déclarés attribuables à une transmission par contact hétérosexuel est passé de 7,5 % en 1987 à 26 % en 1993–1994. Au Pérou, le rapport entre les hommes et les femmes atteints du sida était d’environ 15 pour 1 en 1987 ; aujourd’hui, il est de 7 pour 1 ( Chauvin, 1993 ).

TRANSMISSION ET EFFETS DU VIH
ET DU SIDA

Dans les pays en développement, le principal mode de transmission du sida est le contact hétérosexuel qui est à l’origine de plus de 85 % des infections ( Banque mondiale, 1993 ). Outre les rapports hétérosexuels, une personne peut être exposée au VIH si elle entre en contact avec du sang contaminé ( p. ex. lors d’une transfusion sanguine ou d’une exposition à des produits sanguins infectés par le VIH comme des seringues ou des instruments

Pour les femmes, le principal mode de transmission du VIH est (est le contact hétérosexuel.

— Anna Strebel, University of the Cape, Belleville ( Afrique du Sud )

médicaux infectés ). Le sida peut aussi être transmis de la mère à l’enfant pendant la période prénatale. Environ 30 % des bébés nés de mère séropositive sont séropositifs ( OMS et PNUD, 1994 ). L’allaitement peut aussi être un véhicule de transmission du VIH aux bébés ( Banque mondiale, 1993 ).

Le sida ne se propage pas accidentellement d’une personne à une autre. On ne contracte pas le sida en embrassant une autre personne ou en la serrant dans ses bras, en portant ses vêtements ou en mangeant dans le même plat, ni si elle tousse ou éternue. Le VIH peut vivre dans l’organisme humain pendant des années avant qu’apparaissent les symptômes du sida. Il faut en moyenne entre six et dix ans pour que les symptômes du sida se manifestent chez une personne adulte ( Banque mondiale, 1993 ).

Le sida est un syndrome où le système immunitaire de l’organisme perd tout contrôle ( Usher, 1992 ). Le sida provoque un affaiblissement du système de défense naturelle qui réglemente habituellement l’organisme. Il provoque la maladie en diminuant la résistance dont le corps a besoin pour combattre d’autres infections, ce qui peut avoir des conséquences fatales. L’organisme finit par mourir car, ne pouvant plus se protéger, il est vulnérable à la moindre infection. Usher ( 1992, p. 26 ) donne la description suivante :

Les personnes infectées par le virus de l’immunodéficience humaine tombent victimes de maux qu’une personne saine remarquerait à peine. Les gens qui souffrent du sida meurent de tuberculose, de cancer et de pneumonie ; ils meurent d’hémorragie interne, ils meurent parce que les blessures produites par un coup ou une chute ne se cicatrisent pas mais s’aggravent au contraire. [...] Une personne atteinte du sida peut mourir après avoir attrapé un rhume. ( Traduction libre. )

TRAITEMENT ET PRÉVENTION

Il n’y a pas de traitement efficace ni de guérison. Malgré tous les efforts actuellement déployés pour trouver un traitement, les espoirs de succès restent minces. On a fait des recherches avec des drogues antivirales comme l’azidothymidine ( AZT ), mais ces drogues sont trop chères pour la plupart des habitants des pays en développement : une année de traitement à l’AZT coûte plus de 3 000 $ ( Banque mondiale, 1993 ). Les drogues antivirales ont aussi de graves effets secondaires et tout ce qu’elles peuvent faire est de ralentir les progrès de l’infection et de prolonger un peu la vie ( do Prado, 1994 ). La plupart des traitements visent à soulager la douleur et à traiter les infections opportunistes qui affligent les personnes séropositives, comme la tuberculose, la diarrhée et la candidose.

Les chercheurs ne doivent pas perdre de vue que tout vaccin proposé doit pouvoir être utilisé dans les pays en développement. Un vaccin basé sur les souches de VIH courantes en Europe et aux États-Unis n’aurait qu’une utilisation limitée dans les pays du Sud. De plus, pour être efficace, un vaccin devra être facile à distribuer et d’un prix abordable pour tous.

Actuellement, en l’absence d’un traitement définitif pour le sida, la prévention est le seul moyen de lutter contre la propagation par transmission du VIH. Les principales méthodes de prévention sont les suivantes :

Image la diffusion d’informations sur la façon d’éviter l’infection ( p. ex. réduire le nombre des partenaires sexuels, modifier les comportements sexuels à risque élevé ) ;

Image la promotion du préservatif masculin en latex qui est efficace pour prévenir la transmission du VIH s’il est utilisé régulièrement et correctement ;

Image le traitement des autres MTS ;

Image la réduction de la transmission du virus par le sang.

TRANSMISSION DES MTS ET DU VIH

Le VIH et le sida ayant mobilisé l’attention mondiale ces dernières années, les autres maladies transmises surtout par contact sexuel ont été quelque peu négligées. Les maladies transmises sexuellement ( MTS ) sont des infections extrêmement communes : d’après une estimation effectuée en 1990 par L’OMS, il y a plus de 250 millions de nouveaux cas chaque année dans le monde. Les facteurs suivants augmentent le risque de contracter une MTS : l’âge lors des premiers rapports sexuels ( des rapports précoces augmentent le nombre d’années d’activité sexuelle et la probabilité d’exposition à de nombreux partenaires ), les partenaires multiples ou une relation avec une ou un partenaire qui a des antécédents de partenaires multiples, et l’absence d’une protection appropriée ( CRNTR, 1993 ).

Le système de reproduction féminin semble être particulièrement vulnérable aux organismes transmis dans le cadre des relations sexuelles. La transmission de l’homme à la femme de certaines MTS est au moins de 15 % plus élevée que la transmission de la femme à l’homme ( OMS et PNUD, 1994 ).

Les MTS ont des conséquences graves et souvent irréversibles dont les victimes sont surtout des femmes. Les MTS non traitées chez les femmes peuvent provoquer des salpingites aiguës, la stérilité, un risque accru de grossesse ectopique, des avortements spontanés et des mortinatalités ainsi que des infections aiguës et chroniques chez les bébés nés de mère infectée ( CRNTR, 1993 ).

Il est également démontré que la présence des MTS augmente de beaucoup la probabilité de transmission du VIH. En fait, les personnes atteintes d’une MTS sont de deux à neuf fois plus susceptibles d’être infectées par le virus du sida que celles qui ne le sont pas ( Population Reports, 1990 ). En 1991, 54 % des patients des deux sexes atteints d’une MTS dans une clinique de dépistage de ces maladies à l’hôpital universitaire de Zambie, de même que 60 % des patients des deux sexes également atteints d’une MTS dans un centre de santé urbain de Kariba, au Zimbabwe, ont été trouvées séropositives. Près d’un tiers des patientes et patients d’une clinique de dépistage des MTS à Bombay, en Inde, étaient séropositifs en 1991 ( Institut Panos, 1992 ).

La transmission du VIH est facilitée par les lésions et inflammations génitales associées aux MTS. La probabilité de transmission du VIH est particulièrement prononcée en présence d’un ulcère génital ( Germain, 1991 ; Bassett et Mhloyi, 1993 ) bien qu’il y ait de plus en plus de preuves que les cas sans ulcération puissent également accroître la probabilité de transmission du VIH.

À cause du rôle des MTS dans la transmission du sida, beaucoup d’organisations et d’experts internationaux ont insisté sur la nécessité d’enrayer les infections associées aux MTS ( Banque mondiale, 1993 ; Lwihula, 1994 ). On continue cependant à sous-estimer l’importance des MTS comme cofacteurs de la transmission du VIH, particulièrement pour les femmes ( Dixon-Mueller et Wasserheit, 1991 ). Les femmes voient souvent les pertes vaginales chroniques comme « un problème féminin normal » associé à leur vie intime, l’un des nombreux désagréments « naturels » associés à la condition féminine ( Guimarães, 1994 ; Pesce, 1994 ; Vlassoff, 1994 ).

Au sujet des pertes vaginales, les femmes ne reçoivent souvent que peu ou pas d’informations sur la genèse de la maladie, la façon dont elle est transmise et dont on peut la prévenir. La plupart des femmes qui en sont atteintes sont convaincues que ces pertes font partie intégrante de la condition féminine et qu’elles sont condamnées à en souffrir toute leur vie, surtout si elles sont actives sexuellement.

— Leda Pesce, Mouvement Paulina Luisi, Melo-Cerro Largo ( Uruguay )

Les MTS restent souvent non détectées et donc non traitées chez les femmes ( Mhloyi et Mhloyi, 1994 ; Ngwenya, 1994 ). Il arrive quelquefois que les médecins ne savent pas différencier des pertes normales de celles qui sont anormales. Alors que la plupart des MTS causent des symptômes douloureux chez les hommes, les femmes ont davantage tendance à entretenir des infections asymptomatiques pendant des périodes de temps prolongées — étant entendu que 50 % des femmes infectées d’une MTS n’ont aucun symptôme de quelque nature que ce soit ( Nowak, 1995 ). Ceci a de sérieuses conséquences sur la santé et le bien-être des femmes et augmente la vulnérabilité à l’infection par le VIH ( Standing et Kisekka, 1989 ).

On a démontré que la présence de maladies transmises sexuellement accroît le risque d’infection par le VIN. Chez les femmes, les symptômes d’une MTS sont souvent moins apparents que chez les hommes. Les Mrs chez les femmes restent souvent non détectées et donc non traitées, ce qui provoque une vulnérabilité accrue à l’infection par le VIH.

— Anna Strebel, University of the Cape, Belleville ( Afrique du Sud )

L’attention accordée actuellement au sida ne devrait pas avoir pour effet de marginaliser ou de négliger les autres MTS. Une proportion notable de la population, particulièrement parmi les jeunes filles et les jeunes garçons, est encore mal renseignée sur les MTS. Les programmes d’éducation doivent insister sur le lien entre les MTS et l’infection par le VIH et renseigner les femmes et les hommes, et les jeunes des deux sexes, sur la façon d’éviter les MTS et d’en reconnaître les symptômes ; il faut leur expliquer, le cas échéant, comment et où chercher à se faire soigner. Il faut surmonter les restrictions qui existent dans certaines sociétés et qui empêchent les adolescents, particulièrement les jeunes femmes, d’avoir accès à des informations sur la sexualité, la contraception et la prévention des maladies ( Pino et al., 1994 ).

L’ÉPIDÉMIE DE SIDA ET LES FEMMES

L’épidémie de sida a eu des conséquences particulièrement dures pour les femmes des pays en développement. Parce que celles-ci sont habituellement les premières pourvoyeuses de soins dans la famille, la présence d’une personne malade à la maison signifie souvent qu’elles doivent assumer un fardeau supplémentaire ( Wilson, 1993 ). Les femmes doivent s’occuper des membres infectés de la famille en plus des tâches substantielles qu’elles remplissent à la maison et dans le monde du travail. Danziger ( 1994, p. 913 ) a noté que :

À mesure que le nombre de personnes atteintes du sida augmente dans la famille et que l’on y accueille un nombre croissant d’orphelins et d’autres personnes à charge, la femme responsable de la famille et les autres femmes qui l’entourent doivent passer de plus en plus de temps à dispenser des soins. ( Traduction libre. )

Les femmes doivent aussi parfois se charger des activités des membres malades de la famille, ce qui signifie que leur journée de travail devient plus longue et leur charge plus lourde, et que certaines de leurs propres occupations doivent être remises à plus tard ( Durana, 1994 ). L’énorme fardeau que représentent pour les femmes les soins requis par l’épidémie de sida forcera beaucoup d’entre elles à la longue à négliger certaines de leurs responsabilités, y compris leur santé et leur bien-être personnel ( Danziger, 1994 ). Il faut apporter de toute urgence un soutien et des ressources aux personnes qui dispensent des soins, officiellement et non officiellement, aux malades qui souffrent et meurent du sida.

Beaucoup de victimes du sida sont des chefs de famille, ce qui a des conséquences désastreuses pour ceux qui les entourent. En Ouganda, on trouve l’incidence la plus élevée de cas de sida parmi les adultes entre 16 et 42 ans ( Wawer, 1991 ), soit parmi les membres les plus productifs de la société. Lorsque tombe malade la personne qui ramène l’argent à la maison, l’homme le plus souvent, cela signifie que la famille perd la capacité de travail de cette personne ainsi que le revenu que cela rapportait ( Adeokun, 1994 ; Tsikata, 1994 ).

Quand une femme contracte une maladie associée au VIH, il lui devient difficile, voire impossible, de s’acquitter de ses responsabilités. Les conséquences sont particulièrement tragiques dans les cas où la femme est chef de famille et doit subvenir quotidiennement aux besoins des personnes à sa charge. Pour les familles qui dépendent des femmes pour l’entretien des cultures de subsistance, par exemple, cela signifie souvent une réduction radicale des aliments disponibles pour la maisonnée ( Danziger, 1994 ). Dans certains cas, l’agricultrice peut être remplacée par un des enfants plus âgés, particulièrement une fille, que l’on retire de l’école à cette fin.

De plus, lorsqu’une personne de la famille contracte le sida, la parenté peut se retourner contre la femme. Certains peuvent l’accuser d’être la cause de l’infection et la traiter de façon cruelle, même si elle n’est nullement responsable de la maladie. Si une femme est séropositive, on la soupçonne souvent d’avoir eu des partenaires multiples ou de s’être adonnée à la prostitution, en d’autres termes, d’être une « mauvaise femme » ( OMS et PUND, 1994 ). Elle peut être renvoyée dans la maison de ses parents pour alléger le fardeau du foyer marital et se voir refuser la garde de ses enfants. Les répercussions peuvent être terribles si on peut effectivement faire remonter sa maladie à une occupation antérieure comme travailleuse sexuelle ( Agyeman, 1992 ; Anarfi, 1992 ).

Les femmes séropositives peuvent être traitées avec violence ou abandonnées par leur mari ( Danziger, 1994 ). Hamblin et Reid ( 1991 ) ont observé que les membres de la famille encouragent souvent un homme qui semble en bonne santé à quitter sa femme si elle a le sida et à en trouver une autre, sans se rendre compte qu’il risque de transmettre l’infection à l’autre femme.

Dons certains cas de femmes séropositives [qui ont une relation avec des hommes non infectés], la famille des hommes a fait directement pression sur eux pour qu’ils abandonnent leur partenaire.

— Rafael Garcia, Universidad Autónoma de Santo Domingo, Saint-Domingue ( République dominicaine )

Dans les régions du monde qui ont été le plus affectées par le sida, la succession rapide des décès des adultes a provoqué l’effondrement total des familles. Ces tragédies ont laissé derrière elles un grand nombre d’orphelins et d’enfants destitués ( Adeokun, 1994 ) qui sont restés à la charge de la génération plus âgée. L’inégalité entre les sexes peut alors donner lieu à un traitement différentiel suivant que les orphelins sont des filles ou des garçons : si les personnes qui ont la garde des enfants n’ont pas les moyens de les envoyer tous à l’école, les orphelines se trouveront probablement désavantagées ; les grands-parents gardent aussi parfois les filles plus âgées à la maison pour aider, même s’ils disposent de l’argent nécessaire pour les envoyer à l’école ( De Bruyn, 1992 ).

Des traditions culturelles peuvent exacerber encore davantage les terribles effets de l’épidémie de sida. Dans certaines sociétés patriarcales, quand un homme meurt, ses biens ne deviennent pas la propriété de son épouse. Outre la souffrance morale associée au décès, cette perte crée d’énormes difficultés pour les survivants ( Adeokun, 19942 ). Par ailleurs, même lorsque les lois sur l’héritage soutiennent les droits de la femme à la propriété des biens de son mari, les pratiques coutumières peuvent forcer les femmes à concéder leur héritage à la famille de leur défunt mari ( Danziger, 1994 ).

2 Voir S. Manneschmidt, « AIDS programs in Uganda : What lessons can be learned for Nepali women ? », texte inédit soumis au concours du CRDI sur les maladies tropicales en 1994–1995.

II faut prendre les initiatives de politique nécessaires pour modifier des traditions sociales et légales nuisibles comme l’injustice des systèmes d’héritage. ll faut que les gouvernements cessent de faire des discours sur l’égalité entre les sexes et effectuent les modifications légales nécessaires pour mettre fin aux pratiques traditionnelles qui nient de façon aussi flagrante l’égalité entre les hommes et les femmes.

— Lawrence A. Adeokun, Université Makerere, Kampala ( Ouganda )

LA TRANSMISSION DU SIDA
PARMI LES FEMMES

Facteurs biologiques

Il devient de plus en plus évident que les femmes sont biologiquement plus susceptibles que les hommes de contracter le VIH lors des relations hétérosexuelles ( Mantell et al, 1988 ; Rodin et Ickovics, 1990 ; PNUD, 1992 ; Adeokun, 1994 ). L’OMS et le PNUD ont rapporté que les résultats des études effectuées dans de nombreux pays indiquent que la transmission du VIH de l’homme à la femme semble être de deux à quatre fois plus élevée que la transmission de la femme à l’homme ( OMS et PNUD, 1994 ).

Il y a un certain nombre d’aspects du système de reproduction féminin qui le rendent plus favorable à la transmission du VIH que l’anatomie masculine : la concentration du VIH est plus élevée dans le sperme que dans les sécrétions vaginales ; le vagin est plus vulnérable aux infections que le pénis ; anatomiquement, lors des relations sexuelles sans protection, ce sont les femmes qui sont dépositaires du sperme ( do Prado, 1994 ; Pesce, 1994 ). Le fait que la prévalence de l’infection par le VIH soit plus élevée chez les jeunes femmes de 15 à 25 ans ( et atteigne son point culminant chez les hommes cinq à dix ans plus tard, dans le groupe des 25 à 35 ans ) a amené certains analystes à suggérer que la surface intacte mais immature des voies génitales des jeunes femmes est une barrière moins efficace contre le VIH que les voies génitales adultes des femmes plus âgées ( PNUD, 1992 ). De plus, les sécrétions de mucus sont moindres chez les femmes jeunes et postménopausiques et ne contribuent pas autant à minimiser l’irritation et la rupture des membranes génitales, ce qui peut faciliter la pénétration du virus ( PNUD, 1992 ; do Prado, 1994 ; OMS et PNUD, 1994 ; Pesce, 1994 ). Les MTS et les infections gynécologiques rendent les femmes particulièrement vulnérables au VIH et au sida ( do Prado, 1994 ).

Le VIH ne semble pas progresser plus rapidement chez les femmes enceintes que chez celles qui ne le sont pas, au moins aux étapes initiales de l’infection ( Strebel, 1994 ). La grossesse, en l’absence de symptômes associés au VIH, n’a pas d’influence marquée sur la progression de la maladie ( Carpenter et al., 1991 ; Hankins et Handley, 1992 ). Cependant, à cause de leurs fonctions de procréation ( qui entraînent grossesses, avortements et accouchements ), les femmes courent un risque notable de recevoir des transfusions sanguines et autres produits sanguins qui, en l’absence de procédures adéquates de dépistage, risquent d’être contaminés par le VIH ( Pesce, 1994 ).

Les femmes ont souvent un pronostic plus pessimiste lorsqu’elles sont infectées et elles meurent plus tôt que les hommes ( Jones et Catalan, 1989 ; Berer et Ray, 1993 ). Ceci est peut-être lié au fait que la progression du sida est associée à l’état général de santé et d’immunité de la personne avant l’infection, et que les femmes ont tendance à avoir un mauvais état de santé et de nutrition ( Adeokun, 1994 ). La malnutrition non seulement ralentit le processus de guérison et déprime le système immunitaire mais inhibe également la production de mucus ( PNUD, 1992 ).

Il est difficile de déterminer si le pronostic plus pessimiste pour les femmes que pour les hommes est lié à des différences biologiques ou s’il est associé au fait que les femmes ont tendance à être diagnostiquées et à se faire soigner plus tard que les hommes ( Hankins et Handley, 1992 ). Une récente étude américaine, dans laquelle 768 femmes et 3 779 hommes ont été suivis pendant une période de 15 mois dans 17 centres de santé répartis à travers les États-Unis, a constaté que les femmes qui souffrent du sida avaient des taux de survie inférieurs à ceux des hommes et étaient particulièrement vulnérables à la pneumonie, l’une des maladies les plus meurtrières des victimes infectées. Les auteurs des recherches ont déclaré que le risque accru de pneumonie associée au sida parmi les femmes pourrait être lié à leur manque relatif d’accès aux soins de santé, à leur situation socio-économique inférieure et au fait qu’elles bénéficient d’un moindre soutien social que les hommes infectés ( Melnick et al., 1994 ).

Il est urgent de faire des recherches pour déterminer s’il y a une base physiologique à la susceptibilité des femmes à l’infection. Les recherches devraient examiner, entre autres, si la période plus courte entre le diagnostic et le décès chez les femmes, par comparaison avec les hommes, relève de facteurs comme le retard de diagnostic ou le manque de connaissances au sujet des premiers symptômes de l’infection par le VIH, ou si elle indique effectivement une progression plus rapide de la maladie chez les femmes ( Paolisso et Leslie, 1995 ).

Idées fausses sur le sida

Manque d’informations complètes et de compréhension

Beaucoup de chercheurs ont fait remarquer que, bien qu’il semble y avoir une sensibilisation générale aux messages de base associés au sida, la maladie est souvent mal comprise dans ses détails ( Adeokun, 1994 ; Guimarães, 1994 ; Mhloyi et Mhloyi, 1994 ; Pinel, 1994 ; Kuyyakonond, 1995 ). Adeokun ( 1994 ) et Mhloyi et Mhloyi ( 1994 ) ont indiqué que, dans leurs pays respectifs, l’Ouganda et le Zimbabwe, presque 100 % des gens étaient au courant du sida et comprenaient le rôle essentiel du préservatif comme méthode de prévention de la transmission du virus. Mhloyi et Mhloyi ont déclaré qu’il n’y avait pas de différences socio-culturelles marquées dans la sensibilisation au sida et qu’on trouvait une compréhension de base chez les personnes des deux sexes, dans tous les groupes d’âge et dans tous les types de relations. Cependant, les deux chercheuses ont constaté que, malgré le bombardement d’informations de base auquel les gens ont été soumis, ils continuaient à être mal informés. Par exemple, Mhloyi et Mhloyi ont constaté qu’environ 36 % des répondants des deux sexes ne savaient pas la différence entre l’infection par le VIH et le sida, et que 32 % ont déclaré qu’il n’y avait pas de différence. Seulement 13 % ont dit qu’une personne séropositive était en meilleure santé qu’une personne atteinte du sida (tableau 1 ).

Les résultats de l’étude de Mhloyi et Mhloyi révèlent aussi qu’il y avait un grand nombre d’idées fausses sur les causes du sida. Seulement 19 % des personnes interrogées comprenaient que le sida était causé par le VIH et seulement 11 % ont indiqué les partenaires sexuels multiples comme un déterminant de l’infection par le VIH. En accord avec l’opinion fréquente que les MTS sont des « maladies de femmes » et que les femmes sont des « réservoirs d’infection » ou des « vecteurs de transmission », alors que les hommes sont des victimes, la majorité des répondants pensaient que le sida était causé respectivement par les femmes, les prostituées et les soldats (tableau 2).

Tableau 1. Enquête : « En quoi les personnes séropositives et celles qui souffrent du sida diffèrent-elles?»

Réponses

Distribution (%)

Ne connaît pas la différence

35,9

ll n’y a pas de différence

32,1

Les séropositifs sont en meilleure santé

13,1

Ne sait pas très bien

3,4

Les séropositifs peuvent être guéris

0,9

Autre

2,1

Source : Mhloyi et Mhloyi ( 1994 ).

 

Tableau 2. Enquête : « Quelles sont les causes du sida ? »

Réponse

Distribution (%)

Femmes

21,4

VIH

18,9

Prostituées

16,8

Soldats

11,6

Nombreux partenaires sexuels

11,0

Autre

10,5

Hommes

5,9

Camionneurs

3,8

Source : Mhloyi et Mhloyi ( 1994 ).

Un sondage effectué en Tanzanie a révélé que 15 % des personnes interrogées pensaient que le sida était une punition de Dieu impossible à empêcher ; de 10 à 12 % croyaient que l’on pouvait contracter le sida en touchant une partie du corps ou en portant les vêtements d’une personne qui était morte du sida ; 25 % pensaient que le sida pouvait être transmis par les moustiques et autres insectes piqeurs ; 20 % étaient d’avis que la maladie ne frappait que les prostituées, les serveuses de bar et les camionneurs effectuant de longues distances ( Ndejembi, 1993 ).

Dans l’étude de Mhloyi et Mhloyi ( 1994 ), on notait une meilleure compréhension du sida, avec 53 % des répondants identifiant la perte de poids et 38 % la maladie continue comme symptômes de la maladie, alors que 2 % seulement ne connaissaient aucun symptôme.

Les résultats correspondent à la croyance culturelle que les maladies transmises sexuellement sont des « maladies de femmes » et que les femmes sont des vecteurs alors que les hommes sont des victimes. L’association du sida avec des groupes sexuels « à risque élevé » est une opinion qui sert à créer une distance entre l’infection par le VIH et la population générale.

— Gilford D. Mhloyi et Marvellous M. Mhloyi, Université du Zimbabwe, Harare ( Zimbabwe )

Il arrive que certaines personnes agissent, à leur propre détriment, à partir d’informations incomplètes et insuffisantes. Un homme de 30 ans qui prétendait en savoir beaucoup sur le sida déclarait que, depuis qu’il « comprenait mieux le sida », il ne sortait qu’avec des filles plus jeunes ; finies les prostituées ! ( Mhloyi et Mhloyi, 1994 ). Certains hommes ne savaient pas que l’infection par le VIH est suivie par une période de latence. Ils pensaient que, de nos jours, il faut veiller à bien choisir ses partenaires et déclaraient qu’ils prenaient des précautions en choisissant une femme qui, de toute évidence, n’a pas le sida ( Mhloyi et Mhloyi, 1994 ).

Une recherche sur les femmes des régions rurales du Nord-Est de la Thaïlande a également conclu que les femmes ne comprenaient pas qu’il y avait une période de latence entre le moment de l’infection et le test séropositif indiquant la présence du VIH. Certaines femmes estimaient que leur mari ne courait pas de risque parce qu’il avait subi le test du sida avant de revenir à la maison à la suite d’une absence prolongée. D’autres femmes ont déclaré qu’elles utilisaient des préservatifs pendant un certain temps après que leur mari ait eu des rapports avec des prostituées ( Kuyyakonond, 1995 ). Dans la même étude, certaines femmes affirmaient savoir qu’elles-mêmes et leur mari n’étaient pas infectés parce qu’ils avaient subi le test du sida dans le passé, indiquant par là qu’elles ne comprenaient pas que les résultats d’une ancienne analyse de sang puissent ne plus être valides.

Les femmes qui utilisaient des préservatifs avec leur mari ont déclaré qu’elles ne s’en servaient que pendant de brèves périodes directement après les rencontres de leur mari avec des prostituées ( « jusqu’à ce que le danger soit passé » ). Les discussions ont révélé que ces femmes ne voyaient pas le risque de transmission du VIH comme une possibilité continue mais plutôt comme quelque chose de transitoire et de limité à des périodes spécifiques ( p. ex. suite aux rapports du mari avec une prostituée ou quand les symptômes devenaient « vraiment graves » ).

— Thicumporn Kuyyakonond, Centre du Nord-Est pour la prévention et le traitement du sida. Université Khon Kaen ( Thaïlande )

Une recherche effectuée en République dominicaine a conclu que certains hommes, pensant que le risque du sida était lié aux travailleuses sexuelles, évitaient les relations sexuelles avec celles-ci ou utilisaient des préservatifs lorsqu’ils pensaient qu’ils avaient affaire à des « filles de la rue ». Cependant, avec d’autres femmes, comme les serveuses de bar moins professionnelles en la matière, ils prenaient moins de précautions ( Garcia et al., 1994 ). Morris et al. ( 1994 ) a indiqué que les hommes utilisaient des préservatifs nettement moins souvent avec leurs partenaires sexuelles commerciales régulières ( visites multiples ) qu’avec des partenaires d’occasion ( visite unique ). Ce sont là de parfaits exemples du fait que des connaissances insuffisantes ne valent guère mieux que l’ignorance. Il est évident que les hommes et les femmes ont besoin d’une éducation de meilleure qualité pour dissiper les mythes et redresser l’insuffisance des connaissances sur le sida.

Les groupes « à risque élevé »

L’association du sida avec des groupes à risque élevé, renforcée par les campagnes d’éducation et les médias, a eu pour effet de créer une distance entre l’infection par le VIH et la population générale ( Usher, 1992 ). À l’origine, on pensait que les personnes frappées par le sida étaient surtout les hommes homosexuels, les prostituées et les utilisateurs, hommes ou femmes, de drogues administrées par injection qui partagent leurs aiguilles. Bien que le profil de transmission du sida se soit modifié de façon considérable, on continue à penser à tort, dans beaucoup de sociétés, que le sida est « un fléau gay » ( Guimarães, 1994 ), une « peste gay » ( Pinel, 1994 ), une « peste rose » ( Chauvin, 1993 ) ou la punition divine depuis longtemps attendue ( Pinel, 1994 ) qui aura pour effet de supprimer les toxicomanes, les prostituées et les homosexuels. Au Brésil, par exemple, l’archétype du patient atteint du sida est l’homosexuel blanc et riche qui travaille dans le domaine de la mode, des spectacles ou des arts. La langue reflète cette perception : le terme aidético utilisé pour désigner une personne atteinte du sida suppose un comportement homosexuel ( Guimarães, 1994 ). La tragédie est que beaucoup de gens, qui se battent quotidiennement pour mener une vie apparemment « normale », ne s’identifient pas aux campagnes médiatiques axées sur les groupes « anormaux » ou « à risque élevé » et pensent qu’ils ne courent aucun danger ( Guimarães, 1994 ; Pinel, 1994 ).

Quand on leur a demandé qui risquait de contracter le virus du sida, les femmes ont répondu le plus souvent que les personnes à risque étaient les prostituées et les hommes qui ont des rapports sexuels avec elles. ll faut noter que très peu de femmes ont identifié les conjointes de ces hommes comme constituant un groupe à risque.

— Thicumporn Kuyyakonond, Centre du Nord-Est pour la prévention et le traitement du sida, Université Khon Kaen ( Thaïlande )

Du fait de la perception que le sida est en grande partie une maladie d’hommes, les femmes qui ne sont pas des prostituées risquent de ne pas reconnaître qu’elles courent le risque d’être infectées. D’après Guimarães ( 1994 ), les femmes interrogées dans le cadre de son étude au Brésil pensaient souvent que leur principal risque de contracter le sida venait de l’exposition à du sang infecté par le VIH ou à des objets qui avaient été en contact avec du sang infecté ( fraise dentaire, seringue, etc. ). Guimarães avance l’opinion que, à cause de l’accent mis à tort sur les « boucs émissaires » du sida, les risques que courent les femmes parmi les gens « normaux » ont été négligés. Elle soutient que, si on veut sérieusement enrayer l’épidémie de sida, il faut chercher à mieux comprendre les relations entre les sexes parmi les gens « normaux » plutôt que de se concentrer seulement sur certains groupes dits « anormaux ».

« Pas mon homme ! » ou l’incapacité
d’admettre l’infidélité

L’un des problèmes récurrents et particulièrement inquiétants soulevés par un grand nombre de chercheurs concernait le fait que, en dépit des preuves du contraire, les femmes mariées, ou celles qui avaient une relation stable, ne pensaient pas qu’elles couraient le risque d’être infectées par le VIH. Beaucoup de femmes ont du mal à admettre que leur mari ou leur conjoint puisse avoir des rapports sexuels en dehors de leur relation stable et les expose au risque du VIH ( do Prado, 1994 ; Guimarães, 1994 ; Pesce, 1994 ; Mhloyi et Mhloyi, 1994 ). Le fait que les femmes soient incapables de voir leur conjoint comme une source d’infection possible réduit de façon considérable les possibilités qu’elles prennent des mesures préventives ( Pesce, 1994 ).

Une femme du Zimbabwe âgée de 35 ans a déclaré que « le sida est le problème des hommes qui passent du temps avec des prostituées, ce n’est pas notre problème » ( Mhloyi et Mhloyi, 1994 ). De même, dans une étude effectuée dans les régions rurales du Nord-Est de la Thaïlande, 77 % des femmes à qui l’on a demandé qui présentait un risque de contracter la maladie ont déclaré que l’on courait un risque si l’on avait des rapports sexuels avec des prostituées. Il est à noter que très peu de femmes ( 14,8 % ) identifiaient les conjointes de ces hommes comme un groupe à risque ( Kuyyakonond, 1995 ). Dans la même étude effectuée en Thaïlande, les femmes qui disaient que leur mari « ne voyageait pas » estimaient qu’elles ne couraient pas de risque. La croyance générale était que c’était lors des voyages loin de la maison que les hommes fréquentaient les prostituées ( Kuyyakonond, 1995 ).

Dans la recherche de Pesce ( 1994 ) sur des femmes pauvres en Uruguay et en Argentine, presque toutes les femmes interrogées ont reconnu qu’elles ne prenaient pas de précautions lors des relations sexuelles. La plupart des femmes avaient tendance à penser que c’étaient les autres femmes, et pas elles, qui étaient exposées au risque du sida, et elles étaient incapables d’associer leur mari ou leur partenaire aux « hommes qui couchent à droite et à gauche ». L’une des méthodes courantes de prévention du sida citée par les femmes dans une étude brésilienne était liée au choix et à l’évaluation subjective du partenaire. Une femme de la clinique de planification familiale BENFAM, au Brésil, interrogée sur le risque que son partenaire stable lui transmette le sida, a répondu : « Mais je le connais ! » ( Guimarães, 1994 ). En même temps, les patientes atteintes du VIH ou du sida à l’hôpital universitaire Gaffrée déclaraient combien elles avaient été trompées par leur partenaire, combien elles avaient peu idée de la vie sexuelle qu’il menait à l’extérieur du foyer et combien elles s’étaient senties trahies ( Guimarães, 1994 ).

Certaines femmes semblent supposer que le mariage ou le fait d’être amoureux les protège de cette maladie mortelle ( Pesce, 1994 ). Il faut faire comprendre aux femmes qu’en dépit de l’amour et du mariage, beaucoup d’hommes ont des rapports sexuels en dehors de leur relation stable et peuvent exposer leur partenaire au risque d’infection par le VIH ( do Prado, 1994 ).

La culture brésilienne entretient un fantasme romantique selon lequel deux personnes se rencontrent, tombent amoureuses et deviennent immunisées contre tous les dangers. L’amour est tout-puissant, hommes et femmes sont vus comme des êtres imparfaits sans le complément de l’autre. L’activité sexuelle est validée par l’amour et il n’y a pas de place pour une princesse ou un prince infecté, et nul désir de rompre la spontanéité avec le latex d’un préservatif. Après tout, l’amour justifie tout, même la mort.

— Arletty Pinel, GENOS, Internacional. São Paulo ( Brésil )

Facteurs économiques

Vie de femmes pauvres

À cause de divers facteurs socio-économiques, certaines femmes courent davantage de risques d’être exposées à l’infection par le VIH que d’autres. On reconnaît de plus en plus que les facteurs de classe, tout comme les facteurs de race, viennent s’ajouter à la différence sexuelle pour renforcer la complexité des relations de pouvoir ( Ramazanoglu, 1989 ; Stamp, 1989 ). Aux États-Unis, près de la moitié des gens qui ont été diagnostiqués comme atteints du sida sont des Afro-Américains et des Latino-Américains des deux sexes qui habitent les quartiers pauvres des villes ; les femmes pauvres membres des minorités raciales sont régulièrement plus frappées par le sida. Aux États-Unis, en particulier, le sida est de façon disproportionnée une maladie des défavorisés, une maladie des gens méprisés et condamnés par la société, une maladie des exclus sociaux et des pauvres ( Singer, 1994 ).

De même, au Brésil, un grand nombre de jeunes femmes pauvres, classées comme noires ou mulâtres et en grande partie analphabètes, ont été infectées par des partenaires séropositifs ( Guimarães, 1994 ). En Ontario, au Canada, les adolescents actifs sexuellement en provenance de familles à faible revenu ont beaucoup moins tendance à utiliser des préservatifs que les adolescents qui viennent de familles à revenu plus élevé ( Institut canadien de la santé infantile, 1994 ). D’une façon générale, les données des deux dernières décennies indiquent que les groupes de gens pauvres et sans pouvoir ( quel que soit le lieu du globe où ils se trouvent ) sont plus vulnérables aux ravages du sida ( Kambon, 1995 ).

Les femmes pauvres ont tendance à avoir moins de facilités d’accès à l’éducation et aux informations sur la santé. La pauvreté contribue à la malnutrition et à la vulnérabilité à l’infection. La mauvaise alimentation, le stress chronique et les maladies préalables peuvent compromettre le système immunitaire et accroître la susceptibilité au sida ( Singer, 1994 ). Les femmes qui vivent dans la pauvreté ont également moins tendance à recevoir un diagnostic précoce d’infection par le VIH et ont souvent un accès limité aux soins de santé et à un traitement adéquat ( Strebel, 1992 ; Guimarães, 1994 ).

Strebel ( 1992 ) a fait remarquer que les femmes n’ont souvent pas le pouvoir et le statut social qui donnent accès aux ressources économiques. À cause de leur situation différentielle dans la société, les femmes sont généralement plus pauvres que les hommes et dépendent souvent d’eux économiquement ( Campbell, 1990 ; Ankrah, 1991 ; Ulin, 1992 ). Cette dépendance économique compromet leur aptitude à exiger des rapports sexuels sans risque. À l’opposé, les femmes indépendantes économiquement ont davantage tendance à exercer un contrôle sur les différents aspects de leur vie sexuelle et de leurs fonctions de reproduction. D’après un récent document de L’OMS, ce n’est pas une coïncidence si les pays où le virus se propage actuellement le plus rapidement parmi les hétérosexuels sont généralement ceux où le statut des femmes est inférieur. Partout où la discrimination entre les sexes laisse les femmes sous-éduquées, sans compétences, sans amour-propre, sans droit de posséder la terre ou d’autres ressources essentielles, elle les laisse particulièrement vulnérables à l’infection par le VIH ( OMS, 1994a ).

Les femmes qui ont un niveau plus élevé d’autonomie sont davantage en mesure de refuser d’avoir des rapports sexuels avec un mari séropositif.

— Lawrence A. Adeokun. Université Makerere. Kampala ( Ouganda )

De plus, les femmes pauvres, préoccupées par leur survie économique, risquent de ne pas changer leurs comportements habituels malgré les messages qui les invitent à avoir des rapports sexuels moins risqués. Les statistiques sur le sida ne les affectent guère : « Statistiquement et dans leur perception subjective du monde, les femmes pauvres courent davantage de risques de mourir de faim, d’un avortement raté ou d’autres complications de santé que du sida » ( Goldstein, 1994, p. 119 ).

Au cours des 15 à 20 dernières années, le Brésil a dû faire face à une crise sociale, économique et politique. Ceci a eu un certain nombre de répercussions néfastes, notamment des taux d’inflation élevés, des taux de chômage critiques, des mises à pied constontes, une baisse des salaires, des soins de santé insuffisants, des maladies endémiques chroniques et une montée de la violence urbaine. Tout cela pose des problèmes de survie immédiats qui sont habituellement considérés plus urgents que le risque plus éloigné de l’infection par le VIH.

— Carmen Dora Guimarães, Universidade Federal do Rio de Janeiro ( Brésil )

Le mode de vie et l’emploi

Le mode de vie et l’emploi, qui sont la conséquence des impératifs économiques, peuvent avoir un effet sur les taux de transmission du VIH. Au Zimbabwe, par exemple, il y a une économie double avec des centres industriels urbanisés, d’une part, et de vastes communautés agricoles, de l’autre, qui sont reliés par une infrastructure de communication bien développée ( Mhloyi et Mhloyi, 1994 ). Les membres de la famille sont souvent séparés pour des raisons économiques du fait que les hommes se rendent dans les centres urbains pour trouver du travail tandis que les femmes restent dans les régions rurales. Les couples peuvent donc vivre séparés pendant une grande partie des années où ils sont sexuellement actifs et capables de reproduction. Loin de leur partenaire, les hommes prennent souvent une seconde femme ou une amie, ou fréquentent les prostituées. Le cercle vicieux se met en place lorsque les migrants rentrent chez eux en rapportant des infections avec eux ( Jacobson, 1992b ).

Il existe aussi des niveaux élevés de migration de femmes qui ont quitté leur pays pour chercher du travail. Beaucoup de femmes des Philippines ont émigré dans les pays d’Asie avoisinants, au Moyen-Orient et en Amérique du Nord pour travailler comme employées de maison. Ces femmes peuvent être victimes de violence et d’abus sexuels et donc exposées aux MTS, y compris le VIH ( Osteria, 1995 ).

La prostitution

En dépit des risques, les femmes continuent à avoir des relations sexuelles multiples, souvent pour des raisons économiques ( Adeokun, 1994 ; Lwihula, 1994 ; Strebel, 1994 ). Du fait de la position subordonnée des femmes dans la société et de leur accès limité aux ressources financières, l’exploitation commerciale de l’activité sexuelle est une source de revenu importante pour beaucoup de femmes qui se battent pour survivre avec des moyens limités

Avant toute chose, il s’agit pour les femmes de donner à manger à leurs enfants et de leur mettre un toit sur la tête, même si cela veut dire coucher avec un nouveau partenaire en raison du soutien qu’il apporte pendant le temps qu’il passe avec elle.

— Asha Kambon. Commission économique pour l’Amérique latine et les Antilles, Port of Spain ( Trinité-et-Tobago )

( Standing et Kisekka, 1989 ; Pauw, 1993 ). D’après L’OMS ( 1994a ), quand les temps sont durs, certaines femmes sont amenées à échanger leur corps pour de l’argent, de la nourriture ou un abri. Les femmes pauvres sur lesquelles les clients font pression pour avoir des rapports sexuels sans protection sont souvent moins libres d’imposer le port d’un préservatif, ce qui accroît les risques d’infection par le VIH ( Schoepf, 1988 ; Larson, 1990 ; Strebel, 1994 ).

Au Brésil, par exemple, où l’inflation et la pauvreté ne cessent d’augmenter, un nombre croissant de jeunes femmes, ainsi que des hommes, ont été poussés à participer au marché de l’activité sexuelle commerciale dans les grandes zones urbaines pour se procurer un revenu ( Guimarães, 1994 ). L’épidémie s’étend rapidement dans certains pays de l’Asie comme la Thaïlande et l’Inde, connus pour leurs antécédents de prostitution et pour être la cible du tourisme sexuel international ( Ford et Koetsawang, 1991 ; Rana, 1991 ; Seraprespamni, 1991 ). Des tests de dépistage du VIH effectués au hasard auprès de prostituées de Bombay ont accusé une croissance de près de zéro en 1986 à plus de 25 % en 1990 ( Basnet Dixit, 1990 ). Une étude récente effectuée auprès des prostituées de Falkland Road, à Bombay, a révélé qu’environ 50 % des femmes qui avaient subi le test étaient séropositives ( Manneschmidt, voir note 2 à la page 59 ).

Les femmes économiquement destituées et les mères chefs de famille monoparentale qui assument l’entière responsabilité économique des personnes à leur charge et disposent d’un revenu moindre que les familles dirigées par un homme ( Schoepf, 1988 ; Ulin, 1992 ) peuvent se tourner vers le travail sexuel ou la prostitution ( Anarfi, 1992 ). Une travailleuse sexuelle avoue qu’elle fait cela parce qu’elle a deux enfants et pas de mari ; qu’est-ce qu’elle peut faire d’autre, demande-t-elle ? Ce n’est pas qu’elle aime cela, mais elle n’a pas le choix ( Bledsoe, 1990 ).

Il ne faut pas non plus oublier qu’au moins 100 millions d’enfants vivent et travaillent dans les rues des villes du monde entier. Des petites filles de diverses parties du Népal, par exemple, sont vendues par leurs parents et emmenées dans des centres urbains comme Bombay, en Inde, pour travailler comme prostituées ( Manneschmidt, voir note 2 à la page 59 ). Ces enfants vivent dans une extrême pauvreté, souffrent de malnutrition et de mauvaise santé, sont souvent victimes d’exploitation, de violence et d’abus sexuels et courent un risque élevé de contracter le VIH et d’autres maladies transmises sexuellement ( Institut Panos, 1994a ).

Quelques mises en garde

Strebel ( 1994 ) a noté que certains auteurs ont mis leurs lecteurs en garde contre une analyse simpliste du lien entre les facteurs économiques et le VIH ou le sida. La complexité des rapports entre l’économie et le VIH ou le sida peut être démontrée de maintes façons. Des analystes ont indiqué que les femmes de condition économique plus élevée, qui ont parfois un mari riche faisant beaucoup de déplacement, prêt à payer pour satisfaire sa sexualité, sont également vulnérables à l’infection par le VIH ( Larson, 1990 ; Gwede et McDermott, 1992 ).

De plus, alors que certaines femmes se retrouvent chefs de famille par suite de l’abandon de l’homme, un nombre croissant de femmes décident de rester célibataires parce qu’elles pensent que cela renforce leur situation économique ( Ramphele et Boonzaier, 1988 ; Stamp, 1989 ). D’après Strebel ( 1994 ), ces femmes peuvent être dans une meilleure position pour insister sur l’utilisation d’un préservatif.

Facteurs socioculturels

Relations sexuelles hors du mariage

Il existe un certain nombre de traditions, de contextes et de situations qui entraînent un échange des partenaires sexuels et peuvent accroître le risque d’infection par les MTS ou le VIH. Dans beaucoup de cultures, il est généralement accepté, et même attendu, que les hommes aient des partenaires sexuelles en dehors du mariage. En Thaïlande, le principal mode de transmission du VIH est l’activité sexuelle et on a constaté que les relations sexuelles des maris en dehors du mariage sont un facteur clé de la transmission du VIH à leur femme ( Pramualratana, 1995 ).

Un sondage effectué en Tanzanie a indiqué que quatre hommes sur cinq pensaient que c’était un signe de virilité pour un homme d’avoir des relations sexuelles en dehors du mariage ( Ndejembi, 1993 ). D’après Guimarães ( 1994 ), le mari ou le partenaire stable qui a des relations en dehors du mariage peut partir du principe que ce qu’il fait à l’extérieur de son foyer ne regarde que lui tant qu’il remplit le rôle qui lui prescrit de protéger le foyer et de subvenir aux besoins de la famille. L’activité sexuelle d’un homme avec d’autres femmes est souvent vue comme une expression de sa virilité.

Nous, les hommes, on ne prend pas le sida au sérieux. On est trop insouciant pour ça. C’est la nature de l’ homme, le chauvinisme masculin. Quand un homme voit une femme, il oublie le sida. Quels que soient (es problèmes, l’homme est sûr qu’il peut y faire face. Beaucoup d’hommes pensent que, si la solution est de cesser d’avoir plusieurs femmes, ils aiment mieux mourir du sida. Si on est un homme et qu’on contracte (e sido, on peut compter sur le soutien des gens. Ils disent : «C’est un mocho parce qu’il a attrapé la maladie en faisant des choses d’hommes : en faisant l’amour avec les femmes». Je croyais moi-même que ces histoires de sida était des bobards jusqu’à ce que je me retrouve avec un test séropositif.

— Homme séropositif de la République dominicaine, cité par Rafael Garcia, Universidad Autónoma de Santo Domingo. Saint-Domingue ( République dominicaine )

On a estimé qu’entre 50 et 80 % de toutes les femmes infectées en Afrique n’ont pas de partenaire autre que leur mari ( Hatcher Roberts et Law, 1994 ). Dans les sociétés officiellement polygames, les hommes peuvent justifier des relations en dehors du mariage en expliquant qu’elles pourraient aboutir à de nouveaux mariages ( Adeokun, 1994 ; Mhloyi et Mhloyi, 1994 ). Dans les sociétés où la polygamie n’existe pas ou est en déclin, les liaisons des hommes en dehors du mariage sont chose courante ( Mhloyi et Mhloyi, 1994 ). Une enquête a démontré que 75 % des hommes thaïlandais avaient fréquenté une prostituée ( Economist, 1994 ). D’autres sondages effectués en Thaïlande ont indiqué qu’environ six millions d’hommes thaïlandais fréquentent des prostituées chaque semaine et que les préservatifs ne sont pas régulièrement utilisés dans les maisons de prostitution ( Pradubmook, 1994 ).

La pratique culturelle de l’abstinence sexuelle post-partum peut aussi encourager les hommes à avoir des relations sexuelles multiples. Dans certaines sociétés, bien que l’abstinence sexuelle après la naissance d’un enfant soit proscrite pour les femmes, les hommes sont autorisés à « aller voir ailleurs » ( Mhloyi et Mhloyi, 1994 ). Les tabous sociaux et religieux qui s’opposent aux relations sexuelles entre mari et femme pendant que la femme a ses règles ou allaite peuvent aussi encourager les hommes à avoir des relations en dehors du mariage ( Jacobson, 1992b ). De même, dans toute l’Afrique subsaharienne, les guérisseurs traditionnels recommandent aux hommes infectés par des MTS d’avoir des rapports sexuels avec des vierges pour se guérir ( Jacobson, 1992b ).

Les pratiques sanctionnées par la société qui servent de justification aux hommes pour opprimer les femmes posent un problème qui doit recevoir une attention délicate mais urgente ( Ramphele et Boonzaier, 1988 ; Stamp, 1989 ; Strebel, 1994 ). Ankrah ( 1991, p. 972 ) tire la conclusion suivante :

La valeur intouchable de la culture africaine qu’est le droit légal et coutumier des hommes à un nombre illimité de partenaires, selon leur bon plaisir, doit maintenant être remise en question parce que les modes hétérosexuels de transmission du VIH font courir un risque d’infection à tous les hommes africains qui ont des rapports sexuels avec des partenaires multiples. Lorsque la culture et la tradition, y compris la polygamie, ne font plus progresser un peuple, le moment est venu de les larguer. ( Traduction libre. )

Alors que les sociétés sanctionnent généralement le fait que les hommes puissent avoir des relations sexuelles en dehors du mariage, ce n’est habituellement pas le cas pour les femmes, bien que, dans un certain nombre de sociétés, il existe des pratiques et des rituels traditionnels qui invitent les femmes à avoir des relations avec d’autres hommes que leur mari. Dans certaines régions de l’Afrique subsaharienne, après la mort d’un mari, l’un des frères du défunt peut « hériter » de sa femme. Des relations intrafamiliales peuvent être acceptées si le mari ne réussit pas à féconder son épouse. Par ailleurs, une coutume associée au « nettoyage sexuel des veuves » exige de celles-ci qu’elles aient des rapports sexuels avec un étranger. Ceci se produit traditionnellement immédiatement après la mort du mari pour empêcher l’esprit du mort de revenir hanter les vivants ( Lwihula, 1994 ). D’autres situations qui s’accompagnent de relations sexuelles hors-mariage sont la naissance de jumeaux et les mariages où la tante paternelle de la mariée peut avoir des rapports avec le mari avant cette dernière ( Balmer, 1994 ). Dans les régions où les MTS et le sida sont endémiques, ces pratiques traditionnelles, qui entraînent la formation de réseaux sexuels étendus, s’accompagnent d’un risque de transmission des MTS ou du sida ( Lwihula, 1994 ). Beaucoup de sociétés doivent maintenant faire face au dilemme qui consiste à trouver un équilibre entre, d’un côté, les exigences de la tradition et, de l’autre, l’acceptation des conseils médicaux et des technologies recommandées par les programmes de prévention des MTS et du sida.

L’association des avocates de l’Ouganda travaille actuellement à réduire, en modifiant le système légal officiel, la pratique culturelle qui veut qu’une veuve épouse le frère de son mari. La question en cause est la marginalisation perpétuelle des femmes, le fait qu’elles n’ont pas accès au droit de propriété et ne sont pas considérées comme les premières gardiennes de leurs enfants.

— Seble Dawit, consultant indépendant sur les droits internationaux de la personne, New York ( NY, É.-U, ).

Relations bisexuelles des hommes

La bisexualité masculine, qui existe dans le monde entier, pose des problèmes particuliers pour la prévention et la lutte contre la transmission du VIH. Il y a des hommes mariés qui ne s’identifient pas comme homosexuels ou bisexuels, mais qui ont juste une petite liaison avec un homme gay et infectent leur femme ( Thomson, 1994 ). La communauté bisexuelle pose plus de problèmes que la communauté hétérosexuelle en partie parce que ces hommes nient être à risque et avoir des relations homosexuelles avec d’autres hommes ( C. Jones cité dans Ortiz, 1994, p. 2 ).

Dans une grande partie de l’Amérique latine, on fait une distinction entre les activos , les hommes qui pénètrent leur partenaire au cours des rapports anals, et les pasivos, c’est-à-dire les hommes qui sont plus passifs ( Singer, 1994 ). Les activos, bien qu’ils s’adonnent à des pratiques bisexuelles, se considèrent hétérosexuels alors que les pasivos sont: jugés être homosexuels ( Carrier, 1989 ; Singer, 1994 ). Goldstein ( 1994 ) a déclaré qu’un pourcentage important d’hommes du Brésil sont sexuellement actifs à la fois avec des femmes et des hommes mais se définissent publiquement ( y compris auprès de leur partenaire féminine ) comme exclusivement hétérosexuels. En conséquence, les femmes ne sont pas au courant des pratiques bisexuelles de leur partenaire masculin ou refusent de les reconnaître.

Guimarães ( 1994 ) a étudié le problème de la bisexualité au Brésil et ses répercussions en termes de transmission du VIH aux femmes. Les statistiques officielles depuis 1982 indiquent que la bisexualité des hommes est associée à un pourcentage significatif de tous les cas de sida. En janvier 1994, 32,7 % ( 13 084 ) des cas déclarés de sida chez les hommes étaient le résultat de transmissions homosexuelles, mais les transmissions bisexuelles représentaient 16,9 % ( 6 773 ) des cas ( Guimarães, 1994 ).

Depuis 1982. les statistiques officielles du Brésil indiquent que la bisexualité masculine est responsable d’un pourcentage significatif de tous les cas déclarés de sida. Pourquoi les répercussions des relations masculines bisexuelles sur les femmes ont-elles été si gravement négligées par les spécialistes médicaux du sida ?

— Carmen Dora Guimarães, Universidade Federal do Rio de Janeiro ( Brésil )

Ces dernières années, l’augmentation de la prévalence de la transmission du VIH chez les femmes « à risque faible » ( mariées ou vivant avec un partenaire stable, âgées de 20 à 40 ans ) a donné lieu à des recherches épidémiologiques. Ces études ont révélé que beaucoup de femmes avaient, sans le savoir, des partenaires bisexuels qui étaient séropositifs ( Guimarães, 1994 ). Malgré les statistiques tenues depuis l’apparition de l’épidémie, les répercussions de la bisexualité masculine sur les femmes ont été gravement négligées par les médecins spécialistes du sida, les chercheurs et les responsables des interventions sur le sida ( Guimarães, 1994 ).

Dans l’étude effectuée par Guimarães, les femmes interrogées soupçonnaient ou mentionnaient rarement que leur partenaire pouvait s’adonner à des comportements bisexuels. Beaucoup de femmes, pensant que leur homme était macho et que les hommes macho veulent seulement des femmes, ont déclaré que leur risque de contracter le sida dépendait uniquement des rapports de leur partenaire avec d’autres femmes.

Activité sexuelle et mariage précoces

L’activité sexuelle précoce joue un rôle important dans la transmission des MTS et du sida. Dans beaucoup de pays, plus de la moitié de toutes les infections par le VIH jusqu’à maintenant ont frappé les jeunes de 15 à 24 ans, avec un ratio d’infection entre femmes et hommes de 2 pour 1. En fait, la prévalence de l’infection par le VIH est la plus élevée chez les jeunes femmes de 15 à 25 ans tandis qu’elle atteint son point culminant chez les hommes cinq à dix ans plus tard, dans le groupe des 25 à 35 ans ( PUND, 1992 ). Les niveaux élevés d’infection chez les jeunes femmes peuvent être dus aux mariages et aux relations sexuelles précoces.

Les adolescents des deux sexes ont tendance à croire qu’ils sont immortels et invincibles, et cela pose un défi aux stratégies de prévention du VIH ( Gray et House, 1989 ). Des études récentes indiquent une tendance vers une augmentation de l’expérimentation sexuelle chez davantage d’adolescents, à un âge plus précoce, avec davantage de partenaires sexuels ( Cochran et Peplau, 1991 ; Pino et al., 1994 ) et sans la protection d’une contraception efficace ou régulière ( Lema et Kabeberi-Macharia, 1992 ).

Le fait que les femmes deviennent séropositives à un âge notablement plus jeune que les hommes a amené les analystes à se poser de plus en plus de questions sur les raisons de cet écart. Outre la possibilité d’une base physiologique différentielle, les circonstances et les situations dans lesquelles les femmes ont des rapports sexuels ont aussi leur importance. C’est ainsi que des rapports rapides qui ne font pas l’objet d’un consentement mutuel peuvent inhiber la production de mucus et la relaxation de la musculature vaginale, deux facteurs qui augmentent le risque de traumatisme vaginal ( PUND, 1992 ). De plus, les femmes ont des rapports sexuels avec des hommes plus âgés qui sont plus susceptibles d’être infectés parce qu’ils sont sexuellement actifs depuis plus longtemps. Du fait que les hommes choisissent des partenaires de plus en plus jeunes, dans un effort pour réduire leur risque d’infection par le VIH, un nombre croissant de jeunes filles sont encouragées à s’adonner à des activités sexuelles ou forcées de le faire : on a signalé la présence de « papas gâteaux » qui attendent à l’extérieur des écoles pour offrir de l’argent, en échange de relations sexuelles, à des écolières qui profitent parfois de l’occasion pour s’acheter des fournitures et autres articles essentiels ( Danziger, 1994 ). Certaines échangent des relations sexuelles contre des vêtements et des accessoires de mode que ne peuvent leur procurer ni leurs parents pauvres, ni l’emploi médiocre qu’elles occupent, ni le maigre salaire qu’elles gagnent ( Schoepf, 1993 ). Les hommes cherchent aussi à épouser des femmes plus jeunes pour se protéger contre l’infection ( Danziger, 1994 ).

Il faut poursuivre les recherches sur le rapport entre le début des relations sexuelles et le profil de transmission du VIH. Les stratégies qui visent à retarder le début de l’activité sexuelle chez les femmes sont de toute évidence importantes, ainsi que les mesures qui augmentent la capacité des jeunes filles de contrôler les situations où elles sont sexuellement actives. On ne devrait faire pression ni sur les jeunes hommes ni sur les jeunes femmes pour leur imposer des mariages ou, dans le cas des femmes, des grossesses précoces.

L’importance culturelle des enfants

Dans les milieux africains, un mariage réussi est un mariage qui permet de mettre au monde et d’élever des enfants. Un couple sans enfant est méprisé et ridiculisé. La plupart du temps, c’est la femme qui est tenue responsable de l’absence d’enfant et supposée stérile.

— George K. Lwihula, faculté de médecine. Dar es-Salaam (Tanzanie )

Après le mariage, une pression considérable est exercée sur les femmes dans toutes les sociétés pour qu’elles aient des enfants ( CRNTR, 1993 ; Garcia et al., 1994 ). Les préservatifs, la principale façon de prévenir la transmission du VIH, contrôlent aussi la fertilité, ce qui présente une difficulté particulière pour les femmes en âge d’avoir des enfants. Comme l’a noté Kathryn Carovano ( 1991 ), proposer uniquement aux femmes des méthodes de prévention du VIH qui sont en contradiction avec les normes de fertilité en vigueur dans la plupart des sociétés, c’est ne rien leur proposer du tout.

Dans beaucoup de sociétés, le mode principal de légitimation sociale des femmes est leur rôle de mère. La maternité peut donner aux femmes leur seul « projet personnel », leur seule source d’identité et leurs seules « possessions » personnelles ( Bonino, 1994). À cause du rôle fondamental que la

Les grands-mères croyaient que plus on a d’enfants, plus on a de gens pour vous aider. Les femmes croyaient que « les enfants sont des trésors » et que, si on n’a pas d’enfant, on passera pour « une femme stérile et inutile ».

— Daw Win May, Institut des sciences infirmières, Yangon ( Myanmar )

maternité joue pour beaucoup de femmes, celles-ci peuvent devenir enceintes même si elles savent qu’elles sont séropositives ( Lwihula, 1994 ) et peuvent voir la grossesse comme une façon de retenir leur partenaire ( Garcia et al., 1994 ). De plus, les femmes dont le partenaire est séropositif peuvent aller jusqu’à risquer l’infection pour essayer de concevoir un enfant ( Garcia et al., 1994 ). Le désir profond d’une femme d’avoir un enfant malgré le fait qu’elle est séropositive a été relaté en ces termes par Hamblin et Reid ( 1991 ) :

J’espère encore avoir un enfant. [...] On m’a dit que c’était totalement égoïste, que je n’avais pas le droit d’infliger ce risque de souffrance à un enfant qui n’est pas encore né. Qui dit que je n’ai pas le droit ? Si j’ai la chance de tomber enceinte, mon enfant sera aimé et désiré. Cela donnera-t-il à la société une raison supplémentaire pour me rejeter ? ( Traduction libre. )

Les pratiques culturelles des pays d’Afrique qui limitent certains rites funéraires aux femmes qui ont eu un enfant aident aussi à comprendre pourquoi certaines femmes séropositives essaient de tomber enceintes.

« Droit » du mari aux rapports sexuels et violence

Les relations de pouvoir dans les couples africains sont clairement en faveur des hommes. Les hommes dominent les prises de décisions concernant la famille et leur domination s’étend aux relations sexuelles. Ils peuvent exiger des relations sexuelles même contre la volonté de leur partenaire.

— George K. Lwihula, faculté de médecine. Dar es-Salaam ( Tanzanie )

Dans certaines sociétés, les hommes dominent toutes les prises de décisions concernant la famille et leur domination peut inclure le « droit » aux relations sexuelles. Dans certaines cultures africaines, par exemple, une femme peut quasiment se retrouver dans l’impossibilité de refuser d’avoir des relations sexuelles avec son mari, même si elle soupçonne qu’il a eu des rapports avec de nombreuses partenaires et qu’il y a un risque sérieux de transmission du VIH ( Bledsoe, 1990 ; Lwihula, 1993 ). Le refus d’une femme de se soumettre au « droit conjugal » de son mari peut être un motif légitime de divorce ( Adeokun, 1994 ). Au Zimbabwe, parce qu’un mari doit verser de l’argent pour sa femme lors du mariage ( le « prix de la mariée » ), celle-ci se considère sa propriété et croit souvent qu’elle doit « lui en donner pour son argent » en termes de capacité sexuelle et de reproduction3.

Quel que soit le niveau de connaissance d’une femme, il est quasiment impossible de surmonter des obstacles culturels comme le a droit » traditionnel des maris sur la personne de leur épouse.

— Lawrence A. Adeokun, Université Makerere. Kampala ( Ouganda )

Par suite de la « construction sociale » des rôles traditionnellement assignés aux sexes, outre le contrôle limité que les femmes ont sur leur vie ( Strebel, 1993 ), elles sont aussi exposées aux risques de violence sexuelle et au danger associé d’infection par le VIH. Les femmes qui sont violées risquent de contracter des MTS, y compris le sida, si l’agresseur est infecté ( Berer et Ray, 1993 ). Un centre d’aide aux victimes de viol à Bangkok a déclaré que 10 % de ses clientes avaient contracté des MTS à la suite d’un viol ( Banque mondiale, 1993 ). Les fillettes peuvent aussi être victimes d’inceste ainsi que d’abus sexuels infligés par des aînés respectés ( p. ex. des enseignants ). Les sociétés devraient élaborer et appliquer des lois contre le viol et les autres formes de violence sexuelle.

Mutilation des organes génitaux féminins

La mutilation des organes génitaux féminins, connue sous le nom populaire de « circoncision féminine », est pratiquée dans 27 pays d’Afrique, sept pays du Moyen-Orient ainsi que certaines parties de la Malaisie, de l’Inde et de l’Indonésie et parmi certaines populations immigrantes des pays occidentaux. On estime que, de nos jours, entre 85 et 114 millions de femmes ont fait l’expérience de la mutilation sexuelle dans le monde. Si les tendances actuelles se poursuivent, plus de deux millions de filles risqueront la mutilation sexuelle chaque année ( Banque mondiale, 1993 ).

La mutilation des organes génitaux féminins pose une pléthore de risques pour la santé des filles et des femmes, parmi lesquelles les hémorragies,

3 Voir R. Mhunga, « AIDS and violence against women », communication inédite présentée lors d’un séminaire sur les conséquences qu’entraînent le VIH et le sida sur le développement tenu au CRDI le 1er décembre 1994.

le tétanos, l’infection, la rétention d’urine, la commotion et même la mort ( Banque mondiale, 1993 ). Il peut y avoir transmission du VIH et d’autres infections virales lorsque les instruments utilisés ne sont pas stérilisés. Dans les régions rurales, on peut utiliser des instruments grossiers comme des couteaux émoussés, des lames de rasoir rouillées ou des morceaux de verre sales ( Omer Haski et Silver, 1994 ). De plus, les femmes infibulées courent des risques plus élevés de contracter des MTS ou le VIH parce que les risques de déchirure sont plus grands lors des relations vaginales et parce que leurs partenaires peuvent pratiquer des rapports anals si les relations vaginales sont impossibles ( De Bruyn, 1992 ; van der Kwaak, 1992 ). Conscients des risques graves que la mutilation des organes sexuels féminins pose pour la santé des femmes, des groupes féminins d’Afrique travaillent à l’abolition de cette pratique ( Banque mondiale, 1993 ). D’autres pratiques rituelles comme la scarification, les tatouages et les saignées peuvent aussi provoquer une infection par le VIH si elles sont pratiquées avec un équipement non stérilisé ( OMS et PNUD, 1994 ).

Assèchement vaginal

L’assèchement vaginal ou « sexe sec » est une pratique culturelle qui peut contribuer à augmenter de façon notable les risques d’infection chez les femmes qui le pratiquent. Pour avoir un « sexe sec », les femmes s’insèrent différentes choses dans le vagin ( p. ex. des poudres, des herbes, du tissu, de l’hydroxyde d’aluminium, du sel gemme ou des cailloux ) dans le but de resserrer le vagin et d’assécher ses sécrétions naturelles avant les relations sexuelles. Le sexe sec est basé sur l’idée que le vagin d’une femme doit être sec, étroit et chaud pour renforcer le plaisir sexuel ( Institut Panos, 1994b ).

Le recours à des méthodes d’assèchement du vagin a été signalé dans les pays suivants : Arabie Saoudite, Cameroun, Costa Rica, Ghana, Haïti, Kenya, Malawi, République dominicaine, Zaïre, Zambie et Zimbabwe ( Institut Panos, 1994b ). Dans les régions rurales du Zimbabwe, les jeunes femmes peuvent être initiées au sexe sec par une tante qui agit à titre d’éducatrice traditionnelle au moment de la puberté ou avant le mariage.

L’assèchement du vagin augmente probablement le risque de contracter le VIH lors des relations sexuelles. Les agents qui sont insérés dans le vagin peuvent provoquer une irritation et des lésions. La friction augmente le risque d’ulcération génitale pour les deux partenaires. Parce que les préservatifs requièrent une certaine lubrification et qu’ils sont susceptibles de se déchirer sous l’effet d’une friction excessive, la pratique du sexe sec rend leur utilisation quasiment impossible ( Institut Panos, 1994b ). Il est urgent de poursuivre les recherches sur cette pratique sexuelle.

Inégalité des rapports de pouvoir entre les sexes

Beaucoup de femmes ne contrôlent pas comment, quand, avec qui et à quelle fréquence elles ont des rapports sexuels. Elles grandissent dans la société avec l’idée que la « femme idéale » supprime ses désirs et ses besoins pour plaire à son partenaire.

— Elsa do Prado, Centro de Salud y Sexualidad « Alternatives ». Montevideo ( Uruguay )

La subordination des femmes compromet leur aptitude à prendre des décisions dans tous les domaines de la vie, y compris la sexualité ( Pesce, 1994 ) et joue un rôle important dans la transmission du VIH. Beaucoup de chercheurs ont insisté sur le fait que les relations de pouvoir entre les sexes entravent l’aptitude des femmes à acquérir de nouvelles connaissances en santé et à les traduire en mesures préventives. Les hommes et les femmes occupent des positions distinctes dans la société ; leurs rôles sont strictement différenciés. Ces différences entre les sexes prévoient en particulier que les hommes doivent être actifs et dominants dans les rapports sexuels, alors que les femmes doivent assumer un rôle de soumission passive. Les femmes grandissent dans la société avec l’idée que la « femme idéale » supprime ses propres désirs pour plaire à son partenaire ( do Prado, 1994 ), que son corps est un objet qui a pour fonction de satisfaire les hommes ( Pesce, 1994 ), qu’elle est appréciée pour son rôle sexuellement passif. Beaucoup de femmes ne contrôlent pas comment, quand, avec qui et à quelle fréquence elles ont des rapports sexuels, mais elles doivent se soumettre aux jugements, opinions, décisions et sentiments des hommes ( do Prado, 1994 ).

Pour éviter l’infection, on conseille aux femmes de s’abstenir des rapports sexuels, de pratiquer la monogamie ou d’insister pour que leur partenaire masculin utilise des préservatifs. Or, beaucoup de femmes sont limitées dans leur aptitude à influencer l’activité sexuelle de leur conjoint ou de leur partenaire ( Strebel, 1994 ). Comme le dit une femme du Zimbabwe, quoi qu’on fasse les hommes iront toujours courir partout ( Mhloyi et Mhloyi, 1994 ). En fait, on demande aux femmes d’exercer un contrôle et de faire des choix dans un domaine où elles ont peu de contrôle et peu de choix ( Hollis, 1992 ; Strebel, 1994 ).

Ces problèmes ont été soulevés lors d’une étude effectuée à Cape Town, en Afrique du Sud ( Strebel, 1994 ). Des groupes de discussion spécialisés ont été organisés avec une centaine de femmes noires ( et quelques hommes ) en provenance de cliniques de soins prénatals et de soins aux malades atteints de MTS, ainsi que de diverses organisations politiques communautaires, et avec des employées de maison, des enseignantes et des étudiantes. Les différences entre les sexes, particulièrement les notions de pouvoir et de responsabilité, ont dominé les discussions. Beaucoup de femmes ont déclaré que les hommes avaient le pouvoir de déterminer la nature des rapports sexuels. Cela signifiait que les hommes avaient des partenaires sexuelles multiples et que les femmes n’étaient pas en mesure de protester ni même d’attendre des hommes qu’ils reconnaissent la façon dont ils se comportent. On a cependant reconnu que les femmes avaient aussi un certain pouvoir et pouvaient également avoir des partenaires multiples. Certaines participantes ont déclaré que les femmes pourraient s’affirmer et s’imposer davantage pour réduire les risques associés aux pratiques sexuelles. Mais la remise en question de certaines positions de pouvoir apparemment indélogeables présentait selon elles bien des difficultés ( Strebel, 1994 ). La pratique de la sexualité sans risque ne s’avérait pas chose facile parce que, dans l’ensemble, les hommes ne prenaient pas la responsabilité de la prévention, tout comme ils ne prenaient pas la responsabilité de la contraception. Parce que c’étaient généralement les femmes qui étaient en charge des questions de santé, on a insisté sur le fait qu’il était essentiel de trouver une méthode de prévention du VIH qui soit contrôlée par les femmes et ne requière pas la participation des hommes.

Difficulté à imposer le préservatif

Nombre de chercheurs ont étudié les différents obstacles qui s’opposent à l’utilisation des préservatifs ( Adeokun, 1994 ; do Prado, 1994 ; Garcia et al, 1994 ; Guimarães, 1994 ; Lwihula, 1994 ; Mhloyi et Mhloyi, 1994 ). La différence de pouvoir entre les hommes et les femmes est telle qu’il est difficile pour ces dernières de demander aux hommes d’utiliser un préservatif ( Garcia et al, 1994 ; Guimarães, 1994 ). D’après Maria De Bruyn ( 1993 ), la dynamique de pouvoir en vigueur rend l’autoprotection des femmes au mieux problématique et, au pire, très difficile voire impossible. Les programmes d’éducation sur le sida doivent reconnaître la réalité et élaborer des stratégies qui tiennent compte du fait qu’invariablement les femmes ont bien peu, sinon rien, à dire dans les relations sexuelles et que les infections en rapport avec les fonctions de reproduction ont des conséquences plus graves pour elles que pour les hommes ( Germain, 1991 ). Les stratégies de prévention continueront à échouer tant que les programmes ne tiendront pas directement compte de ces réalités.

Tout d’abord, il faut que les hommes et les femmes puissent communiquer de façon efficace. La plupart des mesures de prévention et de contrôle exigent la compréhension et la coopération des deux parties. Or, la communication entre les partenaires est souvent minimale, sinon inexistante, sur les affaires quotidiennes, et le dialogue est encore plus réduit sur les questions en rapport avec la prévention du sida ( Lwihula, 1994 ). En outre, dans de nombreuses sociétés, la discussion des questions liées à la sexualité se heurte à des restrictions culturelles ( Ngwenya, 1994 ; Manneschmidt, voir note 2 à la page 59 ). Dans une étude effectuée en Thaïlande, les couples mariés ne semblaient guère parler de préservatifs et la moitié des femmes ont déclaré qu’elles se sentiraient embarrassées si elles devaient demander à leur mari d’en utiliser un ( Kuyyakonond, 1995 ). Les discussions, lorsqu’elles avaient lieu, semblent avoir été très limitées et superficielles. Par exemple, les femmes déclaraient que leur mari leur avait dit de ne pas avoir d’inquiétudes au sujet du VIH ou du sida parce qu’il avait utilisé un préservatif quand il « était sorti ».

Les discussions sérieuses entre mari et femme sur l’utilisation des préservatifs étaient rares. Les femmes ne parlaient guère directement des préservatifs à leur mari. Il faut lancer des campagnes qui encouragent les couples mariés à discuter des relations sexuelles en dehors du mariage, des risques de contracter des MTS et du sida, et de la nécessité d’utiliser des préservatifs. Ces campagnes devront promouvoir ce type de discussion ouverte parmi les couples mariés et insister sur le fait que c’est au mari d’aborder le sujet en témoignage de sa responsabilité envers la famille.

— Anthony Pramualratana. Université Mahidol (Thaïlande )

Dans l’étude effectuée par Pesce ( 1994 ) auprès des femmes pauvres de l’Uruguay et de l’Argentine, près des trois quarts des femmes interrogées ont déclaré qu’elles parlaient à leur partenaire du VIH et du sida. Cependant, comme la plupart de ces femmes avaient des relations sexuelles sans protection, Pesce a conclu que ces conversations ne semblaient guère encourager les mesures de prévention. On peut se demander ce qui se passe exactement lorsque les couples s’entretiennent du VIH et du sida. Il est essentiel de mieux comprendre les tendances de la communication entre les hommes et les femmes en ce qui concerne la transmission du VIH et de proposer des stratégies qui aident à rendre cette communication plus efficace. Le manque de dialogue entre les partenaires sur les questions sexuelles suggère qu’il y a un besoin immédiat d’interventions qui rapprochent les hommes et les femmes pour leur permettre de mieux comprendre le point de vue de l’autre, de réduire les obstacles à la communication et de susciter et d’entretenir un changement de comportement ( Balmer, 1994 ).

Pour constituer des mesures efficaces de prévention du VIH et du sida, les préservatifs doivent être utilisés correctement et régulièrement. Or, les hommes continuent à refuser les préservatifs. Comme l’a dit une des femmes de l’étude de Mhloyi et Mhloyi ( 1994 ), si tu veux un divorce, essaie de demander à ton mari d’utiliser un préservatif.

Quelquefois je veux qu’il mette un préservatif. Mais il demande pourquoi puisqu’il n’aime pas ça. Et il se fôche. ll arrive qu’on se dispute. Même si je mentionne qu’il pourrait attraper le sida, il se met en colère.

— Une femme du Nord-Est de la Thaïlande citée par Anthony Pramualratana. Université Mahidol (Thaïlande )

Les hommes peuvent juger les préservatifs inacceptables pour un certain nombre de raisons. Pour commencer, ils entravent la reproduction et les enfants sont très importants pour les hommes et pour les femmes dans la plupart des cultures ( Adeokun, 1994 ; Lwihula, 1994 ). Dans certains pays de l’Afrique subsaharienne, l’homme moyen veut avoir plus de 10 enfants, en partie parce que les grandes familles sont un symbole culturel de la virilité et de la richesse d’un homme ( Sachs, 1994 ). Les hommes refusent aussi les préservatifs parce qu’ils ne veulent pas réduire leur propre sensibilité et qu’ils craignent que l’utilisation continue ne compromette la fécondité de façon permanente ( OMS et PNUD, 1994 ). Les spécialistes de la planification familiale rapportent régulièrement que les suggestions d’utilisation de préservatifs sont accueillies par des commentaires comme ceux-ci : « On ne peut pas se laver les pieds si on garde ses chaussettes », ou : « C’est comme manger un bonbon sans enlever le papier » ( Sachs, 1994, p. 16 ). De plus, comme les unités de planification familiale ont tendance à être orientées vers les femmes et accessibles seulement aux femmes, certains hommes se fâchent quand leur femme rapporte des préservatifs à la maison parce qu’ils n’ont pas participé au processus de prise de décisions ( Lwihula, 1994 ).

Les femmes se heurtent à beaucoup de difficultés lorsqu’elles essaient d’introduire des pratiques sexuelles moins risquées ( Balmer, 1994 ; do Prado, 1994 ; Garcia et al., 1994 ; Guimarães, 1994 ). L’utilisation du préservatif dépend de toute évidence de la coopération de l’homme puisque c’est lui qui le porte. Dans beaucoup de cultures, les femmes dépendent des hommes pour l’approvisionnement en préservatifs parce qu’il n’est pas socialement acceptable pour une femme de les transporter ( Sacco et al., 1993 ; Garcia et al., 1994 ) et que les femmes risquent de refuser d’acheter, de transporter ou de garder des préservatifs à la maison ( Garcia et al., 1994 ).

Quand une femme demande à un homme d’utiliser un préservatif, elle s’affirme sexuellement, particulièrement si elle fournit le préservatif. Ceci est à l’opposé du rôle de la femme « convenable » qui est traditionnellement subordonnée et passive, particulièrement en ce qui concerne les questions sexuelles.

— Carmen Dora Guimarães, Universidade Federal do Rio de Janeiro ( Brésil )

Pour justifier sa demande, une femme peut expliquer qu’un préservatif est nécessaire à des fins de contraception. Cependant, les femmes mariées ou vivant avec un partenaire stable peuvent choisir d’autres méthodes de contraception qui ne gênent pas leur partenaire comme la contraception orale, un dispositif intra-utérin ou la stérilisation. Une femme peut avoir de la difficulté à justifier l’utilisation d’un préservatif dans le cas des relations anales parce que, de toute évidence, cela n’a rien à voir avec la contraception.

Bien qu’une femme puisse aussi expliquer qu’un préservatif est nécessaire pour se protéger contre la transmission des MTS ou du VIH, cela remet en cause les concepts d’amour romantique et de fidélité ( Strebel, 1994 ), particulièrement si la femme est mariée ou a une relation stable. Les relations permanentes sont généralement basées sur les principes de la monogamie, de la fidélité et de la confiance mutuelle. En suggérant l’utilisation d’un préservatif, symbole redouté de l’activité sexuelle extra-maritale ( Byron, 1991 ), la femme sous-entend qu’elle soupçonne son partenaire d’avoir été infidèle. Si son partenaire accepte le préservatif, ses soupçons d’infidélité sont confirmés. La suggestion peut aussi amener l’homme à soupçonner la femme d’infidélité, ce qui peut provoquer une violente réaction de sa part et entraîner la punition physique ou l’abandon ( Garcia et al, 1994 ; Guimarães, 1994 ; Strebel, 1994 ). Une femme de Buwunga, en Ouganda, concluait : « Si tu demandes à ton mari d’utiliser un préservatif, il risque de te battre et de te renvoyer. et alors, qu’est-ce que tu feras ? » ( Perlez, 1990, p. A4 ).

Étant donné son manque de pouvoir dans les relations entre les sexes, la femme qui refuse les relations sexuelles ou insiste sur l’utiliisotion d’un préservatif ou sur une réduction du nombre de partenaires risque de s’exposer à la violence.

— Anna Strebel, University of the Cape, Belleville ( Afrique du Sud )

L’utilisation du préservatif pose aussi un problème aux femmes célibataires sans partenaire régulier. Si une femme célibataire demande qu’un préservatif soit utilisé, son partenaire peut penser qu’elle a des partenaires multiples ou une MTS, ce qui peut empêcher la relation de se poursuivre. Comme l’a expliqué une femme : « Ce n’est pas facile de trouver un homme bien de nos jours... » ( Guimaràes, 1994, p. 29 ). C’est pourquoi les femmes célibataires peuvent accepter de prendre le risque d’avoir des relations sans utiliser de préservatif en espérant que l’amour ou la chance protégera le couple contre l’infection.

On distribue des préservatifs quand il y en a ; malheureusement, les stocks de préservatifs sont souvent à plat.

— Shirley Ngwenya, Health Services Development Unit, Acornhoek, Nord-Est du Transvaal ( Afrique du Sud )

Finalement, l’un des faits profondément troublants est que les préservatifs, la méthode de prévention la plus couramment recommandée, sont souvent impossibles à trouver, particulièrement dans les régions éloignées ( Lwihula, 1994 ). Les chercheurs d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine ont noté que l’insuffisance des services de planification familiale, la pénurie de préservatifs ou leur prix élevé empêchent les personnes qui veulent prendre des mesures préventives de mettre leur décision à exécution ( Adeokun, 1994 ; Mhloyi et Mhloyi, 1994 ; Ngwenya, 1994 ; OMS, 1995 ). Il faut sérieusement s’occuper de cette question de l’insuffisance des ressources qui est peut-être liée à des problèmes de gestion et de distribution.

Amour et rapports sexuels : fatalisme et caractère irrationnel

Les personnes qui vivent dans des communautés où le sida est très répandu finissent parfois par avoir une attitude de complaisance et de fatalisme vis-à-vis de cette maladie. Quand on voit de plus en plus de gens mourir du sida, on peut penser que l’on est soi-même infecté et décider que ce n’est pas la peine de changer son comportement sexuel. D’après certains Zimbabwéens : « La mort est avec nous, nous ne pouvons pas y échapper », ou bien : « Voilà, on est tous séropositifs ; éventuellement, il ne restera plus personne, c’est juste une question de temps » ( Mhloyi et Mhloyi, 1994, p. 18 ).

Il ne faut pas oublier, pour conclure, que les gens ne sont pas toujours rationnels en ce qui concerne l’amour et les rapports sexuels, et que cela peut avoir des conséquences terribles en termes de transmission du VIH. Or, les

Il semble très difficile de se procurer des préservatifs. Beaucoup de gens ont exprimé le désir d’utiliser des préservatifs parce qu’ils comprenaient qu’ils réduisaient les risques de contracter une MTS. Cependant, la majorité des gens n’ont souvent pas accès à ces préservatifs.

— Gilford D. Mhloyi et Marvellous M. Mhloyi, Université du Zimbabwe, Harare ( Zimbabwe )

interventions pour lutter contre le sida ont été conçues à partir du principe que les gens agiront de façon logique si on leur donne les informations adéquates. Comme le dit Keeling ( 1993 ), la supposition bienveillante et optimiste que les gens raisonnables, à qui on communique d’une façon raisonnable des informations raisonnables, auront une tendance raisonnable à apporter des changements raisonnables à leur comportement pour réduire raisonnablement leurs risques de contracter le VIH s’est avérée déraisonnable.

Les gens prennent souvent des risques excessifs lorsqu’il s’agit d’amour et de relations sexuelles. Même si une femme sait que son partenaire est séropositif, par exemple, elle peut ne pas se protéger en témoignage de son rapport total et symbiotique avec lui.

L’approche rationnelle de la sexualité, centrée sur la pathologie, ne suffira jamais à promouvoir la compréhension des aspects comportementaux de la transmission du sida.

— Arletty Pinel, GENOS International, Sāo Paulo ( Brésil )

INTERVENTIONS

Éducation sur la santé

Les programmes de prévention et d’éducation en santé ont été l’une des principales stratégies déployées dans le monde entier pour éviter la propagation des MTS, y compris le sida, et pour augmenter la sensibilisation du public et la compréhension de ces maladies. A l’origine, la plupart des programmes visaient les groupes « à risque élevé » comme les homosexuels, les prostituées, les toxicomanes et les chauffeurs de camions ( Sekimpi, 1988 ; Balmer, 1994 ). Ces dernières années, cependant, les programmes de diffusion de l’information et de modification des comportements ont été de plus en plus orientés vers les populations générales, particulièrement les jeunes qui commencent à être actifs sexuellement ( Balmer, 1994 ; Manneschmidt, voir note 2 à la page 59 ). Les préoccupations particulières des femmes ont aussi commencé à recevoir plus d’attention et les fournisseurs de services font actuellement tout ce qu’ils peuvent pour élaborer et dispenser des programmes axés sur les femmes ( Institut Panos, 1990 ; Pearlberg, 1991 ; Guimarães, 1994 ).

Les programmes de prévention diffusent donc des informations sur la façon dont le virus se propage et informent le public sur les mesures à prendre pour se protéger contre l’infection ( p. ex. la monogamie ou la réduction du nombre de partenaires sexuels, le choix de partenaires à risques moins élevés, l’évitement du contact avec du sang contaminé, l’utilisation de préservatifs, l’abstention de pratiques sexuelles risquées comme les relations sexuelles anales, et le traitement des MTS ). Ces programmes sont fondés sur l’espoir que l’éducation entraînera une modification des comportements et donc une réduction de la propagation du VIH et du sida ( Balmer, 1994 ; Manneschmidt, voir note 2 à la page 59 ).

Les efforts déployés pour modifier les comportements sexuels, cependant, n’ont pas toujours été couronnés de succès. Même s’ils ont reçu des informations correctes et les ont bien comprises, les gens ont continué à agir comme par le passé. Dans une étude sur les chauffeurs de camions dans l’Est de l’Afrique avec une prévalence de 25 % de VIH, 90 % avaient suffisamment de connaissances sur les MTS et le VIH, y compris des renseignements sur les préservatifs et les comportements présentant moins de risques ( Bwayo, 1991 ). Malgré ces connaissances, deux tiers des hommes ont continué à s’adonner à des pratiques sexuelles risquées.

Il sert à rien d’utiliser le counseling uniquement comme moyen d’éducation. Bien que le counseling ait réussi dans une certaine mesure à informer les gens sur les risques de contracter des MTS et le sida, il faut réfléchir davantage au rôle qu’il peut jouer pour provoquer un changement de comportement permanent.

— Don H. Balmer, Université de Nairobi, Nairobi ( Kenya )

Les programmes conçus pour accroître les connaissances des adolescents sur le VIH n’ont pas éliminé par là même les comportements à risque élevé ( Baldwin et al., 1990 ). Les preuves dont on dispose indiquent que ces adolescents ont toujours un comportement sexuel à risque élevé même après avoir participé aux programmes d’éducation ( Thurman et Franklin, 1990 ; DiClemente et al., 1992 ). Les programmes qui s’efforcent de promouvoir l’utilisation des préservatifs comme mesure de prévention ont augmenté la sensibilisation, mais non l’usage ( Jay et al., 1988 ).

Bien que l’épidémie dure depuis 14 ans, la plupart des mesures de prévention restent limitées à des projets isolés qui répètent les mêmes informations élémentaires. Le gouvernement fédéral continue à organiser des campagnes sporadiques dans les médias, mais du fait qu’elles sont irrégulières et qu’elles ne sont quasiment pas accompagnées d’interventions locales complémentaires, les gens ont l’impression que le sida pose un problème seulement quand il y a une campagne.

— Arletty Pinel, GENOS International, Sāo Paulo ( Brésil )

Stratégies médiatiques

Bien que les opinions concernant la santé puissent être influencées par les messages médiatiques, l’utilisation des médias pour transmettre des informations complexes peut s’avérer d’une efficacité limitée. Les connaissances acquises par leur biais sont souvent incomplètes et leur valeur est limitée par le fait que le public n’a pas l’occasion de poser des questions ( Mhloyi et Mhloyi, 1994 ). L’expérience de première main réussit souvent mieux à promouvoir des changements de comportement ( Mhloyi et Mhloyi, 1994 ; Pesce, 1994 ). De plus, beaucoup de femmes risquent de ne pas profiter des informations diffusées lors des campagnes d’éducation dans les médias parce que la langue utilisée n’est pas adaptée à leur niveau d’éducation ou à leur contexte culturel ( Pesce, 1994 ). Pour que les campagnes médiatiques atteignent les femmes, les messages doivent leur être adressés et être adaptés à leurs caractéristiques particulières.

Les messages médiatiques mal pensés peuvent créer de fausses impressions et aller en fait à l’encontre du but recherché. Beaucoup de femmes ne croient pas que leur partenaire puisse être une source d’infection. Cette fausse perception peut se trouver renforcée par des messages plus ou moins clairs, qui recommandent la monogamie pour prévenir le sida et amènent les femmes à penser qu’elles ne courent effectivement aucun risque puisqu’elles

ll faut que les programmes d’éducation du public trouvent des moyens de diffusion autres que les médias s’ils veulent atteindre les habitants des régions rurales. Beaucoup sont trop pauvres pour acheter un journal local, encore moins une radio. Les femmes ont tendance à être plus défavorisées parce qu’elles n’ont guère le temps d’écouter la radio ou de lire les journaux. Même si elles avaient le temps, beaucoup de femmes ne savent pas lire..

— Hellen Rose Atai-Okei, Ateki Women Development Association, Kampala ( Ouganda )

n’ont de relations qu’avec un seul partenaire. Les promoteurs de la santé doivent faire preuve de prudence avec ce type de messages ( Pesce, 1994 ).

Certaines méthodes peuvent être meilleures que d’autres. Mhloyi et Mhloyi ( 1994 ) ont rapporté que l’écoute de la radio réussissait mieux à réduire les risques d’infection par les MTS que la lecture des journaux. Kuyyakonond ( 1995 ) a également rapporté que les femmes dont la source première d’information était la radio avaient tendance à avoir des informations plus exactes. Ceci vient peut-être du fait que les présentations radio-phoniques en direct, qui comprennent souvent des sessions de questions et réponses, peuvent sembler plus réalistes aux auditrices ( Mhloyi et Mhloyi, 1994 ). De plus, à cause des niveaux élevés d’analphabétisme, les femmes ne sont souvent pas en mesure de tirer profit des journaux.

Pédagogie innovatrice

Dons le cadre de notre étude, nous avons mis à l’essai des méthodes d’éducation différentes, y compris le théâtre, les chansons et les discussions. Nous avons réuni des hommes et des femmes de tous íes groupes d’dge. Ces innovations ont permis de réduire les obstacles à la communication et d’informer la population sur les problèmes clés.

— Gilford D. Mhloyi et Marvellous M. Mhloyi. Université du Zimbabwe, Harare ( Zimbabwe )

Compte tenu du peu de succès des campagnes d’éducation traditionnelles, il faut trouver des méthodes d’éducation originales et présenter l’information d’une façon qui la rende intéressante et pertinente ( Garcia et al, 1994 ; Manneschmidt, voir note 2 à la page 59 ). De plus en plus de pays font appel à des spectacles, notamment à des feuilletons et à des émissions de radio ou à des chansons, pour sensibiliser la population au sida ( Heise, 1993 ). Mhloyi et Mhloyi ( 1994 ) ont mis à l’essai des méthodes d’éducation différentes, y compris le théâtre, les jeux de rôle, les chansons et les discussions. Ces moyens originaux ont contribué à réduire les obstacles à la communication et à informer la population des problèmes clés. Les pièces et les chansons foisonnaient de réparties choisies pour provoquer la conversation. Dans une pièce, par exemple, un personnage dit : « Thérèse, tu ne sais donc pas que, quand tu te retrouves au milieu de tout ça, le préservatif est la dernière chose à laquelle tu penses ? » Cette question a encouragé le groupe à discuter des obstacles à l’utilisation des préservatifs ( Mhloyi et Mhloyi, 1994 ). Selon Kambon ( 1995 ), il faut donner plus d’importance aux nouvelles techniques. Le théâtre populaire, en communiquant de nouvelles informations, peut être une source de responsabilisation. Mais, dans sa signification profonde, il doit être ancté dans la culture des gens.

Pour éduquer le public et modifier les comportements dangereux dans le Nord-Est de la Thaïlande, des chercheuses subventionnées par le CRDI, Thicumporn Kuyyakonond et Eleanor Maticka-Tyndale, ont lancé un programme complètement nouveau de sensibilisation au sida qui comprenait des drames radiophoniques réguliers sur ce thème ( Conway, 1995 ). Les dialogues radiophoniques étaient basés sur des histoires extraites directement des groupes de discussion et reflétaient des expériences de la vie ordinaire. Les drames, qui mélangeaient le feuilleton radiophonique et le théâtre d’improvisation, étaient conçus sur le modèle du théâtre thaïlandais traditionnel, le maw lum. Devant l’intérêt et l’enthousiasme suscités, les responsables sanitaires de la Thaïlande, en collaboration avec les ONG locales, ont étendu le projet pilote aux programmes de toute la province.

Responsabilisation des femmes

Les messages orientés vers les femmes doivent insister sur l’apprentissage de l’affirmation de soi et donner aux femmes le sentiment de pouvoir personnel dont elles ont besoin pour protéger leur santé.

— Rafael Garcia, Universidad Autónoma de Santo Domingo, Saint-Domingue ( République dominicaine )

La dynamique des rapports de pouvoir limite l’aptitude des femmes à décider des conditions dans lesquelles les rapports sexuels ont lieu. Beaucoup de chercheurs ont insisté sur le fait que la solution au sida touche à des problèmes bien plus profonds que l’initiation aux préservatifs ( Usher, 1992 ) et l’une des stratégies les plus importantes pour faire face au sida est d’accroître le pouvoir et l’autonomie des femmes. Celles-ci ont besoin d’éducation sur leur situation de subordination dans la société et doivent être encouragées à s’occuper d’elles-mêmes : les notions de soin de sa propre personne et de contrôle de sa propre vie doivent être ressenties à tous les niveaux d’émotion et pas simplement imposées rationnellement ou intellectuellement ( Pinel, 1994 ). Usher ( 1992, p. 46 ) commente :

A l’époque du sida, il faut que les femmes, et particulièrement les femmes jeunes, connaissent bien leur corps et comprennent leur sexualité pour pouvoir en discuter avec leur futur partenaire. Le sida exige des femmes qu’elles prennent des décisions conscientes et actives dans les domaines les plus intimes de leur vie. ( Traduction libre. )

Il faut examiner avec les femmes les difficultés auxquelles elles se heurtent lorsqu’elles exigent des relations sexuelles sans risque et chercher des stratégies avec elles. Il faut apprendre aux femmes à utiliser des préservatifs et à les inclure à la stimulation érotique préalable aux rapports sexuels ( Pesce, 1994 ). Il est également essentiel de procéder à une sensibilisation qui permette de redresser les opinions erronées, comme la fausse perception, si répandue, que les maris et les partenaires ne sont pas des sources d’infection. Lorsque, au cours d’un stage de formation du Mouvement Paulina-Lousi, en Uruguay, les femmes affirmaient que les hommes étaient des « coureurs », les responsables demandaient : « Quels hommes ? », pour les inciter à réfléchir aux risques auxquels elles étaient elles-mêmes exposées ( Pesce, 1994 ).

Le counseling de groupe peut être efficace pour aider les femmes à faire face à ces problèmes. Dans un groupe, les femmes peuvent partager leurs expériences et leurs perceptions, examiner leurs valeurs, confirmer leurs opinions, se soutenir mutuellement et s’entraîner à de nouveaux comportements dans un milieu protégé ( Moore, 1981 ; Burden et Gottleib, 1987 ). La formation en groupe améliore effectivement l’amour-propre des femmes et peut contribuer à les responsabiliser ( Weitz, 1982 ). Jacobson ( 1992b ) a rapporté que, dans plusieurs pays, on essaie actuellement de regrouper les femmes pour discuter des tabous dangereux pour leur santé. Cela responsabilise les femmes en leur permettant de rompre le silence et de se concentrer sur leurs intérêts personnels.

Le counseling de groupe est une méthode efficace pour aider les femmes à améliorer leur image de soi. Dans un groupe, les femmes peuvent partager leurs expériences et leurs perceptions. Les groupes réduisent l’isolement et fournissent un contexte où les femmes peuvent se soutenir et voir leurs opinions confirmées.

— Don H. Balmer, Université de Nairobi, Nairobi ( Kenya )

Les femmes du monde entier ont toujours trouvé de la force dans les organisations non officielles. Elles se sont mobilisées autour d’activités précises et ont fait appel aux liens familiaux, aux groupes de voisinage et aux réseaux non officiels pour parvenir à leurs fins ( March et Taqqu, 1982 ; Ulin, 1992 ). Les programmes de prévention du sida doivent tirer parti de la capacité de la plupart des femmes en matière d’action collective. Heise et Elias ( 1995 ) ont soutenu que, en réunissant leurs forces pour que les choses changent, les femmes peuvent créer un consensus de groupe et une volonté commune et définir ensemble ce qui est possible. Au sein de projets communautaires, les femmes peuvent apprendre à analyser leur situation et à chercher des solutions individuelles et collectives à leurs problèmes.

Prévention sous contrôle féminin

Les recherches futures doivent s’efforcer de trouver des méthodes de prévention dont tes femmes aient le contrôle pour qu’elles puissent protéger leur propre santé ainsi que celle de leurs enfants.

— Elsa do Prado, Centro de Salud y Sexualidad « Alternatives », Montevideo ( Uruguay )

Compte tenu des incroyables difficultés auxquelles les femmes se heurtent dans leurs efforts pour convaincre les hommes d’utiliser des préservatifs, les recherches se concentrent de plus en plus sur l’élaboration de méthodes de prévention du VIH dont elles auraient le contrôle. Le nouveau préservatif féminin, un étui de polyuréthanne muni de deux anneaux à placer à l’intérieur du vagin, requiert encore la coopération du partenaire ( Institut Panos, 1994b ; Cohen, 1995 ).

Bien que l’on sache depuis de nombreuses années que le spermicide nonoxynol-9 tue le VIH en laboratoire, les recherches sont restées limitées sur son effet de protection contre la transmission sexuelle du virus. Le premier essai à grande échelle sur des femmes américaines ne fait que commencer et il faudra plusieurs années avant d’en connaître les résultats.

La mise au point d’un virocide, un microbicide inséré dans le vagin qui protégerait contre la transmission du VIH, tout en laissant passer le sperme sans l’endommager, est actuellement à l’étude. Un tel produit permettrait aux femmes de se protéger du sida à l’insu de leur partenaire et sans sa coopération. Une telle recherche n’en est encore qu’à son tout début ( Institut Panos, 1994b ).

Interventions orientées vers les hommes

La plupart des programmes axés vers les sexes pour prévenir la transmission du sida ont ciblé exclusivement les femmes. Bien qu’un grand nombre des interventions aient été orientées vers les hommes homosexuels, on ne s’est guère préoccupé des hommes hétérosexuels ( Strebel, 1994 ). Or, compte tenu du pouvoir exercé par les hommes sur les prises de décisions dans tous les domaines de la vie, y compris la sexualité, il faut les encourager à prendre l’initiative de la prévention et les sensibiliser à l’importance de l’utilisation correcte et régulière des préservatifs.

À cet égard, une étude effectuée récemment à Lima, au Pérou, a indiqué qu’il peut être important d’utiliser des hommes pour distribuer les agents de contraception, y compris les préservatifs masculins, pour rejoindre

L’attention exclusive accordée aux femmes dans les études axées sur les sexes n’est pas toujours dans l’intérêt ni des femmes ni de l’égalité entre les sexes. Ceci a été clairement démontré dans les méthodes utilisées pour protéger les femmes contre le sida. Il faut mettre l’accent sur le pouvoir et la sexualité des hommes si l’on veut que notre analyse reflète la complexité des relations de pouvoir entre les sexes et donc des comportements liés au sida. Sinon, les solutions proposées s’avéreront irréalistes et impossibles pour la grande majorité des femmes.

— Anna Strebel, University of the Cape, Belleville ( Afrique du Sud )

effectivement la population masculine ( Foreit et al., 1992 ). L’utilisation d’hommes dans le programme communautaire de distribution des préservatifs a fait monter les ventes de façon spectaculaire ainsi que le nombre de nouveaux clients de sexe masculin. Les hommes qui distribuaient les préservatifs ont réussi auprès des hommes parce qu’ils partageaient des caractéristiques communes avec la population desservie.

De même, le Conseil national de planification familiale du Zimbabwe a signalé la réussite d’une campagne médiatique intensive effectuée en 1989 et conçue spécifiquement pour accroître la responsabilité des hommes dans la planification familiale et encourager les décisions conjointes dans les couples. La campagne incluait une série d’exposés d’information et d’incitation prononcés par des éducateurs de sexe masculin. De plus, un feuilleton amusant sur les conséquences des conduites sexuelles irresponsables a été diffusé à la radio deux fois par semaine pendant six mois et a atteint une audience de 40 % de la population masculine du pays. À la fin de la campagne, 40 % des hommes ont dit que les décisions de planification familiale devraient être prises conjointement par le mari et la femme et 17 % des hommes qui avaient assisté à au moins un exposé ont déclaré qu’ils avaient commencé à utiliser des méthodes de planification familiale ( Sachs, 1994 ).

Les hommes devraient comprendre leurs propres besoins et ceux de leur femme en matière de santé des fonctions de reproduction, partager les décisions relatives à la reproduction et assumer davantage de responsabilités en ce qui concerne la santé sexuelle, l’utilisation des contraceptifs et le « bien-être » de leur famille.

— Trinidad S. Osteria, Université De La Salle, Manille ( Philippines )

Traitement précoce et complet des MTS

La promotion du traitement précoce et complet des MTS est l’une des stratégies clés pour prévenir la transmission du VIH. Or, un grand nombre des programmes de lutte contre les MTS n’ont pas eu beaucoup de succès ( O’Connor et al., 1992 ; Lwihula, 1994 ). Un certain nombre d’obstacles empêchent les femmes atteintes d’une MTS de se faire soigner de façon adéquate. Pour commencer, dans beaucoup de cultures, les femmes n’ont guère de connaissances sur ce que devrait être leur santé sexuelle et donc peu de moyens de diagnostiquer ce qui peut constituer des symptômes possibles de MTS ( Tin Tin Saw, 1995 ; Manneschmidt, voir note 2 à la page 59 ). Pesce ( 1994 ) a noté que plusieurs des femmes qui ont participé à l’étude qu’elle a effectuée en Uruguay, particulièrement les femmes pauvres, n’avaient absolument aucune connaissance au sujet de leur corps et de leur sexualité.

À cause de la honte, de l’embarras et du tabou social associés aux MTS, les femmes hésitent souvent à avoir recours aux services de santé pour faire diagnostiquer et traiter ces maladies. Dans beaucoup de cultures, elles ne se sentent pas à l’aise pour exprimer quoi que ce soit concernant leur corps qui puisse avoir un rapport quelconque avec la sexualité ( Tin Tin Saw, 1995 ; Manneschmidt, voir note 2 à la page 59 ). De plus, beaucoup de médecins sont des hommes et il peut y avoir des obstacles culturels qui empêchent les femmes d’être vues par des hommes qui ne sont pas leur mari ( Manneschmidt, voir note 2 à la page 59 ).

De plus, comme les MTS sont associées à la « perversion féminine » et à l’« immoralité sexuelle », certaines des femmes atteintes peuvent éprouver une très grande crainte d’être ostracisées par leur famille et leur communauté ( Guimarães, 1994 ; Lwihula, 1994 ). À l’opposé, les MTS sont devenues « une preuve, orgueilleuse, de la virilité » pour les hommes ( Pinel, 1994 ) et le niveau de déclaration des MTS peut être plus élevé parmi les hommes ( Pinel, 1994 ).

Le traitement des MTS est généralement limité aux cliniques spécialisés. Or, les femmes ont déclaré qu’elles ne se sentent pas à l’aise pour aller dans ces cliniques surtout fréquentées par des prostituées et des hommes ( Guimarães, 1994 ). Pour augmenter les chances que les femmes se fassent traiter, les services de santé pourraient reconnaître le tabou social associé aux MTS et offrir des services de traitement de concert avec les services de santé primaire et de planification familiale, avec des consultations privées pour que la raison de la visite au centre ne soit pas évidente. ( Elias, 1991 ; Banque mondiale, 1993 ).

Les recherches ont révélé que beaucoup de spécialistes de la santé manquent de connaissances sur les symptômes des MTS, y compris le sida ( Guimarães, 1994 ; Manneschmidt, voir note 2 à la page 59 ). Guimarães ( 1994 ) a fait remarquer que le personnel médical d’une clinique de planification familiale du Brésil n’attachait souvent pas d’importance aux symptômes « mineurs » de MTS chez les patientes. Pesce ( 1994 ) a rapporté que les spécialistes d’une clinique médicale de l’Uruguay ne donnaient quasiment pas d’informations aux femmes concernant la genèse des écoulements vaginaux, comment la maladie se transmet, son traitement et sa prévention. Ces résultats suggèrent que la formation professionnelle des fournisseurs de soins de santé doit comporter davantage de formation sur les MTS, particulièrement du point de vue de la différence entre les sexes.

Enfin, dans certains cas, ce peut être une condition nécessaire du traitement que la personne infectée amène son partenaire à la consultation, ce qui peut représenter un obstacle important. Ce type d’exigence doit être éliminé car les personnes qui sont mariées ou dans une relation permanente, tout comme celles qui ont des partenaires sexuels occasionnels, pourraient refuser de s’y conformer ( O’Connor et al., 1992 ; Lwihula, 1994 ).

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Chapitre 5
Les femmes, la santé et
le milieu de travail

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CRDI

Les femmes constituent 50 % de la population du monde, exécutent les deux tiers du travail du monde et possèdent un dixième des richesses du monde. Nous grandissons tous dons une culture qui accorde davantage de valeur au travail des hommes qu’à celui des femmes et à la vie des hommes qu’à la vie des femmes.

— K. Soin, membre du Parlement, Singapour

Dans le monde entier, les femmes consacrent des heures longues et laborieuses au travail dans la population active officielle et non officielle ainsi qu’à la maison. Cependant, dans les pays industrialisés comme dans ceux en développement, les répercussions du travail des femmes sur la santé est un domaine d’étude qui a été passablement négligé ( Berr, 1994 ; Haile, 1994 ; Messing, 1991 ). Selon Lee ( 1984, p. 15 ) :

Même dans les pays développés, où les mouvements en faveur de la santé au travail sont mieux établis, très peu d’études ont été effectuées spécifiquement sur la santé des femmes. Celles qui ont été faites s’intéressent en majorité aux effets du travail sur les fonctions de reproduction plutôt qu’à la santé des femmes elles-mêmes. ( Traduction libre. )

Pour illustrer la pauvreté des études sur les effets du travail des femmes sur la santé, Messing ( 1991 ) a signalé qu’une recherche, effectuée entre 1975 et 1991 dans la banque de données Medline pour trouver des publications en anglais qui utilisaient les mots clés « dysménorrhée », « troubles menstruels » et « tension prémenstruelle » en association avec les mots « industrie », « profession », « travailleuse » ou « femme », n’a fourni aucune référence en français ni en anglais, et seulement une référence à une étude rédigée en chinois qui reliait les facteurs de risques professionnels aux symptômes menstruels. Outre le manque d’information sur les problèmes de santé associés aux activités des femmes à l’extérieur, il y a aussi très peu de renseignements sur les effets directs sur la santé des lourdes charges de travail des femmes à la maison ( Messing, 1991 ; Koblinsky et al.,1993a ; Hatcher Roberts et Law, 1994 ). D’après Lee ( 1984 ), chercheuse malaisienne, ce manque de priorité et d’intérêt est lié au statut inférieur que la société a accordé au travail des femmes, particulièrement au travail à la maison qui est rarement vu comme présentant des dangers.

Les pages qui suivent traitent des différents problèmes de santé associés au travail des femmes. Nous avons adopté une large définition du terme « travail » qui inclut non seulement les activités rémunérées, mais toutes les activités grâce auxquelles des biens et des services économiques sont produits et vendus. Les risques de santé associés au travail des femmes dans leurs activités de subsistance et leurs activités domestiques seront également étudiés.

Les organismes gouvernementaux et non gouvernementaux doivent poursuivre les recherches dons le secteur de la santé et de la sécurité au travail. Il faut élaborer des instruments pratiques qui permettent d’intégrer les principes de la santé et de la sécurité au travail à l’application, au contrôle et à l’évaluation des politiques et des programmes gouvernementaux et non gouvernementaux. On sait très peu de choses et on manque de données désagrégées selon le sexe sur le rôle véritable des femmes, leur travail et leur importante contribution au développement. Cet atelier offre un milieu idéal pour partager connaissances et expériences afin d’explorer les différents moyens d’encourager la recherche dans ce domaine et d’amener au grand jour les préoccupations des femmes qui travaillent.

— Ng Yen Yen, sénateure au Parlement de Malaisie, Pahang ( Malaisie )

LA POPULATION ACTIVE OFFICIELLE

Dans la plupart des régions du monde, les femmes jouent un rôle de plus en plus important dans la main-d’œuvre officielle. Cette évolution du rôle économique des femmes expose leur santé à des risques supplémentaires ( Paolisso et Leslie, 1995 ). Entre 1950 et 1985, le nombre de femmes économiquement actives dans les pays en développement est passé de 344 à 675 millions ( Sivard, 1985 ). D’après l’Organisation internationale du travail ( OIT ), en 1990, les femmes représentaient plus du tiers de la population active globale du secteur de travail officiel : 41,4 % dans les pays industrialisés et 34,3 % dans les pays en développement ( OIT, 1993 ).

Dans Women’s Lives andWomen’s Health, Leslie ( 1992 ) affirme que, même si selon les époques et suivant les pays, la situation varie considérablement, il est clair que la tendance, dans les pays en développement, a été une augmentation générale de la participation des femmes à la population active rémunérée ( dans les secteurs structurés et informels ). Cette expansion rapide de la participation des femmes au marché du travail est liée à un certain nombre de changements économiques et sociaux, parmi lesquels la monétisation accrue des économies, l’urbanisation, la baisse des niveaux de vie, l’amélioration du niveau d’instruction des femmes et l’évolution des sociétés qui ont commencé à accepter que les femmes participent à un monde économique plus vaste ( Paolisso et Leslie, 1995 ).

Les taux de participation des femmes à la population active officielle varient de façon considérable suivant les régions. Pour commencer, les chiffres des pays industrialisés ont tendance à être plus élevés que ceux des pays en développement. Au Canada, par exemple, 58 % des femmes âgées de plus de 15 ans font partie de la population active rémunérée, et elles

Le bouleversement du scénario social, politique et économique de bon nombre de pays d’Asie et du Pacifique a transformé et continuera à transformer radicalement le rôle des femmes. À mesure que les pays se libéreront politiquement et économiquement, et avanceront vers le progrès et le développement économique, un nombre croissant des femmes de la région entreront dans la population active.

— Ng Yen Yen, sénateure au Parlement de Malaisie, Pahang ( Malaisie )

constituent 45 % de la population active totale ( Condition féminine Canada, 1994 ).

En Afrique subsaharienne, la participation des femmes à la population active officielle en 1990 était de 37 % ( UNDIESA, 1991 ). Comme la plupart des employés du secteur public et des travailleurs salariés sont des hommes, les femmes se retrouvent invariablement dans l’agriculture de subsistance ou sont forcées de créer les occasions de travail qu’elle peuvent dans les secteurs non structurés ( ONU, 1991 ).

La participation des femmes a augmenté dans presque tous les pays d’Asie. D’après les statistiques officielles, l’activité économique des femmes dans le sud et l’ouest de l’Asie est très faible ( moins de 20 % ), mais elle est relativement élevée ( de 35 à 40 % ) dans l’Est et le Sud-Est. Dans l’Asie du Sud-Est, on a assisté à une expansion notable des possibilités économiques offertes aux femmes. Le travail des femmes fournit jusqu’à 80 % de la force de travail des zones de production pour l’exportation ( p. ex. en République de Corée et en Thaïlande ). Cependant, les femmes ont habituellement été confinées au travail répétitif à la chaîne dans des industries comme celles de l’électronique, de la transformation des aliments, des textiles et de la chaussure ( OIT, 1992a ). Si les possibilités d’emploi plus nombreuses offertes aux femmes dans les économies d’Asie relativement avancées témoignent à la fois d’une pénurie croissante de main-d’œuvre et d’un niveau d’instruction plus élevé chez les femmes, dans les pays à faible revenu, la participation accrue des femmes, particulièrement dans les régions urbaines, est souvent associée à la pauvreté et à la nécessité d’augmenter le revenu du ménage ( OIT, 1994 ).

En Amérique latine, on a également observé un accroissement de la participation des femmes à l’économie. Au Chili, par exemple, entre 1970 et 1990, la participation des femmes à la population active rémunérée a augmenté de 83 % ( Berr, 1994 ). Les taux de participation des femmes à la population active officielle sont actuellement de 31 % dans les régions urbaines de l’Amérique latine et de 14 % dans les régions rurales. Les possibilités de travail des femmes dans les régions urbaines semblent être liées de près aux besoins économiques créés par la crise qui a sévi tout au long des années 1980. D’après une étude de l’UNICEF, les femmes qui travaillent pour un faible revenu ont constitué un « ajustement invisible » à la crise économique ( UNICEF, 1987 ).

L’augmentation du travail des femmes dans certains pays d’Amérique latine a aussi été associée au niveau d’instruction plus élevé chez les femmes. L’un des taux de participation les plus élevés des femmes à la population active dans cette partie du monde est celui de l’Uruguay ( 40 % ), qui a peut-être le meilleur système d’éducation secondaire de la région ( OIT, 1994 ).

La poursuite de la croissance de l’économie chilienne dépendra de l’intégration croissante des femmes à la population active. Cependant, les répercussions du travail des femmes sur leur santé est un secteur de recherche et de politique qui n’a guère reçu d’attention jusqu’ici.

— Ximena Díaz Berr, travailleuse salariée des secteurs de l’industrie et de la culture fruitière. Santiago ( Chili )

Le secteur des services est particulièrement important en Amérique latine et emploie environ 70 % de toutes les femmes économiquement actives, la proportion la plus élevée se retrouvant dans les services domestiques ( OIT, 1992a ). Au Brésil, par exemple, près du tiers des 15 millions de femmes qui constituaient la main-d’œuvre féminine en 1985 étaient employées comme domestiques ( Machado, 1993 ).

LA POPULATION ACTIVE NON OFFICIELLE

Les statistiques susmentionnées portent seulement sur la participation des femmes à la population active rémunérée mesurée officiellement et ne tiennent pas compte de tout le travail effectué par les femmes dans le secteur non structuré. Lorsqu’on examine les risques pour la santé associés au travail des femmes, il est essentiel de tenir compte du travail effectué dans le secteur informel qui est souvent absent des statistiques sur la main-d’œuvre. Voici ce qu’en dit Waring ( 1993, p. 109 ) :

Prenez le cas de Tendai, une jeune fille de Lowveld, au Zimbabwe. Sa journée commence à quatre heures du matin quand, pour aller chercher de l’eau, elle part avec un seau de 30 litres vers un trou de forage à quelque 11 kilomètres de chez elle. Elle marche pieds nus et revient à neuf heures. Elle mange un peu et va chercher du petit bois jusqu’à midi. Elle nettoie les ustensiles utilisés pour le repas du matin et s’assoit pour préparer un déjeuner de sudsa pour la famille. Après le déjeuner et une fois la vaisselle faite, elle marche en plein soleil jusqu’au début de la soirée à la recherche de légumes sauvages pour le dîner avant la corvée d’eau du soir. Sa journée se termine à neuf heures, après qu’elle a préparé le dîner et mis ses jeunes frères au lit. Tendai est considérée non productive, non occupée et économiquement inactive. D’après le système économique international, Tendai ne travaille pas et ne fait pas partie de la population active. ( Traduction libre. )

Les femmes pauvres se débattent pour gagner leur vie et nourrir leurs enfants en travaillant comme vendeuses de rue, colporteuses, camelots, travailleuses domestiques, travailleuses sexuelles et convoyeuses de drogues.

— Asha Kambon, Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes, Port of Spain ( Trinité-et-Tobago ) ( voir Kambon, 1995 )

Les statistiques gouvernementales omettent souvent une grande partie du travail des femmes qui est essentiel pour la subsistance du ménage, comme la collecte du combustible et de l’eau, l’élevage de quelques animaux et l’entretien d’un potager ( OIT, 1985 ; Nuss, 1989 ). Un rapport de l ’UNDIESA,The World’sWomen ( 1991 ), affirme que si tout le travail non payé des femmes dans le secteur de l’agriculture de subsistance, de l’entretien de la maison et des soins à la famille était pris en considération dans les statistiques sur la population active, leur part serait égale ou supérieure à celle des hommes.

En Inde, par exemple, les statistiques officielles suggèrent que 14 % de la population féminine travaille, par comparaison avec 52 % de la population masculine. Une commission spéciale instituée en 1988, cependant, a conclu que plus de 90 % des femmes qui travaillent en Inde étaient dans le secteur non officiel et n’avaient généralement pas été enregistrées par les fonctionnaires chargés de recenser l’économie du pays ( Misch, 1992 ).

Les statistiques ignorent le nombre croissant de femmes, dans le monde entier, qui travaillent à domicile et à la pièce, comme celles qui fabriquent des tissus, des tapis et des paniers dans leur maison ( Leslie, 1992 ; Berr, 1994 ; Haile, 1994 ). Les femmes qui colportent les marchandises, comme les paysannes des Andes, en Amérique latine, qui viennent de la campagne et de leurs communautés indigènes pour vendre en ville des marchandises, des aliments et des produits d’artisanat qu’elles ont fabriqués elles-mêmes, sont aussi facilement laissées pour compte. Selon Kambon ( 1995 ) :

Les taux de chômage élevés ont poussé d’importantes portions de la population active féminine vers le secteur non structuré [... ], les Antillaises devant trouver des moyens pour survivre. Selon les estimations, entre 30 et 50 % de tous les emplois sont dans le secteur informel. En Guyane, [... ] le revenu fourni par le secteur informel correspond à près de 60 % de l’économie tandis qu’en Haïti, il peut atteindre 93 %. ( Traduction libre. )

Une grande partie des activités des femmes sont liées aux occupations familiales comme l’agriculture, l’élevage des animaux, l’exploitation de la forêt, etc. Ces contributions des femmes, qui travaillent sans salaire dans les fermes familiales, peuvent se fondre dans le travail familial, devenir invisibles ou être considérées comme « secondaires, marginales et supplémentaires 4 ». Il est aussi possible que les femmes ne déclarent pas leurs occupations agricoles comme du travail malgré le fait que, pendant la saison des récoltes, elles peuvent passer jusqu’à 16 heures par jour dans les champs ( Khan et Midhet, 1991, cités dans Koblinsky et al., 1993b ).

Bien que l ’OIT ait élargi sa définition du travail productif en 1982 de façon à comprendre « tout travail rémunéré ou générant un profit » et « toute production et tout traitement des produits primaires, que ce soit pour le marché, l’échange ou la consommation à la maison », la nouvelle norme est loin d’être universellement appliquée et, dans la plupart des pays, seule une faible partie de la production des femmes est mesurée. Les enquêteurs qui effectuent les sondages, des hommes la plupart du temps, peuvent ne pas identifier ce que font les femmes comme du « travail », mais considérer que cela fait partie de leurs responsabilités domestiques ( Greenhalgh, 1991 ; Nayak-Mukherjee, 1991 ). Les difficultés associées à la collecte de statistiques sur le travail des femmes aux Philippines ont été décrites par Illo ( 1991, p. 4 ) :

Lors de la collecte de données sur le travail ou la population active, les enquêteurs chargés de recueillir les statistiques ou les données de recensement interrogent très souvent superficiellement les femmes sur ce qu’elles font, ce à quoi un nombre infini de femmes, particulièrement dans les régions rurales, répondent : « Rien ». Il faut noter que le travail des femmes, particulièrement dans les régions rurales, comprend de nombreuses « entreprises » même si elles sont de peu d’envergure. [ ... ] Les femmes considèrent tout cela comme faisant partie des tâches d’une bonne maîtresse de maison. Le recenseur, qui n’a pas été sensibilisé aux subtilités de la façon dont les gens se décrivent, enregistre un très grand nombre de femmes comme « simples ménagères » qui, par définition, « ne travaillent pas ». ( Traduction libre. )

Le travail des femmes dans le secteur non structuré continue à être négligé bien qu’elles n’aient souvent pas d’autre choix et que ce soit un élément crucial de leur survie économique puisqu’elles ne peuvent souvent pas trouver de travail dans le secteur officiel. Comme Greenhalgh ( 1991, p. 6 ) l’a fait remarquer : « ... les processus globaux de restructuration économique et de déréglementation du travail ont abouti à la fois à une non-officialisation et à une féminisation de la population active dans bien des pays ». Beaucoup de femmes sont dans une situation où le mari ( s’il y en a un ) ne

4 Voir Mirdha, B.R., « The female client and the health-care provider », texte inédit présenté au concours CRDI/TDR 1994–1995.

gagne rien ou pas assez pour garantir une base d’existence minimale. Le revenu gagné par les femmes dans le secteur informel devient indispensable au fonctionnement du ménage. « Si j’avais un petit commerce, a déclaré une femme du Tchad, je pourrais donner à mon enfant ce dont il a besoin, ce que son cœur désire » ( Wyss et Nandjinger, 1995 ).

LA DIVISION DU TRAVAIL
ENTRE LES SEXES

Dans le monde entier, on fait une distinction marquée entre le « travail des femmes » et le « travail des hommes ». D’après Acevedo ( 1994 ), cette différenciation trouve son origine dans la division sexuelle du travail dans la famille et se perpétue dans l’organisation sociale du travail en dehors de la maison. Les hommes sont souvent les premiers responsables des tâches qui requièrent un grand effort physique, comme la coupe des arbres, la chasse, la préparation de la terre pour l’exploitation agricole, et des travaux qui s’effectuent au loin, comme la conduite des troupeaux ( Momsen, 1991 ). Dans la plupart des cultures, l’application des insecticides est considérée comme une tâche masculine ( Momsen, 1991 ). Les femmes, quant à elles, sont plutôt chargées d’élever les enfants, de s’occuper des membres de la famille et de produire les biens matériels qui sont consommés directement par la famille, comme la nourriture et les vêtements ( Acevedo, 1994 ). En agriculture, « les femmes effectuent les tâches répétitives et qui prennent du temps, comme le désherbage, et celles qu’elles peuvent effectuer près de la maison, comme l’entretien du potager. » ( Momsen, 1991, p. 50 ).

Dans la population active, on peut observer la division du travail entre les sexes dans la concentration des femmes au sein d’une gamme étroite de professions traditionnelles ou « féminines » qui sont généralement mal payées et peu prestigieuses ( OIT, 1994 ). Les femmes travaillent dans l’enseignement, les bureaux, la vente et les services domestiques, alors que les hommes travaillent dans la fabrication, le transport, la gestion, l’administration et la politique ( UNDIESA, 1991 ). Cette tendance générale existe dans les pays industrialisés tout comme dans les pays en développement. Au Canada, en 1993, bien que la participation des femmes aux professions traditionnellement dominées par les hommes se soit accrue, 71 % de toutes les femmes qui travaillaient étaient employées dans cinq groupes professionnels bien définis — l’enseignement, les soins infirmiers ou autres emplois liés à la santé, le travail de bureau, la vente et les services ( Condition féminine Canada, 1994 ).

La division du travail entre les sexes persiste même quand les femmes et les hommes travaillent dans la même industrie, le même emploi ou la même profession ; on retrouve généralement les hommes dans les postes plus élevés alors que les femmes occupent fréquemment des emplois demandant peu de compétences et offrant peu d’occasions d’avancement. Dans le secteur des textiles, par exemple, les femmes travaillent surtout comme ouvrières et opératrices de production ; en électronique, elles travaillent à la chaîne et, dans l’industrie du vêtement, comme tailleuses, opératrices de machine à coudre et repasseuses. De plus, les données laissent entendre que, lorsqu’une profession devient « à prédominance féminine », son statut économique et social diminue ( OIT, 1985 ).

TRAVAIL DES FEMMES ET
RISQUES ASSOCIÉS

Cette partie porte sur divers types de travail effectués par les femmes et certains des risques pour la santé qui y sont associés. Elle traite d’abord du travail des femmes dans le secteur agricole, le secteur des services et le secteur industriel, puis des risques pour la santé liés au travail à domicile, un secteur en pleine expansion. Enfin, elle examine en détail des risques associés au travail ménager. Bien que ces catégories ne couvrent pas toutes les variétés de travail des femmes, elles représentent une portion importante des activités effectuées par les femmes dans les pays en développement.

Il faut aussi noter que ces catégories de travail des femmes empiètent les unes sur les autres. Par exemple, le « travail ménager » peut comprendre des responsabilités agricoles. De plus, les femmes employées dans le secteur industriel peuvent effectuer leur travail à la maison et pourraient donc être également classées comme travailleuses à domicile.

Le secteur agricole

Dans bon nombre de pays en développement, la plupart des femmes travaillent dans le secteur agricole — qu’elles fassent partie de la main-d’œuvre agricole rémunérée ou qu’elles pratiquent l’agriculture de subsistance. Elles

Je suis ouvrière, organisatrice, directrice, administratrice, conseillère, médecin, infirmière, femme de ménage, jardinière, peintre, menuisière — tout ce que vous vouiez ! En d’autres termes, je suis la femme à tout faire.

— Une femme noire du Nord du KwaZulu-Natal ( Afrique du Sud ) citée par Pagé ( 1995. p. 8 )

peuvent travailler dans le secteur de production agricole primaire aussi bien que dans les secteurs du traitement, de l’entreposage et de la commercialisation des produits agricoles.

En Afrique subsaharienne, près de 80 % des femmes économiquement actives travaillent dans le secteur agricole ( UNDIESA, 1991 ). Les femmes africaines produisent 80 % de la nourriture consommée sur place et au moins 50 % des récoltes destinées à l’exportation ( UNDIESA, 1991 ). Une étude effectuée par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture ( FAO ) révèle que 80 % du transport et de l’entreposage des récoltes, 70 % du désherbage et du binage et 50 % de l’ensemencement et de la plantation sont effectués par des femmes ( Haile, 1994 ).

Bien que, dans plusieurs pays d’Asie, il y ait eu un déplacement général, ces dernières années, vers les secteurs non agricoles de l’économie ( Nayak-Mukherjee, 1991 ), le nombre de femmes qui travaillent dans le secteur agricole reste élevé. Dans tout le sud-est de l’Asie et le sous-continent indien, au moins 70 % de la population active féminine travaille dans le secteur de l’agriculture (UNDIESA, 1991 ). Une étude de l’oIT, qui décrit en détail la façon dont les femmes des régions rurales occupent leur temps, indique que jusqu’à 90 % des femmes des régions rurales du centre de l’Inde s’adonnaient à l’agriculture ( Chatterjee, 1991 ). Au Bhoutan et au Népal, plus de 95 % des femmes économiquement actives travaillent dans le secteur de l’agriculture (ONU, 1991 ).

Malgré ces taux de participation élevés et la contribution importante que les femmes qui travaillent dans le secteur agricole apportent à l’approvisionnement du monde en nourriture, rares sont les recherches sérieuses sur les risques pour la santé associés à ce travail. Il arrive même que les recherches ignorent systématiquement le travail des femmes. Au Canada, par exemple, Messing ( 1991 ) rapporte que les travailleuses agricoles ont été exclues d’une importante recherche continue sur le cancer parmi les exploitants agricoles, intitulée « Étude sur la mortalité des exploitants agricoles canadiens », parce que la définition d’« exploitant » utilisée par Statistique Canada ne comprenait que les propriétaires d’exploitation agricole et que les femmes constituaient moins de 4 % de cette catégorie.

Nous savons bien que le travail agricole des femmes est ardu et fatiguant. Le type de tâches que les femmes effectuent — désherbage, ramassage et tri — les exposent à des risques élevés de blessures, de maux de dos, de graves douleurs arthritiques, de défauts posturaux et de maux de jambe. Le travail physique dur et répétitif exigé en agriculture est associé aux troubles musculo-squelettiques et aux troubles des tissus mous ainsi qu’aux arthroses des mains, des genoux et des hanches. Les travailleuses agricoles du sud de l’Inde ( Kerala et Tamil Nadu ), qui prennent part aux diverses étapes de la production du riz, ont signalé qu’elles demandent souvent à leurs enfants de leur marcher sur le dos le soir après une journée de transplantation pour soulager la douleur et leur permettre de retourner au travail le lendemain ( Mencher, 1988 ).

Les femmes peuvent devoir travailler sous une pluie battante comme en plein soleil avec les pieds enfoncés dans la boue ( Mencher, 1988 ). La station dans l’eau et dans la boue toute la journée lors de la transplantation peut provoquer une rupture des talons ( Mencher, 1988 ). Les femmes peuvent aussi être davantage exposées à toutes sortes d’infections et de maladies parasitaires ( Chatterjee, 1991 ; Mencher, 1988 ).

Le travail agricole des femmes est souvent effectué sans aucune aide mécanique. En fait, lorsque les technologies agricoles ( p. ex. les machines pour le défrichement de la terre, le labourage, le moissonnage et le battage ) sont introduites par les organismes de développement, la technologie et la formation connexe sont parfois exclusivement réservées aux hommes ( Butler et al., 1987 ).

Dans I’industrie de la culture du riz au Viet Nam, les femmes assument un certain nombre de responsabilités dont elles s’acquittent habituellement avec des instruments agricoles rudimentaires pour le labourage, l’ensemencement, la transplantation, la surveillance, le désherbage et la récolte. Les femmes du Viet Nam passent souvent entre 16 et 18 heures par jour au travail, alors que les hommes n’y passent qu’entre 12 et 14 heures.

— Nguyen Thi Hoa Binh, Syndicat des femmes du Viet Nam, Hanoï ( Viet Nam )

Dans les pays en développement, les insecticides sont souvent mal utilisés et, dans beaucoup d’entre eux, les dangers associés à leur usage excessif risquent d’augmenter à mesure que les femmes se retrouveront en plus grand nombre dans les secteurs d’exploitation agricole aux fins d’exportation. Les insecticides sont absorbés par la peau, par inhalation et par ingestion. Les hommes, qui sont habituellement responsables de la fumigation des récoltes, peuvent être exposés à des doses élevées d’insecticides pendant de courtes périodes, faute de protection adéquate pendant l’application. Dans un rapport publié en 1989, Strengthening Women, l’International Centre for Research on Women (ICRW) déclare que :

Les femmes [ ... ] font la plus grande partie du travail à la main ( comme le désherbage, le ramassage et le tri ) dans les champs après la pulvérisation, ce qui a pour effet de les exposer aux insecticides pendant des périodes prolongées quasiment sans aucune protection vestimentaire. L’exposition aux insecticides représente un risque non seulement pour la santé des femmes, mais aussi pour celle des enfants non encore nés et des enfants nourris au sein. ( Traduction libre. )

Même si ce sont généralement les hommes qui sont chargés de l’application des insecticides, dans les plantations de cacao et de palmiers à huile de Malaisie, les personnes qui se déplacent à pied et pulvérisent manuellement les insecticides sont presque toujours des femmes ( la plupart du temps, les hommes conduisent les camions de pulvérisation et autres équipements plus sophistiqués ). Les insecticides utilisés, comme le paraquat, sont toxiques s’ils sont ingérés et produisent des vapeurs délétères quand ils sont pulvérisés ; les femmes signalent des troubles de la vue, y compris la cécité ( APDC, 1992 ).

Suivant le type d’insecticide, l’exposition peut entraîner des problèmes neurologiques et des problèmes de comportement, des dermatites, des troubles de la reproduction, des problèmes pulmonaires, des troubles du foie, des lésions oculaires ( y compris l’abrasion de la cornée ) et certains types de cancer ( Engberg, 1993 ). Les femmes qui travaillent dans les plantations de Malaisie ont fait état d’autres effets des insecticides tels qu’étourdissements, douleurs musculaires, démangeaisons, brûlures de la peau, ampoules, difficultés à respirer, nausées, changement de la couleur des ongles et troubles oculaires ( Labour Resource Centre, 1995 ).

Certains produits chimiques utilisés en agriculture ont été associés à des défauts génétiques chez les enfants. Des avortements spontanés, des naissances d’enfants mort-nés et des naissances prématurées ont aussi été attribués à quelques-uns de ces produits chimiques ( Messing, 1991 ). Ce qui est tragique, c’est qu’il arrive qu’on se débarrasse dans les pays en développement des produits chimiques qui ont été interdits dans les pays où ils ont été fabriqués à l’origine à cause de leurs effets nocifs sur la santé ( Puta, 1994 ).

Dans une étude menée par le Health Research and Consultancy Centre, 40 % des femmes qui travaillent dans le secteur agricole à Sigchos, en Équateur, avaient des taux élevés de toxines dans le sang. Les produits chimiques utilisés en agriculture ( insecticides et engrais ) s’infiltraient dans le système sanguin des femmes par l’inhalation et le contact avec la peau et provoquaient des cancers, des fausses couches, des troubles rénaux et des maux de tête ( MacMillan, 1995 ).

Au Chili, environ 200 000 travailleurs temporaires, dont la plupart sont des femmes âgées de 20 à 29 ans, sont employés au ramassage et à l’emballage des fruits dans l’industrie florissante de l’exportation agricole qui permet à ce pays d’expédier des fruits dans le monde entier. Cependant, il y a un côté sombre à l’industrie des fruits du Chili. Une étude a montré que trois fois plus d’enfants étaient nés avec des malformations congénitales entre 1988 et 1990 dans un hôpital situé près d’une région agricole du Chili ( l’hôpital régional de Rancagua ) qu’à l’hôpital clinique de l’Université de Santiago. Les niveaux d’avortements spontanés étaient également particulièrement élevés à Rancagua : 211 pour 1 000 grossesses comparativement à 120 pour 1 000 à Santiago ( cité dans Diebel, 1995 ). Victoria Mella, qui a effectué la recherche, a commencé à étudier la question après avoir observé qu’un nombre exceptionnellement élevé de jeunes femmes avortaient de fœtus grotesquement déformés. Comme le décrit Diebel ( 1995, p. A18 ) :

Le dénominateur commun était qu’elles avaient toutes travaillé dans l’industrie agricole, souvent depuis l’âge de 12 ans [... ]. [ Au Chili ] des milliers de jeunes femmes passent leurs années de fécondité dans des champs saturés d’insecticides, dans la peur que leurs bébés naissent horriblement déformés. Elles ne portent pas de vêtements de protection et ne peuvent compter sur aucun syndicat ni aucune norme gouvernementale sur la santé pour les protéger [...]. Toutes [ les femmes ] se plaignent du manque de masques et de protections vestimentaires, de l’eau potable contaminée, de toux constantes, d’allergies, de troubles des bronches, de spasmes musculaires et d’étourdissements. ( Traduction libre. )

Les travailleurs ne sont jamais correctement informés des multiples effets nocifs des produits chimiques agricoles et ne reçoivent pas toujours de vêtements de protection. Dans le secteur de l’exportation de fleurs, en Équateur, on a signalé que des femmes, forcées de satisfaire aux quotas de production, sont entrées dans des champs qui venaient d’être traités avec des produits chimiques, sans porter de masques ni de vêtements de protection ( Paolisso et Blumberg, 1989 ). Les femmes qui travaillent dans les champs, en Équateur, ne savaient pas qu’il fallait laver les vêtements pour les débarrasser des produits chimiques agricoles si des insecticides avaient été utilisés ( MacMillan, 1995 ).

S’il n’y a pas d’installations qui permettent de se laver sur place, les travailleuses agricoles risquent de prendre leurs repas alors qu’elles ont encore les mains couvertes des insecticides utilisés dans les champs où elles travaillent ( Messing, 1991 ). Le manque d’informations sur les dangers des insecticides signifie que les travailleuses ne se doutent pas des risques qu’elles courent et utilisent souvent des contenants chimiques abandonnés et contaminés par les insecticides pour y garder l’eau potable ( LaDou, 1993 ).

Le traitement des produits agricoles peut aussi avoir des effets nocifs sur la santé. Par exemple, au Brésil, au Mozambique et à Sri Lanka, on produit des noix de cajou aux fins d’exportation et ce sont les femmes qui traitent les récoltes. Cela suppose que l’on retire la noix de son écorce extérieure qui contient un acide dangereux pour la peau si l’on ne porte pas de vêtements de protection ( Momsen, 1991 ). Le manioc, importante culture vivrière de l’Afrique tropicale et de nombreux pays du Pacifique, dégage lors de sa préparation un poison mortel : l’acide prussique. Les femmes — principales responsables du traitement du manioc — peuvent donc être exposées aux émanations d’acide prussique et en subir les effets nuisibles ( Ferrar, 1992 ).

Les femmes constituent une partie importante de la main-d’œuvre utilisée pour la culture du tabac dans beaucoup de pays en développement où elles travaillent dans les champs et les usines de traitement. En Indonésie, les fabricants de cigarettes utilisent environ 15 millions de gens, pour la plupart des femmes. Au Brésil, les femmes arrachent les feuilles de tabac de la tige dans des entrepôts où l’humidité et l’odeur du tabac peuvent provoquer des migraines, des vomissements, des étourdissements et des difficultés respiratoires ( Greaves et al., 1994 ). Il est urgent de poursuivre les recherches sur l’incidence de la culture du tabac sur la santé des femmes.

Il faut noter que les maladies liées au milieu de travail des femmes, qu’elles soient le résultat de la participation des femmes à l’agriculture ou à d’autres industries, peuvent être exacerbées par un certain nombre de facteurs qui influent sur la santé et le bien-être général des femmes. Par exemple, la mauvaise alimentation et le manque de repos, souvent associés à la pauvreté, peuvent accroître les effets des maladies dans le lieu de travail ( Haile, 1994 ; Puta, 1994 ). Comme le note Messing ( 1991 ), un organisme jeune et en bonne santé résiste mieux aux risques associés aux produits chimiques dans le lieu de travail qu’un organisme en mauvaise santé ou plus âgé — un organisme mal nourri peut avoir plus de mal à tolérer l’air pollué.

De plus, les infections et les maladies parasitaires qui ne sont pas nécessairement liées au travail ( p. ex. le paludisme, l’ankylostome et le sida ) peuvent aggraver les effets des maladies associées au travail des femmes.

Au Venezuela, les femmes sont concentrées dans ce qu’on appelle des « ghettos de femmes ». Par exemple, deux fois plus de femmes que d’hommes travaillent dans le secteur des services comme les restaurants, les hôtels et le travail domestique.

— Doris Acevedo, Université de Carabobo. Maracay [ Venezuela )

Le secteur des services

Les services constituent un important secteur d’emplois pour les femmes. Les emplois dans le secteur des services comprennent les soins infirmiers, le travail de secrétariat, l’enseignement, les ventes et le travail de restauration. Les femmes travaillent aussi dans les restaurants et les hôtels et occupent des emplois domestiques. Ces types d’activités sont considérées « typiquement féminines » parce qu’elles sont perçues comme une extension du rôle traditionnel des femmes.

En Amérique latine et dans les Antilles, 71 % des femmes économiquement actives travaillent dans le secteur des services tandis qu’en Asie, le pourcentage est de 40 %. En Afrique, cependant, seulement 20 % des femmes considérées comme économiquement actives travaillent dans ce secteur (UNDIESA, 1991).

Le travail dans le secteur des services, parmi ceux qu’il est convenu d’appeler les « ghettos de femmes » ( Acevedo, 1994 ), se caractérise notamment par un minimum de prise de décisions et par les interactions avec le public. Bien que les rapports avec le public et l’attention aux besoins des autres puissent être gratifiants, ils peuvent aussi être très exigeants et difficiles ( Messing, 1991 ), et provoquer des niveaux élevés de stress, l’épuisement et l’usure au travail. Le stress excessif accroît les risques d’accidents dans le lieu de travail ainsi que les possibilités de maladies cardio-vasculaires ( Lowe, 1989 ). Ces emplois, qui consistent en tâches monotones avec un minimum de créativité et peu de contrôle sur l’environnement extérieur, peuvent contribuer à l’apparition de troubles mentaux ( Acevedo, 1994 ).

La demande de travailleuses domestiques pour s’occuper des enfants et s’acquitter d’autres responsabilités domestiques a grandement augmenté dans certains pays à mesure qu’un nombre croissant de femmes prenaient un emploi salarié à plein temps à l’extérieur de la maison. Par conséquent, les travailleuses domestiques en provenance des pays en développement émigrent de plus en plus dans les pays industrialisés ( p. ex. des Philippines et des Antilles au Canada ; et des Philippines à Hong-Kong et à Singapour ). Ces femmes peuvent souffrir d’angoisse affective à cause de l’éloignement de leur famille, être assujetties à des conditions de travail difficiles et à l’insécurité d’emploi et être exposées à des risques de mauvais traitements de la part de leur employeur ( Grandea, 1994 ).

C’est souvent par la ruse que les femmes du Bangladesh, de l’Inde, des Philippines et de Sri Lanka sont persuadées de s’expatrier au Koweït, en Arabie Saoudite et aux Émirats arabes unis pour travailler « pratiquement comme esclaves pour de riches familles arabe » ( Serrill, 1995, p. 57 ). Serrill dit encore ( p. 57 ) :

Il n’est pas rare de voir des domestiques forcées de travailler de l’aube jusqu’à minuit et ce, tous les jours de la semaine. Souvent, on ne leur donne à manger que des miettes ou des restes ; elles sont battues et insultées et, dans la pire des éventualités, violées et assassinées. Ce n’est que dans les cas les plus notoires que l’employeur sera accusé d’abus sexuel ou de voies de fait. ( Traduction libre. )

En outre, comme le rapporte Dickson ( 1995 ) :

Les travailleuses domestiques sont exposées aux multiples risques de l’environnement familial où se produisent la plupart des accidents. Ces risques comprennent l’exposition aux poisons dans les insecticides et les produits de nettoyage, de longues stations debout, de fréquentes demandes d’heures supplémentaires et de travail pendant les fêtes, ce qui prive leur famille de leur présence, tout cela pour une rémunération le plus souvent insuffisante. Dans ce secteur en pleine croissance, beaucoup de femmes ont choisi de ne pas être des ménagères à plein temps, mais elles n’ont pas nécessairement amélioré les conditions de travail de celles qui sont appelées à les remplacer. ( Traduction libre. )

Les problèmes de santé et les conditions de travail des enseignants des années intermédiaires dans l’État de Maracay, au Venezuela ( dont environ 75 % sont des femmes ) ont été étudiés par Acevedo ( 1994 ). Un examen des dossiers médicaux des éducateurs a permis de constater que les problèmes de santé suivants étaient les plus courants : dépression, hypertension et problèmes de la voix. Les causes les plus fréquentes d’absentéisme étaient la dépression, l’anxiété, les maux de tête permanents, la diaphonie fonctionnelle, des nodules sur les cordes vocales et l’hypertension. Acevedo ( 1994 ) a fait remarquer que ces troubles sont liés aux caractéristiques spécifiques de l’enseignement : travail avec le public, journée de travail intensive, utilisation excessive de la voix, bas salaire et faible prestige social.

Dans plusieurs pays, les femmes constituent jusqu’à 75 % de la main-d’œuvre du secteur de la santé ( Jones et Catalan, 1989 ; Strebel, 1994 ; Lule et Ssembatya, 1995 ). La majorité des postes les mieux payés, les plus prestigieux et les plus chargés de pouvoir, comme les postes de médecin et de directeur, continuent cependant à être occupés par des hommes. Les femmes, par contre, ont tendance à assumer des rôles moins bien considérés et pauvrement payés ( ou non payés ) bien qu’essentiels, et sont infirmières, sages-femmes, auxiliaires médicales et agentes sanitaires communautaires ainsi, traditionnellement, qu’assistantes à l’accouchement.

Les femmes constituent la vaste majorité des bénévoles dans les hôpitaux, les cliniques d’entraide et autres organismes de santé communautaires malgré leur charge de travail déjà lourde à la maison ( Lange et al., 1994 ). En fait, le succès des programmes de soins de santé primaires et des stratégies pour la survie des enfants est dû en grande partie à la participation des femmes ( Leslie et al., 1988 ; Kwawu, 1994 ). Les femmes s’acquittent de tâches multiples et essentielles comme l’éducation des mères sur l’importance des soins prénatals, la bonne alimentation pendant la grossesse, l’allaitement, le sevrage, les vaccinations, le traitement de la diarrhée, le suivi de la croissance des bébés et des jeunes enfants et les thérapies orales de réhydratation. Elles dispensent des conseils et des traitements simples ; apportent un soutien social et affectif aux membres de la communauté ; surveillent la tension artérielle des gens ; leur conseillent, le moment venu, de s’adresser aux services de santé et prennent rendez-vous pour ceux qui ont besoin d’aide ; en outre, elles participent à diverses campagnes de prévention ( Banque mondiale, 1993 ; Lange et al., 1994 ). Dans les pays en développement, les assistantes traditionnelles à l’accouchement mettent au monde la plupart des bébés.

C’est le cas au Laos, par exemple ( Boupha, 1995 ) :

Menées par les membres du Syndicat des femmes lao, les femmes du Laos, en tant que grand-mères, mères, filles, nièces, tantes et voisines, jouent un rôle important dans la famille et la communauté où elle dispensent une formation sur la santé [... ]. Elles sensibilisent la communauté à l’importance de la vaccination des enfants et la renseignent sur des sujets comme les activités sanitaires, la planification familiale, la contraception et les méthodes d’espacement des naissances. ( Traduction libre. )

L’enthousiasme et l’empressement des femmes à travailler comme pourvoyeuses bénévoles de soins de santé correspondent aux attentes et aux stéréotypes sexuels. D’après les attentes et les responsabilités définies par la société, les femmes sont supposées servir, nourrir et comprendre les autres — sans ostentation et sans attendre de remerciements —, ne jamais rejeter les demandes qui leur sont adressées et ne pas s’intéresser aux compensations monétaires ( Lange et al., 1994 ). De fait, dans cette étude effectuée par Lange et al. sur les dispensatrices de soins de santé à Santiago du Chili, plus de la moitié des femmes interviewées ne s’attendaient à aucune compensation économique pour leur travail. Elles insistaient sur le fait qu’elles étaient fières de travailler bénévolement et qu’une rétribution diminuerait la valeur de leur travail. Celles qui indiquaient qu’elles aimeraient être payées disaient qu’elles utiliseraient l’argent pour réduire les frais associés à l’accomplissement de leur tâche et pour acheter les instruments nécessaires à leur travail.

Nous avons appris dans le programme que la santé est très importante, que nous devons apprendre beaucoup de choses, non pas tant comment traiter les maladies que comment les prévenir. Le programme m’a beaucoup aidée parce que, en tant que femme, bien que je sois toujours un peu timide, je parle déjà aux autres, et nous échangeons les unes avec les autres, d’égale à égale. C’est bien de traiter avec les gens de la communauté et de leur apprendre des choses. Quelquefois, on est bien accueilli, quelquefois on ne l’est pas, mais finalement les gens comprennent ce qu’on leur apprend.

— Une participante à un programme de développement et d’éducation en soins de santé primaires en Colombie, citée par Collazos ( 1994 ).

Bien que ce ne soit pas l’objectif premier des programmes, la participation des femmes aux programmes de soins de santé primaires contribue souvent à leur perfectionnement personnel et leur procure une immense satisfaction. Dans l’étude menée par Lange et al.( 1994 ) sur les pourvoyeuses bénévoles de soins de santé au Chili, les femmes avaient envie de faire ce travail à cause du perfectionnement personnel qu’elles pourraient tirer de la formation ainsi que de leur perception que le travail représentait une occasion de servir la communauté. Les femmes ont déclaré que leur travail leur permettait d’établir des relations positives avec les membres de la communauté et leur fournissait l’occasion d’aider les autres, ce qui leur donnait un sentiment positif, les aidait à faire bon usage de leur temps et les enrichissait personnellement. La formation les aidait à devenir plus autonomes et mieux capables de faire face à certaines situations quotidiennes. Ainsi, certaines femmes ont déclaré qu’avant de dispenser des soins de santé, elles n’avaient pas assez confiance en elles pour parler en public ou discuter avec les médecins ou d’autres professionnels de la santé. La formation a augmenté leur estime de soi et leur aptitude à entreprendre des tâches importantes ( Lange e t al., 1994 ).

La contribution des femmes à titre de pourvoyeuses de soins de santé est sous-évaluée et les femmes sont découragées par ce manque de reconnaissance. Elles risquent d’être perçues et traitées comme des ressources à exploiter jusqu’à épuisement.

— llta Lange, École de sciences infirmières. Universidad Católica de Chile Santiago ( Chili )

Même si les femmes peuvent tirer beaucoup de satisfaction de leur rôle de dispensatrices de soins de santé, elles peuvent aussi se sentir frustrées et découragées parce que la valeur de leur contribution n’est pas pleinement reconnue. Ce manque de reconnaissance peut avoir un effet négatif sur la stabilité, la continuité et l’efficacité de leur travail ( Lange et al., 1994 ). Dans cette étude, lorsque les auteurs ont demandé aux femmes ce qu’elles n’aimaient pas dans leur « travail bénévole » pour la communauté, 75 % ont cité des éléments en rapport avec la réaction des gens face à leur désir d’aider, mentionnant l’apathie, le manque de coopération, la critique, le manque de reconnaissance et le fait que leur travail n’était pars reconnu par la communauté qu’elles servaient ( Lange et al., 1994 ).

De même, au Bangladesh, les assistantes traditionnelles à l’accouchement, appelées dai, ont déclaré que leurs services ne recevaient pas la reconnaissance qui leur était due. Par exemple, bien que les dai soient largement reconnues comme des femmes expérimentées dont la présence est requise lors des accouchements, il arrivait qu’elles ne reçoivent pas de paiement comptant ni de cadeau convenable, comme un sari, lorsqu’elles avaient réussi un accouchement ( Rozario, 1995 ). En revanche, tout médecin présent recevait toujours des honoraires substantiels, même lorsque c’était la dai qui avait effectivement mis l’enfant au monde alors que le médecin se contentait d’observer. Malgré ce manque de gratitude, les assistantes traditionnelles à l’accouchement ont dit qu’elles continueraient à aider les familles qui requéraient leur aide. Comme l’a dit une dai : « Qu’est-ce que je peux faire ? Je connais le travail, les gens m’appellent, je ne peux pas dire non » ( Rozario, 1995 ).

Compte tenu du rôle utile et essentiellement bénévole que jouent les pourvoyeuses de soins de santé, il y a un risque que les services de santé comptent de plus en plus sur les femmes. Toute réduction supplémentaire des programmes de santé financés par l’État signifie un accroissement du fardeau des femmes. De plus, à cause de la façon dont les femmes ont été élevées, elles ne peuvent pas se plaindre de la situation. Il faut prendre des mesures pour veiller à ce que les pourvoyeuses de soins de santé ne soient pas exploitées et que leur travail soit pleinement reconnu ( Lange et al., 1994 ).

Le secteur industriel

Dans beaucoup de pays en développement, la participation des femmes à la population active industrielle a augmenté au cours des vingt dernières années. Dans les économies nouvellement industrialisées, comme la Corée du Sud, Hong-Kong, Singapour et Taïwan, et d’autres comme la Malaisie, le Mexique, les Philippines, la Thaïlande et certains pays des Antilles, les femmes occupent maintenant de plus en plus d’emplois dans les usines et sont donc exposées à de nouveaux risques pour leur santé en milieu de travail ( Vickers, 1991 ; Jacobson, 1993 ).

Certains pays en développement ont établi des zones de production économique ou zones de libre-échange qui offrent divers encouragements, comme des formules d’impôt intéressantes et une main-d’œuvre bon marché, bien disciplinée, manuellement adroite et hautement productive pour encourager les corporations multinationales à y installer des unités de production ( Nayak-Mukherjee, 1991 ; Vickers, 1991 ). Certains gouvernements ont tenté d’accroître les avantages comparatifs de leur pays en renonçant aux lois sur la protection des travailleurs qui augmentent les coûts de main-d’œuvre ( LaDou, 1993 ). Le gouvernement de Malaisie a annoncé « une main-d’œuvre bon marché, docile, très facile à former et non syndiquée » pour attirer les investissements étrangers ( Lim, 1988, p. 37 ). Dans les zones de libre-échange du sud et du sud-est de l’Asie, les travailleurs des secteurs à forte intensité de main-d’œuvre, comme ceux de l’électronique, des textiles et de la chaussure, sont essentiellement des femmes ( de 75 à 90 % ), célibataires et jeunes ( de 15 à 29 ans ) ( Nayak-Mukherjee, 1991 ; Yen, 1995 ). Bon nombre d’auteurs ont soutenu que le dynamisme et la croissance économique auxquels on assiste dans les économies des pays du sud-est de l’Asie sont dans une large mesure attribuables à la participation des femmes, car les secteurs qui ont été le moteur de la croissance sont aussi ceux où la main-d’œuvre féminine domine ( Nayak-Mukherjee, 1991 ).

Les conditions de travail dans ces usines sont souvent abominables. Les femmes ne peuvent habituellement obtenir que les emplois les moins payés qui demandent le moins de compétences, faute d’occasions de formation et d’éducation ( Vickers, 1991 ) et à cause de la discrimination systémique entre les sexes. Elles travaillent généralement dans des industries non réglementées qui peuvent être hors de la portée des lois sur la santé et la sécurité au travail et des syndicats ( Banque mondiale, 1993 ; OIT, 1985 ). Il a été dit que certaines sociétés restreignent le nombre d’années d’emploi de chaque femme pour limiter le nombre de travailleuses chevronnées qui risqueraient de demander des salaires plus élevés ( OIT, 1985 ; Nayak-Mukherjee, 1991 ). D’autres usines contrôlent la vie des femmes 24 heures sur 24 en les installant dans des dortoirs.

Ce type de travail en usine entraîne un stress considérable. Les travailleuses sont habituellement soumises à des objectifs de productivité extrêmement élevés et peuvent travailler sept jours par semaine à des tâches monotones, à toute heure du jour ou de la nuit. Les employées d’usine qui travaillent à la pièce, ou qui sont payées à l’heure, sont soumises à des contraintes de temps extrêmes, ce qui peut être cause d’anxiété et de stress. Le rythme de travail accéléré peut amener les travailleuses à négliger de prendre des précautions de sécurité importantes, ce qui accroît le risque d’accident ( Messing, 1991 ).

Les jeunes filles et les jeunes femmes constituent une cible particulière dans un milieu hautement compétitif où elles sont vues comme une source de travail bon marché et comme une main-d’œuvre docile, facile à embaucher et à congédier lorsqu’on n’a plus besoin d’elle. Des dizaines de milliers de fillettes travaillent dans des usines où elles utilisent des outils conçus pour des adultes, transportent de lourdes charges et travaillent de longues heures sans pause et avec peu de normes de sécurité, sinon aucune, pour les protéger.

— A. El Bindari Hammad, Organisation mondiale de la santé. Genève ( Suisse )

L’insécurité de l’emploi, du fait que les femmes peuvent perdre leur travail lorsque la production est réduite ou lorsque l’usine déménage, puisque les industries ne cessent de chercher de nouvelles sources de main-d’œuvre bon marché, ajoute encore au niveau de stress. D’après Nayak-Mukherjee ( 1991 ), on a assisté à des déménagements d’industries de Singapour en Indonésie, en Malaisie, en Thaïlande et de là à Sri Lanka et, très récemment, au Bangladesh et même en Chine. Il n’est pas surprenant que ces conditions stressantes provoquent des migraines, des dépressions nerveuses et l’épuisement professionnel ( Nayak-Mukherjee, 1991 ).

Parmi les autres conditions de travail malsaines dans le secteur industriel, il y a le manque de ventilation, le manque de lumière, la chaleur, l’humidité, les radiations et la surpopulation, qui peuvent à la fois compromettre la santé physique et réduire la productivité ( Soin, 1995 ). Le bruit, un problème extrêmement fréquent dans les usines ( Banque mondiale, 1993 ; Puta, 1994 ), peut provoquer la surdité industrielle ; c’est également un important facteur de stress pour les travailleuses ( Messing, 1991 ). Les installations sanitaires pour les femmes, comme les toilettes, sont souvent inadéquates. Par exemple, dans une usine typique du Bangladesh, où travaillent plus de 200 femmes et 50 hommes, il n’y avait qu’une salle de toilettes pour les femmes et une pour les hommes ( Hossain et Sobhan, 1988 ).

La pollution de l’air intérieur peut provoquer des douleurs, des maux de tête et des problèmes respiratoires ( Messing, 1991 ). Les effets nocifs de la concentration élevée de poussière sur la santé des travailleurs, particulièrement sur leur système respiratoire, est un fait bien connu dans le domaine de la santé au travail ( Carasco, 1994 ; Haile, 1994 ). Outre les difficultés des voies respiratoires, la poussière a été associée aux accidents, à la maladie générale et à l’absentéisme ( Meng et al., 1987 ).

Les résultats d’une étude menée par l’Institut national de la santé au travail et d’hygiène du milieu, à Hanoï, au Viet Nam ( Nga, 1995 ), ont révélé ce qui suit :

Les travailleurs étaient exposés à des agents nocifs dans le lieu de travail, comme la chaleur, les gaz toxiques, le bruit, la poussière et les produits chimiques [ ... ]. Les caractéristiques du travail dans les industries qui utilisent les technologies nouvellement importées comprenaient le mouvement monotone de groupes de petits muscles, un air de mauvaise qualité dans les salles de travail [ ... ] et une différence marquée entre la température à l’intérieur et à l’extérieur. ( Traduction libre. )

Les femmes, que les stéréotypes perçoivent comme passives, sont plus nombreuses dans les emplois qui requièrent une station debout ou assise prolongée, souvent dans des positions inconfortables et dans des sièges non ergonomiques. Les problèmes de santé associés au travail statique sont les douleurs musculaires, y compris les douleurs dans le dos, le cou et les épaules, et les crampes dans les jambes ( Acevedo, 1994 ; Haile, 1994 ). La station debout prolongée, sans bouger, peut être nocive pour le système musculo-squelettique et gêner la circulation du sang dans les jambes, ce qui provoque des crampes, un engourdissement et une enflure du bas des jambes et des pieds ( Corlett et Bishop, 1976 ; Waterfield, 1981 ; Messing, 1991 ).

Les travailleuses du secteur des textiles

Dans le secteur des textiles et des vêtements, dont la main-d’œuvre est constituée en majorité de femmes, la byssinose, ou « poumon brun », est une maladie professionnelle des poumons courante chez les travailleurs qui traitent le coton et sont exposés à la poussière de coton brut. Les symptômes comprennent l’essoufflement et l’oppression thoracique, et cela peut provoquer

Bien que certains risques soient évidents, d’autres sont insidieux et lents à se manifester. Les travailleuses peuvent être exposées à un air saturé de poussière, à des vapeurs et des gaz dans les usines d’extraction chimique, à une humidification artificielle dans les usines de coton, à des peintures et à des solvants qui peuvent être absorbés par la peau. Leur travail à la chaîne peut être une source d’extrême ennui.

— Anne Kamoto Puta, Organisation zambienne de la santé et de la sécurité au travail, Ndola ( Zambie )

la bronchite chronique ou l’emphysème ( Comité des femmes de l’Asie, 1987 ; Labour Resource Centre, 1995 ; Paolisso et Leslie, 1995 ).

Les travailleuses du secteur des textiles peuvent être exposées à des produits chimiques nocifs et risquent de ne pas être conscientes des effets toxiques possibles des matériaux chimiques qu’elles manipulent ( Puta, 1994 ). L’exposition aux produits chimiques utilisés pour la teinture, la décoloration et la résistance au rétrécissement peut provoquer l’irritation des yeux, des maux de gorge, des réactions allergiques et des éruptions cutanées ( Comité des femmes de l’Asie, 1987 ).

L’utilisation d’une machine à coudre requiert des mouvements répétitifs des doigts, des poignets et des coudes exécutés à vitesse accélérée ( APDC, 1990 ; Vézina et al., 1992 ) ; elle peut causer des douleurs extrêmes et persistantes et éventuellement provoquer des problèmes neurologiques et musculo-squelettiques tels que bursite, épicondylite, syndrome du canal carpien et ténosynovite du poignet ( Kurppa et al., 1979 ; Messing, 1991 ; Punnett, 1985 ). Les travailleuses du secteur des vêtements ont tendance à avoir des accidents, comme se faire traverser le doigt par une aiguille, ce qui n’est pas surprenant lorsqu’on doit travailler très vite dans des conditions stressantes ( Comité des femmes de l’Asie, 1987 ). Les opératrices de machine à coudre peuvent souffrir de douleurs aiguës dans le dos et la nuque et de problèmes dans les épaules et les coudes ( Messing, 1991 ; Rowbotham, 1993 ). Une femme qui avait travaillé à la machine à coudre pendant plusieurs années concluait que les conséquences pour sa santé avaient été incroyables : « J’avais tout le temps les mains fatiguées, je ne pouvais rien soulever de lourd sans qu’elles me fassent mal » ( Rowbotham, 1993 ).

Plus de la moitié des problèmes médicaux étaient de nature respiratoire, situation directement attribuable à la concentration élevée de poussière dans la fabrique de textiles.

— Joseph Carasco, Centre de recherches fondamentales, Kampala ( Ouganda )

Ce type de travail, comme une grande partie du travail des femmes en général, est ennuyeux, répétitif et monotone. Il offre également peu d’occasions de contact avec les autres. L’effet de ces conditions de travail sur l’esprit et la santé générale des travailleuses n’a pas été sérieusement étudié ( Acevedo, 1994 ; Messing, 1991).

Enfin, les travailleuses du textile peuvent devoir utiliser un équipement dangereux ( Berr, 1994 ; Carasco, 1994 ) sans dispositifs de protection ou sans recevoir la formation nécessaire pour apprendre à s’en servir sans danger. Les femmes du secteur des textiles en Ethiopie, par exemple, travaillent régulièrement sans dispositifs de protection ( Haile, 1994 ).

Les travailleuses du secteur électronique

Comme l’industrie des textiles, l’industrie de l’électronique emploie surtout des femmes. Dans le secteur électronique de Malaisie, par exemple, 85 % de la main-d’œuvre est féminine — et 92 % de ces emplois ne sont pas spécialisés. Qui plus est, en Malaisie, la concentration des femmes dans le secteur de l’électronique n’est pas une simple coïncidence puisque la présence d’une population active féminine nombreuse et peu payée est une des raisons bien connues pour lesquelles les sociétés décident de s’y installer ( Labour Resource Centre, 1995 ).

Le principal risque pour la santé associé au travail des femmes dans le secteur électronique est lié aux troubles oculaires. Dans ce secteur, celles qui travaillent sur des chaînes d’assemblage de semi-conducteurs en utilisant des microscopes toute la journée pour attacher des fils minuscules à des puces de semi-conducteurs ( APDC, 1990 ) souffrent souvent de fatigue oculaire qui peut provoquer la conjonctivite, la myopie, une détérioration de la vue et la diplopie ( APDC, 1990 ; Nayak-Mukherjee, 1991 ).

De plus, toutes sortes de produits chimiques potentiellement dangereux peuvent être utilisés à différentes étapes du processus d’assemblage électronique, notamment le trichloréthylène, le méthyléthylcétone, le xylène, l’acétone, l’acide sulfurique et l’acide hydrochlorique. L’exposition à ces produits chimiques a été associée à des maladies cutanées et respiratoires ainsi qu’à des avortements spontanés ( Labour Resource Centre, 1995 ; Yen, 1995 ).

Les travailleuses à domicile

Les risques pour la santé que courent les travailleuses à domicile requièrent une attention particulière parce que presque tous les gens qui travaillent à domicile sont des femmes et que ce secteur constitue une partie intégrante de l’économie parallèle dans la plupart des pays en développement. Par définition, le « travail à domicile » est la production d’un bien ou la prestation d’un service pour un employeur ou un entrepreneur dans un lieu choisi par le travailleur, souvent sa propre maison, habituellement sans contrôle direct de l’employeur ou de l’entrepreneur. On appelle aussi les travailleuses à domicile des « travailleuses à la pièce » ( OIT, 1992b ).

Bien qu’il soit difficile d’établir le nombre exact de travailleuses à domicile puisqu’elles ont peu de chances d’être incluses dans les statistiques, l’OlT a estimé qu’elles constituent entre 5 et 35 % du produit national brut dans plusieurs pays en développement sur lesquels elle a réuni des données ( Misch, 1992 ).

De plus en plus, les travailleuses à domicile tendent à constituer une vaste économie parallèle internationale dans la plupart des pays industrialisés et des pays en développement puisque les entreprises réagissent à la concurrence internationale en fragmentant le processus de production et en comptant de plus en plus sur le travail effectué par les femmes dans leur propre maison ( Messing, 1991 ). Les travailleuses à domicile « tissent des tapis en Turquie, cousent des chaussures en Italie, font des vêtements aux États-Unis, lavent du linge en Équateur et assemblent des éponges métalliques pour laver la vaisselle au Mexique » ( Misch, 1992, p. 18 ).

Les types de travaux effectués par les travailleuses à domicile dans les pays en développement sont extrêmement variés. Elles participent à la production des vêtements, des textiles, du tabac, des tapis, des objets en osier et en cuir ( OIT, 1992b ) ; elles exécutent des tâches connexes comme le tri, le nettoyage, l’emballage et l’étiquetage ; de plus, elles peuvent participer au sous-montage de produits électriques et électroniques et également travailler dans les industries traditionnelles associées à la préparation des aliments et à la fabrication des produits artisanaux et de la poterie ( Haile, 1994 ).

À première vue, le travail à domicile offre certains avantages pour les femmes. Parce que ces travailleuses sont souvent mariées avec des enfants, n’ont généralement qu’une éducation primaire ( OIT, 1992b ) et vivent souvent dans la pauvreté, le travail à domicile leur donne l’occasion de gagner un certain revenu tout en s’occupant de leurs enfants et en s’acquittant de leurs responsabilités ménagères (OIT, 1992b, 1994 ).

Cependant, bien qu’on ne sache pas grand-chose sur les conditions de travail des travailleuses à domicile, faute de données adéquates, les informations disponibles laissent entendre qu’elles sont généralement très mauvaises. Le travail à domicile suppose habituellement de très longues journées de travail, ce qui peut provoquer une extrême fatigue. Le paiement à la pièce étant extrêmement bas, les femmes ont tendance à travailler le plus longtemps possible. En Inde, par exemple, les femmes peuvent commencer avant l’aube à rouler des cigarettes et n’arrêter que longtemps après la tombée de la nuit. D’après l’une de ces rouleuses de cigarettes, les journées commencent à 5 h 30 et se terminent à 23 h 30 : « Ma vie a commencé avec les beedis [ cigarettes ] et il est bien possible qu’elle se termine de la même façon » ( Misch, 1992, p. 18 ).

Les travailleuses à domicile doivent faire face à un grand nombre de problèmes similaires à ceux des femmes employées dans d’autres secteurs. Par exemple, comme une grande partie du travail des femmes en général, le travail à domicile est répétitif, monotone et manque de variété. Les travailleuses à domicile, comme les Indiennes qui fabriquent des bracelets et de la dentelle, peuvent souffrir de troubles oculaires à cause de la minutie que demande leur travail ( Misch, 1992 ). Les travailleuses du tabac peuvent « avoir les bras enflés à force de couper le tabac et souffrir d’asthme à force de le respirer » ( Misch, 1992 ). Un sondage des travailleuses à domicile effectué en 1986 par la Self-Employed Women’s Association ( SENA ) à Gujarat, en Inde, a révélé que 90 % des femmes se plaignaient de maux de pieds et de jambes ; 82 %, de maux de dos ; et 31 % de douleurs aux mains. Les maux de tête, les douleurs abdominales et l’asthénopie sont d’autres problèmes signalés. Les travailleuses à domicile peuvent avoir des accidents liés à leur travail, par exemple se blesser avec les couteaux ou se piquer avec les aiguilles ( OIT, 1992b ).

Certains facteurs, qui distinguent le travail à domicile des autres formes de travail, créent des risques supplémentaires pour la santé et le bienêtre des femmes. Pour commencer, comme les travailleuses à domicile ne sont pas enregistrées comme travailleuses et qu’elles ne travaillent pas aux termes de contrats fixes, leurs employeurs n’assument généralement aucune responsabilité pour leur santé et leur sécurité ( Misch, 1992 ). Comme l’a déclaré Misch ( 1992, p. 19 ), elles sont « hors de la portée des lois et des règlements qui offrent aux travailleurs une certaine mesure de protection contre l’exploitation ». Comme l’a dit aussi une travailleuse à domicile de Malaisie, qui travaillait jusqu’après minuit la plupart du temps pour fabriquer de l’« argent » en papier utilisé dans les cérémonies funéraires chinoises : « Je m’inquiète du fait que je n’ai pas de protection en cas de maladie ou de chômage et j’ai souvent mal au dos et aux yeux » ( Mitter, 1986, p. 119 ).

Habituellement exclues des emplois sûrs et syndicables du secteur structuré, les femmes sont prêtes à accepter les emplois qui peuvent les faire vivre, même s’il ne s’agit pas d’un emploi stable.

— Swasti Mitter, Institut des nouvelles technologies. Université des Nations Unies, Maastricht ( Pays-Bas ) ( voir Mitter, 1994 )

Les travailleuses à domicile sont également isolées de leurs collègues ( Messing, 1991 ) et n’ont pas accès à des moyens de pression comme les syndicats pour négocier leur salaire et formuler leurs préoccupations en matière de santé. En outre, comme il y a peu de chances pour que leur maison soit équipée ou conçue pour les tâches à accomplir, elles peuvent devoir travailler dans des positions particulièrement inconfortables, sans ventilation adéquate ( Johnson, 1982 ). Enfin, Messing ( 1991 ) a fait remarquer que puisque les enfants peuvent être présents dans le lieu de travail, les femmes sont souvent obligées de partager leur attention entre les soins aux enfants et le travail, ce qui accroît les risques d’accident à la fois pour elles-mêmes et pour leurs enfants.

Le travail ménager

II n’existe pas de définition du « travail ménager », si bien que cela devient l’expression générale pour décrire toutes les tâches non rémunérées effectuées par les femmes.

— Waring ( 1993, p. 109 )

Outre le travail que les femmes effectuent dans la population active structurée et informelle, elles participent également au marché du travail par les travaux qu’elles accomplissent à la maison ( Acevedo, 1994 ). Dans toutes les sociétés, les femmes ont généralement de lourdes responsabilités à la maison. Les nombreuses tâches domestiques habituellement effectuées par les femmes comprennent la préparation de la nourriture pour la famille sur des feux qui dégagent de la fumée dans des cuisines non ventilées ; les soins aux membres de la famille, y compris les enfants, les malades et les personnes âgées ; l’approvisionnement en nourriture, en bois et en eau pour la consommation familiale ; le transport de lourdes charges sur de longues distances ; la surveillance et l’éducation des enfants ; l’entretien de la maison et l’entretien du potager et des animaux. Il est clair, comme le font remarquer Wyss et Nandjinger ( 1995 ), qu’« une ménagère ne manque pas de travail ». Pour reprendre les termes de Cardaci ( 1992 ) :

À titre de dispensatrice de soins, il incombe à la femme de garantir [ ... ] une atmosphère de sécurité, une maison chaude et propre où les membres de la famille sont protégés de la maladie et des dangers, où les enfants, les jeunes et les adultes bénéficient d’une alimentation équilibrée. [... ] C’est le rôle de la femme de maintenir l’harmonie dans la famille et de réduire les anxiétés et les tensions qui émergent lorsque les rapports se détériorent. C’est le rôle « typique » de la femme de faire de la maison un refuge. ( Traduction libre. )

De plus en plus, les femmes se joignent à la population active rémunérée, mais leur fardeau à la maison n’en est pas réduit pour autant. Au contraire, elles se sentent obligées de faire leur travail à la maison et à l’extérieur avec efficacité, ce qui veut souvent dire aux dépens de leur santé et de leur bien-être.

Le travail ménager, essentiel au maintien des systèmes sociaux, n’est pas récompensé par la société en termes monétaires. Comme « travail » signifie souvent « activité payée », le travail important mais non rémunéré que les femmes effectuent à la maison a tendance à être éclipsé et marginalisé ( Berr, 1994 ). Cependant, ce travail des femmes est essentiel à l’entretien de la population active.

Du fait que beaucoup de femmes travaillent à la maison, elles souffrent tout particulièrement des risques pour la santé que présente le milieu familial. Bien qu’un grand nombre des responsabilités traditionnelles des femmes les rendent plus vulnérables à des problèmes de santé particuliers, très peu de recherches ont été effectuées pour étudier la prévalence de ces pathologies, leur importance pour les femmes, leur incidence sur la productivité et le bien-être, et la façon de les soulager ( Vlassoff, 1994 ).

Les statistiques nationales et internationales sur le rôle économique des femmes ont tendance à ignorer complètement le travail effectué par les femmes dans le milieu familial ( Rathgeber, 1994a ). Or, si l’on tient compte du travail ménager lorsqu’on mesure le travail des femmes, leurs journées de travail sont beaucoup plus longues que celles des hommes dans la plupart des pays du monde ( OIT, 1992a ; Acevedo, 1994 ) ( figure 4 ). Les recherches doivent incorporer explicitement le travail non rémunéré des femmes dans la description et la mesure des activités de travail des femmes.

La pollution de l’air intérieur

D’après la Banque mondiale ( 1993 ), la pollution de l’air intérieur expose probablement davantage de gens dans le monde entier à de graves polluants que la pollution de l’air extérieur. Comme, dans tous les pays en développement, les femmes sont essentiellement responsables de la préparation des

Comme (es femmes sont associées de près aux travaux domestiques, elles sont davantage exposées aux polluants dégagés dans la maison par l’utilisation de combustibles comme le kérosène, de sous-produits industriels comme le caoutchouc, la toile, le cuir, les tourteaux d’oléagineux et le bois à brûler. Ces facteurs sont liés à l’incidence élevée d’asthme et d’autres maladies respiratoires ainsi que de problèmes oculaires.

— Fekerte Haile, Organisation internationale du travail. Addis-Abéba ( Éthiopie )

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Figure 4. Temps de travail total des femmes et des hommes, y compris les travaux ménagers, en 1990, ( Source : UNDIESA, 1991. )

aliments, ce sont elles, ainsi que leurs jeunes enfants, qui sont le plus exposés à l’air intérieur.

De plus, l’OMS estime qu’environ la moitié de la population du monde utilise aujourd’hui des produits de la biomasse ( comme le bois et la bouse de vache ) pour faire la cuisine et se chauffer, souvent sans ventilation adéquate. En Inde, par exemple, 99 % des foyers des villages ruraux et plus de la moitié des foyers urbains utilisent des produits de la biomasse pour faire la cuisine (APDC, 1990 ). La proximité des fourneaux utilisés dans les maisons qui utilisent des produits de la biomasse a été associée à des infections respiratoires aiguës chez les jeunes enfants et à des maladies chroniques des poumons et au cancer chez les adultes. L’exposition pendant la grossesse peut également avoir un effet négatif sur son résultat, comme la naissance d’un enfant mort-né, une insuffisance cardiaque droite et un poids inférieur à la naissance ( Banque mondiale, 1993 ; Haile, 1994 ). Les femmes peuvent aussi souffrir de maux quotidiens, tels qu’irritation des yeux, écoulement nasal et maux de tête.

Des études effectuées en Chine, en Inde, au Népal et en Nouvelle-Guinée ont indiqué que près de la moitié des femmes adultes ( dont peu fument ) souffrent de maladies pulmonaires et cardiaques chroniques à cause du niveau élevé de fumée à l’intérieur de la maison. Les Chinoises qui ne fument pas et qui sont exposées à la fumée du charbon à la maison ( qui est particulièrement nocive ) présentent un risque de cancer des poumons similaire à celui des femmes qui fument légèrement ( Banque mondiale, 1993 ).

Une étude de quatre villages dans le Gujarat rural, en Inde, a constaté que les femmes qui faisaient la cuisine dans des huttes mal ventilées étaient exposées en moyenne à 100 fois le niveau de particules de fumée suspendues dans l’air jugé acceptable par l’OMS, 6 fois plus que les autres membres de la maison et 15 fois plus que les résidents de Delhi ( Chatterjee, 1991 ). Une autre étude effectuée en Inde a estimé que les femmes qui font la cuisine inhalent autant de benzopyrène, un cancérogène, que si elles fumaient 20 paquets de cigarettes par jour (OMS, 1984 ). Dans les régions montagneuses de haute altitude du Népal, les femmes souffrent souvent d’une maladie semblable à l’anémie. Cette maladie est causée par la présence d’oxyde de carbone dans le sang, une conséquence de l’exposition à long terme à des sources d’énergie non raffinées, comme les foyers pour faire la cuisine à l’intérieur ( Easterbrook, 1994 ). Les infections pulmonaires aiguës et les bronchites chroniques sont aussi très répandues dans les régions rurales de l’Inde et du Népal par suite de l’exposition à la fumée des cuisines (ONU, 1995 ).

Paolisso ( 1995 ) a laissé entendre que la déforestation et la rareté du bois à brûler augmentent vraisemblablement les risques associés à la pollution par la fumée, parce que les femmes sont forcées d’utiliser des produits de la biomasse de qualité inférieure et qui brûlent vite, ce qui accroît le temps qu’elles passent à s’occuper des feux de cuisson. Il a cependant fait remarquer que l’on ne dispose guère de données sur l’ampleur de la substitution des combustibles ni de preuves fiables de ses répercussions sur la santé.

De toute évidence, il est urgent d’effectuer davantage de recherches sur les effets de cette activité courante sur la santé. De plus, il faut examiner dans quelle mesure des modifications aux installations utilisées pour chauffer les maisons et y faire la cuisine ( p. ex. le type de fourneau, le type de ventilation, le type de combustible ) réduiraient l’exposition aux effets nocifs de la pollution de l’air intérieur. Il ne faut pas oublier, cependant, que les efforts déployés pour réduire les niveaux de fumée à l’intérieur peuvent avoir pour effet d’accroître les morsures d’insectes dans les communautés où le paludisme est endémique, car la fumée est connue pour éloigner les insectes qui mordent. C’est pourquoi les interventions visant à réduire la fumée à l’intérieur des maisons, dans les régions où le paludisme est endémique, doivent être accompagnées de mesures de contrôle du paludisme comme des moustiquaires imprégnées d’insecticides.

Les maladies tropicales

Du fait de la division du travail entre les sexes, les responsabilités des femmes à la maison et les rôles que la culture leur impose peuvent aussi accroître leur exposition aux maladies transmises par l’eau, comme la schistosomiase. Par exemple, dans les communautés où les femmes sont chargées de laver les vêtements ou de nettoyer les ustensiles de cuisine en les immergeant totalement ou en partie dans des eaux infectées, les femmes peuvent présenter des taux d’infection plus élevés que les hommes pendant la période de pointe de la mue des cercaires ( Huang et Manderson, 1992 ; Anyangwe et al., 1994 ). De plus, les femmes qui travaillent ou se déplacent pour trouver du combustible et du fourrage dans des lieux où la défécation est pratiquée en plein air, risquent une exposition aux maladies propagées par les excréments ( p. ex. la typhoïde, la dysenterie amibienne, les maladies parasitaires et l’ankylostome ).

Les lourdes charges

Les fillettes et les femmes d’Éthiopie portent souvent jusqu’à 77 kg de bois à brûler et d’autres produits (de 95 à 300 % de leur poids) et parcourent en moyenne II à 12 km par jour.

— Fekerte Haile, Organisation internationale du travail. Addis-Abéba ( Éthiopie)

Un grand nombre des responsabilités traditionnelles des femmes, dans les pays en développement, sont associées au transport de lourdes charges. Les femmes portent, soulèvent et transportent fréquemment des objets lourds dans le cadre de leurs activités quotidiennes. Par exemple, la responsabilité de l’approvisionnement en eau fraîche, qu’il faut souvent aller chercher très loin dans des contenants lourds, pour boire et pour faire la cuisine ainsi qu’aux fins de propreté et d’hygiène, est une tâche qui incombe presque exclusivement aux femmes et aux jeunes filles ( Carasco, 1994 ; Hatcher Roberts et Law, 1994 ). Des études effectuées à petite échelle en Asie et en Afrique indiquent que les femmes et les jeunes filles passent en moyenne de 5 à 17 heures par semaine à puiser et à transporter de l’eau ( ONU, 1991 ). Cependant, Butler et al.( 1987 ) ont indiqué que, lorsque le voyage vers la source est facilité par d’autres moyens de transport ( comme une bicyclette, un âne, une brouette ou un char à bœufs ), certains hommes peuvent y participer.

En outre, Rosina Wiltshire a fait remarquer que « des pompes à eau installées dans de nombreuses communautés se sont avérées inutiles. Bien que les femmes soient en général responsables de l’approvisionnement en eau, ces pompes ont été principalement conçues et installées pour être utilisées par des hommes ».

Les femmes sont aussi responsables de l’approvisionnement en bois à brûler. Gurinder Shahi, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a estimé qu’au Népal, les femmes des régions rurales marchent cinq à six heures par jour à pied à la recherche de bois à ramener à la maison ( Easterbrook, 1994 ). Les fillettes et les femmes d’Éthiopie portent fréquemment jusqu’à 77 kg de bois à brûler et d’autres produits ( de 95 à 300 % de leur poids ) et parcourent en moyenne entre 11 et 12 km par jour ( Haile, 1985 ; Abegaz et Junge, 1990 ). Dans le tableau 3, les données sur les charges de bois à brûler transportées en Éthiopie sont comparées avec les limites de poids de l’OlT.

Le transport de lourdes charges sur de longues distances est un travail physiquement exigeant et épuisant. Outre la fatigue, les lourdes charges peuvent causer une incidence accrue de maux de dos, de lombalgies, de problèmes chroniques et débilitants dans le dos et les jambes, de troubles des genoux et autres dommages physiques ( OIT, 1989 ; Haile, 1994 ). Au Viet Nam, le dur travail physique est chose courante et « on a constaté que les charges transportées sur la tête avaient un effet néfaste sur les vertèbres des travailleuses ( spécialement dans la région du cou ) » ( Nga, 1995 ).

L’eau peut être transportée sur la tête, le dos, l’épaule ou la hanche, suivant la région du monde (APDC, 1990 ) et chaque méthode peut créer des problèmes de santé pour les femmes. Les femmes qui transportent l’eau sur leur dos marchent souvent courbées. Le port asymétrique sur l’épaule peut

Tableau 3. Limites des charges à soulever et à transporter par les femmes selon les charges habituellement soulevées et transportées en Ethiopie ≬ comparaison de l’on.

 

Charge permise (en kg)

Charge moyenne ( en kg )
habituellement soulevée et
transportée par les
Éthiopiennes

Âge

Occasionnellementa

Fréquemmentb

15–18

15

10

46

19–44

15

10

64

45 et plus

15

10

55

Sources : on ( 1989 } ; Haile ( 1 994 ).

a Limites à ne pas dépasser sans risque pour la santé.

b Valeurs recommandées d’un point de vue ergonomique.

amener le corps à se développer davantage d’un côté. Le transport sur la hanche peut provoquer des troubles de la hanche (APDC, 1990 ). Enfin, le transport de l’eau sur le dos avec une courroie attachée au front peut provoquer de graves migraines.

Le transport de lourdes charges, comme de grands contenants d’eau, peut aussi provoquer une descente de matrice ( Labour Resource Centre, 1995 ) et a été associé à des troubles menstruels, des fausses couches et des naissances d’enfants mort-nés (NCSEW, 1988 ). Les fillettes qui commencent jeunes à transporter de lourdes charges d’eau présentent des risques de scoliose ( Chatterjee, 1991 ). L’Asian and Pacific Development Centre (APDC, 1990, p. 112 ) souligne également que les femmes sont exposées à des problèmes du squelette qui peuvent provoquer la difformité et l’invalidité.

Ces problèmes peuvent prendre diverses formes, notamment des lésions de la colonne vertébrale qui, avec le surmenage, peuvent dégénérer et se transformer en arthrose, rhumatisme arthritique ou cyphose ( dos courbé en permanence ). La douleur est constante et la mobilité diminue jusqu’à atteindre un stade où les gens sont complètement immobilisés. ( Traduction libre. )

Chez les femmes plus âgées des pays en développement, les chercheurs indiquent que l’invalidité fonctionnelle est essentiellement liée aux années passées à transporter de l’eau ( Doty, 1987 ). Ces types de dommages physiques peuvent à leur tour accroître le fardeau de la double journée des femmes.

Dégradation écologique et charges pour les femmes

Le défrichement des terres et la coupe des arbres entraînent la déforestation, obligeant les femmes des régions rurales à s’éloigner toujours plus de la maison pour chercher du bois à brûler. La déforestation assèche à son tour le sol et l’utilisation des insecticides et des engrais raréfie encore les sources d’eau accessibles aux femmes et finit par créer une pénurie d’eau à usage domestique. Cela a un effet sur la santé et les conditions de vie de la famille alors que les femmes sont épuisées par la recherche d’eau et de combustible.

— K, Soin, membre du Parlement, Singapour

Parce que la vie des femmes est associée de près aux ressources naturelles, la dégradation de l’environnement peut avoir des répercussions immédiates et dramatiques sur leur charge de travail et leur mode de vie ainsi que sur la santé et les conditions de vie de la famille dans son ensemble ( Muntemba, 1989 ; Soin, 1995 ). On entend par dégradation de l’environnement les changements négatifs du milieu physique et de l’écologie, comme la poilution de l’eau, le recul de la végétation, la destruction des forêts et l’appauvrissement des sols ( Tsikata, 1994 ).

Si la dégradation de l’environnement réduit la quantité de nourriture produite par la terre et par les eaux, ou diminue la quantité du combustible disponible pour faire la cuisine, les femmes, qui sont essentiellement responsables de l’alimentation de leur famille, s’épuisent parce qu’elles sont forcées de travailler plus longtemps pour s’acquitter de leurs tâches ( Jacobson, 1992a ). Une étude effectuée dans les régions rurales du Kenya a conclu que la marginalisation agricole et la détérioration de l’environnement augmentaient la charge de travail des femmes en âge d’avoir des enfants plus que celle des autres membres de la maisonnée ( Ferguson, 1986 ). Dans trois communautés du Népal, une étude a montré que la déforestation avait eu pour effet d’accroître de façon notable le nombre de fois où les femmes doivent aller chercher du bois à brûler. Dans les communautés montagneuses, le temps consacré quotidiennement à la collecte du bois est passé d’un peu plus d’une heure à deux heures et demie ( Kumar et Hotchkiss, 1988 ). Dans certaines régions de l’Inde, où la forêt a été ravagée, les femmes et les enfants doivent parcourir de huit à dix kilomètres tous les jours pour se procurer suffisamment de bois pour faire cuire le repas du soir, alors qu’il y a sept ou huit ans, il leur suffisait d’une courte marche d’un ou deux kilomètres (APDC, 1990 ). Dans le district de Jayawijaya, dans la province d’Irian Jaya, en Indonésie, à mesure que diminuait la surface de terre cultivable, les gens ont commencé à utiliser les flancs élevés des collines, ce qui a provoqué une érosion du sol. Le sol a perdu sa fertilité et la production de nourriture a diminué. Le résultat final a été une détérioration de la qualité de vie pour tout le monde, mais, en particulier, pour les femmes et les enfants 5.

Les risques les plus graves pour la santé, dans la région de Tongu, sont liés à la dégradation de l’environnement et la pauvreté provoquées par la détérioration et la disparition des moyens d’existence. L’activité économique entourant la récolte des myes, une activité essentiellement féminine, a complètement disparu.

— Dzodzi Tsikata, Institut de recherches statistiques, sociales et économiques, Université du Ghana, Legon ( Ghana )

5 Voir Handali, S., « Gender and women’s health issues in Jayawijaya District, Irian Jaya, Indonesia », texte inédit présenté au concours CRDI/TRD 1994–1995.

Les femmes, qui sont principalement responsables de l’approvisionnement en eau de leur famille, peuvent devoir parcourir des distances supplémentaires en quête d’eau potable à cause de la dégradation de l’environnement. Le déversement croissant de produits chimiques agricoles et de déchets organiques dans les rivières, ainsi que l’envasement créé par la déforestation, compromettent gravement l’approvisionnement en eau propre et sans danger pour les femmes des régions rurales (APDC, 1992 ).

Des chercheurs qui, dans le cadre d’un projet au Burkino Faso, évaluaient l’incidence de la pénurie de bois à brûler sur les pratiques agricoles des femmes et l’alimentation des familles ( Rathgeber, 1990b, p. 500 ), ont constaté que :

les femmes étant forcées de passer une plus grande partie de leur temps à chercher du bois à brûler, elles ont moins de temps pour l’agriculture. Ceci se solde en retour par une réduction des récoltes et de la quantité de nourriture disponible pour la famille ainsi que du surplus à vendre dans les marchés locaux. En même temps, les femmes font moins souvent la cuisine et servent à leur famille des aliments achetés bon marché dans les magasins ou cuits plusieurs heures auparavant et souvent conservés dans des conditions malsaines et insalubres. ( Traduction libre. )

Le double ou triple fardeau des femmes

Pour comprendre les problèmes de santé des femmes au travail, il faut prendre conscience de la combinaison des charges et des risques associés aux nombreux rôles des femmes, y compris le travail rémunéré et les responsabilités familiales ( Timoteo et Llanos-Cuentas, 1994 ). Malheureusement, peu de recherches ont été faites jusqu’ici sur la double journée de travail des femmes. Le fait que les femmes combinent souvent les responsabilités domestiques ou familiales avec un travail rémunéré n’a pas été suffisamment étudié du point de vue de la santé ( Messing, 1991 ).

On parle souvent du « double fardeau » des femmes qui ont des responsabilités à la fois à la maison et dans la population active officielle ( Messing, 1991 ; Acevedo, 1994 ; Berr, 1994 ). Breilh a aussi inventé l’expression « triple charge » ou « triple fardeau » pour désigner les responsabilités triples que les femmes peuvent avoir, c’est-à-dire la responsabilité de la reproduction, du travail productif dans la population active officielle et du travail domestique ( Breilh, 1994 ).

Les grossesses, souvent à de très courts intervalles, l’allaitement et les soins aux enfants tout en effectuant sans interruption des tâches épuisantes ( Alilio, 1994 ) représentent une lourde charge pour beaucoup de femmes. Des études menées en Tanzanie indiquent que la plupart des femmes continuent jusqu’au dernier jour de la grossesse à s’acquitter de travaux fatigants comme la collecte du bois et du combustible, le travail dans les champs, la

Les femmes sont responsables de l’entretien de la maison et du bien-être de la famille, qu’elles participent ou non au marché du travail. Cette réalité représente une double charge de travail pour beaucoup de Chiliennes.

— Jasna Stiepovick et Julia Rami’rez, département des sciences infirmières, Universidad de Concepciôn ( Chili )

cuisine, la lessive et les soins aux enfants et ce, souvent sans apport calorique adéquat ( Mpanju, 1992 ).

Les femmes du monde entier sont presque exclusivement responsables des soins aux enfants et du travail ménager et reçoivent généralement peu d’aide de la part de leur mari et des autres membres de la famille ( Chavkin, 1984 ; Breilh, 1994 ). Il y a aussi un manque de soutien institutionnel, tel que crèches, garderies et autres services, particulièrement pour les mères de la classe ouvrière.

La double charge de travail à l’intérieur et à l’extérieur de la maison crée un stress physique et mental considérable ( Berr, 1994 ) et les rôles entrent souvent en conflit. Les tâches ménagères ne commencent ni ne finissent à heure fixe, mais accaparent la journée entière d’une façon ou d’une autre. Pendant qu’elles travaillent, les femmes n’arrêtent pas de penser à leur maison et de prendre des décisions touchant la famille et les enfants.

Les mauvaises conditions de vie dans la famille peuvent avoir un effet négatif sur le travail des femmes dans le secteur officiel. La fatigue peut augmenter l’absentéisme et susciter la frustration et le mécontentement, ce qui peut provoquer des taux élevés de changement d’emploi ( OIT, 1994 ). Le surmenage causé par l’excès de responsabilités peut avoir des effets nocifs cumulatifs sur la santé, comme la fatigue, le stress et une moindre résistance à la maladie et aux affections chroniques. La nécessité de répondre aux différentes exigences peut causer une privation des nécessités physiologiques comme le sommeil. De plus, un organisme fatigué par les soins prodigués à un bébé ou un parent malade résistera moins bien à un virus ou aux effets nocifs des solvants dans les produits de nettoyage ( Messing, 1991 ).

CARACTÉRISTIQUES DU TRAVAIL DES FEMMES

Diverses caractéristiques du travail des femmes peuvent avoir des conséquences nocives sur leur santé et leur bien-être. Les caractéristiques examinées ci-après sont associées aux types de travail qu’effectuent un grand nombre de femmes dans les pays en développement. Ces caractéristiques ne sont pas particulières au travail des femmes, mais elles constituent des éléments courants de beaucoup de travaux effectués par les femmes.

Longues heures de travail et manque de loisirs

Quand on tient compte de toutes les formes du travail des femmes, les femmes des pays en développement ont des journées de travail plus longues que les hommes ( Jacobson, 1993 ; Paolisso et Leslie, 1995 ). Bien qu’il y ait des différences d’un pays à l’autre, les estimations varient entre 16 et 20 heures par jour dans certaines régions ( Secrétariat du Commonwealth, 1990 ; Acevedo, 1994 ; Handali, voir note 5 à la page 129 ). Dans les pays d’Afrique, par exemple, les femmes qui travaillent dans les champs y passent généralement 16 heures par jour. Au Burkina Faso, en Inde, au Kenya, au Népal et au Niger, la récolte de bois à brûler prend parfois de trois à cinq heures par jour et suppose que les femmes parcourent des distances de trois à dix kilomètres ( Agarwal, 1986 ). À titre d’exemple du temps qu’il faut aux femmes pour effectuer leur travail, une étude effectuée en Afrique a montré qu’il faut environ 13 heures pour piler suffisamment de maïs pour nourrir une famille pendant quatre à cinq jours lorsqu’on ne dispose pas de la technologie moderne adéquate ( Butler et al., 1987 ).

Sur les plaines battues par le vent de l’Inde occidentale, les femmes de Gotarka considèrent leur vie difficile comme quelque chose d’aussi naturel que la mousson. Pendant que les maris sirotent du thé et parlent politique, les femmes, comme leurs mères et leurs grand-mères avant elles, allaitent et élèvent les enfants, cherchent le bois à brôler, transportent l’eau, nettoient la maison, s’occupent du bétail, ensemencent les champs. Et il leur faut encore nourrir tout leur monde. « Les journées sont si longues », dit Manju Javantila Darji. mère de trais enfants. « On commence à travailler quand la lune est dans le ciel et quand on finit, elle y est toujours. »

— Stackhouse ( 1995a, p. Dl )

Les responsabilités des femmes à titre de dispensatrices de soins de santé leur prennent beaucoup de temps : « lorsqu’une mère a un enfant très malade, elle le veille jour et nuit » ( Wyss et Nandjinger, 1995 ). Selon Richters ( 1994 ), il faut passer énormément de temps auprès d’un bébé qui a la diarrhée, qui vomit et qui est agité par la fièvre si on veut le persuader d’ingérer des quantités suffisantes de liquide, cuillerée par cuillerée, pour le réhydrater oralement, et il faut aussi beaucoup de temps pour allaiter les enfants à la demande jusqu’à l’âge de 18 mois à 2 ans, tel que recommandé dans les programmes de santé primaires des pays en développement.

Les femmes ont donc moins de loisirs et de temps libre que les hommes, particulièrement pendant certaines saisons agricoles ( Holmboe-Ottesen et al., 1989 ; McGuire et Popkin, 1989 ). Non seulement les femmes travaillent de longues heures, mais elles ont peu de contrôle sur l’organisation de leur travail. Paolisso et Leslie ( 1995 ) ont observé que le moment où les femmes doivent aller chercher l’eau et le bois à brûler, préparer la nourriture, nourrir les membres de la famille, baigner les enfants, les éduquer et s’occuper d’eux, et travailler dans les champs ou à l’usine dépend en grande partie de la demande et des besoins quotidiens de la famille.

Des journées de travail aussi longues causent souvent une fatigue extrême. À cause du manque de loisirs, il est aussi extrêmement difficile pour les femmes de trouver le temps de s’occuper adéquatement de leurs problèmes de santé ( Berr, 1994 ).

Mal payée ou pas du tout

Pour s’occuper de sa santé, il faut avoir de l’argent : si l’on n’a pas un salaire décent, ce n’est pas la peine de parler de la santé et des mesures à prendre pour la protéger ( Misch, 1992 ). Il faut avoir un salaire suffisant pour pouvoir s’offrir une alimentation équilibrée, un logement convenable avec des sources d’eau saine et des sources d’énergie qui ne dégradent pas l’environnement, et pour recevoir une éducation dans ces domaines. D’après Messing ( 1991 ), un revenu trop faible peut contribuer à la détérioration de la santé en diminuant l’accès à une alimentation et à un logement convenables et en augmentant les niveaux de stress.

Or, une grande partie du travail des femmes est sous-payé et sousévalué. Le salaire moyen des femmes est inférieur à celui de leurs contreparties masculines (ONU, 1991 ; Acevedo, 1994 ). Dans l’ensemble du monde, le salaire des femmes représente, en moyenne, seulement les deux tiers de celui des hommes. Dans certains pays d’Afrique et d’Asie, l’écart de salaire entre les hommes et les femmes atteint 50 % (UNDIESA, 1991 ). De plus, les femmes s’acquittent de tâches essentielles à la maison qui ne sont pas considérées économiquement importantes et ne sont pas rémunérées.

À cet égard, les observations de Gerelsuren et Erdenechimeg ( 1995 ), de la Fédération des femmes de Mongolie, sont malheureusement trop connues :

Bien que la loi mongolienne sanctionne le principe de l’égalité salariale pour un travail d’égale valeur, les femmes reçoivent en moyenne un salaire inférieur à celui des hommes. Cette disparité est liée au fait que les femmes occupent la plupart du temps des emplois non professionnels et moins bien rémunérés. Quoique le gouvernement ait pris certaines décisions qui offrent aux femmes des heures de travail flexibles, une meilleure sécurité au travail et des conditions de travail saines, celles-ci continuent à travailler dans des milieux insalubres. ( Traduction libre. )

La ségrégation des emplois et la discrimination contribuent à la différence de salaires entre les femmes et les hommes ( OIT, 1985 ). Généralement, les femmes occupent des emplois qui ont peu de prestige et de statut ( Acevedo, 1994 ;ONU, 1991 ). De plus, même lorsque les femmes font le même travail que les hommes et ont les mêmes diplômes, elles reçoivent habituellement un salaire inférieur à celui des hommes. La féminisation des professions traditionnellement occupées par les hommes a tendance à les dévaluer ( Acevedo, 1994 ).

La perception du travail des femmes comme source de soutien secondaire est une autre raison citée par beaucoup pour expliquer la différence de salaire entre les sexes pour le même travail ( Grandea, 1994 ).

Les femmes qui reçoivent un salaire inférieur sont plus susceptibles de souffrir d’un manque d’énergie nutritionnelle et d’anémie ainsi que de niveaux de stress élevés ( Carasco, 1994 ). Parce que les femmes ont tendance à utiliser une grande partie du revenu qu’elles gagnent pour nourrir leur famille et pour répondre aux autres besoins essentiels, il ne reste aux femmes qui reçoivent un salaire inférieur pratiquement rien pour s’occuper de leur santé ( Paolisso et Leslie, 1995 ).

Les salaires à la fabrique de textiles n’étaient pas suffisants pour satisfaire les besoins de base. Le salaire entier du mois passait tout simplement à l’achat et à la préparation de la nourriture.

— Joseph Carasco, Centre de recherches fondamentales. Kampala ( Ouganda )

Les femmes pauvres qui n’ont pas suffisamment de temps pour gagner un salaire, prendre soin de leur famille et s’occuper consciencieusement de leur santé ne prennent généralement pas sur leur temps de travail pour utiliser les services de santé : « Les congés de maladie peuvent être impossibles ou trop chers pour les femmes dont le revenu est inférieur, et elles peuvent être forcées de négliger leurs propres besoins de santé » ( Messing, 1991, p. 10 ).

Comme Vickers ( 1991, p. 15 ) l’a fait remarquer, la crise économique ajoute encore aux problèmes de santé des femmes associés à l’insuffisance du revenu :

Lorsque le prix des aliments augmente et que les salaires diminuent, les femmes doivent passer plus de temps à trouver des façons de calmer la faim des membres de la famille ; elles doivent donc aller de plus en plus loin pour trouver les boutiques et les marchés les moins chers, préparer des aliments bon marché et souvent manger moins elles-mêmes pour pouvoir nourrir leur mari et leurs enfants. ( Traduction libre. )

Il peut aussi exister un lien entre les niveaux de revenu et la sécurité au travail. Lorsque les revenus des femmes dans une société sont plus élevés et qu’il y a davantage de possibilités d’emploi, les femmes peuvent dans une certaine mesure avoir le choix et décider de ne pas continuer à travailler dans une situation qui présente des risques pour leur santé et leur sécurité. Dans

Il faut relever le salaire de base des travailleurs pour qu’ils aient un niveau de vie acceptable si l’on veut appliquer des normes supérieures de santé et de sécurité au travail. Le Labour Resource Centre a constaté que la préoccupation la plus importante des travailleurs est le salaire. Les travailleurs feront même des travaux dangereux ou utiliseront des produits chimiques nocifs s’ils reçoivent une indemnité pour le faire.

— Josie Zaini, Association d’éducation et de recherches pour les consommateurs, Malaisie

les sociétés qui offrent moins de possibilités d’emploi aux femmes, le seul choix à leur disposition peut être un emploi mal payé, avec peu ou pas de protection en termes de santé et de sécurité, ou pas d’emploi du tout.

Si le salaire est insuffisant pour satisfaire aux besoins de base, les femmes peuvent être forcées de chercher d’autres sources de revenu. Il faut accorder plus d’attention au fait que les femmes prennent souvent un emploi secondaire et aux effets que cela peut avoir sur leur santé. Les femmes qui ont des ressources limitées peuvent aussi s’adonner à la prostitution pour se procurer un revenu supplémentaire ( Standing et Kisekka, 1989 ; Pauw, 1993 ; Strebel, 1994 ). D’après L’OMS ( 1994a, p. 59 ), « quand les temps sont durs, certaines femmes se retrouvent dans la nécessité d’échanger leur corps pour de l’argent, de la nourriture ou un abri ». Les rapports avec des partenaires sexuels multiples, sans préservatifs, accroissent le risque de maladies transmises sexuellement, y compris le sida.

Les femmes chefs de famille

Il est impossible de parler des femmes et de leur milieu de travail sans mentionner le fait que beaucoup d’entre elles sont l’unique ou la principale source de revenu de la famille. Le nombre croissant, dans le monde entier, de femmes seules avec des enfants qui se retrouvent chefs de famille est attribuable à un certain nombre de facteurs, dont la migration nationale et internationale des hommes en quête de travail, le divorce, le veuvage, la guerre, l’abandon, ainsi que le nombre croissant de naissances parmi les femmes adolescentes sans partenaire fixe. Selon les estimations, les familles dirigées par une femme représenteraient le tiers des familles de la planète. Aux Antilles, les femmes constituent jusqu’à 50 % de tous les chefs de famille et, dans certaines parties de l’Afrique subsaharienne, la proportion est de 45 % (ONU, 1991 ).

Les familles dont le chef est une femme sont particulièrement défavorisées et vulnérables économiquement. Comme beaucoup de femmes n’ont pas eu la possibilité de poursuivre des études et qu’elles ont de la difficulté à obtenir un emploi sûr et bien payé, le revenu des familles dirigées par une femme est souvent nettement inférieur à celui des familles dirigées par un homme. Au Canada, les familles monoparentales dirigées par des femmes sont de plus en plus nombreuses, et la plupart ( 57,2 % en 1992 ) vivent dans la pauvreté ( Condition féminine Canada, 1994 ). Comme l’indique Richters ( 1994 ) :

Il appert que les femmes sont le seul soutien financier du tiers des familles du monde. Parce que souvent ces mères n’ont guère reçu d’instruction et n’ont pas de capital à investir et qu’elles s’efforcent de mener à bien deux emplois à la fois ( à la maison et à l’extérieur ), les familles dont le chef est une femme sont généralement pauvres. ( Traduction libre. )

La nécessité, dans ces familles, de vivre dans un espace limité avec des ressources insuffisantes, s’avère très éprouvante pour la santé physique et mentale de ces femmes ( Acevedo, 1994 ). La dégradation des services publics a des répercussions néfastes surtout pour les femmes.

La transformation des économies agricoles de subsistance en économies génératrices de revenu peut accroître le nombre des familles dirigées par une femme et avoir des effets négatifs sur la santé. Herrera et Lobo-Guerrera ( 1994 ) ont expliqué que certaines femmes indigènes, dans les bassins de l’Orinoco et de l’Amazone, devaient faire face à des tâches beaucoup plus lourdes, travaillant dans les champs et à la maison avec leurs enfants, tandis que leur mari, en quête d’activités génératrices de revenu, quittait la famille pendant de nombreux mois de l’année. Bien que ces femmes tirent des produits agricoles de leur conuco ( petit lopin de terre ), elles sont privées des protéines, comme la viande et le poisson, que leur mari se chargeait habituellement de rapporter.

Leslie ( 1992, p. 15 ) précise encore :

Compte tenu de la prévalence accrue des familles dirigées par une femme et des différences, en ce qui a trait au bien-être des femmes et des enfants, constatées dans ces circonstances, il est urgent de procéder localement à des recherches en sciences sociales pour examiner les facteurs de pauvreté et de mauvaise santé dans ces familles. ( Traduction libre. )

Postes inférieurs

Dans le monde entier, la position subordonnée des femmes dans la société est reflétée par la pénurie de femmes dans les postes de supervision et de direction. Dans la majorité des pays du monde, les femmes occupent seulement une petite proportion ( entre 10 et 30 % ) des postes de gestion, et encore moins ( moins de 5 % ) des postes les plus élevés ( OIT, 1993 ). En outre, elles sont peu représentées dans les secteurs du pouvoir, de la politique et de la prise de décisions. En fait, les femmes constituent moins de 5 % des chefs d’État, des dirigeants des grandes entreprises et des postes clés dans les organisations internationales (ONU, 1991 ).

Chômage

Dans bien des pays en développement, le chômage est beaucoup plus élevé parmi les femmes que parmi les hommes. Les femmes sont particulièrement vulnérables aux fluctuations économiques, ont moins de chances de tirer profit de l’expansion des emplois et sont les premières à souffrir de leur compression. Le chômage, particulièrement pour les gens plus pauvres, est associé à une détérioration de la santé physique et mentale.

Dans les Antilles anglophones, par exemple, les femmes et les jeunes adultes ( âgés de moins de 25 ans ) sont les groupes les plus vulnérables de la population active, et les femmes sont particulièrement défavorisées. Sur les 191 000 personnes employées à la Jamaïque en 1989, 57,2 % avaient 25 ans ou moins, mais 64,5 % des personnes au chômage étaient des femmes ( Planning Institute of Jamaica, 1989 ). En 1991, le taux de chômage des femmes de la Jamaïque était plus de deux fois supérieur à celui des hommes ( 23,1 % contre 9,3 % pour les hommes ) ( OIT, 1994 ). Des tendances similaires ont été signalées pour la Guyane en 1986 et pour Trinité-et-Tobago en 1988 (OPS et OMS, 1992 ).

En règle générale, les femmes figurent moins dans les statistiques du chômage parce qu’elles travaillent habituellement à temps partiel et de façon temporaire et font partie de la population active informelle.

— Doris Acevedo, Universidad de Carabobo. Maracay ( Venezuela )

Il arrive que les femmes ne cherchent pas de travail parce qu’il n’y a pas de travail qui leur convienne ou parce qu’elles sont découragées par les préjugés et la discrimination ( Nuss, 1989 ). Outre la discrimination générale fondée sur le sexe, les femmes sont parfois victimes de discrimination si elles ne répondent pas à certains canons de beauté ( Acevedo, 1994 ). Les chefs d’entreprise peuvent engager les femmes ou leur accorder des promotions en fonction de leur beauté physique ( Humphrey, 1987 ). Au Venezuela, par exemple, les offres d’emploi pour les secrétaires et les réceptionnistes portent souvent la mention « présentant bien », attribut qui n’est pas exigé des hommes ( Acevedo, 1994 ).

Travail à temps partiel et travail bénévole

Les femmes ont davantage tendance que les hommes à travailler à temps partiel, en partie parce qu’elles tentent d’organiser leur travail autour de leurs responsabilités familiales. Des activités comme la vente ambulante et dans les marchés offrent ce type de flexibilité. En Afrique occidentale, les femmes dominent ce secteur — elles constituent jusqu’à 93 % des marchands ambulants à Accra, 87 % au Lagos et 60 % à Dakar. Toutefois, un important pourcentage de femmes dans le monde occupent des emplois saisonniers ou à temps partiel. La main-d’œuvre à temps partiel, qui d’habitude n’est pas représentée par des syndicats, n’a pas les moyens de négocier de meilleures conditions de travail ( Grandea, 1994 ).

Le travail social bénévole est habituellement effectué par les femmes et reçoit peu de reconnaissance et peu de rémunération. Les femmes constituent la plupart des bénévoles dans les hôpitaux, les cliniques d’entraide et d’autres organismes communautaires. En Amérique latine, elles ont créé des réseaux, tels que des associations de ménagères et des regroupements de mères de famille, pour s’aider mutuellement à répondre à leurs besoins quotidiens ( Jacquette, 1986 ). Dans les zones périphériques des grandes villes du Pérou, par exemple, un grand nombre de femmes ont créé et dirigent des « clubs de mères » et des « comités Verre de lait » qui sont des organisations visant à freiner la détérioration des conditions économiques et de la santé ( Timoteo et Llanos-Cuentas, 1994 ).

La vie des femmes — et leur charge de travail — est particulièrement touchée par les crises économiques et les politiques d’ajustement qui les obligent à assumer des responsabilités toujours plus grandes. La réduction des services de santé, de garde d’enfants et d’éducation signifie que les femmes sont forcées de fournir, à titre privé ou individuel, les services sociaux qui étaient auparavant dispensés par l’État ( Secrétariat du Commonwealth, 1990 ; Vickers, 1991 ; Acevedo, 1994 ).

Travail par roulement

Le travail par roulement, qui devient de plus en plus courant dans le secteur industriel à mesure qu’on y introduit des équipements automatisés, peut entraîner des troubles gastro-intestinaux, des désordres nerveux et des troubles du sommeil ( p. ex. fatigue, sommeil léger et insomnie ). L’anxiété, la confusion, l’irritabilité, la nervosité, la dépression et les difficultés à se concentrer ont également été associées au travail par roulement ( Labour Resource Centre, 1995 ).

Les conditions de travail par roulement, qui supposent souvent le travail de nuit, peuvent aussi réduire le temps que les femmes ont à consacrer à leur famille à la maison. Par exemple, Haile ( 1994 ) a signalé que les femmes qui travaillent la nuit en Ethiopie sont souvent forcées de dormir à l’usine après le travail, faute de service de transport adéquat pour rentrer chez elles. Si une femme prend un autobus qui l’amène au centre de la ville, elle est exposée à la fois à des risques de viol et de vol. C’est pourquoi beaucoup de femmes décident de passer la nuit dans leur lieu de travail, où elles ne dorment pas suffisamment la plupart du temps.

Santé et sécurité au travail : quelle protection ?

Les lois ne servent pas à grand-chose si les mécanismes d’application et autres systèmes administratifs sont faibles et si ceux qu’ils sont supposés protéger ne sont pas au courant de leur existence.

— Josie Zaini. Association d’éducation et de recherches pour les consommateurs, Malaisie

Il est nécessaire d’avoir des normes de santé et de sécurité au travail, et des mesures en place pour appliquer ces normes, afin de promouvoir et de maintenir le niveau le plus élevé possible de bien-être physique, mental et social chez les travailleurs de tous les groupes professionnels ( Puta, 1994 ). Pour assurer la santé et la sécurité des travailleurs, il faut prendre des mesures qui permettent de créer et d’entretenir un milieu de travail sain et sans danger et de prévenir les maladies et les accidents associés aux conditions de travail.

Les femmes travaillent souvent dans des industries non réglementées qui peuvent être hors de la portée de la législation sur la santé et la sécurité au travail ( OIT, 1985 ; Banque mondiale, 1993 ). Dans les cas où des lois sont en place, elles peuvent ne pas être appliquées, ce qui leur enlève toute utilité.

On a pris conscience des répercussions terribles de la non-application des normes de sécurité à Bangkok, en Thaïlande, en mai 1993, lorsque l’absence de mesures de prévention des incendies a causé la mort de plus de

Beaucoup de travailleurs, les femmes en particulier, occupent des emplois qui ne sont pas protégés par des lois sur la sécurité sociale et le travail, ou travaillent dans des conditions non garanties par contrat. Un nombre considérable de travailleuses sans contrat au Chili travaillent dans le secteur de l’agriculture ( p. ex. la cueillette des fruits ). les services domestiques, la pêche et les industries du commerce.

— Ximena Diaz Berr. travailleuse salariée des secteurs de l’industrie et de la culture fruitière. Santiago ( Chili )

200 employés et de graves blessures à des centaines d’autres tandis qu’une fabrique de jouets était réduite en cendres. La plupart des victimes étaient des jeunes femmes thaïlandaises qui gagnaient l’équivalent de 6 $US par jour à bourrer des poupées. Les avertisseurs d’incendie ne fonctionnaient pas et il n’y avait pas de détecteurs de fumée, d’escaliers de secours ni de consignes en cas d’incendie. Parce que certaines portes d’issue étaient régulièrement fermées à clé, des centaines de personnes ont été obligées de sauter des troisième et quatrième étages dans un effort désespéré pour échapper à l’incendie. L’usine était la propriété d’actionnaires de Taïwan, de Hong-Kong et de Thaïlande, et fabriquait des poupées pour des compagnies de jouets multinationales aux États-Unis.

Comme le dit Kittipak Thavisri, spécialiste de la main-d’œuvre à l’université Thamasat à Bangkok ( IHT, 1993, p. 15 ) :

La sécurité publique coûte cher [ ... ]. Pour attirer les investisseurs étrangers [ ... ], il faut laisser tomber certains des règlements du travail [ ... ]. La situation est semblable dans des milliers d’autres usines de Thaïlande [... ]. On ne fait pas suffisamment attention, en Asie, à la sécurité et aux conditions de travail dans un climat économique où les fabricants ont souvent pour unique objectif de maintenir les coûts de production à un niveau aussi bas que possible. ( Traduction libre. )

De fait, dans tout le sud-est de l’Asie, les lois sur la sécurité au travail n’ont pas suivi le phénoménal développement économique de la région. Dans certains pays, il n’y a pas de lois du tout. Et quand il y en a, elles ne sont presque jamais appliquées ( Shenon, 1993 ).

Il faut prendre davantage de mesures pour veiller à ce que des normes adéquates de santé et de sécurité au travail et des mesures d’application des lois soient adoptées pour lutter contre les risques associés au travail des femmes.

Bien qu’un certain nombre de conventions de l’Organisation internationale du travail visent spécifiquement la protection de la santé des travailleurs, leur application par les pays membres a laissé à désirer.

— Fekerte Halle, Organisation internationale du travail, Addis-Abéba ( Éthiopie )

Dans les pays industrialisés, l’attention aux questions de sécurité au travail pour les femmes s’est généralement limitée à la sauvegarde de leur capacité de reproduction et on a cherché à les protéger des milieux de travail jugés dangereux pour la fécondité ( Eines, 1993 ) et à défendre la santé du fœtus. Le fait que les hommes puissent aussi subir des dommages dans leurs fonctions de reproduction a été largement négligé jusqu’à récemment.

Les femmes doivent être conscientes du fait que les lois sur la protection peuvent aussi être utilisées contre elles. On peut en effet invoquer les lois sur la protection pour justifier des pratiques et des politiques de travail discriminatoires afin de tenir les femmes à l’écart des emplois mieux payés qui sont occupés essentiellement par des hommes. Dans un procès américain, par exemple, la Cour suprême des États-Unis a conclu que la loi sur la protection au travail qui excluait « les femmes enceintes ou en âge d’avoir des enfants » était utilisée pour les empêcher d’obtenir des emplois bien rémunérés ( Johnson Controls, 1991 ).

D’autres types de lois visant à protéger les femmes peuvent aussi finir par réduire leur salaire ou les décourager de garder leur emploi. Par exemple, plusieurs pays ont des lois qui fixent des périodes standard de congé de maternité et offrent des avantages spéciaux aux femmes. Ces lois requièrent habituellement des employeurs qu’ils fournissent ces avantages aux travailleuses, ce qui, en réalité, augmente le coût de leur recrutement. Pour éviter les prestations de maternité, certains fabricants de vêtements du Bangladesh n’embauchent les jeunes femmes que sur une base quotidienne et temporaire ( Banque mondiale, 1993 ). Acevedo ( 1994 ) a rapporté qu’au Venezuela, les modifications apportées à la loi sur l’emploi qui avaient pour objet d’avantager les femmes ( p. ex. l’extension du congé de maternité de 12 à 16 semaines et l’interdiction de renvoyer une femme pendant l’année qui suit la naissance d’un enfant ) ont en fait causé des préjudices à certaines d’entre elles. Pour contourner la loi, certains employeurs du secteur industriel ne recrurent plus que des femmes qui ont passé l’âge d’avoir des enfants ou remplacent les employées par des hommes. Certaines sociétés, avant d’engager une femme en âge d’avoir des enfants, exigent même qu’elle produise un certificat médical attestant qu’elle s’est fait stériliser ( Acevedo, 1994 ).

Manque de soutien des syndicats

Les femmes peuvent souffrir d’un stress supplémentaire au travail lorsqu’elles n’ont pas d’association de protection pour les soutenir quand c’est nécessaire. Par exemple, les travailleurs de certaines zones de libre-échange ou de production aux fins d’exportation, comme Sri Lanka, ne sont pas autorisés par la loi à former des syndicats (APDC, 1990 ).

Les cadres des syndicats étaient surtout des travailleurs de sexe masculin, qui habituellement ne sont pas sensibles aux problèmes des femmes. Les femmes avaient donc moins recours à un groupe organisé, supposé être là pour aider tous les employés.

— Joseph Carasco, Centre de recherches fondamentales. Kamala ( Ouganda )

Lorsqu’il y a effectivement des syndicats, les femmes y sont souvent sous-représentées. Le Labour Resource Centre ( 1995 ) a rapporté qu’en Malaisie, la loi exige qu’un comité de sécurité soit créé dans les lieux qui emploient plus de 40 personnes. Bien que la loi spécifie le nombre d’employés, d’employeurs, etc. qui doivent faire partie du comité, elle ne fait pas mention de représentation en fonction du sexe.

Les cadres des syndicats étaient essentiellement des travailleurs de sexe masculin qui habituellement ne sont pas sensibles aux problèmes des femmes. En conséquence, les travailleuses avaient moins recours à un groupe organisé qui était supposé être là pour aider tous les employés.

— Joseph Carasco, Centre de recherches fondamentales, Kamala ( Ouganda )

Les intérêts des travailleuses — comme la garde d’enfants, le harcèlement sexuel, le défaut d’accès au capital, l’infériorité sociale et les questions de santé et de sécurité — sont rarement soutenus par les syndicats. Dans une étude des syndicats dominés par les hommes dans des professions dominées par les femmes ( Rathgeber, 1990a, p. 16 ), les chercheurs ont constaté que :

Les préoccupations des femmes n’étaient habituellement pas formulées par les délégués syndicaux et les femmes elles-mêmes hésitaient à participer aux activités du syndicat parce qu’elles estimaient qu’elles n’avaient pas les compétences verbales nécessaires ou qu’elles ne disposaient pas du temps qu’il fallait pour combiner l’activité syndicale avec leurs responsabilités domestiques [ ... ]. Même lorsque les femmes avaient atteint des niveaux élevés de qualification ou étaient devenues membres de syndicats qui étaient supposés protéger leurs intérêts, la différence entre les sexes continuait à constituer un important facteur de disparité dans l’expérience réelle en milieu de travail. ( Traduction libre. )

Il faut adopter des stratégies pour augmenter la représentation des femmes dans les syndicats et pour faire en sorte que les syndicats répondent mieux aux besoins de leurs membres, y compris la main-d’œuvre féminine.

Absence de contrats

Beaucoup de femmes des pays en développement travaillent sans contrat et ne bénéficient donc d’aucune assurance en matière de santé ou de sécurité sociale ( Machado, 1993 ; Berr, 1994 ). Les employeurs ne sont pas non plus tenus d’accorder des congés de maternité ou le droit d’utiliser la clinique médicale de la société aux travailleurs engagés sans contrat ou avec un contrat temporaire. Zaini 6 a expliqué que, parce qu’une femme enceinte qui travaille pour un entrepreneur dans une plantation de Malaisie n’a pas droit à un congé de maternité payé, elle revient à la plantation une semaine après son accouchement, car son revenu est essentiel à la survie de la famille.

Une étude de 300 travailleuses dans le secteur de la cueillette du raisin aux fins d’exportation au Chili ( l’une des plus importantes sources d’emploi féminin dans le secteur de la production ) a révélé que 65 % des femmes travaillaient avec un contrat temporaire, et que 14,3 % travaillaient sans aucun contrat ( Medel et Riquelme, 1992 ). Dans le meilleur des cas, certaines de ces femmes étaient protégées contre les maladies et les accidents liés au travail pendant les mois où elles étaient employées. Cependant, si elles avaient des problèmes de santé en rapport avec leur dur travail après la saison de cueillette des fruits, elles se retrouvaient sans protection ( Berr, 1994 ).

Les femmes occupent souvent des emplois temporaires ou à temps partiel et n’ont généralement pas droit à une assurance contre les accidents et les maladies, même si elles ont un contrat. Celles qui travaillent dans le secteur agricole, comme domestiques, dans les secteurs de la pêche et de la cueillette des fruits, travaillent souvent sans contrat ( Berr, 1994 ). Au Brésil, environ le tiers des 15 millions de femmes qui constituaient la population active féminine en 1985 étaient employées comme domestiques. Ces femmes, dont le salaire était habituellement inférieur au salaire minimum, n’ont souvent pas de contrat d’emploi et ne sont pas couvertes par le système de bien-être social, qui offre des avantages comme une assurance-santé et une pension de retraite ( OIT, 1985 ; Machado, 1993 ). Le pourcentage de femmes sans contrat est plus élevé parmi les groupes à faible revenu que parmi les femmes des régions rurales.

Dans bien des pays du monde, le recours à des travailleurs à domicile s’est accru afin de réduire les coûts de main-d’œuvre. Les sociétés qui utilisent des travailleurs à domicile ont habituellement une longue chaîne de sous-traitance. Le dernier maillon de la chaîne, et le plus précaire, est le travail effectué surtout par des femmes dans leur maison, sans contrat de travail officiel, sécurité sociale ni protection contre les accidents et la maladie ( Berr, 1994 ). Si une travailleuse à domicile est malade, elle ne peut pas prendre de congé de maladie. En cas de blessure ou de maladie pendant le travail, le coût du traitement médical est assumé par la travailleuse et sa famille et l’employeur n’a aucune responsabilité ( Prompunthum et Kerdpol, 1985 ; OIT, 1992b ).

6 Voir Zaini, J., « Women in Malaysian plantations : health and medicines », cité dans APDC ( 1990 ), inédit.

Risques pour la santé et la sécurité : quelle information ?

La plupart des travailleurs, particulièrement dans les pays en développement, ne sont pas conscients des effets toxiques des produits chimiques qu’ils manipulent. Des programmes d’éducation sur la santé et la sécurité au travail devraient être dispensés à tous les travailleurs.

— Anne Kamoto Puta, Organisation zambienne de santé et de sécurité au travail, Ndola ( Zambie )

Les femmes manquent souvent d’informations sur l’ampleur des effets des conditions de travail dangereuses pour la santé. Par exemple, elles ne savent pas toujours que les produits chimiques qu’elles manipulent ont des effets toxiques. Parfois, ces informations n’existent pas mais il arrive aussi que les femmes n’aient simplement pas été informées des risques qu’elles courent. LaDou ( 1993 ) a rapporté que le manque d’informations sur les dangers des insecticides est répandu parmi les travailleurs, les employeurs et même les vendeurs d’insecticides. Les travailleurs ( et tous ceux qui sont en contact avec les agents nocifs ) ont le droit d’être au courant des risques supposés, et des programmes de formation doivent être mis en place.

Le Labour Resource Centre ( 1995 ) a fait remarquer, cependant, que l’éducation des travailleurs sur la santé et la sécurité représente une lutte constante. Beaucoup de travailleurs, dont la préoccupation première est de travailler et de recevoir un meilleur salaire, ne considèrent pas les questions de santé et de sécurité au travail comme une priorité. En fait, certains travailleurs peuvent même accepter d’effectuer des travaux dangereux ou d’utiliser des produits chimiques toxiques s’ils reçoivent une indemnité supplémentaire pour ce faire.

La santé n’est pas considérée comme une priorité par comparaison avec des questions urgentes comme le salaire et la stabilité d’emploi. Les femmes n’ont souvent pas conscience du rapport entre les conditions de travail et la détérioration de leur santé

— Ximena Díaz Berr, travailleuse salariée des secteurs de l’industrie et de la culture fruitière, Santiago ( Chili )

Harcèlement sexuel

On reconnaît de plus en plus l’étendue du harcèlement sexuel auquel les femmes sont soumises au travail ( Ahikirie, 1991 ). Les employeurs peuvent exiger des rapports sexuels en retour de l’accès ou du maintien à un emploi, d’une promotion ou d’une augmentation de salaire. Une femme qui a désespérément besoin de travailler peut se retrouver dans l’incapacité de refuser la demande de faveurs sexuelles. Une femme qui est soumise au harcèlement sexuel peut souffrir de dommages psychologiques, ainsi que de réactions physiologiques négatives, telles que gastrite et étourdissements ( Acevedo, 1994 ).

Comme le décrit Humphrey ( 1987, p. 140 ) :

Les [ femmes ] peuvent être congédiées par les contremaîtres et les directeurs dont elles ont refusé les avances, congédiées si une relation tire à sa fin et, dans bien des cas, congédiées si elles dénoncent I’agresseur [ ... ]. Ce qui est peut-être encore plus répandu et généralisé, ce sont les humiliations publiques et avilissantes que subissent les femmes que l’on maltraite, que l’on brutalise, que l’on insulte et que l’on menace de mesures disciplinaires [...]. Ces pratiques semblent très courantes dans les usines du Brésil. ( Traduction libre. )

Stress

On accorde de plus en plus d’attention aux effets du stress sur la santé et le bien-être des individus. 11 y a un certain nombre de facteurs psychosociaux dans le lieu de travail qui sont liés aux niveaux de stress, parmi lesquels le nombre d’heures passées au travail, le niveau de satisfaction au travail, la complexité des tâches, le degré de supervision et la structure organisationnelle. Le stress peut être provoqué par d’autres conditions de travail, depuis le bruit jusqu’aux produits chimiques et au harcèlement sexuel ( Messing, 1991 ). Le stress a aussi été lié à l’insuffisance des périodes de repos, aux exigences constantes, à l’incapacité de parler avec les collègues et au travail répétitif ( Messing, 1991 ).

Le stress constitue un risque important dans le travail de beaucoup de femmes. La nécessité de satisfaire aux exigences rivales du travail et de la famille peut être une source considérable de stress pour les femmes, aussi bien dans les pays industrialisés que dans les pays en développement. Plusieurs études effectuées dans les pays industrialisés ont démontré que le stress associé à la recherche de l’équilibre entre le travail rémunéré à l’extérieur de la maison et les responsabilités d’éducation des enfants et de gestion de la maisonnée peut se solder par une réduction de la productivité, un manque de ponctualité, l’absentéisme, un changement fréquent de travail, une baisse du moral, une réduction du niveau de satisfaction dans la vie et une mauvaise santé mentale ( Lee et al., 1994 ). De plus, les femmes ont souvent des niveaux de stress plus élevés que les hommes à cause des conditions sociales dans lesquelles elles vivent, y compris l’inégalité économique, la pauvreté et la marginalité.

La confusion des frontières entre le travail à l’extérieur et la maison, plus prononcée pour les femmes, peut provoquer des niveaux de stress élevés. Les femmes qui travaillent et s’efforcent également de faire face à leurs responsabilités familiales peuvent souffrir de migraines, de nervosité et de dépression.

— Ng Yen Yen, sénateure au Parlement de Malaisie, Pahang ( Malaisie )

Dans certains secteurs où domine la main-d’œuvre féminine, le rythme rapide du travail et le fait que les objectifs de production dominent la vie des femmes peuvent provoquer une mauvaise santé chronique. Les travailleuses, sous menace constante d’un congédiement si les quotas ne sont pas atteints, peuvent souffrir de maux de tête, de fatigue, d’ulcères d’estomac, de rhumes constants, de troubles du sommeil, d’hypertension et de palpitations cardiaques (APDC, 1990 ). Or, peu d’études systématiques du stress ont été effectuées dans les secteurs dominés par les femmes.

Deux chercheuses d’Amérique latine ont présenté des résultats sur le stress parmi les femmes dans la population active rémunérée. Berr ( 1994 ) a publié les conclusions d’une étude effectuée par le Centre d’études sur les femmes du Chili sur les facteurs de risque associés au stress parmi les travailleuses des industries de la cueillette des fruits et du vêtement. Un indice de stress a été mis au point, fondé sur la présence de trois maladies liées au stress ( névrose, ulcère et gastrite ) signalées par les travailleuses. Ceci a été suivi par une analyse des facteurs associés à l’indice de stress. À partir de valeurs de contrôle ( représentées par des femmes qui n’avaient jamais souffert d’aucune des trois maladies ), une analyse de régression logistique multi-dimensionnelle a été effectuée afin d’identifier les facteurs de risque associés au stress.

Parmi les travailleuses du secteur du vêtement, l’analyse a révélé que les femmes qui déclaraient souffrir des maladies liées au stress avaient 3,7 fois plus tendance à être économiquement responsables de leur famille, 2 fois plus tendance à être exposées au bruit dans l’environnement et 2,8 fois plus tendance à avoir souffert d’un accident dans le lieu de travail. Dans le cas des ramasseuses de fruits, l’analyse a indiqué que ces femmes avaient davantage tendance à souffrir d’une maladie liée au stress si elles consacraient plus de deux heures par jour au travail à la maison ( 8,5 fois plus ), si elles avaient peur d’être renvoyées ( 3,5 fois plus ), et si elles travaillaient dans une position physique forcée ( 2,1 fois plus ). Dans les usines d’emballage, les conditions de travail stressantes étaient liées à la rigueur du travail ainsi qu’à la longueur des heures de travail. Les femmes qui travaillaient dans les usines d’emballage avaient davantage tendance à souffrir de stress si elles craignaient d’être renvoyées ( 3,4 fois plus ) et si elles travaillaient dans un milieu bruyant ( 3,9 fois plus ).

Breilh ( 1994 ) a présenté les résultats d’un sondage concernant le stress parmi les femmes qui travaillent dans la fonction publique en Equateur. Une proportion élevée des femmes interrogées se trouvaient en état de stress. Il a conclu que les niveaux élevés de stress parmi les femmes fonctionnaires étaient associés au travail répétitif et ennuyeux, à la mauvaise organisation et à l’excès de travail. Il a également constaté que les femmes qui restaient longtemps debout pendant leur travail étaient les plus touchées par le stress.

Des niveaux élevés de stress ont aussi été liés au manque d’aide à la maison. Plus de 50 % des travailleuses interrogées par Breilh ( 1994 ) effectuaient beaucoup de travail à la maison sans soutien d’aucune sorte. Parmi les travailleuses ayant un mari ou un partenaire, un pourcentage très faible ont déclaré que celui-ci leur apportait une aide à la maison. Seulement 10 % des partenaires aidaient aux travaux ménagers et 27 % participaient aux tâches associées aux soins à la famille.

Breilh a indiqué qu’on notait une réduction notable du stress chez les travailleuses qui avaient les niveaux de loisirs les plus élevés. Cependant, à cause des restrictions culturelles et du manque de temps, le temps de loisirs des travailleuses était minimal et elles n’en tiraient donc pas tellement d’avantages. Les femmes ont invariablement peu de temps pour elles-mêmes, pour leurs projets personnels ou pour les activités de loisirs.

Breilh a également établi un rapport entre un milieu de travail stressant et la présence de troubles menstruels. Le pourcentage de femmes souffrant de polyménorrhée ( menstruations accrues ) était presque trois fois plus élevé chez les travailleuses avec un niveau élevé de stress. Ces femmes avaient également tendance à souffrir d’autres maladies comme des infections récurrentes. Le stress psychologique peut aussi provoquer l’aménorrhée chez les femmes (CRNTR, 1993 ).

Effets nocifs possibles sur la reproduction

Les activités de travail des femmes peuvent aussi leur causer des problèmes dans le domaine de la reproduction. Les lourdes charges peuvent, par exemple, provoquer une descente de la matrice et sont associées aux troubles menstruels, aux fausses couches et à la naissance d’enfants mort-nés ( NCSEW, 1988 ). Une étude effectuée au Maharashtna, en Inde, qui portait sur le dur travail agricole, a conclu qu’il y avait une incidence élevée d’enfants mort-nés et de naissances prématurées pendant la haute saison de la culture du riz, lorsque tout le monde, y compris les femmes dont la grossesse est presque à terme, passe toute la journée dans les champs. Le travail suppose qu’elles restent accroupies et penchées pendant des heures. L’effort physique et la pression sur l’utérus peuvent provoquer un déclenchement prématuré du travail et de l’accouchement ( Batliwala, 1988 ).

Parmi les autres troubles possibles des fonctions de reproduction des travailleuses du secteur agricole, on peut citer ce qui suit ( Engberg, 1993, p. 873 ) :

Image perturbation du cycle menstruel ;

Image stérilité ;

Image malformation fœtale ;

Image cancer chez les enfants ;

Image retard de croissance ;

Image développement postnatal anormal des bébés à cause des produits chimiques transmis par l’allaitement.

Certaines conditions de travail, comme le travail par roulement, les emplois du temps irréguliers et les variations de température, peuvent modifier le cycle menstruel d’une femme ( Acevedo, 1994 ). Certaines études ont indiqué que le froid, l’exposition aux solvants ou le fait de soulever des charges à un rythme rapide peuvent produire des douleurs menstruelles ( dysménorrhée ) ( Messing, 1991 ).

La station debout prolongée, le travail par roulement, les longues journées de travail, l’exposition aux radiations et à certains produits chimiques peuvent contribuer au grand nombre d’avortements spontanés parmi les femmes qui travaillent à l’extérieur ( Patrick, 1991, cité dans Koblinsky et al., 1993b ; Acevedo, 1994 ). Borges ( 1993 ) a noté que les emplois associés à un niveau élevé de stress sans contrôle ou presque sur les tâches à accomplir augmentaient le risque d’accouchements prématurés chez les femmes ( Acevedo, 1994 ).

Une étude effectuée à La Victoria, au Venezuela, a évalué l’état de santé d’un groupe de travailleuses du textile par comparaison avec des femmes de la même région qui ne travaillaient pas à l’extérieur de la maison. De façon générale, les travailleuses du textile avaient des conditions de vie plus pauvres et des niveaux scolaires plus faibles, et étaient notablement plus financièrement responsables de la famille que les femmes qui ne travaillaient pas à l’extérieur. Eu égard aux fonctions de reproduction, on notait un nombre sensiblement plus élevé d’avortements spontanés, ainsi que des poids à la naissance nettement plus faibles chez les travailleuses du textile que chez les femmes qui travaillaient exclusivement à la maison 7. Il se peut que les caractéristiques du travail dans la fabrique de textiles, y compris les longues heures passées à la chaîne, le rythme de travail intense et la station debout prolongée, combinées aux mauvaises conditions de vie et à la responsabilité d’une famille, aient contribué à ces troubles des fonctions de reproduction.

Aspects positifs du travail des femmes

Le travail peut cependant avoir beaucoup d’avantages positifs pour la santé des femmes. Dans les pays industrialisés, les preuves indiquent que, au moins pour les femmes qui ont une attitude positive envers le travail, il y a une forte corrélation positive entre l’emploi des femmes et leur santé ( Repetti et al., 1989 ; Rodin et Ickovics, 1990 ). Qui plus est, il semble que la santé physique et mentale des femmes qui travaillent à l’extérieur soit de beaucoup meilleure que celle des femmes qui travaillent uniquement à la maison ( McDaniel, 1987 ).

Les femmes qui font partie de la population active officielle peuvent gagner en estime de soi et en confiance dans leurs aptitudes et leurs capacités de décision. Le milieu de travail offre également la possibilité de bénéficier du soutien social des collègues ( Leslie, 1992 ; Debert-Ribeiro, 1993 ). Le fait d’assumer des rôles multiples ( p. ex. à la maison et dans la population active rémunérée ) peut avoir pour effet d’augmenter l’amour-propre et la joie de vivre et représenter une défense contre la dépression ( Ayers et al., 1993 ). On a trouvé que les. effets de l’emploi étaient plus bénéfiques chez les femmes qui occupaient des postes professionnels et des postes de direction que chez les travailleuses manuelles ( Hazuda et al., 1986 ).

Comme les conditions de travail sont très différentes dans les pays en développement et les pays industrialisés, il est difficile de généraliser à partir des données obtenues dans ces derniers. Il est donc important que les conséquences sur la santé de la participation accrue des femmes à la population active dans les pays en développement soient étudiées de façon systématique et exhaustive.

7 Voir A. Borges et D. Acevedo, « Salud reproductiva en textileras y amas de casa, La Victoria, Aragua, Venezuela », inédit.

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Chapitre 6
Les maladies tropicales

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CRDI: S. Colvey

La plus grande partie de la documentation sur le sujet estime que les effets des maladies tropicales sur les hommes et les femmes sont du même ordre, étant entendu que les femmes souffriront davantage lors de la grossesse et de l’accouchement. Alors que cela pourrait s’avérer approprié, les recherches n’analysent pas avec suffisamment de profondeur les conséquences néfastes des maladies tropicales sur les femmes dans le contexte de leurs fonctions économiques, sociales, culturelles et personnelles. ( Traduction libre. )

— Rathgeber et Vlassoff ( 1993, p. 513 )

Les maladies tropicales ( notamment le paludisme [ ou malaria ], la schistosomiase, la filariose [ filariose lymphatique et onchocercose ], la trypanosomiase [ maladie de Chagas et trypanosomiase africaine ], la lèpre, le choléra et la leishmaniose ) comptent parmi les maladies les plus répandues mais aussi les plus négligées du monde. Les parasites du paludisme sont présents dans environ 100 pays, contaminent un nombre estimé à 270 millions de personnes par an, en tuent jusqu’à 2 millions ( beaucoup plus que le sida ) et provoquent au moins 100 millions d’accès aigus de palud chaque année ( Cowley, 1992 ; OMS, 1993 ). Environ 200 millions de gens, répartis dans 76 pays, sont atteints de schistosomiase et quelque 200 000 en meurent chaque année ( OMS, 1990 ). On estime qu’il y a plus de 12 millions de cas de leishmaniose dans le monde et que 350 millions de personnes présentent un risque de maladie ( OMS, 1990 ). Environ 20 millions de gens sont atteints d’onchocercose ( Stephenson, 1987 ; Warren et al., 1993 ) et environ 10 à 12 millions souffrent de la lèpre ( Htoon et al., 1993 ).

Jusqu’ici, l’effet des maladies tropicales sur les femmes n’a guère retenu l’attention. Les recherches dans ce domaine ont été dominées par le point de vue biomédical et les sujets d’étude ont eu tendance à être des hommes et des enfants. Les recherches sur les femmes ont porté surtout sur les aspects liés à la grossesse et à la reproduction, et n’ont pas étudié ceux-ci dans le contexte plus vaste des responsabilités et des rôles sociaux assumés par les femmes ( Rathgeber et Vlassoff, 1993 ).

Malgré la prédominance du point de vue biomédical, il reste beaucoup de questions sans réponse concernant l’influence des facteurs biologiques sur les maladies tropicales, y compris le rÃle que joue le sexe sur la vulnérabilité à l’infection et sur la progression et l’intensité des maladies ( Brabin et Brabin, 1992 ; Duncan, 1992 ; Michelson, 1992 ; Vlassoff, 1994 ). Les

Les auteures remercient Lori Jones Arsenault, du CRDI, qui a collaboré à la rédaction du présent chapitre, pour sa contribution exceptionnelle.

femmes semblent présenter une meilleure réaction immunitaire à certaines maladies tropicales ( p. ex. paludisme, lèpre et leishmaniose viscérale ) et soit une immunité naturelle plus forte, soit une réaction cellulaire plus vigoureuse et plus rapide ( Agyepong, 1992 ). De nombreux chercheurs se sont empressés d’ajouter, cependant, que tout avantage des femmes associé à leurs hormones sexuelles ne tarde pas à disparaître pendant la grossesse oú le système immunitaire perd de sa force tandis qu’augmente la vulnérabilité aux maladies ( Brabin et Brabin, 1992 ). Dans les pays en développement, les nombreux cycles de grossesse et de lactation, qui débutent souvent à un âge précoce, augmentent la susceptibilité des femmes à la maladie. Les infections parasitaires pendant la grossesse peuvent entraîner une malnutrition et une détérioration de l’état de santé des femmes et avoir également de sérieuses répercussions sur la croissance et le développement du fœtus ( Brabin et Brabin, 1992 ).

Les infections intercurrentes et la mauvaise alimentation sont d’autres facteurs qui compromettent encore davantage la réactivité immunologique des femmes ( Ulrich et al., 1992 ). Du fait des pratiques discriminatoires en matière d’alimentation et de la pauvreté des femmes, un pourcentage disproportionné de jeunes filles et de femmes souffrent de malnutrition, ce qui compromet leur aptitude à lutter contre la maladie ( Duncan, 1992 ). Le mauvais état de santé des femmes influence aussi leur capacité de guérison.

Le mauvais état de santé des femmes qui, en Afrique, est associé à la malnutrition générale et à l’infection ainsi qu’aux complications de la grossesse et de l’accouchement, est l’une des raisons du haut niveau de mortalité et de morbidité dues au paludisme chez les femmes. L’anémie nutritionnelle contribue de façon considérable à la récurrence des accès de paludisme. Dans une étude effectuée à Nzega, dans le centre de la Tanzanie, l’anémie et le paludisme clinique pendant la grossesse ont été diagnostiqués chez 87 % des I 072 femmes qui faisaient l’objet de l’étude.

— Martin Sarikiaeli Alilio, Institut national de recherche médicale, Muheza Tanga ( Tanzanie )

De plus en plus de recherches suggèrent que les taux de morbidité et de mortalité ne reflètent pas tant une différence entre les sexes dans la biologie de la maladie que l’effet sur la maladie des différentes circonstances culturelles et sociales ( Manderson, 1994 ; Tandon, 1995 ). Notre étude des dimensions socioculturelles des maladies tropicales se penche sur les différences entre les sexes en ce qui concerne la transmission de la maladie et le risque d’infection, la reconnaissance des signes d’infection et la façon dont ils sont traités, l’expérience sociale de la maladie, l’accès aux soins de santé et l’efficacité des interventions.

LES « ESPACES VITAUX »
SELON LES SEXES

Les femmes et les hommes mènent des vies différentes et, dons beaucoup de communautés, ils n’ont pas les mêmes « espaces vitaux ». Ils peuvent vivre dans la même ville ou le même village, travailler dans la même ferme, dormir dans la même maison et dans la même pièce mais, depuis le moment oú ils se lèvent jusqu’au coucher, ils occupent et utilisent en fait des espaces de vie très différents. En conséquence, ils peuvent être exposés à des maladies environnementales très différentes. ( Traduction libre.)

— B. Kettel ( 1996 )

Il est essentiel d’examiner la façon dont les hommes et les femmes utilisent et gèrent les « espaces de vie locaux » pour comprendre pourquoi les femmes sont exposées à l’infection d’une façon différente des hommes et pourquoi le risque de contracter certaines maladies tropicales varie d’une région à une autre ( Parker, 1992 ; Kettel, 1996 ). Par exemple, bien que, dans l’ensemble, les hommes et les femmes semblent être atteints de façon égale par la schistosomiase et le paludisme, la prévalence de ces maladies varie entre les sexes d’une façon considérable selon les régions en fonction de la division du travail et des responsabilités ( Anyangwe et al., 1994 ; Vlassoff et Bonilla, 1994 ). À cet égard, note Manderson ( 1994, p. 2 ), les différences entre les sexes ne présentent pas d’orientation claire ; dans certains cas, ce sont les hommes qui sont la cible de l’infection et, dans d’autres cas, ce sont les femmes.

Dans beaucoup de pays en développement les femmes jouent un rôle clé dans la production de la nourriture et leurs responsabilités agricoles, qui comprennent la plantation, le désherbage, la récolte, le battage et le vannage, peuvent les exposer à un risque accru de maladies tropicales comme le paludisme et l’onchocercose. Les parasites du paludisme sont transmis aux Ãtres humains par la piqûre de certains vecteurs des moustiques anophèles ( Nájera et al., 1993 ). L’onchocercose est causée par le ver parasite Onchocerca volvuluset propagée par la piqûre des simulies qui transmettent les larves du ver des personnes infectées à celles qui ne le sont pas. Dans certaines parties du Nigéria, les femmes passent plus de temps dans les zones de haute transmission que les hommes et sont davantage exposées aux piqûres des vecteurs de l’onchocercose et du paludisme ( Amazigo, 1994 ).

Malgré l’importance de la participation des femmes aux activités agricoles, leur travail n’est pas toujours pleinement reconnu et les risques connexes ne sont pas sérieusement dénoncés par les chercheurs. Amazigo

Il y a des rapports étroits entre les rôles dévolus aux femmes et leur vulnérabilité à la mauvaise santé chronique ou récurrente causée par la schistosomiase urinaire et le paludisme.

— Stella Anyangwe, faculté de médecine et de sciences biomédicales, Université de Yaoundé l, Yaoundé ( Cameroun )

( 1994 ) a noté que, dans l’évaluation de l’exposition aux piqûres des agents de l’onchocercose, on omet souvent de considérer les tâches effectuées surtout par les femmes. Si l’on ne tient pas compte de la gamme complète des activités féminines dans l’estimation de la prévalence de la maladie, on risque de sous-estimer l’étendue de l’infection féminine ( Vlassoff et Bonilla, 1994 ).

Lorsque les femmes et les hommes travaillent tous dans le secteur agricole, leurs responsabilités différentes peuvent créer des risques séparés. À Simbok, au Cameroun, les hommes se spécialisaient dans les activités liées aux cultures commerciales, alors que les femmes étaient surtout responsables de l’agriculture de subsistance comme les noix pilées et le maïs ( Anyangwe et al., 1994 ). Les femmes effectuaient habituellement le désherbage et la récolte des produits alimentaires avant l’aube pour pouvoir être dans les différents marchés au lever du soleil. Les heures qui précèdent l’aube sont l’une des périodes de pointe pour la transmission du paludisme, si bien que les femmes présentaient un plus grand risque de contracter la maladie ( Anyangwe et al., 1994 ). La plupart des femmes portaient un pantalon pour travailler mais se protégeaient rarement les bras et le visage.

La lessive et la corvée d’eau sont surtout des tâches féminines. Les abords de l’eau constituant un habitat de prédilection pour les moustiques et un lieu de choix pour la transmission du paludisme, les visites régulières des femmes aux sources ou aux rivières infestées de larves de moustiques peuvent accroître leurs risques de contracter cette maladie ( Nájera et al., 1993 ; Anyangwe et al., 1994 ).

Tandis que certains facteurs socioculturels peuvent prédisposer les femmes au paludisme, d’autres pratiques leur servent de protection. Les restrictions culturelles concernant la façon de s’habiller et la liberté de mouvement peuvent les protéger des piqûres de moustiques ( Silva, 1988 ). Le fait qu’elles passent les premières heures de la soirée dans la cuisine oà la fumée des feux les protège des moustiques leur offre une protection supplémentaire ( tout en les exposant, cependant, à la pollution de l’air ). Par contre, les hommes, qui passent de longs moments assis à l’extérieur le soir ou dorment dehors dans les zones où la maladie est endémique, augmentent le risque de contracter le paludisme ( Reubin, 1992 ).

La schistosomiase est le terme général utilisé pour décrire un groupe d’infections causées par les schistosomes transmis par des helminthes ( un type de ver ). La majorité des infections humaines sont causées par quatre espèces connexes qui se développent dans des mollusques aquatiques servant d’hôtes intermédiaires et sont transmises aux humains par pénétration directe de la peau ou ingestion d’eau contaminée. La propagation des maladies transmises par l’eau, comme la schistosomiase, est liée aux activités et aux responsabilités prescrites par la culture et divisées entre les sexes. Les femmes ont tendance à avoir des contacts plus fréquents et plus intenses avec l’eau que les hommes parce qu’elles sont habituellement responsables de la collecte de l’eau et du lavage des vêtements ( Parker, 1992 ). Les taux d’infection des femmes varient d’une région à l’autre en fonction de l’heure où elles effectuent leurs activités, ce qui, à son tour, a un impact sur le degré de contact avec les cercaires ( Michelson, 1992 ).

À Kotto Barombi, au Cameroun, la schistosomiase présentait un risque particulier pour les femmes et les jeunes filles parce qu’elles étaient responsables de la collecte de l’eau, de la lessive, du bain des enfants, du nettoyage des ustensiles, de la pêche au bord du lac et de la culture du riz dans les terres inondées ( Anyangwe et al., 1994 ). Chacune de ces activités s’accompagnait d’un contact constant et prolongé avec les lacs infestés ; en fait, les femmes passaient parfois jusqu’à six à dix heures de suite dans le lac, avec de l’eau jusqu’à la taille, urinant et déféquant lorsque c’était nécessaire ( Michelson, 1992 ; Anyangwe et al., 1994 ). Les petites filles étaient exposées à l’eau dès l’âge de trois ans. Les activités des femmes associées à l’eau avaient souvent un caractère très social, les femmes se retrouvant pour faire leur travail ensemble et les tâches banales étaient transformées en occasions de divertissement et de partage d’informations. En raison du caractère agréable de ces activités, les femmes ne voulaient pas entendre parler des interventions qui visaient à réduire leur contact avec le lac. Les hommes étaient comparativement peu exposés au contact de l’eau. Ils pratiquaient la pêche mais en canot et au milieu du lac.

Dans d’autres sociétés, ce sont les hommes que les préceptes culturels peuvent amener à avoir des contacts fréquents avec des eaux infectées. Dans les communautés où les hommes et les jeunes garçons se baignent et nagent pour le plaisir dans des réservoirs, des canaux ou des rivières, ou vont à la pêche, ils peuvent être plus exposés que les femmes aux maladies transmises par l’eau ( Michelson, 1992 ). Les taux de schistosomiase peuvent être nettement inférieurs parmi les femmes des pays musulmans à cause des restrictions imposées à leurs activités ( Amazigo, 1994 ; Anyangwe et al., 1994 ). Dans les sociétés musulmanes, les femmes vivent souvent retirées dans leur

On lave les ustensiles et les vêtements au bord du lac et c’est là qu’on va aussi chercher l’eau pour nettoyer la maison, faire la cuisine et, parfois, se laver. La pêche au panier est une activité féminine. Les femmes s’avancent de quelques mètres dans le lac et vont placer leurs paniers sous des rochers pour attraper des crevettes et des petits poissons. À cause des rôles assignés aux sexes par la tradition et la culture et des coutumes relatives aux contacts avec l’eau, les femmes de Kotto sont exposées à la schistosomiase urinaire qu’elles contribuent à propager en urinant et en déféquant dans le lac quand elles s’y retrouvent ensemble.

— Stella Anyangwe, faculté de médecine et de sciences biomédicales, Université de Yaoundé I, Yaoundé ( Cameroun )

maison et ce sont les hommes qui sont responsables de presque toutes les activités liées aux risques de contamination aquatique comme la collecte de l’eau nécessaire pour se laver et faire la cuisine. Les pratiques religieuses qui supposent un contact avec l’eau, comme les ablutions et le wadu — ou purification rituelle — sont aussi des activités strictement masculines. On peut remarquer des taux plus élevés de schistosomiase parmi les hommes des communautés musulmanes où les bassins d’ablution dans les mosquées sont contaminés par des mollusques hôtes et servent de sites de transmission ( Michelson, 1992 ).

Les hommes ont généralement davantage tendance que les femmes à contracter la leishmaniose, un groupe de maladies parasitaires transmises par des phlébotomes, et ceci a toujours été associé aux risques liés à leurs occupations ( Ayele, 1988 ; Nandy et al., 1988 ). Les activités qui présentent le plus de risques, dans les régions où la maladie est endémique, comprennent la déforestation, l’agriculture, la chasse, la construction des routes et la participation aux projets de développement des ressources aquatiques. Au Pérou, la leishmaniose est associée à la construction de nouvelles routes, à l’extraction du pétrole, à l’exploitation forestière et au travail dans les mines d’or ( Timoteo et Llanos-Cuentas, 1994 ). Les différences dans la façon de s’habiller, les femmes étant davantage couvertes que leurs contreparties masculines, peuvent aussi avoir pour effet d’exposer les hommes plus que les femmes ( Thakur, 1981 ). Bien que les femmes soient habituellement moins exposées aux piqûres des vecteurs de la leishmaniose, elles se retrouvent à risque si elles sont responsables de la collecte du bois dans les zones infectées et se mettent en quête de combustible afin de préparer les repas, laver les vêtements, etc. Des études récentes ont démontré que l’on trouve des phlébotomes vecteurs de la leishmaniose dans les murs des maisons, ce qui soulève des questions sur la transmission domestique ( Kaendi, 1994 ). Les femmes pourraient être davantage exposées dans les régions où la maladie est fortement endémique et où la densité des vecteurs est plus élevée à l’intérieur ou aux alentours de la maison ( Badaro, 1988 ).

La cysticercose est une infection produite par des formes larvaires du tænia que l’on contracte si l’on mange de la viande de porc ou de bétail infectée qui n’a pas été suffisamment cuite ( Sarti, 1994 ). Le rôle domestique des femmes peut les exposer à la téniase. Tandis qu’elles préparent les repas, les femmes peuvent grignoter des morceaux de viande crue ou pas assez cuite. Absorbée de cette façon, la viande de porc infectée provoque la téniase. De plus, si les femmes préparent et servent les aliments sans appliquer de bonnes mesures d’hygiène, elles peuvent devenir la principale source de transmission de la cysticercose à la famille par contamination alimentaire ( Sarti, 1994 ).

Le rôle des femmes dans la promotion et la préservation de la santé à la maison les expose davantage aux risques de contracter des maladies hautement contagieuses comme la lèpre et le choléra. Les femmes sont chargées de s’occuper des personnes malades dans la famille et sont davantage exposées aux risques de contagion ( Durana, 1994 ).

LES MALADIES DE LA PAUVRETÉ

Les maladies tropicales sont les « maladies de la négligence » et elles sont « exacerbées par la pauvreté » ( Amazigo, 1994 ). Les mauvaises conditions de vie de beaucoup de femmes dans les pays du Sud accroissent le risque de transmission des maladies. Les personnes qui ne disposent pas des conditions nécessaires pour jouir d’une bonne santé, comme l’eau propre, les mesures d’hygiène et un logement adéquat, sont particulièrement vulnérables à de nombreuses maladies. Bonilla et al.( 1991 ) a rapporté que les femmes qui vivent dans des logements insalubres et celles qui doivent chercher l’eau à l’extérieur de la maison souffraient davantage de paludisme que celles qui préparent les repas dans une cuisine adéquate ou celles qui ont l’eau courante.

Le paludisme est une maladie de la pauvreté. En général, les riches et les puissants vivent dans des milieux hygiéniques et ont facilement accès aux ressources médicales, tandis que les pauvres vivent dans des taudis urbains surpeuplés et des régions rurales isolées qui favorisent la transmission. Parce que l’ignorance, l’apathie et le manque d’accès aux médicaments les empêchent souvent de se faire soigner à temps, ce sont les défavorisés qui présentent toujours les manifestations les plus graves des maladies tropicales. Et, parmi les défavorisés, les femmes sont particulièrement vulnérables.

— Rachel Reubin, Centre de recherche en entomologie médicale, Madurai (Inde)

À cause de la pauvreté, une grande proportion de la population du Nigéria vit dans des conditions où les infections parasitaires sont florissantes. Les femmes des régions rurales sont extrêmement désavantagées.

— Uche Amazigo, département de zoologie, Université du Nigeria, Nsukka (Nigéria)

Le manque de ventilation, les mauvaises conditions de logement et le surpeuplement sont des facteurs de risque associés à la lèpre, une maladie extrÃmement contagieuse, transmise par les gouttelettes des sécrétions corporelles, depuis la salive jusqu’au pus des ulcères ( Duncan, 1992 ). Selon Ulrich et al.( 1992 ), la plupart des cas de lèpre parmi les femmes du Venezuela étaient associés à un niveau de vie insuffisant en termes de situation économique ( 79 % ), d’alphabétisation et d’éducation ( 78 % ), d’alimentation ( 75 % ), d’hygiène ( 66 % ) et de logement ( 73 % ). Une autre étude a révélé que la prévalence de la lèpre au Venezuela est six fois plus élevée dans les régions de faible développement économique que dans les régions hautement développées ( Ulrich et al., 1992 ).

L’absence de systèmes d’évacuation des eaux d’égouts et de gestion des eaux dans les collectivités est un facteur important de transmission du choléra. Le choléra est une maladie aiguë et contagieuse du tube digestif qui se déclare quand on absorbe le bacille Vibrio choleræ. On pense que cette maladie n’atteint que les êtres humains ( Stephenson, 1987 ). Le parasite, éliminé par le corps dans les fèces et les vomissements, peut être transmis directement d’une personne à une autre par simple toucher des malades ou du matériel infecté. Les mouches peuvent aussi propager le parasite dans la nourriture et l’eau. En Colombie, les femmes qui vivent dans des logements insalubres, construits au-dessus d’eaux contaminées, et celles qui sont responsables d’aller chercher l’eau à l’extérieur de la maison présentent un risque élevé de contracter le choléra ( Durana, 1994 ).

La maladie de Chagas est courante dans les régions rurales pauvres de toute l’Amérique latine, et les femmes semblent être les plus touchées ( Sotomayer et al., 1994 ). L’infection est causée par un parasite protozoaire flagellé, Trypanosoma cruzi; elle est le plus souvent transmise par des insectes suceurs de sang, les triatomes. Maladie avant tout rurale dans le passé, le Chagas est en train de devenir un problème urbain par suite de la migration. Le vecteur peut vivre et se reproduire dans les fissures et les trous des murs et des toits des logements de mauvaise qualité, comme ceux qui sont faits de boue et de chaume. La surpopulation périurbaine accélère la propagation de la maladie de Chagas et les femmes qui vivent dans la pauvreté sont les plus exposées ( Sotomayer et al., 1994 ).

Plus de la moitié des femmes enceintes chez qui on a diagnostiqué la maladie de Chagas habitaient au-delà de la quatrième « ceinture », une région économiquement pauvre [ avec une croissance notable de la population au cours de la dernière décennie ] offrant peu d’accès aux services essentiels. Il y avait un pourcentage plus élevé de femmes chefs de famille parmi les femmes atteintes de la maladie.

— Octovio Sotomayer, Institut de maternité Dr-Percy-Boland, Santa Cruz ( Bolivie )

Les communautés atteintes par la leishmaniose font souvent partie des secteurs les plus pauvres de la société ( Wijeyaratne et al., 1994 ). Les mauvaises conditions de logement et le manque d’hygiène accroissent le rythme de transmission de la leishmaniose aux alentours des maisons. Les vecteurs de la leishmaniose viscérale sont attirés par le bétail et les chiens qui sont gardés dans la maison ainsi que par les matériaux comme l’herbe utilisés pour la fabrication des logements et que les phlébotomes envahissent facilement (OMS, 1990 ).

TABOUS ET MALADIES TROPICALES

Les maladies tropicales font l’objet de tabous considérables, aussi bien pour les femmes que pour les hommes. Un questionnaire utilisé par Herrin ( 1988 ) pour étudier les conséquences sociales de la schistosomiase aux Philippines a révélé que les gens « méprisaient » ceux qui étaient infectés. L’auteur a noté qu’on « regardait de haut » les personnes atteintes ; on pensait qu’une personne infectée par la schistosomiase compromettait le statut social de sa famille. Des personnes atteintes de la maladie de Chagas se sont vu refuser des emplois dans plusieurs villes d’Amérique latine ; au Brésil, des femmes atteintes de la même maladie ont perdu leur travail lorsque leur état a été découvert ( Zajac, 1992 ).

L’ostracisme social dont souffrent les femmes atteintes de ces maladies est différent de celui qui frappe les hommes. Dans le cas de l’onchocercose et d’autres maladies mutilantes, les hommes s’attendent à recevoir des soins, et en reçoivent, alors que les femmes sont souvent isolées par leur famille, et méme bannies de leur communauté qui les laisse mourir.

— A. El Bindari Hammad, Organisation mondiale de la santé, Genève ( Suisse )

La lèpre a toujours été une maladie tabou. Elle est davantage liée à l’ostracisme et à un sentiment de peur et de répulsion que n’importe quelle autre maladie tropicale ( Ulrich et al., 1992 ). Une recherche qui étudiait les perceptions des personnes atteintes de la lèpre a révélé que les gens refusaient d’employer des lépreux, de travailler avec eux, de leur fournir un logement ou de leur serrer la main ( Tekle-Haimanot et al., 1992 ).

Bien que les tabous puissent avoir des conséquences personnelles dramatiques aussi bien pour les hommes que pour les femmes, les femmes se retrouvent souvent beaucoup plus vulnérables parce que le tabou social vient s’ajouter à d’autres problèmes d’impuissance et de subordination qui se posent à elles simplement parce qu’elles sont des femmes ( Manderson et al., 1993 ). Une étude qui a exploré les répercussions sur les femmes et sur les hommes de l’invalidité liée à la maladie a conclu qu’un pourcentage notamment plus élevé d’hommes demandaient le divorce lorsque les femmes étaient atteintes ( Hellandendu, 1992 ). L’invalidité compromettait les chances de la femme de rester mariée dans la mesure où elle l’empêchait d’exécuter ses activités dans la maison et aux champs ( Hellandendu, 1992 ).Du fait que le choléra est associé à des conditions de vie insalubres, les hommes et les femmes atteints du choléra sont accusés d’être pauvres et sales. Les femmes, cependant, à titre de pourvoyeuses de soins responsables du maintien de conditions de vie saines dans la maison, ressentent plus fortement que les hommes la honte associée à cette accusation ( Durana, 1994 ).

Un certain nombre de maladies tropicales peuvent causer une invalidité et un défigurement physique, notamment la lèpre, le ver de Guinée, la leishmaniose, l’onchocercose, la cysticercose et la chistosomiase urinaire. L’onchocercose, par exemple, peut provoquer une altération de la peau, qui se traduit par une dépigmentation et un vieillissement prématuré ( Vlassoff, 1994 ), alors que la lèpre peut produire de graves mutilations du visage et des extrémités. Parce que la beauté physique est fortement valorisée chez les femmes dans toutes les sociétés, et parce que les capacités de la femme dans la vie sont associées de plus près à son apparence physique que celles de l’homme ( Vlassoff, 1994 ), les maladies qui défigurent peuvent avoir un impact particulièrement profond et provoquer un stress psychologique et émotionnel grave chez les femmes qui en sont atteintes. Une étude sur les lépreux en Inde révèle que 51 % des femmes atteintes ont dû quitter leur foyer de force mais que seulement 32 % des hommes lépreux ont dû faire de même8.

Des femmes atteintes de la lèpre ont été abandonnées par leur mari, privées de leurs enfants et même reléguées dans une grotte ( Mull et al.,

8 Voir C. Vlassoff, S. Khot et S. Rao, « Double jeopardy : women and leprosy in India », inédit, cité dans ONU ( 1995 ), p. 73.

Mthe A. est une jeune fille de 23 ans non mariée qui est traitée depuis 13 ans pour onchocercose par les médecins et les guérisseurs traditionnels. Elle est agréable de sa personne, sauf pour ses jambes énormes atteintes d’éléphantiasis. Mc A. n’a jamais été demandée en mariage et ceci est attribuable à son défigurement. Mlle A. a maintenant une petite fiile de trois mois Elle dit qu’à cause du tabou social attaché à l’étéphantiasis et de sa peur de ne pas pouvoir avoir d’enfant après un certain âge, elle est devenue la proie d’un vieil homme marié et s’est retrouvée enceinte.

— Uche Amazigo, département de zoologie, Université du Nigeria, Nsukka ( Nigeria )

1989 ). Les femmes n’ont même pas besoin d’avoir la lèpre elles-mêmes pour avoir des problèmes ; il leur suffit d’être en contact avec des personnes infectées. Des femmes dont on sait qu’elles ont des lépreux dans leur famille peuvent avoir de la difficulté à se marier ( Mull et al., 1989 ). Près de 70 % des infirmières dans un pays où la lèpre est endémique ont déclaré que les infirmières non mariées qui travaillaient dans les hôpitaux pour lépreux auraient de la difficulté à se marier ( Awofeso, 1992 ).

Dans certaines communautés du Nigéria, on a trouvé que la lèpre avait un impact dévastateur sur les perspectives d’éducation et de mariage des filles 9. À cause des plaintes des parents des enfants sains, les enseignants ont expulsé les enfants infectés. Les enfants qui étaient forcés d’abandonner l’école prenaient habituellement un emploi subalterne et se mariaient vite avant que les difformités physiques apparaissent. Une fois que leur pathologie devenait visible, les adolescentes atteintes de la lèpre présentaient un taux élevé de divorce.

Jusqu’à récemment, les programmes de lutte contre la maladie ont eu tendance à négliger la maladie de peau associée à l’onchocercose, presque toute l’attention étant concentrée sur la cécité qui est considérée être son aspect le plus débilitant. Cependant, une étude effectuée dans les régions rurales du Nigéria a conclu que les lésions disgracieuses laissées par la dermatite papuleuse aiguë et chronique, et l’épaississement et l’irritation de la peau limitaient les chances des jeunes adolescentes de trouver un mari ( Amazigo, 1994 ). Les filles atteintes de.cette maladie essayaient également de cacher leur état et évitaient souvent l’école et les activités sociales. Le tabou ne compromettait pas seulement les perspectives de mariage mais aussi l’aptitude à se faire des amis et empêchait surtout les personnes atteintes d’être pleinement socialisées ( Amazigo, 1994 ). Les garçons et les hommes, par contre, ne faisaient pas face au même degré d’ostracisme.

9 Selon une recherche inédite de M.A. Asuquo, Institut national de recherche médicale, PMB 2013, Yaba, Lagos, Nigéria.

Du fait que certaines maladies tropicales se manifestent par des symptômes dans la région génitale, elles peuvent être perçues à tort comme des MTS. Les femmes infectées peuvent être accusées d’« immoralité » et leur maladie considérée comme la « punition » de leur promiscuité ou de leur perversion sexuelle. La liberté sexuelle accordée aux hommes dans la plupart des sociétés et l’attitude différente devant la présence de MTS suivant qu’il s’agit d’un homme ou d’une femme signifient que les hommes ne sont généralement pas traités d’une façon aussi dure. En fait, les symptômes de maladie tropicale dans la région génitale peuvent être considérés comme un signe de virilité pour les hommes ( Vlassoff et Bonilla, 1994 ). Dans nombre de populations africaines, par exemple, la schistosomiase urinaire masculine, dite l’eau rouge, est un signe de maturité et de virilité.

En Amagunze, au Nigéria, la schistosomiase chez les femmes atteint le plus souvent le système urinaire, et la communauté la considère comme une MTS et l’associe à une conduite sexuelle immorale ( Amazigo, 1994 ). L’hématurie a compromis les perspectives de mariage d’adolescentes, provoqué des accusations de mauvaise conduite sexuelle de la part des maris et, dans certains cas, des abandons et des divorces, remettant également en cause la capacité de travail des femmes et leurs responsabilités familiales ( témoignage tiré de la Nigerian Fertility Survey de 1985 et cité dans Amazigo, 1994 ). Une femme atteinte de schistosomiase urinaire dans l’État d’Anambra, au Nigéria, décrit sa situation de la façon suivante :

Au cours de ton adolescence, alors que les autres filles s’empressent de quitter l’école primaire pour trouver des prétendants, toi [ la fille atteinte d’hématurie ], tu passes ton temps à convaincre tes parents et tes partenaires masculins potentiels [...] que le sang dans ton urine n’est pas un symptôme de gonorrhée due à la promiscuité. Quand tu finis par te marier, tu te plains de saignement et d’irritation du vagin [ après les rapports sexuels ]. Tu n’es donc pas en mesure de satisfaire les désirs sexuels de ton mari. Imagine la vie que tu mènes. Même si tu es innocente, avec ces symptêmes, qui te croira ? ( Traduction libre. )

Enfin, les femmes sont souvent accusées de transmettre les maladies et peuvent être tenues responsables lorsque d’autres membres de la famille tombent malades. Certaines personnes sont persuadées, par exemple, qu’on attrape la lèpre si on a des rapports avec une « mauvaise femme » ou une femme qui a ses règles ( Mull et al., 1989 ). L’étude de Sotomayer et al.( 1994 ) sur la maladie de Chagas en Bolivie comprenait des entrevues avec des femmes enceintes chez qui on avait diagnostiqué la maladie. Lorsqu’elles ont été informées du diagnostic, les femmes ont exprimé des inquiétudes normales concernant la mort possible et les risques pour les enfants à naître. Elles se sont également montrées très préoccupées par les réactions possibles de leur partenaire à cette nouvelle ( Sotomayer et al., 1994 ). Faute d’informations adéquates, il n’était pas rare que les maris blâment leur femme aussi bien pour l’apparition que pour la transmission de la maladie de Chagas et disent à leurs enfants de se méfier de leur mère parce qu’elle risquait de les infecter ( Sotomayer et al., 1994 ). Ce type de réaction ajoutait au stress des femmes qui devaient déjà faire face au fait qu’elles étaient infectées.

Il faut davantage sensibiliser les services de santé aux tabous associés à beaucoup de maladies tropicales, particulièrement pour les femmes. Il faut poursuivre les recherches dans ce domaine, et particulièrement sur les effets sociaux et psychologiques, comme l’anxiété et la dépression, du défigurement chez les femmes.

L’ACCÈS AUX SOINS DE SANTÉ

Le chapitre 8 se penche sur le large éventail des facteurs qui entrent en jeu pour déterminer les chances qu’une femme aille se faire soigner dans un centre de santé. La question est également abordée ici parce qu’elle a une importance particulière en ce qui concerne les maladies tropicales.

Tout d’abord, l’insistance exagérée sur la santé des fonctions de reproduction des femmes dans les pays en développement a eu des répercussions négatives notables sur les soins prodigués aux femmes elles-mêmes. Comme les femmes ont tendance à associer les services de santé modernes avec la planification familiale et les soins aux enfants, elles pensent souvent qu’il n’existe pas de traitement pour leurs autres problèmes de santé et hésitent donc à mentionner les maladies tropicales ( Vlassoff et Bonilla, 1994 ). Une étude des femmes atteintes de paludisme dans le Saradidi, au Kenya, a révélé que 90 % des femmes reconnaissaient qu’elles souffraient de paludisme, mais que 53 % n’utilisaient pas les mesures de prophylaxie parce qu’elles ne savaient pas qu’elles existaient ( Kaseje et al., 1987 ). Il arrive souvent que les femmes ne mentionnent pas certains signes ou symptÃmes inhabituels parce qu’elles ne savent pas que les infirmières peuvent traiter la filariose. Les infirmières ne retirent pas les nodules, et les médecins ne viennent presque jamais au centre ( Amazigo, 1994 ). Malheureusement, les opinions des femmes sur les services disponibles sont trop souvent exactes. L’insistance disproportionnée sur la reproduction a eu pour effet de créer une pénurie de personnel et d’installations pour la détection, l’étude et le traitement des maladies tropicales chez les femmes qui se présentent dans les cliniques de santé.

Ensuite, l’incroyable tabou associé à un grand nombre de maladies tropicales signifie que les femmes sont parfois prêtes à tout faire pour dissimuler leur maladie. Les femmes ne veulent surtout pas exposer certains des effets redoutables de la leishmaniose ou de la filariose lymphatique, par exemple, notamment les difformités disgracieuses qui donnent aux jambes la forme de pattes d’éléphant. Les femmes qui se sentent défigurées ou laides ne sont parfois pas prêtes, psychologiquement, à se faire soigner. Dans la crainte d’être rejetées et abandonnées par leurs amis et leur famille, elles cachent souvent leur affliction et préfèrent vivre isolées dans leur maison, particulièrement une fois que les symptômes de la maladie sont devenus visibles ( Amazigo, 1994 ).

Le manque de femmes dans les centres de santé peut empÃcher les clientes d’exposer tous leurs besoins de santé, particulièrement dans le cas des maladies qui causent des déformations physiques. La réticence des femmes à se faire examiner par des hommes compromet la détection précoce de la maladie.

Les effets nocifs de la filariose lymphatique sur la santé sexuelle des femmes nigériennes sont difficiles à étudier à cause de la réticence des adolescentes et des femmes à se déshabiller devant les travailleurs de la santé el les chercheurs du Nigéria qui sont surtout des hommes.

— Uche Amazigo, département de zoologie, Université du Nigéria, Nsukka ( Nigéria )

Bien que les coûts associés à la prévention et au traitement des maladies tropicales, notamment la pulvérisation d’insecticides, les médicaments et l’hospitalisation, puissent être prohibitifs pour les hommes comme pour les femmes, les femmes risquent d’en souffrir davantage à cause de leurs ressources limitées et, dans certains cas, de leur complète exclusion de l’économie monétaire ( Paolisso et Leslie, 1995 ). Lorsque les ressources financières de la famille sont limitées, même des mesures de prévention relativement bon marché, comme l’acquisition de moustiquaires imprégnées d’insecticide, peuvent être trop chères pour les familles pauvres. De plus, si on ne peut pas acheter suffisamment de moustiquaires pour tous les membres de la famille, la discrimination entre les sexes peut entrer en jeu, si bien que les hommes et les garçons risquent d’avoir des moustiquaires avant les filles ( Alilio, 1994 ).

Les médicaments pour traiter la schistosomiase étaient disponibles dans le centre de santé du village, au prix de 3 $us le comprimé ( 12 $ pour une dose adulte ), ce que quasiment aucun villageois ne pouvait payer. Cela signifiait que presque personne n’était soigné pour son infection.

— Stella Anyangwe, faculté de médecine et de sciences biomédicales, Université deYaoundé LYaoundé (Cameroun)

À cause des différents facteurs qui entravent l’accès des femmes au diagnostic et au traitement, il peut être difficile d’établir une distribution définitive des maladies tropicales entre les sexes. À titre d’exemple, les hommes semblent être davantage exposés à la lèpre que les femmes, le ratio de prévalence enregistré entre les uns et les autres étant d’environ 2 à 1 ( Ulrich et al., 1992 ). De plus en plus de chercheurs suggèrent cependant que l’exactitude des statistiques officielles devrait être remise en question à cause du nombre de femmes qui ne cherchent pas à se faire soigner. L’accessibilité aux services de santé, les lourdes responsabilités liées au travail à la maison et aux soins des enfants, et le tabou associé à la lèpre se combinent pour empêcher les femmes de se présenter dans les cliniques pour se faire diagnostiquer. Cela donne lieu à une sérieuse sous-estimation de la prévalence de la maladie. Même les stratégies élaborées délibérément pour surmonter ces obstacles ne permettent pas toujours de parvenir à des chiffres exacts. Par exemple, même si les chercheurs vont de maison en maison pour détecter les cas actifs, les femmes qui vivent retirées ne sont pas autorisées à ouvrir leur porte à des hommes qu’elles ne connaissent pas, et ceci peut se solder par une omission systématique des femmes ( Manderson, 1994 ).

DISPENSATRICES DES SOINS
À LA FAMILLE

D’après les stéréotypes sexuels classiques, les femmes sont chargées des soins de santé.

— Ilta Lange. École de sciences infirmières. Universidad Católica de Chile. Santiago ( Chili )

La maladie a des conséquences particulières pour les femmes parce que, dans les pays en développement comme dans les pays industrialisés, ce sont les femmes qui sont chargées de dispenser les soins de santé à la famille ( Jones et Catalan, 1989 ; Strebel, 1994 ). Selon les stéréotypes et la division conventionnelle du travail, c’est la responsabilité « naturelle » d’une femme d’élever et de prendre soin des membres de la famille ( Salinas, 1988 ; Lange et ai., 1994 ; Strebel, 1994 ). Les responsabilités traditionnelles des femmes dans la promotion et l’entretien de la santé et du bien-être de la famille comprennent les tâches suivantes : produire et préparer des aliments nutritifs ; fournir de l’eau de bonne qualité et satisfaire aux besoins d’énergie essentiels ; s’occuper des membres de la famille, particulièrement des enfants, des invalides et des vieillards ; renseigner les autres membres de la famille sur la prévention et le traitement des maladies et l’entretien de la bonne santé ; parcourir de longues distances pour amener les enfants dans les cliniques ; traiter les maladies et les blessures courantes ; veiller à la propreté des enfants ; nourrir et prendre soin quotidiennement des membres de la famille ; assurer l’hygiène ; essayer de tenir propres des logements de mauvaise qualité ( Momsen, 1991 ; McCauley et al, 1992 ; Kwawu, 1994 ; Manderson, 1994 ). Les femmes accordent elles-mêmes beaucoup de valeur à leur rôle de dispensatrices de soins de santé ( Vlassoff, 1994 ) et, même quand elles effectuent un travail payé à l’extérieur de la maison, elles continuent invariablement à s’acquitter de ces responsabilités.

Les femmes sont les véritables administratrices des ressources de la famille; ce sont elles qui s’occupent des enfants et prennent soin des maris.

— Jane Kwawu. Centre des études africaines sur la famille. Nairobi ( Kenya )

Diagnostiquer la maladie et soigner les malades

Les femmes sont habituellement les premières personnes au courant lorsque les membres de la famille tombent malades ( Rathgeber et Vlassoff, 1993 ). Si les enfants parlent de leurs problèmes de santé à quelqu’un, c’est habituellement à leur mère. Ce sont aussi les mères qui reconnaissent les maladies des membres de la famille et peuvent « découvrir une infection si elles remarquent du sang sur les vêtements ou dans le lit des enfants » ( Anyangwe et al., 1994, p. 81 ).

Les femmes dispensent l’essentiel des soins aux malades alors que les hommes se chargent rarement de cette responsabilité ( Tsikata, 1994 ). Lorsqu’un membre de la famille est malade, c’est la femme qui décide si le traitement est approprié, s’il faut avoir recours à un médecin, et quels types de services de santé sont nécessaires ( Rathgeber et Vlassoff, 1993 ). Les femmes peuvent produire toute une variété de remèdes pour le traitement des membres de la famille, notamment des toniques, des extraits d’herbes aromatiques, des emplâtres, des onguents, des huiles et nombre d’autres

Une épidémie de choléra accroît les responsabilités, les soucis et le travail des femmes.

— Claudia Durana. faculté d’économique, Universidad do los Andes, Bogotá ( Colombie )

Au Simbok, le paludisme était le plus souvent diagnostiqué par les mères qui, pour commencer, essayaient des remèdes traditionnels comme des infusions d’herbes aromatiques ou des bains de vapeur au-dessus d’un pot d’eau bouillante. Ce n’est qu’ensuite qu’elles administraient des doses, souvent incorrectes, de divers médicaments contre le paludisme, particulièrement la chtoroquine et l’aspirine, qu’elles achetaient sans ordonnance.

— Stella Anyangwe, faculté de médecine et de sciences biomédicales, Université de Yaoundé I, Yaoundé ( Cameroun )

médicaments ( McCauley et al., 1992 ; Kettel, 1996. ). Les femmes préparent des remèdes efficaces aux herbes aromatiques pour les maladies de peau, les helminthes intestinales, la constipation, la diarrhée et d’autres infections ( MacCormack, 1992 ). Ce sont les femmes qui accompagnent habituellement les membres de la famille malades au centre de santé ou à l’hôpital et servent de médiatrices entre les professionnels de la santé et les membres de la famille ( Cardaci, 1992 ; Tsikata, 1994 ).

Répercussions des maladies des femmes

Peu d’études ont mesuré l’impact de la maladie d’une femme sur les autres membres de la famille. Il est important que les femmes soient en bonne santé, pour elles-mêmes mais aussi parce qu’elles jouent un rôle clé dans l’entretien de la santé familiale ( Kaendi, 1994 ). L’état de santé et le bien-être des femmes contribuent directement à la santé et au bien-être de leur famille, particulièrement des enfants et des personnes âgées, et donc de la communauté toute entière. L’invalidité d’une femme peut avoir un effet négatif sur la santé générale de la famille parce qu’elle n’est plus en mesure de s’acquitter de ses responsabilités essentielles ( Amazigo, 1994 ; Anyangwe et al., 1994 ). L’invalidité causée par le paludisme, par exemple, empêche les femmes de se présenter aux consultations prénatales et d’amener les enfants à la clinique pour se faire vacciner ( Brieger et al., 1989 ).

Les infections paludéennes chroniques et répétées ou les cas graves de schistosomiase peuvent réduire l’aptitude des femmes à assumer leurs tâches à la maison et dans les champs. Si la femme fait partie de la population active

Les pertes dues à la maladie de Chagas chez les femmes seulement, dans les zones endémiques, peuvent modifier de façon substantielle le statut économique de communautés entières.

— Octavio Sotom’ayer, Institut de maternité Dr-Percy-Boland, Santa Cruz ( Bolivie )

rémunérée, sa maladie signifiera probablement une perte de revenu pour la famille. Cependant, la perte de revenu due à la maladie peut être difficile à mesurer du fait que les femmes atteintes d’une maladie peuvent travailler plus longtemps ou travailler plus dur simplement pour satisfaire aux exigences de leur emploi.

Si une femme est très malade, endure de grandes souffrances ou est hospitalisée, quelqu’un doit prendre la relève, ce qui peut avoir des conséquences négatives pour d’autres membres de la famille, particulièrement dans les familles avec une femme à leur tÃte. Une étude de la Banque mondiale ( 1993 ) a constaté que la présence à l’école des jeunes entre 15 et 20 ans diminuait de moitié si la maison avait perdu un membre féminin adulte de la famille au cours de l’année précédente. Dans les sociétés où l’éducation des filles n’est pas jugée aussi importante que celle des garçons, les filles sont particulièrement touchées et ont davantage tendance que les garçons à être retirées de l’école pour assumer des responsabilités domestiques accrues (WASH Field Report, 1988 ; Banque mondiale, 1993 ). En cas de maladie grave de la mère, le fardeau de la mère devient le sacrifice de la fille — un sacrifice que l’on demande beaucoup moins souvent aux garçons (FNUAP, 1990 ). Il faut faire davantage de recherches pour étudier les effets des maladies des femmes, particulièrement sur l’absentéisme, les taux d’abandon scolaire et les résultats d’apprentissage des filles d’âge scolaire ( Amazigo, 1994 ; Anyangwe et al, 1994 ).

Aucune étude n’existe qui examine les conséquences sociales et économiques de la cécité due à l’onchocercose sur les rôles économiques et domestiques des femmes, particulièrement lorsqu’elles sont chefs de famille. La cécité d’une mère peut avoir un effet désastreux sur la famille.

— Uche Amazigo. département de zoologie, Universitè du Nigèria. Nsukka ( Nigèria )

Mesures de lutte contre la maladie

Beaucoup de maladies sont transmises à l’intèrieur ou aux alentours immèdiats de la maison. La meilleure façon d’y faire face est de prendre un soin tout particulier de l’environnement biophysique local. Les stratègies de lutte contre la maladie requièrent donc la participation active de tous les membres de la famille. Le rôle social des femmes comme dispensatrices de soins de santè dans la famille signifie qu’elles occupent une fonction importante à la maison, aussi bien dans la transmission que dans la prèvention des maladies. En fait, il se peut que le succès et l’efficacitè ultimes des interventions dèpendent de la participation des femmes.

Il incombe d’abord aux femmes d’appliquer les mesures de prèvention du cholèra dans la famille, de faire bouillir l’eau, de nettoyer l’intèrieur et l’extèrieur de la maison et de prendre soin des enfants.

— Claudia Durana, facultè d’èconomique, Universidad do los Andes, Bogotá ( Colombie )

Comme les femmes ont une autoritè et un pouvoir notables dans la sphère domestique, on risque de se retrouver avec de faibles taux de participation aux activitès de prèvention de la maladie si l’on ne s’assure pas leur collaboration. Si les femmes ne sont pas à l’aise quand il s’agit d’ouvrir leur porte au personnel masculin des programmes de lutte contre les vecteurs de maladies, par exemple, elles ne rèorganiseront pas leur environnement domestique en consèquence.

Le cas des moustiquaires illustre combien il est important de s’assurer l’accord et la collaboration des femmes pour garantir le succès des interventions. Pour lutter contre le paludisme en Asie, en Amèrique latine et en Afrique, on a de plus en plus recours à des moustiquaires imprègnèes d’insecticide. Les moustiquaires trempèes dans l’insecticide antimoustique et utilisèes pour recouvrir les lits permettent de rèduire notablement les dècès associès au paludisme ( OMS, 1993 ). Il y a de bonnes chances pour que ce soit les femmes qui soient chargèes de rèimprègner les moustiquaires tous les six mois ; le succès de cette intervention dèpendra de leur collaboration ( Alilio, 1994 ; Amazigo, 1994 ).

Reublin ( 1992, p. 49 ) dècrit la situation comme suit :

Ce sont les [ femmes ] qui apporteront les moustiquaires de la famille aux centres de santè pour les faire tremper dans une suspension de pyrèthre ; ce sont elles qui les mettront à sècher sur des matelas et qui veilleront à ce que les enfants restent en dessous la nuit. Ce sont elles qui dècideront si les moustiquaires doivent être lavèes et à quelle frèquence, et si elles ont besoin d’être traitèes à nouveau au pyrèthre parce que les moustiques recommencent à piquer. De même, si les onguents, les savons et les fumèes qui ècartent les moustiques sont utilisès à grande èchelle à l’avenir, dans le cadre de programmes intègrès contre la maladie, ce sera aux femmes de veiller à ce que ces produits soient utilisès correctement par la famille et à ce que les enfants, en particulier, se lavent avant de les appliquer à nouveau. ( Traduction libre. )

Vlassoff ( 1994 ) a indiquè qu’une ètude pilote effectuèe au Ghana et financèe par L’OMS pour ètudier les prèfèrences concernant les moustiquaires imprègnèes d’insecticide, a constatè que les femmes ne voulaient pas de moustiquaires blanches parce qu’elles devenaient vite sales et graisseuses. En consèquence, on a dècidè de teindre les moustiquaires en gris et le projet a donnè de bons rèsultats jusqu’ici.

Les mesures d’hygiène sont la clè de la prèvention de maladies comme la leishmaniose, la cysticercose et le cholèra. Comme les femmes sont habituellement les premières responsables des habitudes d’hygiène dans la maison et des pratiques de prèservation de l’environnement, leur participation à la lutte contre la maladie et au traitement est majeure pour leur rèussite. Les femmes peuvent jouer un rôle important dans les stratègies pour amèliorer les pratiques d’hygiène, particulièrement en ce qui concerne l’èlimination des ordures et des eaux usèes, l’amèlioration de la qualitè de l’eau, l’adoption de pratiques hygièniques pour la prèparation des aliments et l’èlimination des sites rèels et possibles d’installation et de reproduction des phlèbotomes, comme les amas d’ordures, les piles de briques et les pierres ( Stephenson, 1987 ; Warren et al., 1993 ).

Les femmes avaient davantage tendance que les hommes à parler directement aux personnes qui dèversaient leurs ordures dans la rivière, alors que les hommes ètaient plus indiffèrents ou laissaient faire.

— Harjanti Yudomustopo. Institut indonèsien des sciences, Jakarta ( Indonèsie )

Éducation sanitaire des membres de la famille

Il est important que les femmes participent pleinement au processus d’èducation en santè. Dans la plupart des cultures, les femmes sont des agents importants de socialisation des membres de la famille eu ègard aux opinions concernant la santè, au comportement en cas de maladie et à l’utilisation des services sanitaires ; elles peuvent donc jouer un rôle important dans la prèvention et la lutte contre les maladies. Par exemple, ce sont les femmes qui donnent aux enfants des habitudes personnelles d’hygiène, leur apprennent à se brosser les dents et leur enseignent les principes de la bonne alimentation et l’importance des pratiques saines en matière d’hygiène et d’èlimination des dèchets ; elles veillent ègalement à ce que les enfants soient vaccinès et soignès pendant les annèes cruciales ( Kwawu, 1994 ; Lule et Ssembatya, 1995 ). Si elles ètaient èduquèes comme il le faut sur les maladies tropicales, les femmes pourraient parler à leurs enfants des parasites, des vecteurs d’infection et de l’èvolution des maladies.

En reconnaissance du fait que les efforts d’èducation axès surtout sur les femmes amèliorent non seulement leur santè mais aussi celle de leur famille, les interventions s’adressent de plus en plus aux femmes pour introduire des changements dans les pratiques de santè ( Sarti, 1994 ). Les femmes

Les efforts d’éducation axés sur (es mères améliorent non seulement leur santé, mais aussi celle de leur famille.

— Elsa j. Sarti, Direccion Nacional de Epidemiologia, Secretan’a de Salud, Mexico ( Mexique )

que l’on invite à passer d’une ancienne source d’eau à une nouvelle, par exemple, ou que l’on persuade d’utiliser des latrines à la maison plutÃt que de dèfèquer dans les bois, peuvent convaincre d’autres membres de la famille de l’importance de ces pratiques. Pour rèduire la transmission de la schistosomiase, on peut encourager les femmes à limiter leur contact avec les eaux infestèes et à dèfendre à leurs enfants de jouer dans les lacs infectès. Les enfants qui vivaient le long de la rivière aimaient jouer, se baigner et même faire leur toilette dans l’eau, a observè Yudomustopo ( 1995 ). Les femmes, à titre de mères et d’èducatrices, ont pris en charge la sècuritè de leurs enfants et la plupart leur ont dèfendu de s’adonner à ces activitès.

Lors de son travail dans un village indien maya, Mata ( 1982 ) a constatè que les attitudes et les pratiques maternelles avaient davantage d’impact sur la transmission des maladies dans la famille que la classe èconomique ou le niveau d’èducation. Sarti ( 1994 ), de la DirecciÃn Nacional de Epidemiologia ( SecretarÃa de Salud ), au Mexique, a rapportè qu’elle avait rèussi à modifier les mauvaises pratiques d’hygiène qui ètaient cause de maladie par le biais de programmes d’èducation communautaires axès sur les mères. Les mères ont ensuite transmis les pratiques de prèvention à leurs enfants.

Bien qu’il faille tenir compte du rôle des femmes dans la prestation des soins, les chercheurs ont tenu à souligner qu’il y avait des inconvènients à viser exclusivement les femmes dans les interventions de lutte contre la maladie. Rathgeber et Vlassoff ( 1993 ), par exemple, ont tout de suite fait remarquer qu’en insistant sur le rôle des femmes comme dispensatrices de soins de santè, on risquait de renforcer l’opinion qu’elles sont responsables des èchecs des efforts communautaires de lutte contre la maladie, d’une part, et de diriger la critique contre elles si les activitès dèsirèes ne sont pas mises en œuvre, d’autre part. Les mesures de contrôle recommandèes peuvent ègalement prendre beaucoup de temps et d’ènergie, ce qui ajoute encore au lourd fardeau des femmes ( Winch et al., 1994 ). À cet ègard, les recherches devraient s’efforcer d’èlaborer des stratègies qui dèbouchent sur une distribution plus èquitable des rôles dans la famille. Sans oublier qu’il est important de s’assurer la collaboration des femmes, on pourrait axer les messages de santè sur les hommes et les femmes plutôt que seulement sur les femmes, ce qui perpètue l’idèe que la santè de la famille est surtout ou exclusivement

Les messages sanitaires adressés aux femmes peuvent perpétuer l’idée que la santé de la famille est surtout ou exclusivement leur responsabilité.

— llta Lange, école de sciences infirmières, Universidad Catolica de Chile, Santiago ( Chili )

la responsabilitè des femmes. Il faut encourager les hommes à jouer un rôle plus actif dans la crèation et l’entretien d’un milieu familial sain plutôt que d’en laisser l’entière responsabilitè aux femmes.

Niveaux de connaissance

L’aptitude des femmes à se protèger elles-mêmes de la maladie et à initier correctement les membres de leur famille aux mèthodes de prèvention et de traitement dèpend des informations qu’elles reçoivent. De nombreuses recherches, cependant, rèvèlent des lacunes importantes dans la comprèhension qu’ont les femmes de la maladie. Au Baringo, au Kenya, beaucoup moins de femmes ( 12 % ) que d’hommes ( 26 % ) connaissaient l’ètiologie exacte de la leishmaniose viscèrale ( Kaendi, 1994 ). L’aptitude des femmes à se protèger ainsi que leur famille est compromise par un manque de comprèhension des causes, des symptômes, des vecteurs de transmission et des mèthodes de prèvention et de traitement.

Une ètude de la transmission du paludisme parmi les adolescentes des règions rurales du Ghana a rèvèlè que beaucoup d’entre elles croyaient que le paludisme ètait dù la chaleur excessive, et que la majoritè des membres de la communautè ne faisaient pas le lien entre le paludisme et les moustiques ( Agyepong, 1992 ). Bien que, selon une ètude effectuèe au Cameroun, la plupart des femmes aient compris que le paludisme ètait causè par les piqùres de moustiques, d’autres mentionnaient des causes diffèrentes, y compris les fortes pluies, les longues marches au soleil et le rhume ( Anyangwe et al., 1994 ). Dans la même recherche, on apprend que la plupart des femmes cessaient de traiter leurs enfants contre le paludisme une fois la fièvre tombèe, même après une seule dose de mèdicament.

Aux Philippines, des femmes s’exposaient parfois au paludisme parce qu’elles n’ètaient pas conscientes des risques qu’elles couraient ( Espino, 1995 ). Une mère sortait continuellement de la moustiquaire la nuit pour prèparer du lait pour son jeune bèbè. Une femme enceinte refusait le traitement de peur que cela fasse du mal au bèbè. Après l’accouchement, cette femme a reçu un diagnostic de paludisme mais a donnè le mèdicament prescrit au bèbè parce qu’elle croyait qu’il souffrait aussi de paludisme ( Espino, 1995 ).

Il y avait de graves malentendus parmi les femmes du Cameroun sur la façon dont on contractait la schistosomiase. Les femmes pensaient que les « vers » qui causent la schistosomiase entraient dans le corps humain par l’urètre ou l’anus, au cours de l’urination ou de la dèfècation dans le lac ( Anyangwe et al., 1994 ). Au Pèrou, les femmes attribuaient frèquemment la leishmaniose au contact avec de l’« eau rance », avec la rosèe du matin et avec un certain arbre, le toroq, ou encore avec les moustiques et les papillons ( Timoteo et Llanos-Cuentas, 1994 ).

Beaucoup de femmes, dans les règions endèmiques, ètaient mal informèes sur la maladie de Chagas ( Zajac, 1992 ; Sotomayer et al., 1994 ). Dans une ètude effectuèe dans les règions rurales de la Bolivie, 59 % des femmes ne savaient pas que les triatomes transmettaient la maladie de Chagas bien qu’elles connaissent ces insectes pour les avoir vus dans leur maison ( Zajac, 1992 ).

L’un des premiers facteurs de risque de la maladie de Chagas. chez les femmes de classe socio-èconomique infèrieure, est le manque d’informotions sur la maladie et son mode de propagation. La majoritè des renseignements sur la maladie ètaient basès sur des spèculations ou des croyances mythiques. Certaines femmes enceintes pensaient qu’elles ètaient victimes de sorcellerie, qu’on leur avait jetè un mouvais sort ou qu’elles avaient ètè infectèes par une outre personne.

— Octovio Sotomayer, Institut de maternitè Dr-Percy-Boland, Santa Cruz ( Bolivie )

Des croyances superstitieuses ont aussi ètè signalèes concernant d’autres maladies. En Colombie, certaines femmes pensaient que le cholèra ètait un « signe du destin » ( Durana, 1994 ) tandis que, dans le Kosnipata, au Pèrou, la leishmaniose ètait parfois attribuèe à la magie ou à une punition de Dieu ( Timoteo et Llanos-Cuentas, 1994 ).

Autoritè dècisionnelle des hommes

Beaucoup de chercheurs ont signalè que les interventions qui visent exclusivement les femmes, parce qu’elles sont responsables des soins aux enfants, peuvent avoir peu d’impact du fait que ce sont surtout les hommes qui ont le pouvoir de dècision dans les familles ( Amazigo, 1994 ; Chiarella, 1994 ; Kaendi, 1994 ; Vlassoff, 1994 ; Bello, 1995 ; Udipi et Varghese, 1995 ). Dans certaines cultures, les femmes peuvent prendre des dècisions sur les questions concernant la santè des enfants sans nècessairement consulter d’autres membres de la famille. Cependant, dans d’autres sociètès, la dècision de changer de comportement doit être sanctionnèe par les maris dans la maison et dans

Au Simbok, c’étaient les pères qui décidaient du moment où on allait se faire soigner dans un centre de santé. Les mères devaient demander au père la permission et l’argent nécessaire pour se rendre elles-mêmes ou pour amener leurs enfants au centre de santé si elles jugeaient l’infection suffisamment grave pour nécessiter un traitement.

— Stella Anyangwe, faculté de médecine et de sciences biomédicales, Université deYaoundé LYaoundé ( Cameroun )

l’ensemble de la communautè ( McCauley et al., 1992 ). Une ètude a rèvèlè que la permission d’assister à des rèunions de femmes ètait seulement accordèe après que les objectifs du programme eussent ètè expliquès aux maris et aux membres de la communautè ( McCauley et al., 1992 ). D’après une femme du KwaZulu-Natal, en Afrique du Sud, on a besoin de la permission du mari absolument pour tout ( Pagè, 1995 ).

Dans le cas des activitès de prèvention du paludisme, par exemple, c’est l’homme de la maison qui peut prendre la dècision ultime et cruciale sur l’utilisation d’une moustiquaire et sur le choix des utilisateurs familiaux. Les pères, et parfois les belles-mères, peuvent dècider quand faire usage des mesures prophylactiques contre le paludisme. On a signalè que des belles-mères empÃchaient leur bru de prendre des mèdicaments contre le paludisme parce qu’elles croyaient qu’il s’agissait en fait de contraceptifs oraux ( OMS, 1995 ). D’après Rogler ( 1989, citè dans Yack, 1992 ), les interventions basèes sur l’idèe que les femmes sont libres de prendre des dècisions concernant la santè de leurs enfants prèsupposent l’existence d’une situation de choix oà les mères et les autres membres de la famille discutent de leurs prèfèrences, dans un contexte de rapports ègaux.

Une ètude effectuèe par Halima Abdullah Mwenesi, du Centre de recherche mèdicale du Kenya à Nairobi, illustre clairement le peu de pouvoir dont disposent les femmes dans certaines sociètès. Mwenesi a examinè la façon dont les dècisions touchant les soins de santè ètaient prises parmi les peuples Mijikenda et Luo du district de Kilifi, dans la Coast Province, au Kenya. Elle a indiquè que, en accord avec les prèceptes de leurs sociètès

L’utilisation des services de santè est lièe de près à l’inègalitè entre les sexes. Les femmes de statut socio-èconomique infèrieur ne peuvent pas dècider unilatèralement de se faire soigner. La dècision est prise par le mari ou par la belle-mère.

— Trinidad S. Ostena, Université De La Salle, Manille ( Philippines )

Presque toutes les mères ( 880 sur 883 ) demandaient conseil avant d’amener un malade à l’hôpital.

— Halima Abdullah Mwenesi, Centre de recherche médicale du Kenya, Nairobi ( Kenya )

patriarcales, les mères aussi bien du peuple Luo que du peuple Mijikenda ne sont supposèes prendre aucune dècision sur elles-mêmes ou sur les enfants de leur mari sans consulter ce dernier ou d’autres hommes de la maison ( Mwenesi, 1994 ). Les femmes consultaient toujours leur mari et, en l’absence de celui-ci, leur père et leurs frères, et c’est seulement si le père n’ètait pas là et que les frères du mari ètaient plus jeunes que l’on s’adressait aux femmes plus âgèes de la famille ( habituellement la belle-mère ou la belle-sœur plus âgèe ).

Ces sociètès ont une structure sociale bien dèfinie où chacun « connaît sa place » ( Mwenesi, 1994 ). Les maris sont consultès parce que « c’est comme ça » ( Mwenesi, 1994 ) et les hommes prennent toutes les dècisions financières. Parmi le peuple Luo, si les rapports d’anciennetè sont ignorès, on croit que le chira s’abattra sur toute la maisonnèe. Des recherches qualitatives effectuèes auprès d’hommes et de femmes ont rèvèlè que, bien que les femmes puissent dècider d’utiliser de simples remèdes traditionnels ou d’acheter des mèdicaments sans ordonnance comme l’acide acètylsalicylique, quelqu’un d’autre que la mère devait participer aux dècisions importantes comme d’aller ou non au centre de santè ou de voir un guèrisseur traditionnel, parce qu’on pensait que le mari ( ou son substitut ) prendrait une dècision plus sage que la mère.

De même, McCauley et al.( 1992 ) ont signalè que, parmi le peuple Gogo de Tanzanie, bien que les femmes soient responsables de soigner leurs enfants malades et leur administrent des tisanes aromatiques en cas de problèmes mineurs, elles devaient demander la permission expresse de leur mari avant de consulter un centre de santè ou un guèrisseur traditionnel. Des rèsultats similaires ont ètè rapportès par Janzen ( 1978 ) sur le Zaïre. Les rèpercussions de ces rèsultats sont graves : les dèlais causès par le fait qu’il faut consulter diffèrentes personnes lorsqu’un enfant souffre d’une maladie grave peuvent entraîner la mort ou la dètèrioration de l’ètat de l’enfant ( Mwenesi, 1994 ). De même, si une femme est elle-même malade, ces retards peuvent aggraver son ètat.

Bien que les interventions doivent reconnaìtre l’importance des femmes comme promoteurs de la santè au niveau familial, elles doivent ègalement être sensibles à l’ensemble complexe de facteurs qui influencent les comportements sanitaires. Il faut tenir compte, par exemple, du statut

Les femmes devaient consulter leur mari parce que les maris avaient des soupçons concernant les visites ou centre de sontè et pensaient que les femmes utilisaient parfois les maladies de leurs enfants ou leurs visites à la clinique pour bèbès comme une excuse pour se prèsenter au service de planification familiale. La plupart des rèpondants masculins ne voyaient pas la nècessitè de ces services.

— Halima Abdullah Mwenesi, Centre de recherche mèdicale du Kenya, Nairobi ( Kenya)

inférieur des femmes dans la famille ainsi que du fait que les pouvoirs ultimes en ce qui concerne la prise de décisions sont souvent entre les mains des hommes de la famille. Il y a beaucoup de travail à faire pour améliorer la position des femmes dans les sociétés en développement avant que des interventions axées exclusivement sur les femmes puissent être considérées comme des solutions viables ( Kaendi, 1994 ).

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Chaiptre 7
Obstacles à l’accès à
des soins de qualitè

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CRDI: D. Marchand

Une analyse fondèe sur la diffèrence entre les sexes peut offrir une perspective intèressante de la structure desservices de santè, de la façon dont ils fonctionnent et des soins qu’ils dispensent La capacitè des systèmes de santè de faire la diffèrence entre les besoins des hommes et des femmes et d’y rèpondre est une mesure de leur pertinence et de leur dètermination. Cette dèmarche est nècessaire pour dèterminer les changements qui s’imposent aux ètablissements et aux pratiques de santè dans les pays en dèveloppement — même s’ils peuvent sembler menaçants à certains.

— A.D. Tillett, Centre de recherches pour le dèveloppement international, Bureau règional pour l’Amèrique latine et les Antilles, Montevideo ( Uruguay )

Toutes sortes de facteurs entrent en jeu pour empêcher les femmes de se prèsenter dans un centre de santè pour se faire soigner. Les obstacles à surmonter ne concernent pas seulement « la distance » ( Timyan et al., 1993 ) et les ressources nècessaires pour couvrir le coût des soins et du transport même si ces èlèments ont certainement leur importance.

Les publications dans ce domaine ont tendance à distinguer entre l’« accès aux soins » et la « qualitè des soins ». Les recherches sur la qualitè des soins sont gènèralement axèes sur l’expèrience de celles et ceux qui ont rèussi à avoir accès à des services de santè modernes sans ègard pour les gens qui dècident de ne pas utiliser ces services ou qui n’en ont pas les moyens. Or, les clientes peuvent considèrer l’accès aux soins comme faisant partie intègrante de la qualitè des soins ( Ndhlovu, 1994 ) et refuser d’utiliser les services jugès de piètre qualitè. C’est pourquoi nous examinerons les obstacles qui empÃchent les femmes d’avoir accès aux services ainsi que les facteurs qui influent sur la qualitè des soins dispensès dans les lieux de prestation des services.

RECONNAISSANCE DE LA MALADIE

Pour qu’une femme dècide de se faire soigner, elle doit pouvoir reconnaître les signes et les symptômes qui indiquent qu’elle a besoin de soins ( AbouZahr, 1994 ; Manderson, 1994 ). Faute de connaissances et d’une bonne comprèhension des questions lièes à la santè, cependant, beaucoup de femmes ne savent pas reconnaître les diffèrentes maladies et la façon dont elles se manifestent. Ainsi, certaines femmes partent du principe que « les ècoulements vaginaux font simplement partie de la vie d’une femme » ( Pesce, 1994 ) ou qu’il est normal d’avoir mal au dos parce qu’elles ont eu mal au dos toute leur vie.

Combien de filles et de femmes dans le monde souffrent d’un manque d’instruction, d’informations et de connaissances ? Ce type de dènuement empêche les femmes de comprendre comment leur corps fonctionne et comment elles peuvent se protèger et prèvenir la maladie.

— A. El Bindari Hammad, Organisation mondiale de la santè. Genève ( Suisse )

En raison des restrictions et des tabous culturels auxquels elles sont soumises, les femmes sont souvent incapables d’interprèter les signes de la maladie, particulièrement s’il s’agit de santè gènitale. Manneschmidt ( voir note 2 à la page 59 ), par exemple, a indiquè qu’ « il y a un dèni collectif des problèmes sexuels des femmes dans la sociètè du Nèpal » et que cela se traduit par une absence de termes en nèpali pour dècrire les diffèrentes parties des organes gènitaux des femmes et leurs symptômes gynècologiques. Manderson ( 1994 ) a dècrit comment certaines femmes, faute de connaissances sur la façon dont leur corps fonctionne, ne savent pas faire la diffèrence entre le sang menstruel normal et d’autres sources de sang ( p. ex. le sang dans l’urine en cas de schistosomiase ), particulièrement dans les cas où il y a eu mutilation gènitale. Manderson ( 1994 ) a ègalement expliquè que certaines femmes peuvent même ne pas remarquer l’apparition d’un saignement mineur ( p. ex. si elles urinent et se baignent complètement habillèes comme l’exigent certaines pratiques culturelles ).

EXIGENCES CONFLICTUELLES

Même si une femme remarque des symptômes de maladie, elle peut n’y prêter aucune attention en raison des autres exigences auxquelles elle doit faire face. Les femmes estiment qu’elles ne peuvent pas s’offrir le « luxe » de se rendre à un centre de santè ou de prendre un congè d’invaliditè, car elles ne pourraient plus consacrer leur temps et leurs efforts aux activitès essentielles et peut-être plus importantes comme les soins aux enfants, la production de

Lorsque les femmes souffrent de maladies comme une infection du système de reproduction ou lo tuberculose, elles nient souvent leurs symptômes jusqu’à ce qu’ils soient trop graves ou trop sèrieux pour qu’elles puissent continuer à assumer leurs lourdes responsabilitès.

— A. El Bindari Hammad, Organisation mondiale de la santè. Genève ( Suisse )

la nourriture et l’emploi rèmunèrè ( AbouZahr, 1994 ; Bhattacharyya et Hati, 1994 ). Les femmes qui occupent un emploi temporaire dans l’industrie de la cueillette des fruits aux fins d’exportation au Chili, par exemple, disent qu’il leur est impossible, à cause de leurs longues journèes de travail, de quitter leur emploi pour s’occuper de leurs problèmes de santè ( Berr, 1994 ).

Responsables du bien-être de leur famille, des femmes qui vivent dans un ètat d’extrême pauvretè à Montevideo, en Uruguay, ont dèclarè qu’elles « ne pouvaient pas laisser leurs enfants seuls » et qu’« aller voir le mèdecin est une perte de temps » ( Bonino, 1994, p. 201 ). Des femmes du Tchad ont dit qu’elles ne pouvaient même pas amener un enfant malade dans un centre de soins parce qu’« on a d’autres enfants à la maison qui nous attendent. Ils doivent aller à l’ècole, et nous devons aller au marchè » ( Wyss et Nandjinger, 1995, p. 148 ).

Généralement, les mères disent qu’elles sont occupèes, qu’elles ne peuvent pas venir au centre de santè, qu’elles doivent se dèplacer ou qu’elles doivent aller vendre leurs produits ailleurs. Elles disent que leur commerce nourrit toute la famille et qu’elles ne peuvent pas s’occuper d’un seul enfont au dètriment de tous les autres.

— Kasper Wyss et Monique Nandjinger, institut tropical helvètique. Bâle ( Suisse )

Les heures d’ouverture des centres de santè ne tiennent pas toujours compte de la division du travail entre les sexes et du moment où les femmes peuvent se libèrer. Étant donnè les tâches que les femmes doivent accomplir pendant la journèe ( p. ex. aller chercher l’eau, nourrir les poulets, ramasser le bois à brûler, aller à l’usine ), il leur serait plus facile d’aller à la clinique le soir alors que celle-ci est habituellement ouverte pendant la journèe. Il faudrait prendre en compte les heures de travail des femmes lorsqu’on fixe les heures d’ouverture des cliniques. Pour amèliorer l’accès aux soins de santè des femmes qui ont un emploi, on pourrait aussi offrir des services de santè sur le lieu de travail ( p. ex. dans les usines ) ( MacCormack, 1992 ).

Il est rare que d’autres membres de la famille et de la communautè se chargent des activitès essentielles des femmes lorsqu’elles sont malades. Les femmes continuent donc à exècuter les tâches qu’il est difficile de remettre à plus tard ( Watts et al., 1989 ; Bonilla et al., 1991 ). Comme elles ne prennent pas suffisamment de temps pour s’occuper de leur santè, il leur faut habituellement plus longtemps pour se remettre complètement d’une maladie. Bien souvent, le sèjour d’une femme à l’hôpital ( si elle doit y aller ) est nettement plus court que celui d’un homme ( Bhattacharyya et Hati, 1994 ) et, immanquablement, une femme retourne au travail, à la maison ou à l’extèrieur, avant d’être totalement remise.

Les femmes ne sont pas prêtes à se rendre dans les centres de santé pour elles-mémes, car leur absence perturbe la tenue de la maison et les activités économiques.

— Ttïmdad S. Osteria, Université De La Salle, Manille ( Philippines)

UNE QUESTION DE PRIORITÉS

Dans les pays en dèveloppement, les femmes ont tendance à faire passer la santè et le bien-être de leur famille, particulièrement ceux des enfants, avant leur propre santè et, en consèquence, n’ont pas recours à l’aide mèdicale pour elles-mêmes. Les femmes « donnent tout à leurs enfants » ( Bonino, 1994 ) parce que « les enfants ont toujours la prioritè » et qu’ils sont « la seule chose qu’elles ont dans la vie » ( Bonino, 1994, p. 201 ). Si elles ne prÃtent guère attention à leurs propres symptômes, les femmes considèrent de leur devoir de se rendre aux visites de contrôle de la grossesse parce qu’elles sont responsables du bien-être de leur enfant ( Bonino, 1994 ). Par ailleurs, les garçons ont davantage accès aux soins de santè que les filles ( Chatterjee, 1991 ). Dans une ètude menèe au Bangladesh, les garçons de moins de cinq ans qui souffraient de diarrhèe ètaient plus souvent amenès au centre de traitement que les filles — le taux d’utilisation ètait de 66 % plus èlevè pour les garçons que pour les filles ( Chen et al., 1981 ).

Le statut généralement inférieur des femmes et le fait qu’elles intériorisent ce statut se traduisent par une marginalisation de leurs besoins physiques, psychologiques et émotionnels ( Bhattacharyya et Hati, 1994 ; Kwawu, 1994 ; Manderson, 1994 ). Les femmes consultent moins les services de santé modernes que les hommes, attendent plus longtemps que les hommes pour se faire soigner lorsqu’elles sont malades, hésitent à utiliser les ressources limitées de la famille pour leurs propres besoins et, quand elles sont malades, ont davantage tendance à se soigner comme elles peuvent et à consulter les guérisseurs traditionnels, ou à apprendre tout simplement à

La routine quotidienne d’une femme est pleine de petites renonciations qui sont des actes de sacrifice pour les autres.

— Constanza Collazos V Centro de Investigaciones Multidisciplinarias en Desarrollo, Cali { Colombie )

À cause de leurs lourdes charges à la maison, les femmes ne peuvent pas se permettre d’être malodes. Il serait utile de découvrir combien il existe de maladies chez les femmes qui ne reçoivent jamais l’attention de la profession médicale.

— Dzodzi Tsikata, Institut de recherches statistiques, sociales et économiques, Université du Ghana, Legon ( Ghana )

vivre avec la maladie et les souffrances qui l’accompagnent ( Mechanic, 1976 ; Lorber, 1984 ; Rathgeber et Vlassoff, 1993 ; Kwawu, 1994 ; Iqbal, 1995 ).

Le chef d’une communauté trés pauvre à l’extérieur de Montevideo, en Uruguay, a déclaré que les femmes ne prennent aucun soin d’elles-mêmes. Le mari ou les enfants viennent toujours en premier ; pour les enfants, elles trouvent toujours le temps ( Bonino, 1994 ). Une femme interrogée au cours de la même étude croit que les femmes donnent plus d’importance à leurs enfants qu’à elles-mêmes.

Les femmes associent l’utilisation d’un dispensaire, d’une clinique ou des services hospitaliers à la santé de leurs enfants ( Kwawu, 1994 ) et ne se rendent généralement dans les centres de santé que pour les faire soigner, même si elles ne sont pas en bonne santé elles-mêmes. Iqbal ( 1995 ) a indiqué qu’on avait souvent observé qu’une femme qui se présente parce qu’elle est inquiéte pour son enfant souffrait elle-même d’une maladie, surtout d’anémie et de malnutrition. Dans une communauté où l’onchocercose est hyperendémique, dans l’État d’Enugu, au Nigéria, les femmes qui se présentaient au seul centre de santé de la localité ont été interrogées à trois reprises sur les raisons pour lesquelles elles venaient au centre ( Amazigo, 1994 ). Sur les 53 femmes ( âgées de 16 à 39 ans ) interrogées, 47 venaient parce que leurs enfants étaient malades, 5 parce qu’elles étaient enceintes et 1 parce qu’elle souffrait de fiévre et de diarrhée. Or, 20 de ces femmes ( 38 % ) présentaient au moins un signe clinique d’onchocercose.

Quand on a demandé aux femmes pourquoi elles ne se faisaient pas soigner en même temps que leurs enfants, l’une d’elles a observé : « Les services du centre de santé sont pour nos enfants et les maladies dont ils souffrent ( poliomyélite, tétanos, tuberculose, rougeole ). je ne crois pas que les infirmiéres peuvent soigner la filariose. Elles n’enlévent pas les nodules, et les médecins ne viennent presque jamais au centre.

— Uche Amazigo, département de zoologie, Université du Nigéria, Nsukka ( Nigéria )

Pour s’occuper de sa propre santé, une femme doit se reconnaître comme une personne, penser qu’elle a de la valeur, renforcer son estime de soi et avoir le pouvoir de prendre des décisions concernant sa santé.

— Constanza Collazos V., Centro de tnvestigaciones Muttidisciptinarias en Desarrollo, Cali ( Colombie )

Les femmes ont besoin d’une éducation générale sur l’importance des soins de santé de routine aussi bien pour elles-mêmes que pour leurs enfants. Il faut un certain degré d’estime de soi pour décider de se faire soigner et c’est un facteur dont il faut tenir compte lorsque l’on met en place des programmes d’éducation sur la santé ( Bonino, 1994 ). Puisque la plupart des femmes accordent une trés grande importance à leurs enfants, il pourrait être utile de faire passer des messages soulignant qu’une femme doit être en bonne santé pour protéger la santé de son enfant ( Iqbal, 1995 ).

MANQUE DE SOUTIEN

Le soutien social apporté par les autres — les parents, les amis, les voisins, etc. — peut jouer un rôle important dans le maintien de la santé physique et psychologique des femmes ( Bonino, 1994 ) et avoir une grande influence sur leur comportement en la matiére. Beaucoup de femmes, particuliérement les femmes pauvres et celles qui sont seules responsables du bien-être de la famille, « manquent de soutien familial, n’ont personne pour leur dire d’aller voir le médecin et de prendre soin d’elles-mêmes, personne pour s’inquiéter à leur sujet » ( Bonino, 1994, p. 214 ). On accorde moins d’importance à la santé des membres féminins de la famille qu’à celle des membres masculins si bien que les maladies des femmes ne reçoivent généralement pas beaucoup d’attention ( Bhattacharyya et Hati, 1994 ). Alors que les hommes sont fortement encouragés par les autres membres de la famille, particuliérement leur mére et leur femme, à se faire soigner, ce n’est pas le cas des femmes ( Niraula, 1994 ) — « le rôle d’une femme est de soigner, pas d’être soignée ».

Une femme a besoin qu’on lui dise que c’est pour son bien qu’il faut qu’elle se fosse soigner. ll lui faut quelqu’un pour la soutenir, en tout temps. Ce qui s’est passé, c’est que je suis allée toute seule à l’hôpital, je n’avais personne pour m’accompagner, alors je n’y suis pas retournée.

— Cité par Maria Bonino, Universidad de la Repûblica, Montevideo ( Uruguay )

Une étude menée dans un hameau égyptien a conclu que l’accés d’une personne malade aux soins de santé était fonction de son statut dans la famille. Les jeunes femmes, dont le statut était jugé inférieur, étaient habituellement soignées par des remédes maison ou traitées par des guérisseurs traditionnels. « Les femmes semblaient avoir besoin de convaincre les hommes qu’elles étaient gravement malades avant qu’on les améne voir le médecin » ( Lane et Meleis, 1991, p. 1206 ). Cependant, les personnes ayant un statut plus élevé, comme les hommes de tous âges et les méres de fils adultes, étaient tout de suite conduites chez un praticien privé.

La société peut complétement sous-estimer l’ampleur véritable des problémes de santé de certaines femmes. Paolisso et Leslie ( 1995 ) ont fait remarquer que, parce que certaines maladies et pathologies trés graves n’étaient pas reconnues comme il se doit par la société ( p. ex. le cancer, le sida, les handicaps physiques, la fatigue chronique, la dépression ), les femmes qui présentaient ces problémes n’avaient pas le statut de « personnes malades ». Si la maladie d’une femme n’est pas reconnue comme authentique, il y a peu de chances pour que les membres de la famille et la communauté l’encouragent à se faire soigner.

HONTE ET EMBARRAS

La honte et l’embarras peuvent empêcher les femmes de parler de leurs maladies aux membres de la famille et aux pourvoyeurs de soins de santé ( Bhattacharyya et Hati, 1994 ; Lule et Ssembatya, 1995 ) et c’est une des raisons pour lesquelles elles ne se présentent pas aux services de santé aux fins de diagnostic et de traitement. Cette réticence à parler aux autres est particuliérement marquée dans le cas des maladies de l’appareil urinaire ou génital ( Amazigo, 1994 ; Manderson, 1994 ). Par exemple, un tabou tenace entoure les MTS parce qu’elles sont associées à la perversion sexuelle. Il n’est pas surprenant que les femmes soient effrayées par les conséquences de la découverte d’une telle maladie et par le risque d’ostracisme de la famille et de la communauté que cela pourrait entraîner ( Guimarães, 1994 ; Lule et Ssembatya, 1995 ). Enfin, Vlassoff ( 1994 ) a fait remarquer que les femmes qui étaient victimes de violence et de mauvais traitements refusent catégoriquement de se faire soigner parce qu’elles ne veulent pas attirer l’attention sur leur situation.

Les services de santé doivent être sensibles à la honte et à l’embarras des femmes devant beaucoup de maladies. Par exemple, en réponse au tabou associé aux MTS et pour augmenter les chances que les femmes se fassent soigner, les centres de santé pourraient offrir des services multiples et des consultations en privé pour que les raisons de la visite ne soient pas évidentes ( Banque mondiale, 1993 ).

LA PEUR DE LA MALADIE

Dans une étude qualitative menée par Bonino ( 1994 ) auprés des femmes d’un quartier trés pauvre à l’extérieur de Montevideo, en Uruguay, les chercheurs se sont penchés sur plusieurs des craintes qui peuvent empêcher les femmes d’aller se faire soigner dans les centres de santé. Certaines femmes ont déclaré qu’elles avaient peur que l’on découvre des maladies au cours de l’examen et ont ajouté « qu’elles aimaient mieux ne rien savoir ». Une femme était préoccupée par le fait qu’elle pourrait avoir un « cancer de l’utérus » et elle préférait « ne pas le savoir » parce que « sa belle-mére était morte du cancer de l’utérus » et « sa belle-sœur avait laissé cinq enfants derriére elle quand elle était morte du cancer de l’utérus ». L’addition d’analyses de sang aux examens de routine peut provoquer d’autres inquiétudes. Une femme a déclaré : « S’ils font les tests du VIH, je n’y vais pas — s’il fallait que je découvre que j’ai le sida ? » ( Bonino, 1994, p. 202 ).

APATHIE ET DÉPRESSION

Les femmes qui souffrent de troubles psychologiques, comme la dépression, peuvent se retrouver dans un état de compléte apathie quant à leur santé ( Bonino, 1994 ). Les troubles psychologiques ont souvent une compasante biologique et les conditions de vie particuliérement dures de beaucoup de femmes, notamment la pauvreté, le niveau élevé de stress, l’isolement et l’absence de soutien social, peuvent se conjuguer pour produire un état de dépression ou d’apathie ( Bernardi et MouriÃo, 1991 ). L’incapacité dans laquelle se trouvent certaines femmes de formuler leurs problémes peut avoir un effet négatif sur leur santé psychologique. Pour d’autres, des traumatismes subis dans l’enfance, comme le viol ou l’inceste, peuvent être des facteurs d’apathie ou de dépression ( Ferrando, 1992 ). Une étude américaine ( Joyce, 1988 ), qui a examiné les antécédents de 70 femmes qui ne s’étaient pas présentées pour recevoir des soins prénatals, a conclu que les obstacles psychosociaux que constituaient la dépression, l’attitude négative et la peur étaient des facteurs d’abstention plus puissants que des obstacles extérieurs comme l’absence d’assurance médicale ou les problémes de transport.

DIFFICULTÉS D’ACCÈS AUX
CENTRES DE SANTÉ

Les gens devraient pouvoir recevoir des soins de qualité prés du lieu où ils habitent. Or, les centres de santé sont souvent mal répartis tandis que le personnel de santé et les ressources financiéres sont habituellement concentrés dans les hÃpitaux urbains ( Banque mondiale, 1993 ; Atai-Okei, 1994 ). Dans les régions rurales, où vivent la majorité des femmes des pays en développement, les services de santé adéquats sont plus rares.

À Kabugao, aux Philippines, communauté de la province de Kalinga-Apayao qui accuse l’un des taux les plus élevés de paludisme dans le pays, il faut prendre un bateau ou marcher pendant une demi-journée dans la montagne pour atteindre l’hôpital régional et la clinique rurale. L’hôpital provincial, qui est mieux équipé, est à prés d’une journée en jeep. Au plus fort de la saison des pluies, il est impassible de traverser la riviére.

— Esperanzo Espino, département de parasitologie et d’entomologie médicale, Institut de recherche de médecine tropicale, Manille ( Philippines )

Les difficultés d’accés aux centres de santé, à cause de l’éloignement, du manque de transport ou du mauvais état des routes, sont des obstacles dont il est souvent fait mention ( Banque mondiale, 1993 ; Atai-Okei, 1994 ; Kaendi, 1994 ; Iqbal, 1995 ; Ren et al., 1995 ). Dans une étude sur le paludisme et le kala-azar menée à Baringo, au Kenya, en 1992–1993, Kaendi ( 1994 ) a conclu que la distance était le facteur le plus déterminant dans l’utilisation des soins de santé. La différence entre les sexes était également citée, 62 % des femmes ( contre 48 % des hommes ) indiquant que la distance influençait leur comportement en la matiére. Le paludisme peut paser de graves problémes lorsqu’il n’y a pas de centre de santé — « beaucoup de gens sont morts de cette maladie avant d’arriver à l’hôpital » ( Anyangwe et al., 1994, p. 78 ).

Dans une étude de 390 femmes ayant fait l’objet d’un suivi aprés s’être présentées à une clinique prénatale au centre de santé de Nankumba, dans le district de Mangochi, au Malawi ( Lule et Ssembatya, 1995 ), l’éloignement du centre de santé était la premiére raison donnée pour expliquer pourquoi moins du quart des femmes avaient accouché au centre de santé alors que prés que 90 % en avaient l’intention. Les chercheurs ont noté que le nombre de femmes qui avaient accouché au centre de santé était lié en proportion indirecte à la distance en kilométres du centre, allant de 90 % pour celles qui habitaient à 1 km du centre jusqu’à 10 % pour celles qui habitaient à plus de 20 km. De même, l’éloignement du centre de santé avait une forte influence

Il y a un certain nombre de problèmes majeurs avec les centres de santé communautaires gérés par l’État et par le secteur privé au Cambodge. Les centres de santé sont très éloignés les uns des autres et les bons établissements sont généralement trop loin. Il n’y a jamais suffisamment de transport. La sécurité pase des problèmes, et on prend des risques en se déplaçant le soir. À cause du manque d’infrastructure, il arrive souvent que les malades n’arrivent pas à temps au centre de santé pour recevoir un traitement adéquat

— Neang Ren. Association des sages-femmes du Cambodge, Phnom Penh ( Cambodge )

sur le nombre de mères qui s’y sont présentées au deuxiéme et au troisiéme trimestres de leur grossesse.

Rodney ( 1995 ) a signalé que pour les femmes de Grenade, le manque de transport était l’un des obstacles les plus importants à l’accès aux services, particulièrement dans les régions rurales. Elles se plaignaient de l’absence de transports publics dans certaines régions et du fait que les minibus des compagnies privées desservaient surtout les régions urbaines à forte densité de population.

Dans les régions rurales, où la marche est le mode de transport habituel des femmes ( et parfois la bicyclette ), lorsqu’une femme malade veut se présenter dans un centre de santé, elle doit parfois parcourir de très longues distances à pied. Si c’est son enfant qui est malade, elle marche parfois plusieurs kilomètres avec l’enfant sur le dos ( Kaendi, 1994 ). L’éloignement des centres de santé signifie souvent que les femmes ne se rendent à la clinique que lorsque leur état ou celui de leur enfant a atteint un stade critique ( Lule et Ssembatya, 1995 ).

Enfin, Bailey et al.( 1995, p. 333 ) ont fait remarquer que le rapport négatif entre l’éloignement et l’utilisation des installations médicales n’est pas toujours uniquement lié à la « friction de la distance » — il peut aussi être associé au degré de familiarité des femmes avec ces services.

Généralement, les clientes qui habitent dans les régions plus éloignées ne comprennent pas bien quels services dispensent l’établissement de santé et y sont moins expasées. La familiarité peut entraîner des niveaux d’acceptation beaucoup plus élevés.

— W. Bailey, département de géographie. University of the West Indies ( Jamaïque )

Il faut rendre les centres de santé plus accessibles si l’on veut promouvoir leur utilisation aux fins de prévention et de lutte contre les maladies ( Kaendi, 1994 ). L’utilisation de cliniques mobiles ou la prestation de moyens de transport pourraient grandement en améliorer l’accessibilité.

RESTRICTION DE LA MOBILITÉ

Quand on nie aux femmes l’exercice de leurs droits légaux, sociaux et culturels, elles sont défavorisées en ce qui concerne(’accés aux soins de santé.

— Trinidad S. Osteria. Université De La Salle. Manille ( Philippines )

Les normes culturelles qui restreignent les mouvements des femmes dans certaines sociétés peuvent les empêcher de consulter les services de santé ( Leslie, 1992 ; Rathgeber et Vlassoff, 1993 ; Manderson, 1994 ; Udipi et Varghese, 1995 ). Dans les régions rurales du Pakistan, par exemple, les femmes ne sont pas autorisées à parcourir de longues distances seules. Elles doivent être accompagnées par un membre masculin de la famille, même leur frère cadet ou leur fils ( Iqbal, 1995 ). Au Nigéria, « la pratique religieuse de la purdah restreint sérieusement les rapports des femmes avec les hommes et les inconnus. Cela limite la distance que les femmes peuvent parcourir seules pour aller se faire soigner » ( Paolisso et Leslie, 1995, p. 61 ). Pour surmonter cet obstacle, MacCormack ( 1992, p. 384 ) a laissé entendre que des « veuves âgées dont l’honneur et le statut sont reconnus pourraient recevoir une formation de travailleuses de la santé afin de se rendre chez les femmes qui ne sont pas autorisées à sortir de chez elles ».

Une stratégie axée sur la femme exigerait des mesures supplémentaires comme encourager les infirmières communautaires à effectuer des visites à domicile, particulièrement dans les communautés où les femmes vivent retirées chez elles, pour diagnostiquer et soigner les cas de maladie dans le cadre des activités du programme du lutte contre le paludisme.

— Uche Amazigo, département de zoologie, Université du Nigéria, Nsukka ( Nigéria )

ACCÈS AUX RESSOURCES FINANCIÈRES

Le manque d’accès aux ressources nécessaires pour couvrir les coûts du transport, des services et du traitement est un autre obstacle à l’accès aux soins de santé ( Bhattacharyya et Hati, 1994 ; Chiarella, 1994 ). Les femmes n’ont généralement pas le contrôle des ressources financières ( souvent rares ) et elles ne peuvent ni ne veulent les détourner à leur profit. Selon Paolisso et Leslie ( 1995, p. 61 ) :

étant donné le salaire limité que gagnent les femmes dans les emplois officiels et non officiels et, dans certains cas, leur complète exclusion de l’économie, on peut se demander dans quelle mesure les femmes pauvres, particulièremenr celles qui sont chefs de famille, peuvent assumer les dépenses associées aux soins de santé. ( Traduction libre. )

Les femmes qui dépendent économiquement de leur mari ou de leur famille ( Mwenesi, 1994 ) doivent compter sur les membres masculins de la famille pour payer les frais associés aux services de santé. Ce sont généralement les hommes qui ont le dernier mot quand il s’agit de décider si on peut dépenser l’argent nécessaire pour qu’un membre de la famille se rende dans un centre de santé ( Anyangwe et al., 1994 ; Kaendi, 1994 ; Tsikata, 1994 ; Vlassoff, 1994 ).

Parmi le peuple Mijikenda, les femmes sont perçues comme la propriété des hommes parce que les hommes paient une dot pour se marier. Les femmes ne prennent aucune décision sans consulter leur mari. Les maladies, de quelque nature qu’elles soient, sont perçues comme une question de vie et de mort, et de telles questions ne peuvent être laissées entre les mains des femmes. Quelqu’un d’autre que la mère doit participer au recours à l’aide médicale. Les mères avaient aussi besoin d’aide financiére pour payer soit le traitement, soit le transport, et très peu ont de l’argent en propre.

— Halima Abdullah Mwenesi, Centre de recherche médicale du Kenya, Nairobi ( Kenya )

Les résultats de diverses recherches qualitatives ont clairement décrit les difficultés financières auxquelles les femmes doivent faire face. Une femme du Tchad a déclaré : « Chaque fois, il faut payer 100 francs par-ci 100 francs par-là. Si on multiplie ces 100 francs par le nombre de fois qu’on va à l’hôpital, on ne peut pas trouver les sommes nécessaires » ( Wyss et Nandjinger, 1995, p. 144 ). Le même sentiment a été exprimé par une femme du Kenya : « J’ai entendu dire que là-bas les services ne sont pas gratuits et que, si on ne peut pas leur donner 20 shillings, [on] ne peut pas recevoir de services « ( Ndhlovu, 1994, p. 12 ). Enfin, une autre femme du Kenya se

Des groupes de réflexion, organisés avec des adolescentes du bidonville, ont révélé qu’elles n’avaient pas confiance dans les services hospitaliers gouvernementaux. L’opinion générale était que les soins de santé ne sont pas à la portée des pauvres.

— S.A. Udipi et M.A. Varghese, SNDT Women’s University. Bombay ( Inde )

plaint du coût des transports : « Elle allait m’amener à l’hôpital national de Kenyatta mais il fallait de l’argent pour payer l’autobus et je ne l’avais pas. Alors, on n’y est pas allé » ( Ndhlovu, 1994, p. 11 ).

Dans les économies en transition, comme le Cambodge, la Chine, le Laos, la Mongolie et le Viet Nam, qui passent d’un système économique centralisé dans un gouvernement socialiste à l’économie de marché, les établissements impasent de plus en plus de droits d’utilisation, et de plus en plus d’hommes et de femmes doivent payer pour recevoir les services de santé essentiels. Zhang ( 1994 ), du ministère de la Santé publique, attachée au Collége médical de Kunming, en Chine, a déclaré que les réformes économiques et l’introduction des droits d’utilisation ont rendu les services moins accessibles aux femmes. Un certain nombre de femmes défavorisées, provenant de familles très pauvres, qui jouissaient autrefois de services gratuits, se retrouvent parfois dans l’impassibilité de voir un médecin dans les régions rurales lorsque c’est nécessaire. Comme les passibilités d’emploi ne sont pas également offertes aux femmes et aux hommes, les femmes sont plus défavorisées par le fait qu’il faut payer les services de santé.

SEXE ET MATURITÉ DES TRAVAILLEURS
DE LA SANTÉ

Dans bon nombre de pays en développement, les travailleurs de la santé sont des hommes. Le manque de femmes parmi les personnes qui dispensent les soins de santé est un autre obstacle qui empêche les femmes de se présenter aux centres de santé, particulièrement lorsque leur maladie est associée à l’appareil génital ou cause des difformités physiques. Lorsque les femmes se décident à consulter un travailleur de la santé, la timidité et la réserve, particulièrement s’il s’agit de santé sexuelle, peuvent rendre la communication impassible entre la cliente et le pourvoyeur de soins ( Iqbal, 1995 ; Manneschmidt, voir note 2 à la page 59 ).

Leur comportement quant aux soins de santé avait davantage à voir avec le manque de ressources financières qu’avec le manque de connaissance ou de désir de se faire soigner.

— Stella Anyangwe, faculté de médecine et de sciences biomédicales, Université de Yaoundé I, Yaoundé ( Cameroun )

Les préceptes culturels peuvent tout simplement interdire aux femmes d’être vues par des spécialistes de la santé masculins. Dans certains pays du Moyen-Orient, par exemple, la plupart des médecins sont des hommes, et une croyance culturelle irréductible veut que les femmes ne doivent pas être vues après la puberté par des hommes qui ne font pas partie de leur famille ( Banque mondiale, 1993 ). Au Bangladesh, les notions de pureté et de honte sont si importantes pour déterminer le statut d’une femme que les patientes musulmanes ne peuvent pas parler directement à leur médecin ; c’est le mari ou le père qui explique le problème de santé au médecin au nom de la femme ( Rozario, 1995 ). Au Pakistan, on préfère les femmes aux hommes pour les soins obstétriques et gynécologiques, même si elles ont moins de qualifications. Il est passible, cependant, de consulter un homme s’il s’agit de problèmes mineurs sans rapport avec la santé des fonctions de reproduction ( Iqbal, 1995 ).

La pratique religieuse musulmane de la purdah interdit aux hommes médecins du Bangladesh d’être présents pendant la naissance d’un enfant. Même si la santé de la femme se trouve gravement compromise pendant le travail, les mères défendent à leurs filles d’accoucher dans les hôpitaux urbains « où la violation de la purdah est inévitable » ( Islam, 1989, p. 234 ).

Les hommes médecins refusent aussi de voir des patientes dans certaines circonstances. Dans le centre du Népal, les femmes ont beaucoup de difficultés à se faire soigner par des hommes lorsqu’elles ont leurs règles, parce qu’elles sont suppasées être souillées et intouchables pendant cette période ( Niraula, 1994 ). De même, au Bangladesh, parce que « la souillure

Les adolescentes et les femmes refusent de se déshabiller devant les travailleurs médicaux qui sont en majorité des hommes. Au Nigéria, les femmes ne veulent pas, comme disent celles du Nord, que des hommes inconnus contemplent leur nudité

— Uche Amazigo, département de zoologie, Université du Nigéria, Nsukka ( Nigéria )

Le manque de femmes médecins dans les cliniques privées et les hôpitaux gouvernementaux était un autre problème. Deux tiers des filles d’une communauté pauvre essentiellement musulmane de l’extérieur de Bombay ne voyaient jamais d’homme médecin à moins de nécessité absolue. Leur mère décrivait les symptômes au médecin et se procurait les ordonnances et les médicaments en leur nom.

— S.A. Udipi et M.A. Varghese. SNOT Women’s University, Bombay ( Inde )

associée à la naissance est considérée la plus grave de toutes et l’accouchement du bébé, la coupure du cordon et le nettoyage du sang sont jugés être les plus dégoûtantes des tâches » ( Jeffery et al., 1988, p. 106 ), certains hommes médecins prèférent ne pas s’occuper des naissances et laissent cette tâche aux assistantes traditionnelles à l’accouchement ( Rozario, 1995 ).

Dans une étude qualitative menée par Chiarella ( 1994, p. 214 ) sur les obstacles qui empêchent les femmes d’utiliser les services de santé officiels en Bolivie, les femmes interrogées ont déclaré que « ce devrait être des femmes qui s’occupent de nous ». Plus de la moitié des femmes interrogées dans le cadre d’une étude menée au Kenya ont également déclaré qu’elles préféraient une femme parce qu’« elle est leur ègale » et parce qu’il serait plus facile de partager leurs problémes avec une femme ( Ndhlovu, 1994 ). Malheureusement, à cause des problèmes de sécurité, des limites impasées à la mobilité des femmes et de l’importance de la présence des femmes dans leur famille, il est souvent difficile de recruter des travailleuses de la santé.

Outre le sexe de la personne qui dispense les soins, une étude récente effectuée au Kenya a conclu que l’âge et la maturité de cette personne représentaient également des facteurs importants pour les femmes. Les femmes peuvent hésiter à utiliser les services parce que « les pourvoyeurs de soins sont plus jeunes qu’elles et qu’elles ne veulent pas montrer leur nudité à de jeunes hommes ». Les femmes préféraient des « femmes mûres, qui étaient mariées et avaient eu des enfants » parce qu’elles pensaient qu’« elles seraient mieux à même de les comprendre et de sympathiser avec leurs problèmes » ( Ndhlovu, 1994 ).

RESPECT DE LA CULTURE

Les soins de santé offerts aux femmes doivent être acceptables culturellement si l’on veut que les femmes y aient recours. Deux études, l’une effectuée en Bolivie et l’autre en Chine, ont examiné la réticence des femmes indigènes à utiliser les services officiels de type occidental parce que certains aspects de

Les femmes de Chapare, en Bolivie, utilisaient rarement les services de santé de type occidental parce que les procédures étaient en contradiction avec leurs croyances culturelles sur ce qui constituait des pratiques désirables. Dans certains cas, le régime traditionnel et le système d’inspiration occidentale se complétaient. Parfois, ils étaient très différents et en oppasition, d’où la sousutilisation des services.

— Giovanna Chiarella, Centre d’éducation-conseils et de recherches sur la santé. Cochabamba ( Bolivie )

ces services étaient contraires à leurs croyances et à leurs pratiques culturelles ( Chiarella, 1994 ; Zhang, 1994 ).

Chiarella ( 1994 ) a utilisé des techniques de recherche qualitatives pour étudier certaines des raisons pour lesquelles les femmes indigènes des régions rurales de Cochabamba, en Bolivie, n’utilisaient pas le système officiel de soins de santé même si les programmes et les services de santé dispensés étaient appropriés. La région est habitée par de nombreux peuples migrateurs issus de différents groupes ethniques, parmi lesquels les Quechua, les Aymara et les Orientaux.

Les chercheurs ont découvert qu’il y avait beaucoup de différences entre les systèmes traditionnels et occidentaux dans les pratiques et les croyances associées aux soins prénatals, au travail et à l’accouchement, et que les femmes indigènes refusaient d’aller accoucher à l’hôpital à cause des inconvénients que présentait le système moderne. Les femmes indigènes préféraient avoir leur bébé à la maison parce qu’elles pouvaient prendre du mate pour aider le travail, qu’elles étaient entourées de leur famille et de leur mari, qu’elles pouvaient aller et venir si elles le désiraient, s’envelopper chaudement et porter leurs propres vêtements, qu’elles n’étaient pas rasées et ne subissaient pas d’incision, qu’elles pouvaient accoucher verticalement, en pasition accroupie. À l’hôpital occidental, par contre, elles ne pouvaient rien consommer, elles étaient entourées d’étrangers et ne pouvaient pas marcher pendant le travail, elles devaient se déshabiller et porter une chemise d’hôpital, la salle était froide et l’épisiotomie obligatoire, et elles devaient accoucher horizontalement, en pasition gynécologique. Les femmes ont également déclaré que les pratiques de l’hôpital étaient inacceptables parce qu’elles ne pouvaient pas s’emmailloter pour empêcher le magre de monter ( le magre est un organe mythique qui est suppasé se développer derrière le nombril pendant la grossesse et qui peut « monter » et causer la mort par asphyxie ).

Le système traditionnel entretient également des notions différentes concernant l’importance du placenta. Ces peuples indigènes de Bolivie considérent le placenta comme une continuation de la vie. Une fois expulsé, il doit être lavé et enterré dans un lieu ombragé. Dans le cas d’un garçon, il est enterré sous un plan de coca et, dans le cas d’une fille, dans la cuisine. Si ce rite n’est pas observé, la croyance veut qu’il peut arriver un grand nombre de calamités ; par exemple, l’enfant peut tomber malade et mourir ou il peut devenir faible d’esprit ou alcoolique en grandissant, et la mére peut aussi tomber malade ( Chiarella, 1994 ). Les femmes ont déclaré qu’il était important de respecter cette pratique parce que cela leur donnait un sentiment de sécurité. Cet acte rituel est manifestement fort éloigné de la méthode occidentale qui consiste à jeter le placenta. Certaines femmes des villages ruraux du Yunnan, en Chine, ne veulent pas non plus accoucher à l’hôpital, en grande partie parce qu’elles craignent de perdre le placenta ( Zhang, 1994 ).

Selon la culture et la religion traditionnelles, le placenta est pour le fœtus une protection sacrée et il doit être enterré dans un lieu sûr pour assurer au nouveau-né une croissance exempte de maladies. Aussi ne faut-il pas s’étonner que beaucoup de femmes accouchent à la maison, avec tous les risques que cela comporte, pour être sûres de pouvoir enterrer le placenta selon les rites. Certains chercheurs ont laissé entendre que l’accouchement à l’hôpital serait plus acceptable pour les femmes de ces régions si elles avaient la garantie que le placenta leur serait rendu.

— Kaining Zhang, Collége de médecine de Kunming, Kunming ( Chine )

Il faut veiller à ce que les pratiques médicales et hospitaliéres respectent la culture des gens auxquels elles s’adressent. Les services de santé devraient adapter leurs méthodes de travail de façon à intégrer les pratiques traditionnelles qui ne sont pas dangereuses pour la santé des femmes ( Turmen et AbouZahr, 1994 ). Compte tenu de l’importance accordée au placenta dans certaines cultures, par exemple, on pourrait encourager les couples à pratiquer une cérémonie de réception du placenta lorsqu’ils rentrent de l’hôpital à la maison ( Zhang, 1994 ).

Bien qu’il faille respecter les normes et les valeurs culturelles, ce peut aussi être la tâche du secteur de la santé de remettre en question, le moment venu, les croyances et les pratiques qui sont dangereuses pour la santé des femmes. Dans les régions rurales du Myanmar ( ex-Birmanie ), par exemple, des recherches qualitatives ont révélé que certaines coutumes traditionnelles entourant la grossesse et les soins prénatals étaient parfaitement saines, alors que d’autres présentaient des risques pour la santé des femmes ( Win May et al., 1995 ). Les pratiques culturelles saines pendant la grossesse, comme le fait de ne pas porter de lourdes charges, de manger beaucoup de fruits et de légumes et de ne pas se priver de certains aliments, doivent être encouragées par les pourvoyeurs de soins. D’autres croyances, comme l’idée que l’œdéme est un phénoméne normal et que les soins prénatals sont inutiles si la mére est en bonne santé, peuvent être dangereuses pour les femmes enceintes et ne doivent pas être entretenues.

Le personnel de santé dons les régions rurales du Myanmar devrait apprendre aux femmes enceintes que l’œdéme est signe de danger et leur faire valoir la nécessité d’utiliser réguliérement les services de soins prénatals. On pourrait ainsi réduire la morbidité et la mortalité maternelles et améliorer la santé de la mére et de l’enfant.

— Daw Win May. Institut de sciences infirmiéres, Yangon ( Myanmar )

PIÈTRE QUALITÉ DES SOINS

Les décisions des femmes en matiére de soins de santé sont influencées par ce qu’elles pensent de la nature et de la qualité des services. Si les femmes n’ont pas confiance dans les services qui leur sont offerts, elles ne les utilisent généralement pas. Beaucoup de femmes hésitent à avoir recours aux centres de santé locaux parce qu’elles pensent, souvent avec raison, qu’ils ne dispensent pas des soins de bonne qualité. Il arrive donc souvent que les établissements de niveau tertiaire soient gravement surpeuplés parce que les femmes les jugent plus efficaces et s’efforcent de s’y rendre, malgré la distance ( AbouZahr, 1994 ).

Bon nombre de femmes ont eu de mauvaises expériences avec les services de soins et elles hésitent à y retourner, même si cela doit compromettre leur santé. Une femme a déclaré : « Ils m’ont tellement maltraitée que je n’ai rien dit, je suis revenue à la maison et je n’y suis jamais retournée » ( Bonino, 1994, p. 203 ). Une autre femme interrogée au cours de la même étude a ajouté : « les étudiants étaient là, ils m’ont déshabillée, ils m’ont tous touchée. J’ai peur d’y retourner ». Il arrive aussi que les femmes refusent de se présenter à l’examen de suivi parce que le médecin « les examine et met son doigt dans leur vagin » ( p. 202 ).

Les femmes sont également influencées par les histoires négatives que leur racontent les membres de leur famille et leurs voisines : « Ma sœur m’a dit qu’ils allaient me découper depuis le haut jusqu’en bas — alors je n’y suis jamais allée » ( Bonino, 1994, p. 202 ). Une étude effectuée au Malawi a révélé qu’une proportion importante de femmes accouchaient à la maison à cause d’expériences passées négatives ou parce que d’autres femmes leur ont dit que les sages-femmes et le personnel ne se comportaient pas bien ou manquaient d’égards envers les femmes pendant le travail ( Lule et Ssembatya, 1995 ). Les femmes qui avaient une attitude pasitive envers le personnel du centre de santé avaient presque trois fois plus tendance à accoucher avec l’aide d’une personne qualifiée que celles qui avaient une attitude négative. Certaines femmes ont déclaré que les femmes plus âgées de leur famille leur avaient conseillé de ne pas aller au centre de santé et de ne pas faire appel aux assistantes traditionnelles à l’accouchement. Les femmes peuvent faire énormément confiance à certaines sources d’information, comme leurs amies et leur famille, lorsqu’elles prennent des décisions en rapport avec leur santé.

Judith Bruce ( 1990 ), du Population Council à New York, a isolé un certain nombre d’aspects de la qualité des soins que les femmes jugent importants, notamment la passibilité de faire un choix informé, la prestation d’informations fiables, la compétence technique, les bonnes relations interpersonnelles ( ce qui comprend des attributs comme la confidentialité, le respect et le tact, le traitement d’égal à égal et la longueur du temps passé avec les fournisseurs de soins ), les systémes de suivi et de continuité et le regroupement approprié des services. Toutefois, les résultats de nombreuses recherches indiquent que les femmes des pays en développement reçoivent souvent des soins de qualité trés médiocre ( OMS, 1995 ). Ainsi, Haaland ( 1994 ) rapporte que:

Les femmes des régions rurales de l’Afrique se plaignent souvent des soins qui leur sont dispensés par les travailleurs de la santé dans leurs communautés. Elles les accusent fréquemment d’être impatients, grossiers et négligents. Elles se plaignent aussi du fait que les travailleurs de la santé demandent des sommes exorbitantes pour les services et les médicaments. En conséquence, les femmes des régions rurales s’occupent généralement de leurs problémes de santé à la maison. ( Traduction libre. )

Les femmes se plaignent souvent qu’on ne leur donne pas suffisamment d’informations. Par exemple, les femmes d’une région rurale de la Bolivie ont déclaré qu’elles n’étaient pas satisfaites parce que le médecin les avait « tripotées » et qu’il « les avait examinées de la tête aux pieds » sans leur donner aucune explication ( Chiarella, 1994, p. 213 ). Dans une étude menée à la Barbade et à Grenade ( Rodney, 1995 ), les professionnels de la santé avaient l’impression que les femmes n’avaient ni le besoin ni le désir de comprendre leur condition et ne se donnaient pas la peine de les informer clairement dans des termes compréhensibles et avec respect. De fait, les messages d’éducation en matiére de santé ne sont pas toujours communiqués d’une façon utile et facile à comprendre pour les femmes des régions rurales — les messages écrits, par exemple, ne sont pas trés utiles à des femmes pratiquement illettrées.

Il est généralement reconnu que les clientes accordent beaucoup d’importance aux rapports interpersonnels. Les résultats de recherche, cependant, ont indiqué un manque de tact de la part de la majorité des fournisseurs de soins de santé dans leurs rapports avec les clientes. Au Kenya, par exemple, des femmes qui s’étaient adressées à des services de planification familiale se sont plaintes d’avoir dû attendre longtemps et de ne pas avoir été correctement accueillies ni mises à l’aise par les pourvoyeurs de soins ( Ndhlovu, 1994 ). Mawajdeh et al. ( 1995 ) a déclaré qu’un grand nombre des femmes qui avaient participé à leur étude sur la qualité des soins prénatals à Irbid, en Jordanie, étaient irritées par le manque d’isolement visuel et auditif.

Tous les gens qui se trouvaient dans la piéce pouvaient entendre les conversations derriére l’écran ainsi que les conseils sur le soin des seins et des mamelons et l’hygiéne personnelle, et les réponses aux questions concernant les écoulements vaginaux et l’activité sexuelle.

— Ra’eda Al-Qutob. Fonds des Nations Unies pour la population/Organisation mondiale de la santé ( Jordanie ), et Salah Mawajdeh, Université de science et de technologie. Irbid ( Jordanie )

Les femmes se sont également plaintes d’avoir été durement interpellées ou de s’être fait réprimander par les professionnels de la santé qui jugeaient qu’elles n’avaient pas un style de vie ni un comportement adéquats. Une femme a déclaré que sa « sœur était enceinte de trois mois et, quand le docteur est venu la chercher, elle était en train de fumer et elle s’est fait sermonner. Elle a immédiatement décidé de ne pas entrer » ( Bonino, 1994, p. 202–203 ). Certaines femmes ont dit qu’elles étaient préoccupées par leur degré de propreté et la façon dont elles étaient habillées et qu’elles trouvaient que c’était trop compliqué de « se préparer » pour aller à la clinique. Des femmes ont été insultées par des infirmiéres qui leur ont dit que leurs vêtements sentaient mauvais ( Bello, 1995 ). Les femmes nomades d’Illorin, au Nigéria, ont déclaré que le personnel de l’établissement de santé ( qui appartenait à une autre tribu ) les insultait et leur disait qu’elles se comportaient comme les vaches de leur troupeau ( Bello, 1995 ). Une femme de l’étude menée par Iqbal ( 1995 ) a dit encore : « Elles m’insultaient, et cela ne pouvait pas continuer. Alors, j’ai décidé de rester à la maison. »

Le médecin ne devrait pas faire de réflexions si on lui améne un enfant sale parce que. si la mére doit se rendre à l’urgence, elle ne pensera pas à laver son enfant avant de partir.

— Cité par Maria Bonino, faculté de médecine, Universidad de la Repùblica, Montevideo ( Uruguay )

Les femmes pauvres et marginalisées ont souvent l’impression qu’elles ne sont pas traitées de la même façon que les clientes payantes de la classe moyenne. A un hôpital du Bangladesh, Rozario ( 1995, p. 104 ) s’est fait dire que « si la parenté d’un patient paie une forte somme aux médecins et aux infirmiéres, ils s’organisent habituellement pour veiller sur lui. Autrement, rien ne garantit qu’ils s’en occuperont s’il a besoin de soins. » Mawajdeh et al. ( 1995 ) a constaté que plus la femme était bien de sa personne, plus la communication s’établissait facilement et plus elle recevait d’informations. Une femme de classe inférieure d’un village montagnard du centre du Népal ( citée dans Niraula, 1994, p. 157 ) a déclaré ce qui suit :

Le centre de santé ne traite pas tout le monde également Si quelqu’un d’une classe supérieure ou qui a plus d’influence vient se faire traiter, non seulement le personnel lui consacre la majeure partie de son temps, mais il reçoit aussi des médicaments gratuits. Quant à nous, les pauvres, ils nous disent d’aller les acheter au magasin . Lorsqu’une personne du service de planification familiale ou du service de santé vient au village, elle ne vient jamais nous voir directement. Elle trouve même difficile de nous parler. ( Traduction libre. )

Dans bien des cas, il y a un abîme entre la façon de voir le monde de la cliente et de la personne qui dispense les services. Ces énormes différences entre clients et fournisseurs peuvent faire obstacle à l’accés aux soins et, lorsqu’une personne malade se présente malgré tout, avoir un effet désastreux sur la communication, la compréhension et la confiance10.

Dans une récente étude sur l’interaction des clients et des fournisseurs de soins, Simmons et Elias ( 1994, p. 4 ) soulignent :

Les clients perçoivent souvent les fournisseurs de soins comme des individus puissants qui, de par leurs antécédents sociaux et leur formation, sont trés éloignés de leur réalité et de leurs préoccupations quotidiennes. Les clients et les fournisseurs de soins se rencontrent pour des raisons différentes, et ces différences de perspective et de pouvoir ont un effet profond sur la nature de l’interaction. ( Traduction libre. )

Par exemple, une chercheuse a décrit les difficultés de communication qui se sont présentées entre une cliente et un fournisseur de soins dans un hôpital régional de la province de l’Est en Afrique du Sud — la cliente venait d’une famille Xhosa pauvre d’une région rurale et vivait dans une région éloignée avec peu d’infrastructures. Elle ne parlait que Xhosa et suivait le mode de vie traditionnel. Par contre, les praticiens consultés étaient des Africains du Sud blancs, de sexe masculin, anglophones, formés dans des écoles de médecine et employés dans un hôpital régional.

10 Voir P.S. Vincent, « The snake that broke Sitandile’s neck », texte inédit présenté au concours CRDI/TDR, 1994–1995.

Les femmes qui vivent dons les régions rurales sont défavorisées. Les points de vue des médecins et des travailleurs de la santé éduqués dans les villes, avec leurs théories sur l’anatomie et la physiologie, la maladie et le traitement, sont souvent trés différents de ceux des femmes des régions rurales. Cet écart peut constituer un obstacle à l’utilisation des services de santé.

— S.A. Udipi et M.A. Varghese. SNDT Women’s University. Bombay ( Inde )

De même, dans le centre du Népal où le pourvoyeur de services est généralement un homme de la ville, éduqué et de classe supérieure et la patiente, une femme pauvre d’une région rurale, illettrée et de classe inférieure, la différence de statut entre les pourvoyeurs et les utilisateurs de services « crée des fossés de communication et compromet l’objectivité du service » ( Niraula, 1994, p. 163 ).

Les travailleurs de la santé qui sont de la même communauté que les gens dont ils s’occupent peuvent avoir davantage de succés et dispenser de meilleurs soins que ceux qui viennent de l’extérieur parce qu’ils partagent les antécédents culturels de leurs clients et ont des expériences communes ( Bonino, 1994 ; Lange et al., 1994 ). Par ailleurs, ceux qui s’intégrent complétement à la communauté peuvent gagner la confiance et le respect des gens qu’ils servent — ce qui est une compasante essentielle des soins de santé de qualité. Une femme, parlant d’un médecin de famille qui travaillait depuis des années dans sa région, a déclaré : « Avec lui c’est différent, il explique bien et on comprend tout ; c’est comme si c’était l’un des nôtres, comme s’il faisait partie de la communauté » ( Bonino, 1994, p. 203 ).

Pour que les rapports interpersonnels soient bons, le fournisseur de soins doit avoir le temps. Or, de nombreuses personnes ont déclaré que trop de médecins ne donnent pas le temps aux femmes d’expliquer ce qu’elles ressentent ( AbouZahr, 1994 ; Vlassoff, 1994 ). Les femmes devraient avoir la passibilité de parler des différents facteurs psychosociaux qui influent sur leur bien-être et leur santé pour pouvoir faire le rapport entre la maladie et

Les programmes d’étude, notamment les programmes sur la santé et l’éducation médicale, devraient traiter de la différence entre les sexes et des besoins de santé porticuliers des femmes. Il faut réorienter la formation de base et les cours de perfectionnement de tous les fournisseurs de soins de santé de façon à replacer la santé dans le contexte de l’inégalité entre les sexes et à intégrer les perspectives des femmes, leurs besoins et leurs expériences.

— Boungnong Boupha. Syndicat des femmes lao. République démocratique populaire lao ( Boupha. 1995 )

leur vie de femme, de travailleuse, de mére et d’épouse ( Gupte, 1994 ). Toutefois, les médecins sont souvent « trop occupés et donc trop pressés pour conclure sur chaque cas avant de passer à un autre » ( Ndhlovu, 1994, p. 14 ).

Les femmes sont frustrées et découragées lorsqu’elles parcourent de longues distances à pied pour se rendre au centre de santé et se font dire que le travailleur de la santé n’est pas là, qu’une seule personne est disponible, qu’elle doit s’occuper de beaucoup de gens et qu’elle ne peut donc pas prêter l’attention nécessaire ni offrir un service personnalisé à chacun des clients ( Chiarella, 1994 ). Le temps réservé aux clients dans certains établissements de santé se limite parfois à une fraction des huit heures officielles. Comme les pourvoyeurs de soins de santé ne reçoivent souvent qu’une piètre rémunération pour leur travail en clinique publique, ils peuvent passer une partie de la journée de travail dans une clinique privée pour augmenter leur revenu.

Les systémes de santé doivent faire face à d’autres problémes comme la médiocrité des installations, l’insuffisance de la formation professionnelle, la piétre rémunération des professionnels de la santé et le manque d’engagement social.

— Constanza Collazos V., Centro de Investigaciones Multidisciplinarias en Desarrollo. Cali ( Colombie )

Dans les pays en développement, les fournisseurs de soins se heurtent souvent à de nombreuses contraintes qui compromettent la qualité des soins qu’ils peuvent dispenser. Ils sont habituellement débordés de travail et mal payés, et les centres de santé manquent réguliérement de personnel et de fonds. En conséquence, le personnel se plaint de n’avoir ni le temps ni l’énergie nécessaires pour fournir de longues explications et des soins de haute qualité à leurs clients ( Vlassoff, 1994 ).

Pour pouvoir prodiguer des soins de bonne qualité, il faut dispaser des fournitures, de l’équipement et des médicaments nécessaires. Or, il y a souvent de graves carences dans ce domaine ( AbouZahr, 1994 ; Atai-Okei, 1994 ; Lwihula, 1994 ; Ren et al., 1995 ). Des chercheurs en Afrique, en Asie et en Amérique latine ont signalé des problémes d’approvisionnement en préservatifs, particuliérement dans les régions éloignées. Des services de planification familiale au Kenya ont signalé une pénurie de gants, de désinfectant et d’eau propre : « On a cité des cas où des clientes étaient en larmes parce qu’on ne pouvait pas Ãter leur stérilet faute d’eau ou de lotion stérilisée » ( Ndhlovu, 1994, p. 24 ).

Le manque d’intégration des services est un autre facteur clé qui influe sur le comportement des femmes à l’égard des services de santé et la qualité

Plus on s’éloigne du centre de la ville pour gagner la périphérie, plus les installations et les services de soutien se font rares. Les communications sont difficiles, et la plupart des choses doivent être faites à la main. Cela donne aux travailleurs de la santé le sentiment d’être débordés ; ils perdent bientôt leur attitude pasitive et les services deviennent superficiels.

— Daisy Tin Tin Saw, Projet sur la santé infantile au Cambodge, Organisation internationale de perspective mondiale. Phnom Penh ( Cambodge )

des soins prodigués. Dans beaucoup de pays, les différents types de services ( comme les soins prénatals, la planification familiale et les vaccinations ) ne sont pas intégrés et peuvent même ne pas être dispensés le même jour ( Banque mondiale, 1993 ). Les femmes sont donc forcées de retourner plusieurs fois à la clinique pour se faire soigner et faire soigner leurs enfants. Compte tenu des lourdes charges de travail des femmes et du temps personnel limité dont elles dispasent, on devrait tenter d’adopter des stratégies qui permettent de combiner les différents services de santé et de les offrir à des heures qui conviennent aux femmes ( Banque mondiale, 1993 ; Manderson, 1994 ). C’est lorsque les femmes viennent consulter avec leurs enfants qu’on a le plus de chances de leur dispenser des soins. Elles sont davantage dispasées à se faire soigner lorsqu’elles se présentent avec leurs enfants qu’à venir séparément. L’intégration des efforts de prévention et de traitement des MTS et du VIH aux soins de santé généraux pourrait également accroÃtre les chances que les femmes reçoivent un traitement pour ces maladies jugées honteuses.

PRÉFÉRENCE POUR LES PRATIQUES
TRADITIONNELLES

Compte tenu des nombreux obstacles qui empÃchent les femmes d’avoir accés aux services de santé et, parfois, de la mauvaise qualité de ces services, les femmes préférent souvent le systéme de médecine traditionnel aux services de santé officiels. Le coût prohibitif des services de santé et le manque de temps pour se rendre dans les centres les incitent également à avoir recours aux guérisseurs traditionnels locaux guérisseurs traditionnels locaux.

Comme le dit une femme de la région Benighat du centre du Népal ( citée dans Niraula, 1994, p. 163 ) :

Chaque fois que j’ai [mal à la tête], je me rends chez le dhami dai( frére chaman ). Il récite des mantra en me touchant la tête à trois reprises et, aprés quelque temps, je me sens beaucoup mieux. Le dhami daihabite juste à côté de chez moi et je n’ai pas besoin de le payer pour ses services. Si je vais au centre de santé, cela me prend du temps et de l’argent. où est-ce que je pourrais trouver tout cet argent pour soigner ma maladie ? Je suis satisfaite de ses services. ( Traduction libre. )

Les recherches ont révélé que les femmes des régions rurales du Bangladesh préféraient les assistantes traditionnelles à l’accouchement ( dai ) lorsqu’elles donnaient naissance à leurs enfants parce qu’elles ne se sentaient pas embarrassées devant les femmes daidu village qui sont de la même région et qu’elles connaissent. De plus, les médecins sont chers, mais « [les] daine demandent rien, sinon un sari ou peut-être un repas de poulet au cari » ( Rozario, 1995 ). Certaines femmes préférent aussi les guérisseurs traditionnels parce qu’ils donnent une explication satisfaisante de la maladie, comparativement aux informations limitées du personnel des services de santé modernes ( Vlassoff, 1994 ).

Chapitre 8
Nouveaux secteurs
de recherche

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CRDI: M. Campbell

On doit situer la santé féminine dans le contexte des changements globaux et des tendances nouvelles du monde contemporain. Ces changements surviennent rapidement et leurs conséquences sont ressenties jusque dans les coins les plus reculés du globe. La santé humaine sera profondément mise en question au cours de ce processus continu et accéléré.

A. El Bindari Hammad, Organisation mondiale de la santé. Genève (Suisse)

Les secteurs de recherche que nous avons sélectionnés (sida, milieu de travail, maladies tropicales et obstacles aux soins de santé de qualité) ne représentent qu’un échantillon des domaines où il est urgent de faire davantage d’études basées sur la différence entre les sexes. Au cours des ateliers régionaux qui alimentent le présent ouvrage, les participants ont identifié six autres secteurs supplémentaires de recherche qui n’ont guère retenu jusqu’ici l’attention des chercheurs et des décideurs : la santé des femmes plus âgées, la santé des petites filles et des adolescentes, la santé mentale, les femmes et le tabac, les effets de la guerre sur la santé, et la violence contre les femmes. Bien qu’un examen sérieux de ces sujets dépasse la portée du présent document, nous les passons brièvement en revue ci-après.

LA SANTÉ DES FEMMES PLUS ÂGÉES

Il est nécessaire de faire davantage de recherches sur les problèmes de santé des femmes plus âgées. Les aspects de la santé des femmes concernant la reproduction ont été étudiés de près mais le reste de la vie des femmes a été en grande partie passé sous silence. On sait très peu de choses sur les causes de morbidité et de mortalité des femmes de plus de 45 ans. Bien que les femmes vivent plus longtemps que les hommes dans la plupart des sociétés, elles ne vivent pas nécessairement mieux. Beaucoup de femmes âgées souffrent de malnutrition, de troubles des organes de reproduction, de violence, d’aliénation, de solitude, de maladies en rapport avec le style de vie, de maladies chroniques et de dégénérescence.

Le bien-être de la population vieillissante, dont le nombre va croissant, a aussi des répercussions sur la santé des générations suivantes de femmes. Ce sont, par tradition, les femmes qui dispensent les soins. À mesure que la population vieillira, les pourvoyeuses de soins auront elles-mêmes besoin d’être soignées. Qui s’occupera de celles qui s’occupent des autres quand elles vieilliront? En l’absence d’aide du gouvernement, cette responsabilité a tendance à retomber sur les épaules des filles plus que des fils, et teprésente une obligation de plus dans la vie déjà trop chargée des femmes.

LA SANTÉ DES PETITES FILLES
ET DES ADOLESCENTES

Les recherches doivent également se concentrer sur la santé des petites filles et des adolescentes. L’enfance et l’adolescence sont des époques qui sont souvent déterminantes pour la santé des femmes dans les années à venir. Les petites filles, qui sont moins bien nourries, qui ont un accès réduit aux services de santé et à l’éducation et qui ne reçoivent pas les connaissances nécessaires pour être autonomes économiquement, souffrent des effets de cette dévaluation pendant le restant de leur vie. Les effets cumulatifs des maladies, de la privation et de la malnutrition dans l’enfance peuvent compromettre le développement intellectuel et provoquer des problèmes de santé plus tard dans la vie, comme des troubles d’apprentissage, de l’anémie et des complications obstétriques dont les coûts économiques et sociaux sont considérables. Les maladies tropicales et les MTS, y compris le sida, peuvent avoir des répercussions particulières sur les jeunes filles. Celles-ci peuvent aussi souffrir de problèmes de santé associés à leurs lourdes charges de travail dans les secteurs à la fois domestique et public, tels que maux de dos chroniques, déformations du bassin, avortements spontanés, effets nocifs sur les enfants non encore nés et, dans la vieillesse invalidité.

LA SANTÉ MENTALE

Dans les pays industrialisés comme dans les pays en développement, les problèmes de santé mentale des femmes ont été gravement négligés. Il faut, par exemple, faire davantage de recherches sur la dépression, maladie psychiatrique très répandue qui touche généralement plus de femmes que d’hommes. Il faut poursuivre les recherches sur les différences entre les sexes dans le domaine général des troubles psychologiques et dans la prévalence de symptômes particuliers.

LES FEMMES ET LE TABAC

L’usage du tabac, une cause majeure de morbidité et de mortalité dans le monde entier, est associé à des taux élevés de cancer des poumons, de maladies cardiovasculaires et d’un grand nombre d’autres problèmes de santé. Les données indiquent également que l’usage du tabac pendant la grossesse est associé à des risques plus élevés pour le fœtus et l’enfant éventuel, y compris à des taux supérieurs d’avortement spontané et de faible poids à la naissance. Enfin, les personnes expasées à la fumée secondaire dans la famille ou le lieu de travail peuvent également souffrir des effets du tabac.

On manque sérieusement de données sur les femmes et le tabac dans les pays du Sud. Bien que les taux actuels d’utilisation soient relativement faibles parmi les femmes de ces pays (de 2 à 10 %) comparativement aux femmes des pays industrialisés (de 20 à 35 %), les données indiquent qu’ils vont en augmentant. De plus, dans certains de ces pays, le pourcentage de femmes qui fument des cigarettes (ou utilisent d’autres formes de tabac telles que chutta, pan, et bidis) est déjà relativement élevé (p. ex. Brésil, Chili, Inde, Népal et Papouasie-Nouvelle-Guinée).

Certains sont préoccupés par le fait que l’industrie du tabac voit dans les femmes des pays en développement un énorme marché potentiel et s’adresse systématiquement à elles en exploitant les idées d’indépendance, de pouvoir, de beauté et d’émancipation pour vendre leurs produits. D’autres femmes commenceront peut-être bientôt à fumer parce que cela est rapidement en train de devenir un nouveau symbole de prestige dans cette partie du monde. Il faut faire davantage de recherches sur les femmes et le tabac dans les pays du Sud et examiner sérieusement les stratégies à mettre en œuvre pour prévenir l’augmentation de la consommation du tabac parmi les femmes.

LES EFFETS DE LA GUERRE SUR LA SANTÉ

Les effets de la guerre continuent à se faire sentir sur la santé des femmes et des hommes du continent asiatique, particulièrement au Cambodge, au Laos et au Viet Nam. Le Cambodge est l’un des pays du monde où la densité des mines est la plus élevée. Les bombes et les mines abandonnées dans les champs et les villages continuent à mutiler et à tuer les hommes. Or, ce sont les femmes qui doivent s’occuper de ces victimes de la guerre ainsi que de leur famille privée de père. En outre, les femmes, qui sont chargées de fournir les ressources et de s’occuper de la famille, doivent faire face aux graves conséquences sociales et environnementales de la guerre. Les chercheurs doivent se pencher sur les effets de ces facteurs sur la santé des femmes.

Des recherches devraient s’attacher particulièrement aux effets psychologiques de la guerre. Au cours des deux dernières décennies, les femmes du Cambodge, par exemple, ont assisté à l’exécution de leur mari ; elles ont vu ceux qu’elles aimaient mourir de faim ; elles ont été violées et torturées. Ces horribles expériences ont laissé des cicatrices psychologiques sous forme de dépression et de syndrome de stress pasttraumatique. Il faudrait faire davantage d’analyses de ces problèmes de santé.

Il est également urgent d’examiner l’impact négatif de la migration forcée sur la santé des femmes. Les estimations actuelles du nombre de réfugiés, d’immigrants et de personnes déplacées dans le monde entier se situent quelque part entre 40 à 100 millions de gens. Ces personnes, qui vivent dans un milieu insalubre où les ressources de santé sont rares, sont la proie de nombreuses maladies, notamment le choléra, le paludisme, la diarrhée chronique et le sida. Le surpeuplement, combiné au chômage et au manque d’éducation, favorise également la toxicomanie, les abus sexuels, la violence physique, la dépression, l’anxiété et le syndrome de stress pasttraumatique. Selon le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), le viol répété et souvent brutal est le lot commun des femmes réfugiées.

LA VIOLENCE CONTRE LES FEMMES

La violence contre les femmes, un grave problème de santé publique, atteint des proportions alarmantes aussi bien dans les pays en développement du Sud que dans les pays industrialisés du Nord. La violence familiale et le viol, par exemple, sont des causes importantes de morbidité et de mortalité parmi les femmes. L’agression des femmes par leur mari ou leur partenaire masculin est une des formes de violence les plus courantes du monde. Les sondages effectués ces dernières années ont indiqué qu’environ un quart des femmes du monde sont victimes de violence dans leur propre famille ; des sondages au niveau des collectivités ont produit des chiffres encore plus élevés. La violence contre les femmes est source de traumatisme psychologique, de dépression, de toxicomanie, de blessures, de MTS et d’infection par le VIH et de suicide. Il est très urgent de faire davantage de recherches sur la violence dont les femmes sont victimes dans les pays en développement.

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Chapitre 9
Les priorités de la
recherche

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ACDI: R. Lemoyne

Puisque nous en savons plus aujourd’hui sur les femmes et que nous avons inventorié les grands problèmes auxquels elles font face, que ferons-nous pour que les actions qui s’impasent soient lancées ou plus tôt afin de mettre fin aux souffrances et aux décès indésirables ? De tous les vastes secteurs de recherche qu’il faudrait cibler, comment sélectionner le petit nombre de projets qui pourrait davantage améliorer la vie et la santé du plus grand nombre? Comment faire réellement participer les femmes dans ce processus ?

— A. El Bindari Hammad. Organisation mondiale de la santé, Genève (Suisse)

L’un des objectifs des quatre ateliers parrainés par le CRDI sur les femmes, la santé et le développement durable était de traduire les réflexions partagées par les participants en recommandations de recherches à effectuer pour promouvoir la santé et le bien-être de tous. Il faut de toute évidence continuer à mener des travaux qui intègrent pleinement dans leur protocole la différence entre les sexes, et cela à tous les niveaux : conception, exécution, analyse et diffusion. L’insuffisance de recherches sur la santé qui intègrent cette notion de différence entre les sexes compromet l’aptitude des décideurs à concevoir, planifier, surveiller et évaluer des politiques et des programmes efficaces pour promouvoir la santé des femmes.

Bien que chaque région doive faire face aux préoccupations qui lui sont propres, des problèmes communs ont clairement émergé. Les chercheurs et les organismes du monde entier peuvent faire progresser de façon notable les recherches sur la santé des femmes en travaillant en collaboration et en mettant en commun leurs expériences et leurs résultats. Nous souhaitons que la présente publication encourage les chercheurs qui travaillent dans les secteurs de la médecine et des sciences sociales à œuvrer ensemble et à collaborer davantage.

Plusieurs questions doivent être examinées en priorité dans les études sur la santé. Il faudra adapter ces questions aux communautés étudiées et analyser leurs répercussions sur la santé. Les questions clés ont été divisées en sept catégories qui correspondent en gros aux chapitres précédents : problèmes généraux, éducation, alimentation, sida, milieu de travail, maladies tropicales et difficultés d’accès à des soins de santé de qualité. Un grand nombre de ces questions ont déjà été discutées jusqu’à un certain point dans les chapitres qui leur ont été consacrés.

PROBLÈMES GÉNÉRAUX

Image Quels sont les plus grands problèmes des femmes en matière de santé? Quelle importance les femmes donnent-elles aux questions de santé autres que celles qui concernent la reproduction? Par exemple, comment les maladies tropicales et les problèmes de santé associés au travail sont-ils perçus par les femmes?

Image Comment intégrer les perspectives féminines à toutes les étapes des recherches ainsi que des interventions? Comment peut-on pleinement intégrer le point de vue des femmes aux prises de décisions concernant les politiques sur la santé?

Image Dans quelle mesure les politiques et les programmes extérieurs au secteur de la santé visant à améliorer la qualité de la vie des femmes contribuent-ils à améliorer également leur santé (p. ex. les programmes de crédit et d’économie, l’alphabétisation)?

Image Quels sont les programmes et les politiques qui contribueront à modifier les attitudes et à réduire les pratiques dangereuses pour les femmes, notamment la préférence pour les fils, la mutilation génitale des femmes, la violence, la discrimination à l’égard des filles et des femmes dans le domaine de l’éducation et de l’alimentation?

Image Quelles mesures peut-on prendre pour donner plus de pouvoir aux femmes sur leur propre santé? La formation de groupes de femmes, où elles pourraient parler ouvertement de leurs problèmes, aiderait-elle à augmenter l’amour-propre des femmes et à leur donner la confiance nécessaire pour assumer le contrôle de leur santé et de leur bien-être?

Image Quels sont les obstacles qui empêchent d’adopter une perspective basée sur la différence entre les sexes dans les recherches sur la santé et comment peut-on les surmonter?

Image Quelles sont les stratégies qui pourraient être utiles pour accroître le nombre de femmes de sciences, dans les secteurs biomédical et social, qui travaillent sur la santé des femmes?

L’ÉDUCATION

Image Quelles sont les passibilités d’éducation des femmes et des hommes, des filles et des garçons? Comment les communautés étudiées considèrent-elles l’éducation des filles? Quel est l’effet du manque d’éducation sur la santé et le bien-être des femmes?

Image Dans quelle mesure le niveau d’éducation d’une femme influence-t-il son pouvoir de prise de décisions sur les questions de santé dans la famille et la communauté?

Image Quels sont les liens entre l’éducation des femmes et leurs chances de succès dans la population active? Quels sont les sujets que l’on suggère d’étudier aux femmes et aux hommes?

Image Comment peut-on encourager les familles et les communautés à donner plus d’importance à l’éducation des filles?

L’ALIMENTATION

Image Y a-t-il une différence entre la façon dont s’alimentent les filles et les garçons, les femmes et les hommes? Qui mange en premier et qui mange en dernier? Qui mange le plus et qui mange le moins?

Image Quels facteurs ont un effet sur la différence des niveaux nutritionnels entre les sexes? Comment peut-on surmonter la discrimination qui existe dans certaines sociétés concernant l’accès des femmes à la nourriture?

Image Qui décide quelles récoltes cultiver, qui les cultive et qui reçoit le prix des récoltes?

Image Les femmes souffrent-elles de problèmes de santé particuliers associés aux carences nutritionnelles tels que fatigue, cécité nocturne, déformations osseuses, arrêt de croissance?

Image Qui décide combien d’argent doit être consacré à la nourriture et quelles sortes d’aliments doivent être achetés?

Image Qui prépare la nourriture? Quel est l’état de santé du membre de la famille qui prépare la nourriture?

Image Quels facteurs contribuent au taux élevé de maladies associées à la nutrition parmi les Antillaises et comment peut-on les surmonter?

Image Quel est l’effet de la dégradation de l’environnement sur le niveau nutritionnel des familles? Lorsque la dégradation de l’environnement empêche de se procurer des aliments adéquats, ceci a-t-il un plus grand impact sur les femmes à cause de leur rôle de pourvoyeuses de nourriture?

LE SIDA

Image Dans quelle mesure les femmes et les hommes souffrent-ils du sida?

Image Y a-t-il une base physiologique à la vulnérabilité des femmes à l’infection par le VIH, particulièrement parmi les femmes jeunes et celles qui sont ménopausées?

Image Quels sont les facteurs qui accroissent le risque d’infection par le VIH chez les femmes (p. ex. l’obligation d’être sexuellement actives à un âge précoce, les relations sexuelles avec des hommes plus âgés, le manque de pouvoir en matière de prise de décisions)? Quelles sont les stratégies qui pourraient être utiles pour repousser l’âge où les femmes deviennent sexuellement actives? Comment les jeunes femmes pourraient-elles avoir davantage de contrôle sur le moment des rapports sexuels, la façon dont ils se déroulent et le choix du partenaire?

Image Des programmes d’éducation efficaces, adaptés aux adolescents des deux sexes et dispensés à la fois à l’école et à l’extérieur, sur une vaste gamme de questions en rapport avec la sexualité et les fonctions de reproduction, y compris la prévention des MTS et du VIH, permettraient-ils de réduire les taux d’infection parmi les jeunes? Comment peut-on contourner les restrictions qui, dans certaines sociétés, empêchent les adolescents, particulièrement les jeunes femmes, d’avoir accès à des informations sur la sexualité, la contraception et la prévention des maladies?

Image Pourquoi les femmes atteintes du sida ont-elles un pronostic plus sombre que les hommes? Ceci est-il dû à des différences biologiques? Quel est le rôle des autres facteurs (p. ex. un diagnostic plus tardif pour les femmes, un accès limité aux services de santé, le manque de soutien social, et l’incapacité de reconnaître les premiers signes du VIH)?

Image Quelles sont les stratégies qui pourraient améliorer le diagnostic et le traitement des MTS parmi les femmes et les hommes? Que peut-on faire en réponse à la honte, à la gêne et aux tabous associés aux MTS, particulièrement parmi les femmes? Les femmes hésiteraient-elles moins à déclarer les MTS si des services de diagnostic et de traitement étaient offerts de concert avec les services de santé primaires et de planification familiale, en consultations privées? Enfin, est-ce qu’on augmenterait les diagnostics de MTS parmi les femmes si on incluait à la formation professionnelle des pourvoyeurs de santé une instruction de haute qualité sur les MTS qui tienne compte de la différence entre les sexes?

Image Comment les femmes et les hommes pensent-ils que l’on devient séropasitif? Comment peut-on dissiper les malentendus concernant le VIH et le sida (p. ex. les femmes et les hommes doivent savoir que les hommes mariés et ceux qui ont des relations stables peuvent expaser leur partenaire au VIH, et que les femmes monogames peuvent être à risque ; que certains hommes bisexuels peuvent également expaser leur partenaire au VIH ; que le sida n’atteint pas seulement les homosexuels, les prostituées et les utilisateurs de drogues ; qu’une personne séropasitive peut avoir l’air « en bonne santé » et qu’il y a une période de latence d’environ six mois entre le moment de l’infection et un test de VIH pasitif)?

Image Les femmes peuvent-elles demander à leur partenaire d’utiliser des préservatifs? Qui décide d’utiliser ou non un préservatif? Que pensent les femmes et les hommes des préservatifs? Peut-on se procurer facilement des préservatifs ?

Image Comment peut-on donner aux femmes le contrôle de leur propre corps? Est-ce que des programmes de formation en affirmation de soi et des initiatives pour renforcer l’amour-propre des femmes leur donneraient davantage de pouvoir pour décider des conditions dans lesquelles ont lieu les rapports sexuels? Le counseling de groupe peut-il aider les femmes à faire face à ces questions?

Image Est-ce que l’enseignement des mesures de prévention du VIH et du sida à des femmes de la communauté, que l’on encouragerait à rendre visite à leurs voisines pour discuter de ces questions face à face, constituerait une stratégie efficace de prévention du VIH et du sida?

Image Est-ce que l’invention d’une méthode de prévention du VIH dont les femmes seules auraient le contrôle (le partenaire n’aurait pas besoin d’être au courant, d’accepter ni d’agir) permettrait de réduire la transmission du VIH parmi les femmes?

Image Le désir d’avoir des enfants a-t-il une influence sur l’utilisation des préservatifs? Les femmes et les hommes seraient-ils davantage prêts à utiliser une méthode de prévention du VIH qui laisserait passer le sperme et permettrait donc la conception?

Image Quelles politiques et quels programmes peut-on élaborer et mettre en œuvre pour encourager les hommes à assumer davantage de responsabilité en matière de prévention du VIH et du sida? Comment peut-on rendre les préservatifs plus acceptables aux hommes? Les hommes seraient-ils mieux dispasés envers les préservatifs si les campagnes de distribution utilisaient des travailleurs masculins?

Image Comment peut-on adapter les stratégies d’information sur le sida pour répondre aux besoins des femmes pauvres, des femmes illettrées, des femmes d’origine culturelle différente, etc.? Les messages de prévention dispensés à la radio et dans les journaux sont-ils entendus par les femmes? Les approches éducatives originales (p. ex. la présentation des messages de prévention dans le cadre de mélodrames et de pièces de théâtre communautaires) sont-elles efficaces?

Image Comment peut-on réduire les obstacles à la communication entre les femmes et les hommes sur les questions en rapport avec la sexualité? Comment peut-on encourager les femmes et les hommes à discuter ouvertement des rapports sexuels en dehors du mariage, des risques de contracter des MTS ou le sida et de la nécessité d’utiliser des préservatifs?

Image Comment les femmes et les hommes qui vivent avec le sida sont-ils traités par leur famille et l’ensemble de la communauté?

Image Comment peut-on changer les pratiques légales et coutumières concernant l’héritage en vigueur dans certaines sociétés qui refusent aux femmes le droit à la propriété de leur mari en cas de décès de ce dernier?

Image Dans quelle mesure les femmes et les hommes se tournent-ils vers la prostitution comme source de revenu?

Image Est-ce que certaines femmes courent davantage de risques que d’autres de contracter des MTS ou le sida? Dans quelle mesure les variables de race et de classe viennent-elles s’ajouter à la différence entre les sexes?

Image Est-ce que l’accroissement de l’autonomie économique des femmes (p. ex. la modification des lois qui perpétuent la dépendance économique des femmes envers les hommes en leur refusant le droit de passéder ou de louer des biens indépendamment, ou en leur barrant l’accès à certaines formes d’emploi ou de crédit financier) augmenterait le pouvoir des femmes d’exiger certaines précautions lors des rapports sexuels?

Image Comment peut-on mettre fin aux pratiques culturelles dangereuses qui accroissent le risque de VIH pour les femmes et mettent généralement leur santé en danger (p. ex. la mutilation génitale, l’assèchement vaginal)?

Image Dans quelle mesure les femmes et les hommes sont-ils encouragés par la société à avoir des relations en dehors du mariage? Comment peut-on remettre en question les pratiques et les rites traditionnels qui permettent aux femmes et aux hommes d’avoir des contacts sexuels en dehors du mariage (avec le risque de transmission de MTS que cela comporte)?

Image Les femmes et les hommes sont-ils expasés à la violence sexuelle? Est-ce que l’application des lois contre le viol et l’agression sexuelle aurait pour effet de réduire la violence sexuelle contre les femmes ainsi que le risque du sida?

Image Est-ce que des messages qui seraient adaptés et adressés aux hommes bisexuels et à leurs partenaires réduiraient le risque de propagation du sida parmi les femmes?

LE MILIEU DE TRAVAIL

Image Qu’entend-on par travail des femmes et travail des hommes? Quel est l’effet sur la santé des espaces vitaux différents des hommes et des femmes et de la division des rôles et des responsabilités en fonction des sexes? Qui travaille à un rythme accéléré? Qui est victime de harcèlement sexuel? Qui porte de lourdes charges? Qui occupe les emplois de direction? Qui a le pouvoir de prise de décisions? Qui travaille à la chaîne? Qui travaille par roulement? Qui effectue un travail répétitif et mal payé? Qui effectue des mouvements des mains rapides et répétitifs?

Image Quelles mesures peut-on prendre pour veiller à ce que le « travail invisible » des femmes soit correctement mesuré et que les risques pour la santé associés au travail des femmes dans le secteur non officiel soient pris en considération?

Image Quels sont les risques pour la santé associés au travail agricole des femmes? Quels sont les risques particuliers liés à l’usage excessif des insecticides?

Image Quels sont les programmes et les politiques qui permettraient de veiller à ce que les femmes soient dûment informées des effets dangereux des produits agrochimiques et qu’elles reçoivent les vêtements et les masques de protection nécessaires?

Image Est-ce qu’un meilleur état de santé général des femmes (p. ex. une meilleure alimentation et davantage de repas) améliorerait leur aptitude à faire face aux conditions de travail dangereuses pour la santé?

Image Quels sont les effets psychologiques associés aux caractéristiques courantes du travail des femmes (p. ex. les travaux monotones et répétitifs, le manque de contrôle sur le travail effectué à l’extérieur, l’absence de communication avec les autres, un minimum de prise de décisions et de créativité)?

Image Que peut-on faire pour que le rôle des femmes comme dispensatrices de soins dans le système officiel de services de santé soit mieux reconnu? Comment peut-on veiller à ce que les pourvoyeuses de soins de santé ne soient pas exploitées et que leur travail soit pleinement apprécié? Comment peut-on améliorer les conditions de travail des pourvoyeuses de soins de santé?

Image Quels sont les risques pour la santé associés au travail des femmes dans le secteur industriel des pays du Sud, particulièrement dans les zones de libre échange et d’exportation en pleine expansion? Quel est l’effet des forces de la mondialisation et de l’accroissement du commerce international sur les conditions de travail et les normes de santé de la main-d’œuvre féminine dans les pays en développement? Quelle est la meilleure façon de répondre à ces forces?

Image En quoi consistent les occupations quotidiennes d’une femme? Qui s’occupe des enfants quand ils sont malades? Qui assure la provision d’eau saine en quantité suffisante? Qui cherche le combustible et prépare la nourriture? Qui entretient le potager? Dans quelle mesure les exigences conflictuelles auxquelles les femmes doivent faire face, entre le travail rémunéré effectué à l’extérieur et les responsabilités envers la maison et les enfants, sont-elles source de stress physique et mental pour les femmes?

Image Quelles mesures et quelles technologies pourraient servir à réduire le fardeau des responsabilités domestiques quotidiennes des femmes (p. ex. des pompes à eau conçues pour des personnes de taille plus petite)? Comment peut-on encourager les autres membres de la famille à aider les femmes qui s’occupent des enfants et de la maison?

Image Quelles sont les conditions de travail et les préoccupations de santé particulières des travailleuses à domicile?

Image Quelles sont les répercussions sur la santé du transport de l’eau sur de longues distances dans des contenants lourds pendant de nombreuses années? Dans quelle mesure les femmes et les hommes sont-ils expasés à la pollution de l’air intérieur et quel effet cela a-t-il sur leur santé? Comment peut-on minimiser ce risque pour la santé?

Image Dans quelle mesure la modification des installations utilisées à la maison pour la cuisine et le chauffage (p. ex. le fourneau et la ventilation) et un meilleur combustible pourraient-ils réduire l’expasition des femmes aux effets dangereux de la pollution de l’air intérieur?

Image Est-ce que les effets de la dégradation de l’environnement ont des conséquences similaires sur la santé et les moyens d’existence des femmes et des hommes?

Image Quelles sont les heures de travail et de loisirs des femmes par comparaison avec celles des hommes? Quel est l’effet du manque de temps sur la santé?

Image Quelle valeur accorde-t-on au travail des femmes par rapport à celui des hommes? Quels sont les niveaux de revenu des femmes comparativement à ceux des hommes? Quel type d’activités les femmes et les hommes exécutent-ils sans compensation financière? Dans quelle mesure les niveaux de salaire influencent-ils l’état de santé des femmes et des hommes?

Image Quels facteurs se combinent pour produire la pauvreté et la mauvaise santé dans les familles qui ont une femme à leur tête?

Image Quelles mesures peut-on prendre pour veiller à ce que des normes adéquates en matière de santé et de sécurité au travail soient adoptées et que des mesures d’application soient mises en œuvre en réponse aux risques associés au travail des femmes? Quelles stratégies faut-il adopter pour veiller à ce que les lois sur la protection des femmes ne soient pas utilisées pour justifier des pratiques d’emploi discriminatoires et pour éloigner les femmes des emplois les mieux payés? Comment peut-on faire pour que les autres lois destinées à protéger les femmes (p. ex. les congés de maternité) ne finissent pas par réduire leur salaire et par les décourager de chercher un emploi?

Image Dans quelle mesure les syndicats soutiennent-ils les emplois des femmes comparativement à ceux des hommes? Quel est le pourcentage de femmes et d’hommes parmi les délégués syndicaux? Comment peut-on accroître la représentation des femmes dans les syndicats? Comment peut-on encourager les délégués syndicaux à donner la priorité aux préoccupations des femmes en matière de santé?

Image Est-ce que les femmes et les hommes travaillent sous contrat? Leur travail est-il assuré par une protection en matière de santé et: de sécurité sociale? En cas de maladie associée au travail, qui assume le coût des soins médicaux? Est-il passible de prendre des congés de maladie?

Image Quelles mesures peut-on prendre pour étendre la protection des lois sur le travail et la sécurité sociale aux travailleurs à temps partiel et aux personnes qui occupent des emplois temporaires et saisonniers et qui travaillent à domicile?

Image Comment peut-on veiller à ce que les travailleurs des deux sexes reçoivent des informations adéquates sur les dangers associés à leur travail?

Image Quel rôle jouent les organisations de travailleuses dans les pressions exercées pour améliorer les salaires et les conditions de travail et réduire les risques associés au travail?

LES MALADIES TROPICALES

Image Quel est l’effet du sexe sur la vulnérabilité à l’infection et sur la progression et l’intensité des maladies ? En quoi des facteurs comme la grossesse, l’état nutritionnel généralement inférieur des femmes et les infections intercurrentes influencent-ils la vulnérabilité des femmes à la maladie?

Image Dans quelle mesure le fait que les femmes et les hommes occupent des espaces vitaux différents influence-t-il leur expasition aux maladies tropicales? Quels facteurs socioculturels (p. ex. les façons de s’habiller, les pratiques religieuses) prédispasent les femmes et les hommes aux maladies tropicales et quels sont ceux qui les en préservent? Est-ce qu’une analyse détaillée des responsabilités prescrites par la culture en fonction des sexes pourrait contribuer à améliorer les interventions visant à prévenir et à traiter les maladies tropicales parmi les femmes et les hommes?

Image Est-ce que les femmes qui vivent dans des conditions socio-économiques inférieures (p. ex. les mauvaises conditions de logement, le manque de pratiques d’hygiène adéquates) sont davantage touchées par les maladies tropicales?

Image Quelles sont les différences entre les effets sur les femmes et sur les hommes des tabous associés aux maladies tropicales? Quels sont les effets sociaux et psychologiques (p. ex. l’anxiété, la dépression) du défigurement pour les femmes? Lorsque les maladies sont suppasées être transmises sexuellement, quelles sont les conséquences pour les femmes et pour les hommes? Comment peut-on rendre le personnel des services de santé plus conscient des tabous associés au défigurement et à l’invalidité qui accompagnent certaines maladies tropicales, particulièrement pour les femmes?

Image Dans quelle mesure les femmes ont-elles accès aux services de diagnostic et de traitement des maladies tropicales? Les femmes qui se présentent aux cliniques de soins de santé ont-elles accès au personnel et aux installations spécialisés dans la détection, l’analyse et le traitement des maladies tropicales ?

Image Quelles sont les conséquences pour les femmes lorsque d’autres membres de la famille tombent malades? Dans quelle mesure les femmes estiment-elles qu’elles sont les seules ou les principales pourvoyeuses de soins de la famille? Qui diagnostique les maladies de la famille? Qui soigne les malades? Qui accompagne les malades aux centres de santé? Comment pourrait-on encourager les hommes à participer davantage aux soins des malades?

Image Quelles sortes de soutien et de ressources faudrait-il offrir aux personnes qui s’occupent, officiellement ou non, des malades et des mourants?

Image Quel est l’effet de la maladie d’une femme sur les autres membres de la famille? Quelles sont les conséquences de la maladie de la mère sur les enfants (p. ex. ses effets sur l’absentéisme, les taux d’abandon scolaire et les résultats d’apprentissage des filles d’âge scolaire)?

Image Qui est chargé de veiller à ce que les mesures de lutte contre la maladie soient appliquées? Par exemple, qui est chargé de réimprégner les moustiquaires tous les six mois? Qui est chargé d’entretenir les pratiques d’hygiène de la famille?

Image En reconnaissance du fait que le succès et l’efficacité ultimes des interventions peuvent dépendre de la participation des femmes, quelles mesures pourrait-on prendre pour veiller à ce que les femmes participent aux interventions de lutte contre les maladies? En même temps, quelles stratégies pourrait-on adopter pour assurer une distribution plus équitable des rôles au sein de la famille? Peut-on concevoir des interventions en matière de santé qui permettent d’éliminer les préjugés d’ordre sexuel et tiennent compte des énormes exigences auxquelles les femmes doivent faire face dans le domaine des soins aux enfants, de l’entretien de la maison et des activités génératrices de revenu? Serait-il utile d’adresser les messages concernant la santé de la famille aux femmes et aux hommes plutôt qu’aux femmes seulement (ce qui perpétue l’idée que la responsabilité de la santé de la famille incombe d’abord ou exclusivement aux femmes)? Comment peut-on encourager les hommes à assumer un rôle plus actif dans la création et l’entretien d’un milieu familial sain plutôt que d’en laisser l’entière responsabilité aux femmes?

Image Les femmes et les hommes comprennent-ils correctement les causes, les symptômes, les vecteurs de transmission et les stratégies de prévention et de traitement des maladies tropicales?

Image Quel rôle jouent les hommes et les autres membres de la famille dans les prises de décisions concernant les pratiques en rapport avec la santé?

Image Dans quelle mesure les interventions en matière de santé adressées aux femmes produisent-elles des changements dans les pratiques et les croyances du reste de la famille?

Image Comment veiller à ce que l’expérience et les connaissances considérables des femmes en matière de santé, en rapport avec leur rôle de pourvoyeuses de soins aussi bien dans le secteur de santé officiel que dans la communauté et dans la famille, soient pleinement reconnues? Lors de l’élaboration des politiques et des programmes de santé, serait-il profitable, aussi bien pour les femmes que pour les hommes, de consulter les femmes qui sont les principales utilisatrices des services de santé?

LES DIFFICULTÉS D’ACCÈS À DES SOINS DE SANTÉ DE QUALITÉ

Image Quels sont les facteurs qui empêchent les femmes de connaître et de comprendre leur corps? Les femmes peuvent-elles discuter ouvertement des questions de santé? Une meilleure éducation sur les questions de santé augmenterait-elle l’aptitude des femmes à reconnaître les signes et les symptômes de la maladie? Quelle est la meilleure façon de faire face aux restrictions et aux tabous culturels qui empêchent les femmes de comprendre les questions en rapport avec leur santé sexuelle et leurs fonctions de reproduction?

Image Les femmes prennent-elles le temps de répondre à leurs besoins personnels et à leurs besoins de santé? Compte tenu de leurs nombreuses activités et des exigences conflictuelles auxquelles les femmes doivent faire face, quelles sont les stratégies qui leur permettraient de se rendre plus facilement dans les centres de santé modernes? Serait-il utile de modifier les heures d’ouverture des cliniques (p. ex. en ouvrant les cliniques le soir) pour correspondre à l’emploi du temps des femmes? Est-ce que l’offre de services de santé là où les femmes travaillent (p. ex. à l’usine) donnerait aux femmes davantage d’occasions de se faire soigner?

Image Quelle est l’attitude de la société envers les femmes qui sont malades? Qui soigne les femmes lorsqu’elles sont malades et qui les accompagne au centre de santé? Quelle sorte de soutien les femmes attendent-elles des hommes? Comment peut-on encourager les autres membres de la famille à prendre la relève des femmes lorsqu’elles sont malades pour qu’elles puissent avoir le temps de se remettre complètement?

Image Quelle importance les femmes accordent-elles à la santé par rapport à d’autres préoccupations d’ordre social, économique, environnemental et politique? Quelle priorité les femmes accordent-elles à leur propre santé par rapport à la santé des enfants et des autres membres de la famille?

Image Quels sont les problèmes de santé que les femmes jugent graves ou non? Combien y a-t-il de maladies chez les femmes qui ne reçoivent jamais d’attention médicale? Comment peut-on persuader les femmes qu’il est important de s’occuper de leur propre santé? Puisque les femmes ont tendance à donner tant d’importance à leurs enfants, est-ce que des messages soulignant l’idée que les femmes doivent s’occuper de leur santé pour entretenir celle de leurs enfants auraient plus de chances d’être acceptés? Est-ce que des stratégies visant à améliorer l’amour-propre des femmes pourraient les amener à utiliser davantage les services de santé?

Image Quelles sont les autres personnes importantes qui participent aux prises de décisions concernant l’accès des femmes aux soins de santé? Les femmes iraient-elles plus facilement se présenter aux centres de santé lorsqu’elles sont malades si elles étaient encouragées à le faire? Comment peut-on encourager les membres de la famille et la communauté dans son ensemble à accorder de l’importance à la santé des femmes?

Image Quelles sont les maladies et les pathologies qui sont jugées taboues par la communauté? Comment les services de santé pourraient-ils être plus sensibles à la honte et à la gêne ressenties par les femmes atteintes de maladies jugées taboues?

Image Quels sont les obstacles psychologiques qui empêchent les femmes d’avoir accès aux soins (p. ex. la dépression, l’apathie, la peur) et que peut-on faire pour les réduire?

Image Quelles sont les distances que les gens doivent parcourir pour aller aux centres de santé? Comment pourrait-on rendre les services de santé plus accessibles physiquement aux femmes? Est-ce que des cliniques de santé mobiles ou la prestation de moyens de transport amélioreraient l’accessibilité des services de santé?

Image Quel est le niveau de mobilité physique des femmes à l’extérieur de la maison comparativement à celui des hommes? Comment surmonter les restrictions culturelles qui existent dans certaines sociétés concernant la mobilité des femmes? Pourrait-on améliorer l’accès aux services de santé des femmes dont la mobilité est restreinte si l’on formait des veuves âgées, dont l’honneur et le statut sont reconnus, comme travailleuses de la santé, et qu’on les chargeait de rendre visite aux femmes qui doivent vivre retirées chez elles?

Image Faut-il payer pour utiliser le centre de santé et, dans l’affirmative, combien? Y a-t-il des frais associés au transport vers le centre de santé? Y a-t-il des formules de paiement qui conviendraient mieux aux femmes? De quels moyens les femmes dispasent-elles pour acheter des médicaments? Quels sont les membres de la famille qui décident si les soins valent la dépense?

Image Qui sont les praticiens de la santé qui dispensent des soins aux communautés étudiées? Quel est le sexe des travailleurs de la santé? Les femmes sont-elles à l’aise pour les consulter? Que pense la communauté de la clinique et du travailleur de la santé? Y a-t-il une différence dans la qualité des soins lorsque ceux qui les dispensent appartiennent à la communauté?

Image S’il y avait davantage de pourvoyeuses de soins de santé, les femmes utiliseraient-elles davantage les services de santé modernes? Comment peut-on recruter davantage de pourvoyeuses de soins de santé, particulièrement des femmes d’âge mûr, pour répondre à la réticence des femmes à se faire soigner par des hommes dans certaines sociétés, particulièrement pour les problèmes d’ordre sexuel?

Image Que peut-on faire pour que les services de santé offerts aux femmes soient culturellement acceptables? En même temps, quelle est la meilleure façon de remettre en question les croyances et les pratiques qui sont dangereuses pour la santé et le bien-être des femmes?

Image Est-ce que l’intégration des services (touchant par example les maladies tropicales, la planification familiale, la santé des fonctions de reproduction et les services pédiatriques) permettrait d’améliorer la qualité des soins dispensés aux femmes? En offrant des services aux femmes quand elles se présentent pour leurs enfants, augmenterait-on les chances qu’elles cherchent également à recevoir des soins pour elles-mêmes?

Image Que peut-on faire pour que les femmes de peu d’éducation et de classe socio-économique inférieure reçoivent des informations, des soins et des conseils de qualité?

Image Quelles sont les sources d’information (p. ex. les amis ou les parents) auxquelles les femmes font particulièrement confiance lorsqu’elles prennent des décisions en rapport avec la santé?

Image Comment peut-on faire passer les messages d’éducation sur la santé d’une façon utile et facile à comprendre pour les femmes des régions rurales?

Image Quel est le niveau de sensibilité aux différences entre les sexes parmi les dispensateurs de soins? Sont-ils au courant des préoccupations des femmes en matière de santé? Traitent-ils les femmes comme des personnes à part entière ou comme des pourvoyeuses de soins et des porteuses d’enfant?

Image Comment peut-on améliorer la qualité des soins dispensés aux femmes compte tenu des contraintes auxquelles les pourvoyeurs de services doivent faire face (p. ex. s’ils sont surchargés ou sous-payés, ou accueillent trop de clients)?

Image Quels sont les éléments des soins qui sont importants pour les femmes (p. ex. la consultation en privé, l’impartialité, une période de temps suffisante avec la personne qui dispense les soins)?

Image Lorsque les femmes ont besoin de se faire soigner, à qui s’adressent-elles, à quelle étape de la maladie et pour quelles maladies? Quels sont les types de services de santé que les femmes consultent pour commencer? Pourquoi les femmes préfèrent-elles les guérisseurs traditionnels? Quelles sont les qualités des guérisseurs que les femmes apprécient?

Image Quelles stratégies pourrait-on utiliser pour améliorer les rapports interpersonnels entre les femmes et les pourvoyeurs de soins ?

Image Dans quelle mesure peut-on modifier l’attitude et le comportement des pourvoyeurs de soins de santé en leur dispensant une formation sur la communication, les rapports interpersonnels et le counseling, en y intégrant une perspective sur la différence entre les sexes qui insiste sur l’importance du tact et du respect ?

Sigles et acronymes

AZT

azidothymidine

CMED

Commission mondiale de l’environnement et du développement

CRDI

Centre de recherches pour le développement international

CRNTR

Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction

ENGENDER

Centre for Environment, Gender and Development

FAO

Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’ agriculture

FNUAP

Fonds des Nations Unies pour la population

HCR

Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés

ICPD

International Conference on Population and Development

ICRW

International Centre for Research on Women (États-Unis)

MTS

maladie transmise sexuellement

OIT

Organisation internationale du travail

OMS

Organisation mondiale de la santé

ONG

organisation non gouvernementale

ONU

Organisation des Nations Unies

PNUD

Programme des Nations Unies pour le développement

SENA

Self-Employed Women’s Association

sida

syndrome d’immunodéficience acquise

TDR

Programme spécial de recherche et de formation sur les maladies tropicales (de L’OMS)

VIH

virus de l’immunodéficience humaine

WAND

Women and Development Unit, University of the West Indies

Page laissée vide intentionnellement

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Les auteures

Jennifer Kitts est avocate de formation. Elle s’intéresse aux questions d’ordre sanitaire, juridique, éthique et socio-économique qui ont un impact sur la vie des femmes. Analyste de recherche et chef de projet à la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction, Jennifer Kitts a travaillé à titre de recherchiste, rédactrice et éditrice spécialisée dans les problèmes de santé des femmes avec L’OMS et l’Unité de recherche sur la santé communautaire de l’Université d’Ottawa (Canada). Elle prépare une maîtrise en droit avec spécialisation en droit international et droit comparatif à l’Université de Bruxelles (Belgique). De retour au Canada en septembre 1996, elle travaillera à la Division de l’éthique et des affaires juridiques de l’Association médicale canadienne.

Janet Hatcher Roberts est spécialiste des politiques de la santé à la section des programmes du CRDI. Elle a étudié l’anthropologie, les sciences infirmières, l’épidémiologie et les politiques de santé. Elle a aussi été professeure adjointe de santé et d’épidémiologie communautaires, puis analyste des politiques auprès du gouvernement fédéral de même qu’auprès des provinces et des districts du Canada. Avant de travailler au CRDI, elle était directrice adjointe de la recherche et de l’évaluation auprès de la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction. Au préalable, Janet Hatcher Roberts a été une intervenante assidue dans le domaine de la santé des femmes, dirigeant deux bureaux communautaires et siégeant au conseil d’administration national de DES ACTION.

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L’organisation

Le Centre de recherches pour le développement international (CRDI) croit en un monde durable et équitable. Le CRDI finance les chercheurs des pays en développement qui aident les peuples du Sud à trouver des solutions adaptées à leurs problèmes. Il maintient des réseaux d’information et d’échange qui permettent aux Canadiens et à leurs partenaires du monde entier de partager leurs connaissances, et d’améliorer ainsi leur destin.

L’éditeur

LES ÉDITIONS DU CRDI publient les résultats de travaux de recherche et d’études sur des questions mondiales et régionales intéressant les développements durable et équitable. LES ÉDITIONS DU CRDI enrichissent les connaissances sur l’environnement et favorisent ainsi une plus grande compréhension et une plus grande équité dans le monde. Les publications du CRDI sont vendues au siège de l’organisation à Ottawa (Canada) et par des agents et des distributeurs en divers points du globe.